dimanche 18 novembre 2018

BD - La magie des « Midnight Tales »



Croyez-vous aux fantômes ? Et aux magiciennes ? Si vous répondez par l’affirmative à ces deux questions et qu’en plus vous aimez la bande dessinée de qualité, n’hésitez pas et plongez-vous dans la seconde livraison de « Midnight Tales », recueil de récits complets et de nouvelles chapeauté par Mathieu Bablet. 

Ce dernier est au scénario et au dessin de l’Amulette. Mais il se contente d’écrire deux autres histoires dessinées par Florent Maudoux et Mathilde Kitteh. Il reprend sa casquette d’illustrateur pour enluminer les nouvelles de Tanguy Mandias et Isabelle Bauthian. 


Un contenu riche, dans le style des regrettés DoggyBags, à mettre entre les mains de tous les esthètes appréciant les frissons d’horreur et autres bizarreries du monde surnaturel. 

« Midnight Tales » (tome 2), Ankama Éditions, 136 pages, 13,90 €

samedi 17 novembre 2018

BD - "Cyberwar" ou l'attaque virtuelle contre la suprématie des USA


Tout commence par une simple coupure d’électricité. En pleine finale du championnat de base-ball américain, les lumières s’éteignent. Comme le président des USA et sa famille sont dans les tribunes, l’ordre de l’évacuation est rapidement pris. Car cette panne d’électricité est générale, de la Californie au Maine en passant par la Floride et Washington. 
Mis à l’abri à Camp David, le président découvre un pays en train de s’écrouler sur lui-même. Reste à savoir qui a lancé cette cyberattaque et surtout qu’elle est sa suite. 


Scénario captivant car très réaliste de Daniel Pecqueur mis en images par Denys. Il n’y a pas encore de véritable personnage principal mais la présentation de plusieurs « héros » (un agent de la CIA à Paris, un citoyen lambda, le président…) qui serviront aux différents arcs narratifs de la « Cyberwar » s’annonçant comme passionnante. 

« Cyberwar » (tome 1), Delcourt, 14,50 €

vendredi 16 novembre 2018

BD - Des Dieux en perdition



Adapté d’un roman de Nail Gaiman, « American Gods » s’offre une intégrale très copieuse. Les 9 chapitres adaptés par Craig Russell et dessinés par Scott Hampton. Ombre, prisonnier sur le point de finir sa peine, se réjouit de sortir et rejoindre sa femme. Mais deux jours avant la date fatidique, il doit enterrer sa femme. Morte en voiture avec son meilleur ami qui lui avait promis du travail. 


Accident causé par un manque d’attention du conducteur en raison de la fellation réalisée par l’épouse du copain toujours à l’ombre lors des faits. Ombre voit son monde s’écrouler. Une proie parfaite pour un certain Mister Voyageur, par ailleurs ancien Dieu connu sous le nom d’Odin. 
Ombre et Odin vont sillonner l’Amérique pour reprendre le pouvoir face à ces nouveaux maîtres du pays que sont internet, la télévision et les fake news. 
De la SF très noire, mais qui se déroule pourtant déjà devant nos yeux, le pire de ces nouveaux Dieux étant au pouvoir depuis peu dans ce pays sans mémoire que sont les USA.  

« American Gods », Urban Comics, 272 pages, 22,50 €  

jeudi 15 novembre 2018

Thriller - Le meurtrier et la fillette


Avouons-le, parfois on se sent un peu trop perdu dans ce genre de production, même si elle est de très grande qualité. Un bon suspense, des personnages torturés et un « méchant » intrigant ne suffisent pas pour faire un bon thriller. Il faut ce petit plus, qui permet d’imaginer sans donner à voir. On ne le retrouve qu’à la marge de ce polar de Hjorth et Rosenfeldt. Reste que c’est d’un excellent niveau comme les précédents titres de la série.
 Et logiquement ces romans ont été adaptés pour la télévision…

Massacre d’une famille paisible  

« La fille muette » c’est Nicole. Dix ans. Elle était chez ses cousins ce matin en train de regarder la télévision quand un inconnu a sonné à la porte. La mère, sœur de sa maman, est allée ouvrir. Un premier coup de feu. Puis le tueur, froidement, a abattu le père et les deux garçons de la famille. Nicole s’est cachée.

Et comme le tueur ne savait pas qu’elle était là, il est parti comme il est arrivé, sans dire un mot. Paniquée, la fillette s’échappe et va se cacher dans la forêt de cette petite ville suédoise. Quatre morts c’est suffisant pour mobiliser l’équipe de la brigade criminelle de Torkel. Un peu les « Esprits criminels » des pays nordiques. Le roman devient passionnant quand Sebastian, le psychologue et séducteur de l’équipe, retrouve Nicole. Mais elle ne dit pas un mot. Une énigme de plus alors que d’autres crimes transforment cette enquête en affaire hors normes.

Un père plein d’interrogations Sebastian qui travaille en duo avec Vanja, la plus jeune de l’équipe. Elle a de qui tenir puisque ce dernier est son père. Mais elle ne le sait pas. Le moment est-il venu pour Sebastian de lui révéler ? Pas évident car dans le même temps, coureur de jupons invétéré, il séduit la procureure en charge de l’affaire, menaçant l’entente dans l’équipe.

On suit les hésitations de Sebastian, l’impatience de Vanja, l’énervement de la maire de la ville, le retour à la sécurité de Nicole, les manigances du tueur… De quoi passer quelques nuits blanches passionnantes.

« La fille muette », Hjorth & Rosenfeldt, Actes Sud, 23 €

mercredi 14 novembre 2018

"Les chatouilles", un drame émouvant sur la pédophilie


Se reconstruire, sortir enfin de ce cauchemar sans fin. Odette (Andréa Besconb), depuis son plus jeune âge, a subi les attouchements puis les viols de Gilbert (Pierre Deladonchamps), le meilleur ami de ses parents.

Au début, il ne lui fait que des chatouilles mais ce jeu se transformera en enfer pour la fillette. Tirée d’une pièce signée Andréa Besconb (avec son compagnon Éric Métayer), cette histoire est inspirée en partie par sa propre histoire. Devenue adulte, Odette décide sur un coup de tête d’aller se confier à une psy (Carole Franck).


Le début d’une longue thérapie qui constitue l’essentiel du film. Le risque sur des sujets aussi sensibles, est de trop en montrer. Les scènes avec Odette jeune sont peu nombreuses. Mais d’une horreur absolue.

