La famille, ses joies et ses déchirements, sont au centre de ce thriller psychologique anglais d'une experte du genre : Frances Fyfield.
« Une étrange pensée visita Rachel : le risque se précisait qu'elle se retrouve à demi amoureuse de tous les membres de cette fichue famille. » Rachel Doe, executive woman londonienne, solitaire, ne vivant que pour son travail dans la finance, a vu sa vie basculer quand elle a décidé de s'inscrire à un cours de dessin. Elle est rapidement tombée sous le charme de la modèle du jour, Ivy.
Ivy, l'autre héroïne de ce thriller signé Frances Fyfield. Ancienne droguée, ayant connu les galères de la rue, elle a repris le dessus en enchaînant les ménages, de nuit, dans des sociétés où lieux publics, le salaire de modèle permettant d'améliorer l'ordinaire. Rachel va rapidement demander à Ivy de venir s'installer dans son grand appartement sans vie. Les deux femmes, la trentaine récemment passée, vont retrouver une vie de colocation d'étudiantes, passant des nuits complètes à se raconter leur vie, se confier.
De Londres à la campagne
La vie de Rachel est terne, celle d'Ivy plus tumultueuse. Ivy va vouloir présenter Rachel à ses parents. Grace et Ernest sont fermiers dans les environs de Londres. Bientôt à la retraite, ils vivotent grâce à des chambres d'hôtes. L'élevage de porcs ou de vaches laitières ne permettent plus de payer les frais de l'exploitation. Rachel, au fil des conversations avec le vieux couple, va découvrir le grand drame de la vie d'Ivy dont elle ne parle presque jamais. Ivy a été mariée avec Carl. Ils ont eu une fille et un garçon. Cassy et Sam. Alors qu'elle se baignait dans un lac sur la propriété, sous la surveillance de son père, la petite Cassie se noie. La perte de cet enfant a eu raison du couple et de la raison d'Ivy. Carl part avec Sam et coupe tous les ponts. Les grands-parents sont sans nouvelles de leur petit-fils depuis des années. Ivy a décidé de tirer un trait définitif sur le passé.
Sous le charme du juge
Rachel, face à cette famille déchirée, souffrant de ce deuil, va tenter de recoller les morceaux. Pour faire plaisir aux grands-parents, pour aider Ivy, elle va contacter Carl et lui proposer une rencontre, avec Sam. Ce dernier, devenu un jeune adulte, a tout de sa mère, notamment un pouvoir de séduction extrême. C'est en le rencontrant que Rachel se demande si elle ne va pas tomber amoureuse de toute la famille car, en plus de vivre avec Ivy, elle adore la grand-mère et n'est pas insensible au charme viril et pondéré de Carl, devenu juge.
France Fyfield, avec sa maîtrise habituelle, consacre les 200 premières pages à la description minutieuse des personnages. L'enthousiasme de Rachel, le calme de Carl, la bonhomie de Grace, les mystères d'Ivy. Pour ce qui est du suspense, ce ne sont que quelques pages, flashes hyperviolents semblant sans lien entre eux, faits divers normaux de Londres la surmenée : un homme étranglé dans une ambulance, un fan poignardé dans la foule à la sortie d'un concert... Le lecteur, au fil des chapitres, se prend d'affection pour Rachel et se met à craindre pour son avenir. Naïve, candide, elle ne se doute pas qu'en tombant sous le charme des différents membres de cette famille, elle risque surtout de se retrouver au centre d'une bataille haineuse qui n'a rien perdu de son intensité malgré les années passées.
« L'art de la noyade », Frances Fyfield, Presses de la Cité, 20 €