La petite fille, c’est tout son drame, est littéralement paralysée de peur. Elle se laisse faire. Un argument souvent récupéré par les violeurs qui se persuadent que leur victime était consentante…



Danse et excès

Le film décrit cette première démarche d’Odette pour regarder ce passé en face. Elle raconte alors comment, passionnée de danse, elle a failli entrer à l’opéra de Paris.

Finalement elle fait carrière, participant à des spectacles prestigieux et sillonnant la planète. Une façon de se libérer, entre défoulement sur scène et excès en tout genre le soir après le spectacle. Le film, malgré son propos glauque, est lumineux. La danse qui sauve Odette vient éclabousser d’énergie et de joie l’écran.

La lente mise en place de la confiance entre la patiente et la psy permet aussi de passer les plus gros écueils mélodramatiques. Et dans le rôle des parents, Karin Viard et Clovis Cornillac livrent des compositions remarquables de justesse.

Un film émotion à voir de toute urgence.

 ➤ « Les Chatouilles », drame d’Andréa Bescond et Éric Métayer (France, 1 h 43) avec Andréa Bescond, Karin Viard, Clovis Cornillac, Pierre Deladonchamps, Carole Franck.

mardi 13 novembre 2018

DVD et blu-ray - L’esprit d’équipe ultime dans "Champions"


Il n’y a pas que le foot en Espagne. Nos voisins aiment aussi vibrer aux exploits de basketteurs. Mais l’équipe suivie dans «Champions » de Javier Fesser ne vous enthousiasmera pas par ses victoires mais ses formidables leçons de vie. Car ils sont tous handicapés mentaux.

S’ils deviennent champions c’est qu’ils viennent de bénéficier des conseils d’un entraîneur professionnel. Marco (Javier Guttierrez) vient de se faire vire de son poste du plus grand club de Madrid. Ivre il provoque un accident et insulte des policiers. le voilà condamné à 90 jours de travaux d’intérêts généraux auprès d’une association.

Son rôle, conseiller cette équipe de bras cassés et têtes cabossées. Un film qui fait du bien.

 ➤ « Champions », Le Pacte, 14,99 € 

lundi 12 novembre 2018

DVD et blu-ray - Entrez dans la tête de Quentin Dupieux en revoyant « Au poste »


Ceux qui ont vu « Au poste », film assez inclassable de Quentin Dupieux au cinéma et qui ont apprécié cette histoire de suspect interrogé par un flic très pointilleux doivent absolument revoir ce petit chef-d’œuvre en cochant les commentaires audio du réalisateur. Ces 75 minutes sont en quelque sorte décryptées et sublimées par le scénariste, réalisateur et monteur du film. « Au poste » est par excellence un film d’auteur.

Une création très personnelle d’un homme qui a des idées très arrêtées sur son art. Donc il se retrouve seul en cabine à placer explications et anecdotes sur le film.

Contrairement aux doutes qu’il émet en début d’enregistrement, c’est toujours passionnant. Rien que pour l’explication (un homme en slip dirige un orchestre en plein champ), c’est bourré d’infos. Quentin Dupieux livre aussi quantité d’anecdotes, comment il a trouvé le plan sous le bureau (regardez pour comprendre), ou son obsession de faire avec les clichés du théâtre (porte, placards…).

Il ne cesse de saluer le talent de Grégoire Ludig et semble se prosterner devant le professionnalisme de Benoît Poelvoorde.

Une leçon de cinéma complétée par les premières répétitions du duo. A montrer dans toutes les écoles du 7e art.

« Au poste », Diaphana vidéo, 19,99 €

dimanche 11 novembre 2018

Roman - Ode à un porté disparu avec "Dans les bras de Verdun" de Nick Dybek


En ce jour de commémoration si funeste, on reparle des morts de la Grande guerre. Ceux qui sont tombés au front sous la mitraille, décorés post mortem, et dont les familles vont encore fleurir les tombes. En profitent pour raconter, encore et encore, la bravoure de l’arrière-grand-père, de ce cher oncle jamais connu.

Des milliers de «Poilus » néanmoins, reposent dans des cimetières dédiés aux disparus, où aucune inscription ne distingue les croix. Ils furent des milliers, juste après l’armistice, et encore des années après, à supplier la Grande Muette de leur fournir quelque information, le dernier lieu où leur époux, leur fils, avait combattu. La plupart du temps sans résultat. Comment identifier à cette époque les restes épars d’êtres humains déchiquetés par les obus ?

Tom, originaire de Chicago, est déjà bien marqué par la vie. Il a perdu sa mère et rejoint son père, médecin ambulancier sur le front à côté de Bar-le-Duc. Foudroyé lui aussi en 1915, par un stupide typhus.

Tom prend la relève, conduit les ambulances, brave mille dangers et côtoie la mort ad nauseam. «Une partie de mon travail consistait à servir ces soldats, dont les yeux vides et les bribes de conversation laissaient entrevoir la vie effroyable […]. Une fois, je portai des verres d’eau […]. L’un d’eux me fit signe d’approcher. Renifle ça, tu veux ? L’eau était fétide. Elle sentait la pourriture. Elle venait sans doute d’un tonneau contaminé par l’eau du sol ».

■ Enfant perdu 

En 1921, recueilli par l’abbé Perrin, il devient l’assistant de l’évêque de Verdun. Leur travail : fouiller les champs de bataille et collecter tous les os, qui constitueront par la suite l’ossuaire de Verdun.

Aussi, accueillir les familles des disparus, souvent désespérées après une épuisante recherche. Du ministère des Armées jusqu’aux petites annonces dans les journaux en passant par les soi-disant voyantes, qui les «mettent en relation» avec l’esprit de leur défunt. Un jour arrive Sarah, Américaine elle aussi. Elle cherche depuis 3 ans son mari, porté disparu à Verdun.

Tom tombe éperdument amoureux de cette femme dont le seul enjeu est de retrouver son époux.

Quelques mois plus tard, Tom et Sarah se retrouvent à Bologne, dans une Italie déjà fascisante. Ils y font la connaissance de Paul, journaliste autrichien. Tous trois visent le même but: découvrir l’identité de l’inconnu amnésique hospitalisé à l’hôpital de Bologne.


Au-delà de cette histoire racontée avec sensibilité et pudeur, dans un style magistral par Nick Dybek, transparaît la douloureuse incertitude de toutes ces familles. Porté disparu. Un simple télégramme. Porteur de ces deux petits mots insignifiants, si lourds d’incertitude et de chagrin.

Fabienne Huart 

➤ «Dans les bras de Verdun», Nick Dybek, Presses de la Cité, 21 €

samedi 10 novembre 2018

BD - Devoir de mémoire avec « La petite fille qui voulait voir la guerre »



Comment expliquer la guerre 14 - 18 aux jeunes générations. « La petite fille qui voulait voir la guerre » de l’historien Jean-Yves Le Naour et la dessinatrice Christelle Galland donnera sans doute des pistes aux éducateurs. 

Clémence, 10 ans, doit faire un exposé sur cette sombre époque de l’Histoire de France. En passant devant le monument aux morts de sa commune, Charnay-lès-Mâcon, elle découvre que son nom de famille y figure. Elle va aller à la recherche de cet ancêtre mort pour la patrie. Un album complété par un remarquable dossier sur le 134e régiment d’infanterie de Mâcon dans la Grande Guerre.
« La petite fille qui voulait voir la guerre », Bamboo, 14,50 €

vendredi 9 novembre 2018

BD - La fin des Godillots



Ecrite par Olier et dessinée par Marko, l’histoire des Godillots prend fin avec ce cinquième tome qui voit aussi l’arrivée de l’armistice. Cette bande de copains, venus d’un peu partout de la France rurale, doit ravitailler une unité de soldats dans un village isolé. 
Palette et Le Bourru (les deux héros principaux) découvrent alors qu’il s’agit de l’unité du capitaine Charton, spécialiste des arnaques en tous genres et spécialiste pour se faire de l’argent sur le dos des morts. 

Une série remarquable, donnant un éclairage différent de la vie des soldats de la Grande Guerre. Mais attention, la tonalité comique générale de la série bascule dans le tragique lors des dernières pages. Car la guerre, même quand elle est terminée, est tragique et reste une belle saloperie.
« Les Godillots » (tome 5), Bamboo, 14,50 €

jeudi 8 novembre 2018

BD - Guerre et folie avec "Les oubliés de Prémontré"



La guerre, quelle folie ! Mais que deviennent les fous durant les guerres ? Cette question est au centre de l’album « Les oubliés de Prémontré » de Stéphane Piatzszek et Jean-Denis Pendanx. Cet immense asile d’aliénés tout proche de Soisson dans l’Aisne abrite 1 300 malades au début de l’intrique. Nous sommes en août 1914. La guerre est imminente. Un jeune garçon de ferme vient chercher du travail dans l’hôpital. 200 francs par mois, nourri et logé, c’est mieux que dans la ferme des parents. 
Comme en plus il sait conduire une automobile, il se révèle très utile à l’économe. Mais quand les troupes prussiennes s’approchent, le personnel médical fuit. Il ne reste plus que quelques administratifs demandant sans cesse l’évacuation des malades. Sans succès. Durant trois ans Prémontré sera abandonné. Occupé par les Allemands qui pillent les réserves, les malades meurent de faim ou de froid. Au loin les bombardements font rage. Ce roman graphique de plus de 100 pages, tout en couleurs directes de Pendanx, raconte le quotidien de ces hommes et femmes à charge d’âmes, même si ces dernières sont égarées. Une intrigue vient renforcer la dramaturgie de l’ensemble, basé sur une histoire authentique
« Les oubliés de Prémontré », Futuropolis, 21 €

mercredi 7 novembre 2018

Cinéma - « Lazzaro », d’une Italie à l’autre


Trop gentil ce jeune Lazzaro. Il y a quelques siècles, il aurait été considéré comme un valet de ferme. Ces hommes corvéables à merci, toujours disponible pour les travaux les plus ingrats. Mais Lazzaro ne vit pas au Moyen Age. Le début du film d’Alice Rohrwacher semble se dérouler dans les années 80 ou 90 vu le portable antédiluvien utilisé par le fils de la marquise. L’Italie de la fin du XXe siècle mais où les familles de l’exploitation agricole de la marquise De Luna vivent encore comme des serfs.
Pas de salaires, juste quelques dédommagements en nature en échange de la production des terres. Cinquante pauvres malheureux s’entassent dans les masures insalubres du hameau de l’Inviolata, dormant à 10 par chambre, se partageant les ampoules pour y voir clair la nuit. Ils sont exploités par la patronne (surnommée la Vipère) et son homme à tout faire. L’été, la fameuse vipère vient dans sa belle maison isolée du monde moderne (un pont coupé après des inondations) en compagnie de son fils Tancredi.
Ce jeune adulte déteste la région. Il s’y ennuie. Quand il croise la route de Lazzaro, il revit. Tancredi est le seul à ne pas chercher à l’exploiter odieusement. Mais il l’utilise. Il lui fait croire qu’il est son demi-frère et qu’ils sont tous les deux des chevaliers. Lazzaro le croit. Car Lazzaro est gentil. Il est heureux quand il permet aux autres d’être heureux. Il ne décèle pas la moindre mesquinerie ou méchanceté dans les brimades quotidiennes. Lazzaro est surtout naïf, presque attardé.

■ Prix du scénario à Cannes

Le personnage principal de ce film est interprété par Adriano Tardiolo. Il devient au fil des scènes le prototype de l’homme bon. Presque un saint. Aussi quand le film bascule dans le merveilleux, Lazzaro sautant les époques après une rencontre avec un loup, il n’est plus le benêt de service mais le révélateur des outrances de notre société actuelle.
Dans la seconde partie du film, Lazzaro, innocent et bon, débarque dans l’Italie contemporaine, il va découvrir que finalement le servage n’a pas complètement disparu. Au cours d’une vente aux enchères inversée, il retrouve l’homme à tout faire de la marquise. Désormais, il propose du travail à des migrants. Celui qui propose le plus petit salaire horaire sera embauché. Dans la grande ville, Lazzaro tombe par hasard sur ceux de l’Inviolata. Devenus adultes ou vieux, ils survivent tout aussi péniblement dans des bidonvilles le long de voies ferrées.
Fable profondément humaine, «Heureux comme Lazzaro» a remporté le prix du scénario au dernier festival de Cannes. Un film qui peut changer votre façon de voir la vie, presque vous donner la foi. Pas en une quelconque religion. Juste foi en l’Humanité.

➤ « Heureux comme Lazzaro », drame d’Alice Rohrwacher (Italie, 2 h 07) avec Adriano Tardiolo, Alba Rohrwacher, Agnese Graziani, Sergi Lopez.

mardi 6 novembre 2018

DVD et Bluray - Espionnage et traîtrise au coeur du "Dossier Mona Lisa"


Le monde de l’espionnage n’a rien à voir avec les grosses voitures de James Bond et autres gadgets. Dans la réalité, l’atout essentiel de l’agent secret c’est la discrétion. Avec « Le dossier Mona Lisa » d’Eran Riklis on est au plus près de la réalité. Mona (Goldhifteh Farahani), Libanaise, trahi sa communauté pour informer Israël. Suspectée et menacée par le Hezbollah, elle est exfiltrée en catastrophe. Sa mission est terminée. Elle subit une opération de chirurgie esthétique et une fois rétablie pourra débuter une nouvelle vie au Canada. Durant 15 jours de convalescence en Allemagne, elle va être surveillée et protégée par Naomi (Neta Riskin), agent du Mossad. La cohabitation, quasiment en huis clos est au centre de ce film d’atmosphère, oppressant et virtuose. La confrontation entre les deux femmes, méfiantes puis presque amies, est le cœur de l’histoire. Mais on y apprend aussi beaucoup des pratiques souvent peu reluisantes des services secrets (occidentaux et d’Israël) et la folie terroriste du Hezbollah. Un making-of complète le DVD, racontant le tournage en Allemagne, la mé- thode de travail d’Eran Riklis et présentant mieux Neta Riskin, excellente actrice israélienne.

➤ « Le dossier Mona Lisa », Pyramide Vidéo, 19,99 €

lundi 5 novembre 2018

DVD et Bluray - Bagnards en compétition dans "Death Race 4"


Pas le moindre gilet jaune sur leur tableau de bord. Les prisonniers participant à la course de la mort dans cet ultime opus de la franchise ne semblent pas sensibilisés par le mouvement « populaire » contre la hausse des taxes sur le carburant. Pourtant, ils en consomment de l’essence dans cette compétition dominée depuis 7 éditions par Frankenstein, le bagnard masqué. Dans cette immense prison (reconstituée pour le film dans une ancienne aciérie bulgare), l’anarchie règne. Un nouveau venu, Connor (Zach McGowan, gros biscotos et expression bovine) va le défier. Réalisé par Don Michael Paul, le film vaut pour ses cascades. Par charité chrétienne, on ne dira rien sur les performances des acteurs.
➤ « Death Race 4 », Paramount, 14,99 € le DVD, 16,99 € le bluray

dimanche 4 novembre 2018

BD - Le roi de la bouffe et de l’embrouille



Archie est un des plus anciens personnages de comics américains. Ces histoires comiques et sentimentales se déroulent dans un lycée. Celui de Riverdale. Relancées par une série télé, les aventures de ces jeunes étudiants partent à la conquête de la France dans la nouvelle collection « Log-in » de Glénat destinée aux jeunes adultes. Après des albums consacrés à Archie, Betty et Veronica, c’est Jughead qui a droit à ses propres histoires. Le personnage est le plus délirant. 
Ce fainéant de première, n’appréciant qu’une chose dans la vie : manger (quand il ne dort pas ou joue aux jeux vidéo). Dans ce recueil de six histoires complètes signées Zdarsky (scénario) et Henderson (dessin), il voit son monde s’écrouler quand un nouveau proviseur décide, au lieu des lasagnes et autres hamburgers au menu du lycée, de faire servir aux élèves une sorte de brouet insipide pour faire des économies. 

L’affrontement entre Jughead et le proviseur passe par des rêves prétextes à des parodies de classiques de l’imaginaire américain, de Game of Thrones à James Bond en passant par les superhéros. C’est parfois un peu lourd mais très juste dans la constatation que les jeunes Américains vivent souvent par procuration à travers leurs héros.
« Riverdale présente : Jughead », Glénat, 12,50 €

samedi 3 novembre 2018

BD - La musique (en prison) adoucit les mœurs



Fresnes. Une ville en région parisienne qui n’est plus connue en France que pour sa prison. Une ville dans la ville où vivent des milliers de détenus, de gardiens, où il y a un hôpital et même une salle de spectacle pouvant accueillir des concerts. Des concerts en prison ? Oui, et parfois des « pointures » invitées par l’association chargée d’organiser des activités culturelles pour les prisonniers. Romain Dutter est le responsable de ces concerts et il raconte dans un roman graphique illustré par Bouqué comment l’administration pénitentiaire, longtemps hostile à ces concerts, a changé sa politique au cours des années 80. 

Après une présentation de son parcours (Romain Dutter a beaucoup bourlingué en Amérique du Sud, son premier contact avec le milieu carcéral se déroulant au Honduras), l’animateur raconte les concerts des deux côtés. Réactions des artistes, mais aussi des détenus ou des gardiens. Presque un reportage, sans le moindre parti pris, qui n’oppose personne au contraire. Preuve qu’effectivement, depuis toujours, la musique adoucit les mœurs. Même en prison…
« Symphonie carcérale », Steinkis, 20 €

vendredi 2 novembre 2018

BD - Lucky Luke voyage bien

 



Enfin une femme entre dans la vie de Lucky Luke. Le cow-boy imaginé par Morris, longtemps animé par Goscinny et repris depuis quelques années par Jul (scénario) et Achdé (dessin) va devoir protéger cette compagne française pour le moins encombrante. Pour cause, elle mesure 93 mètres de haut… Tout commence dans les plaines de l’Ouest quand le héros qui tire plus vite que son ombre rencontre un certain Bartholdi. Contrairement à ce que pense le ventre affamé d’Averell Dalton, ce n’est pas un glacier italien mais un sculpteur français. Ce que le repris de justice a pris pour une glace géante est la flamme de la liberté. De la future statue de la Liberté. 

L’histoire de Jul, truffée de gags et de clins d’œil savoureux, explique comment Bartholdi a collecté l’argent de la souscription en sillonnant le pays avec juste la réplique de la main. Ensuite, il s’agit de convoyer la statue monumentale. Mais des ennemis de la liberté veulent détruire le monument. Lucky Luke sera chargé de le protéger. Le voilà donc à Paris pour jouer les gardes du corps de cette femme si symbolique. Une excellente suite à une série qui après quelques atermoiements semble être de nouveau sur d’excellents rails.
« Lucky Luke - Un cow-boy à Paris », Lucky Comics, 10,95 €

jeudi 1 novembre 2018

Cinéma - L’amour entre la veuve et l’innocent au centre du film "En liberté" de Pierre Salvadori



Présenté comme une comédie loufoque et endiablée, «En liberté » de Pierre Salvadori n’est pas si comique que cela. Les gags s’enchaînent, les situations cocasses et les ré- pliques incisives sont légion mais ce qui ressort avant tout de cette excellente surprise de la rentrée cinéma, ce sont les personnages touchants et leurs histoires d’amour un peu compliquées.



Pour Yvonne (Adèle Haenel), les amours sont au point mort depuis deux ans. Normal, 24 mois auparavant, son mari est mort en service. Ce flic de haut vol (Vincent Elbaz), l’a aidé dans sa propre carrière de policière. Aujourd’hui, mère d’un petit garçon, elle est sur la touche. Les collègues veulent la protéger alors qu’elle voudrait retrouver l’adrénaline du terrain et des interpellations mouvementées. Quand elle apprend, par la confidence d’un prévenu, que sa bague de fiançailles est le fruit du faux braquage d’une bijouterie doublé d’une vraie magouille à l’assurance couverte par son défunt mari, son monde s’écroule. Non seulement elle a vécu avec un ripou durant plus de dix ans, mais en plus il a fait condamner un innocent.

Comme deux aimants  

Justement Antoine (Pio Marmaï) sort de prison. Elle va tenter de le réhabiliter. Mais ce dernier est devenu à moitié fou durant sa détention. Sa femme (Audrey Tautou) ne le reconnaît plus du tout. Par contre, entre la veuve trahie et l’innocent en mal de réhabilitation, le courant passe. Yvonne suit Antoine dans ses divagations. Et lui sauve la mise à plusieurs reprises. Une fois dans une rixe à la sortie d’une boîte de nuit. Une autre quand il tente de se suicider. Enfin quand il met le feu à un restaurant qui refuse de le servir… Il attire les ennuis, comme s’il était bouffé par la volonté de cette fois, mériter sa condamnation. Elle arrange tout, comme pour rattraper les années de magouille du défunt mari.
Deux paumés qui se complètent. Chacun dans leur style, ils sont irrésistibles. De drôlerie. D’incompréhension aussi de la part de notre société beaucoup trop manichéenne.
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Triangle amoureux  

Le meilleur ressort comique dans les comédies reste les quiproquos amoureux. Sans aller jusqu’au vaudeville, « En liberté » de Pierre Salvadori joue en partie sur cette problématique. Dans la distribution, on trouve deux femmes et trois hommes. Largement de quoi mélanger les lignes et proposer un triangle amoureux savoureux. Au centre, Yvonne, policière, veuve trahie. Son cœur balance entre Louis (Damien Bonnard) et Antoine (Pio Marmaï).
Le premier, elle le connaît depuis très longtemps. On devine qu’il craque pour elle. Mais n’ose pas faire le premier pas car c’est la femme de son ancien boss. Lui prétend n’avoir jamais trempé dans les magouilles. On veut bien le croire, car c’est un gentil. Toujours prêt à rendre service. Et à protéger Yvonne par tous les moyens. Jusqu’à jouer au baby-sitter quand la femme de son cœur veut sa soirée pour pister Antoine.



Un Antoine qui tombe vite amoureux de la belle policière. Mais (quiproquos justement…) il est persuadé qu’elle est prostituée dans le civil. Alors, qui va l’emporter, le flic ou l’innocent ? À moins qu’au final le flic ripou (tout en étant mort) gâche tout. Si Adèle Haenel et Pio Marmaï sont omniprésents, le troisième larron, Damien Bonnard, fait plus que s’en tirer avec les honneurs. Son petit sourire, ses reparties hésitantes et sa façon de ne pas écouter quand Yvonne est dans les parages le transforment en atout comique essentiel. Une révélation pour ce comédien vu précédemment dans le tragique « Rester vertical » d’Alain Guiraudie.
➤ « En liberté », comédie de Pierre Salvadori (France, 1 h 48) avec Adèle Haenel, Pio Marmaï, Damien Bonnard, Audrey Tautou et Vincent Elbaz.

mercredi 31 octobre 2018

DVD et bluray - Quand la littérature sauve des vies dans "Le cercle de Guernesey"




Phénomène d’édition, le roman de Mary Ann Shaffer et Annie Barrows, « Le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates », semblait impossible à adapter au cinéma. Mike Newell a relevé le défi et le résultat, même s’il est à 1 000 lieues du roman, est très concluant.
On y retrouve les grandes lignes (l’histoire d’amour entre une romancière londonienne et un éleveur de cochons de Guernesey ainsi que la disparition de l’initiatrice du cercle), mais une bonne partie de l’humour du texte original a été zappée au profit de l’émotion.
Côté interprétation, les deux acteurs principaux sont excellents (Lili James et Michial Huisman) et les paysages verts et bucoliques de Guernesey apportent un plus indéniable par rapport au livre. Mais une fois cette romance visionnée, on ne peut que vous conseiller de lire (ou relire) le roman original paru en poche aux éditions 10/18. 
➤ « Le cercle de Guernesey », Studiocanal, 19,99 €

mardi 30 octobre 2018

DVD et bluray - « Sans un bruit », effroyable silence


Pas toujours évident de renouveler le genre du cinéma d’horreur. Entre vampires, zombies, poupées maléfiques ou serial killer, tout ou presque a servi à faire peur au public. Quand le scénario de « Sans un bruit » a commencé à circuler dans les milieux hollywoodiens, ils ont été plusieurs à se demander quel était cet objet bizarre contenant en tout et pour tout une dizaine de répliques. Tout le film était silencieux ou en langue des signes. Se lancer dans un tel projet était une gageure. Des producteurs ont relevé le défi aidé en cela par John Krasinski.

L’acteur qui a le vent en poupe (il est le nouveau Jack Ryan dans la série produite et diffusée sur Amazon) est aussi un bon réalisateur. Il accepte le premier rôle, mais à la condition d’être aussi derrière la caméra et de produire le long-métrage. C’est dire s’il croyait à ce projet. Et comme il a réussi en plus d’embarquer sa compagne, Emily Blunt, pour le rôle principal féminin, le succès était quasi assuré. Et mérité tant le film parvient à provoquer une angoisse perpétuelle du fait du silence obligatoire. Dans un futur proche, des monstres ont fait leur apparition sur terre. Ils attaquent les humains dès qu’ils font du bruit.

La famille Abbott (John Krasinski, Emily Blunt et leurs trois enfants) trouve refuge dans une ferme perdue de la campagne américaine. Pour survivre, ils ne font plus le moindre bruit dans routes leurs activités quotidiennes. Mais l’arrivée d’un bébé risque de compliquer cette rigueur. Un making of raconte comment la ferme a été trouvée puis aménagée. On y apprend également que Milicent Simmonds, interprète de l’adolescente de la famille Abbott, est véritablement sourde et muette, compliquant parfois la compréhension au cours des prises de vues. Mais au final, c’est d’un réalisme époustouflant.

➤ « Sans un bruit », Paramount, 16,99 € le DVD, 19,99 € le bluray

lundi 29 octobre 2018

Thriller - L'Islande, ses légendes du passé et d’aujourd’hui


Après la Mongolie et le Brésil, Ian Manook met le cap sur l’Islande. Écrivain français remarqué pour la trilogie « Yeruldelgger » se déroulant dans les steppes mongoles, il continue son périple littéraire en abordant sur les côtes tourmentées de l’Islande. Un thriller se déroulant sur cette île perdue de l’Atlantique Nord, quoi de plus banal depuis le succès des Indridasson et autres Thorarinsson.

Il fallait donc une bonne intrigue pour captiver le lecteur dans ce voyage touristique… et violent. Du tourisme, c’est ce que vient faire en priorité le personnage central de « Heimaey ». Jacques Soulniz, journaliste français, débarque en compagnie de sa fille, Beckie, jeune adulte rebelle. Il veut lui faire découvrir ce pays si singulier.

A 20 ans, il a sillonné ce rocher hostile aux multiples volcans. Mais Beckie n’a pas la tête à ça. Elle n’est pas insensible à la beauté majestueuse des paysages sauvages mais s’intéresse surtout aux jeunes autochtones.

■ Cadavre et nécropant  
La petite Française craque pour Galdur, jeune marin qui n’a pas froid aux yeux. Un peu trop téméraire le jeune homme. Il vient de dérober deux kilos de cocaïne à la mafia locale. Kornelius, le flic, fait son entrée en scène. Il doit retrouver la drogue. Et le voleur. Pas pour le juger mais rendre son bien au parrain auprès de qui il est endetté. Sur cette intrigue du présent, se greffe une autre énigme tournant autour de la mort d’une jeune fille lors du premier séjour de Soulniz.

Dense, construit sous forme de chapitres courts et percutants, ce thriller plonge le lecteur dans certaines légendes islandaises comme celle du nécropant: « on écorche le bas d’un homme pour s’en faire un pantalon de peau et s’approprier sa force ». « Une fois enfilé le nécropant, tu dois glisser une pièce de monnaie entre ton propre scrotum et le pantalon de peau, pour ainsi te garantir que sa bourse vide se remplira pour toi d’or et d’argent. » Une simple légende pour Kornélius. Jusqu’à la découverte d’un cadavre horriblement dépecé.

Un roman foisonnant, aux multiples personnages, audacieux, usés par la vie ou fatalistes, mais toujours sous le charme de ce pays rude où tout est possible. 

dimanche 28 octobre 2018

BD - Black blagues à la sauce Belzebubs


L’humour est sans doute ce qui se propage le mieux dans le monde. Il n’existe pas un peuple, une corporation, une religion ou le moindre groupe de trois personnes qui, à un moment ou un autre, tente une blague. Ahonen, dessinateur tatoué finlandais, a réussi le combo parfait entre humour noir et hard rock. 


Dans « Belzebubs », série de strips diffusés sur les réseaux sociaux, on suit les délires sataniques de la famille Belzebubs. Même s’ils veulent faire les durs, ces « métaleux » sont surtout de doux dingues, asociaux et qui accordent plus d’importance à leur guitare ou leur maquillage qu’aux résultats scolaires des enfants. 
Sans pitié pour le milieu de la musique Métal, ce sont pourtant là que se trouvent la grosse majorité des fans. Comme quoi on peut bramer « Death » d’une voix rauque tout en aimant rire de ses outrances. 
« Belzebubs », Glénat, 9,95 €

samedi 27 octobre 2018

BD - Le meilleur dans l’Alyah reste le falafel


A 20 ans, Michel Kichka, Belge de la région de Liège, a fait son alyah. D’origine juive, il a abandonné famille et études d’architecture pour rejoindre Israël. Il est admis aux Beaux-Arts et devient dessinateur de presse et de bande dessinée. Dans « Falafel sauce piquante », il raconte cette renaissance, le début de sa vraie vie. Ses enthousiasmes du début, sa fierté d’appartenir à un pays unique au monde. Il rencontre sa future femme, se marient, ont des enfants. Autobiographie dessinée, « Falafel sauce piquante » alterne entre joies du début, craintes actuelles et surtout espoir d’une paix plus durable. 


On découvre l’ouverture d’esprit des arrivants. Leur volonté de faire progresser le pays. Mais les multiples guerres obligent tout le monde à faire de longues périodes dans l’armée. Michel Kichka n’y échappe pas, lui qui se retrouvera à bombarder le Liban. Ses fils non plus ne seront pas épargnés, notamment dans Gaza. Et il met en opposition la dérive sécuritaire de son pays et sa fierté de voir ses fils protéger la nation. 
Lui, met toute son énergie à rapprocher les peuples par l’action de l’organisation Cartooning for Peace créé par Plantu. Il sillonnera le monde en compagnie de dessinateurs arabes pour démontrer que l’humour est le meilleur remède aux guerres.

« Falafel sauce piquante », Dargaud, 21,90 €

vendredi 26 octobre 2018

BD - Les risques de la réalité virtuelle avec "Bolchoi Arena"




Bienvenue dans la Bolchoi Arena. Cette plate-forme de réalité virtuelle a remplacé internet dans un futur proche. L’Homme, plutôt que de se lancer à la conquête de l’espace l’a synthétisé et transposé dans un gigantesque programme informatique. Chacun peut y accéder avec des lunettes implants. La conquête spatiale progresse, mais sous forme de jeu vidéo.

Cette idée a germé dans la tête de Boulet, dessinateur virtuose, passionné de nouvelle technologie et d’astronomie. Il est donc le scénariste de ce long roman graphique (160 pages) prévu en trois parties. Il a confié l’illustration à Aseyn, compagnon de blog.


Le lecteur découvre la Bolchoi Arena en compagnie de Marje et Dana, deux étudiantes. Le jour elles bossent dans des bibliothèques, la nuit elles endossent les tenues de leur avatar et se lancent dans la conquête de nouveaux territoires sur des mondes inconnus. On est forcément un peu décontenancé au début, mais une fois compris le passage de la réalité à la virtualité, l’album devient passionnant.

Car Marje, si elle découvre Bolchoi Arena, a tendance à en abuser. Au détriment de sa vraie vie, études et amours avec son petit ami. Entre manga et SF classique, cette nouvelle série bénéficie en plus d’une extension sur l’appli mobile Delcourt Soleil +.   

«Bolchoi Arena » (tome 1), Delcourt, 19,99 €

jeudi 25 octobre 2018

Cinéma - « Quién te cantará » sans fausse note



L’une chante, l’autre ne s’en souvient pas. Lila (Najwa Nimri) est célèbre, Violeta (Eva Llorach) travaille dans un karaoké et se contente de l’imiter en fin de soirée. Deux femmes autour d’une légende de la chanson espagnole. Le film de Carlos Vermut utilise la ficelle usée de la fan face à son idole.

Mais il transforme cette relation, trop souvent binaire et simpliste, en véritable introspection des deux femmes qui, en se reconnaissant un peu l’une dans l’autre, vont se remettre radicalement en cause. Avant d’arriver à ce « duel », le spectateur est plongé dans le monde étrange de Lila.

Cette chanteuse, très célèbre, a cessé de se produire sur scène depuis dix ans. L’argent commençant à manquer, son agent, un comeback est programmé.

Deux femmes et une star   
Mais à deux mois du premier concert à Madrid, Lila est retrouvée inconsciente sur la plage bordant sa belle maison. Quand elle se réveille à l’hôpital, elle est devenue amnésique. Pour lui rendre sa personnalité, sa meilleure amie embauche Violeta, sa plus grande fan, celle qui connaît toutes les chansons de Lila par cœur et le moindre détail de sa vie.


Cette rencontre va radicalement réorienter la vie des deux femmes à un tournant de leur existence. Le film, un peu long parfois, vaut surtout pour l’interprétation des deux comédiennes principales. Elles sont différentes mais doivent pourtant s’accaparer la personnalité de celle qui écrase tout sur son passage : la star. Lila car elle ne se souvient plus de sa vie d’avant. Violeta car de plus en plus elle se rêve à la place de sa chanteuse préférée.

Film noir, à l’ambiance trouble et malsaine, sur une dualité complexe et maladive, il ne donne pas toutes les clés. Dans le dossier de presse, Carlos Vermut, le réalisateur de « Quien te cantara », précise son but : que le spectateur « passe un bon moment, qu’il soit perdu, qu’il soit ému, qu’il nourrisse les blancs du film par son propre imaginaire ou alors qu’il savoure le mystère qui échappe. »

Mystère. C’est le mot exact pour définir la fin, étonnante, déroutante et diablement mystérieuse.

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Duel musical   


La musique tient une place prépondérante dans le film de Carlos Verlut. Si la bande originale est d’Alberto Iglesias, le compositeur attitré de Pedro Aldomovar, il y a aussi nombre de chansons romantiques comme l’Espagne aime en produire. Les amoureux du genre seront comblés avec plusieurs extraits et même une chanson complète à la fin du film, avec un trucage virtuose à la clé pour « boucler » le film. Mais quand Marta (Natalia de Molina) la fille de Violeta intervient, cette boule de nerfs à la violence explosive n’en a cure des romances.

Ce qui lui plaît c’est le défoulement extrême sur des rythmes modernes. Au bord de la plage ou dans sa chambre, place à la techno, brutale, agressive, assourdissante. L’opposé de la musique que sa mère aime. Ce duel musical et de générations passe par une opposition radicale des genres. La douceur, l’émotion et la mélancolie contre l’ardeur, la force et l’abrutissement.

Les deux styles permettent de mieux cerner l’opposition des deux femmes, la mère et sa fille. La plus jeune, autoritaire, exclusive et intransigeante domine littéralement sa génitrice. Mais cette dernière, grâce à Lila, va trouver les forces pour inverser la tendance. Quel qu’en soit le prix à payer.

➤ « Quién te cantará », drame de Carlos Vermut (Espagne, 2 h 02) avec Najwa Nimri, Eva Llorach, Carme Elias.

mercredi 24 octobre 2018

DVD et blu-ray : l'avocat japonais tourmenté de "The Third Murder"

Un avocat japonais est chargé de défendre un homme accusé du meurtre de son patron. Pour tenter d’éviter la peine de mort, l’accusé prétend que c’est la femme du mort qui a commandité l’assassinat. Mais l’avocat doute de la véracité de la version officielle. Ce thriller de Hirokazu Kore-eda raconte avec minutie le travail d’un avocat. Son empathie pour aider le client, ses doutes et failles personnelles.

Un film noir et oppressant, à l’intrigue implacable.

➤ « The Third Murder », Le Pacte, 19,99 €

mardi 23 octobre 2018

Série - The Haunting Hill House, une maison hantée à voir sur Netflix


Depuis le début du mois, vous pouvez voir sur Netflix une de ces séries qui n’en finissent pas de faire parler d’elles. De vous hanter aussi si vous y avez succombé. « The Haunting Hill House », série en 10 épisodes, est signée Mike Flanagan, le nouveau maître incontesté de l’horreur (Pas un bruit, Ouija).

Chaque épisode présente les différents membres de la famille Hill. De Steve, écrivain qui a connu la gloire en racontant l’histoire de la maison hantée à Luke, drogué en perdition en passant par le père ou la fille aînée, devenue croque-mort. Chacun se remémore ces mois passés dans la maison hantée, les hallucinations et nuits cauchemardesques jusqu’à la fuite en pleine nuit.

Toute la réussite du film est de raconter avec les visions multiples une même histoire. Série comportant quelques moments virtuoses comme ce plan séquence de 15 minutes aux obsèques de la sœur jumelle de Luke. Cela vaut largement tous les films d’horreurs programmés dans les cinémas depuis le début d’année… 

lundi 22 octobre 2018

Livre sur le cinéma - Steve McQueen, le prince des bolides


Beau gosse emblématique du cinéma américain, Steve McQueen était un passionné de vitesse. Il l’a montré dans ses films, mais dans la vie privée il s’offrait souvent un tour en bolide. Ce beau livre, parfait pour les amateurs de cinéma et de voitures de légendes, revient sur la passion dévorante de l’acteur pour la course automobile.

Avant un superbe portfolio et une filmographie exhaustive de sa carrière à la télévision et au cinéma, Guillaume Evin raconte la vie à 100 à l’heure de cet acteur qui aime piloter ou de ce pilote qui aime jouer à l’acteur. Car en plus de ses succès dans les salles obscures, Steve McQueen a participé à quantité de courses récoltant d’autres lauriers.

➤ « Steve McQueen, king of cool » de Guillaume Evin, Hugo Motors, 272 pages, 35 €

dimanche 21 octobre 2018

BD - Un détective à l’ancienne

   



Nom : Vercorian. Prénom : Atom. Particularité : fils d’un flic parisien d’origine arménienne, ancien grand Résistant. Le nouveau héros imaginé par Yann et dessiné par Olivier Schwartz est résolument vintage. L’action de sa première enquête se déroule à l’été 49. Le jeune Atom veut prouver à son père, grand ponte de la PJ, qu’il vaut autant que lui. Il se rêve détective privé et profite d’un fait divers retentissant pour se lancer dans sa première affaire. 

Dans le sud, le Bégum, la femme de l’Aga Khan, vient de se faire dérober ses bijoux dans un « carjacking » avant l’heure. Atom est flanqué de son assistante, la belle et intrépide Mimi et d’un associé-financeur, Jojo la Toupie, colosse qui a connu son heure de gloire dans le milieu du catch. 

Un trio explosif pour une enquête menée à 100 à l’heure, entre la Riviera, les bas-fonds de Paris et la banlieue. Délicieusement nostalgique (mais avec un peu de parodie et de sarcasme, Yann oblige) d’une époque qui a fait les beaux jours de BD à la Tillieux avec un trait proche de Jijé, les aventures d’Atom ne devraient pas passionner les jeunes mais rencontrer un réel enthousiasme auprès des vieux collectionneurs. 

« Atom Agency » (tome 1), Dupuis, 15,95 €



samedi 20 octobre 2018

Roman - Pascal Bruckner nous offre un cauchemar le temps d'une nuit ou d'une année

Si vos nuits sont déjà un peu agitées en raison de cauchemars récurrents et troublants, évitez ce roman de Pascal Bruckner. Ou au choix dévorez-le en une nuit blanche. Ainsi vous n’aurez pas de cauchemar, même si les mésaventures de Jézabel valent largement toutes les inventions paranoïaques de votre inconscient. Pascal Bruckner, dans une veine fantastique qu’il apprécie tant, renoue avec les dédales du temps.

En route pour le Canada afin de présenter à un ami de son père une montre particulière, Jézabel croit sa dernière heure arrivée lors d’une violente tempête. L’avion de ligne, chahuté, est détourné vers le Maine aux USA. De là, elle rejoint un hô- tel perdu dans les montagnes avant d’espérer prendre un bus pour le Canada quand les conditions météo le permettront. Un hôtel étrange, immense, silencieux et sinistre.

En rejoignant la chambre, elle croise pour une première rencontre avec les Insomniaques : « Au loin apparut, accoudé à la balustrade de l’entresol, un trio de vieux messieurs, debout à cette heure, un manchot, un bossu et un boiteux avec leurs cannes qui la fixaient sans mot dire. Ils sautillaient, vifs et agités, malgré leurs handicaps ». Une ambiance étrange, à la Shinning, qui ne l’empêche pas de sombrer dans le sommeil après 24 heures éprouvantes.



A son réveil, elle découvre qu’elle a dormi une année complète. Rêve ou réalité, jamais le lecteur ne sait où est la frontière. Un peu comme si le présent, le passé et l’avenir se mélangeaient allègrement dans un récit alambiqué. Avec Jézabel, on résiste pour ne pas sombrer dans la folie.

➤ « Un an et un jour » de Pascal Bruckner, Grasset, 18 €

➤ L’adaptation en BD de son roman « Les voleurs de beauté », prix Renaudot, vient de sortir aux éditions Glénat

vendredi 19 octobre 2018

Roman - Sur la trace de Federica Ber, la belle disparue



Qui était Federica Ber ? Qu’est-elle devenue ? Ces deux interrogations sont au centre du roman de Mark Greene. Le narrateur se souvient de cette belle Italienne qui lui a fait découvrir les toits de Paris quand il était jeune. 
Aujourd’hui elle est suspectée dans la mort d’un couple d’architectes découvert attachés au pied d’une muraille rocheuse des Dolomites. Entre ces récits distincts, l’auteur aurait pu signer un faux polar, avec rebondissements et coups de théâtre. Il a préféré jouer à fond la nostalgie. Les souvenirs de cet été magique. Puis la disparition de cette femme libre, visionnaire. Cela donne deux histoires d’amours incomplètes, inachevées. Marquées par le destin. Un roman fort et vertigineux.
➤ « Federica Ber » de Mark Greene, Grasset, 18 €

jeudi 18 octobre 2018

BD - Valise mystérieuse et camions du diable

En 1956, en plus du journal de Spirou, les éditions Dupuis publient un autre hebdomadaire : Risque-tout. Plus moderne, il héberge les séries vedettes de l’époque dans des récits complets comme Johan et Pirlouit, la Patrouille des Castors ou Tif et Tondu, mais aussi quelques séries à suivre. Maurice Tillieux, débordant d’activité, vient d’y lancer Marc Jaguar, reporter-photographe. Après une première histoire, « Le lac de l’homme mort », Jaguar part pour la Bretagne et croise la route des « Camions du diable ». Mais Risque-Tout s’arrête sans préavis. 

L’histoire ne compte que huit planches dont une dernière inédite. L’essentiel de l’embryon de récit tourne autour d’une valise, dérobée par un vagabond et qui, en découvrant ce qu’elle contient, préfère s’en débarrasser immédiatement en la jetant dans une mare. Que contenait cette valise ? La question est restée sans réponse durant des décennies. Tillieux, qui travaillait à l’époque comme un feuilletoniste, n’avait pas encore pensé à la suite de l’histoire. Risque-Tout abandonné, il lâche Marc Jaguar pour se consacrer à son autre série vedette, Gil Jourdan. Ce n’est que 50 ans plus tard que Walthéry et Borgers ont osé imaginer une suite aux « Camions du diable ». Le dessin en a été confié à Delvaux, grand spécialiste des voitures de l’époque. Cela donne un album hommage, dans l’esprit, avec pour boucler la boucle, la reproduction des planches dessinées par Tillieux. Le Marc Jaguar « moderne », de journaliste, se transforme en détective privé et même espion, n’hésitant pas à utiliser la manière forte quand il se retrouve en position délicate. Courses-poursuites, bagarres, intrigues, trahisons, secret d’État, le tout saupoudré de quelques clins d’œil en référence à Zappy Max ou César et son incorrigible fillette, autres personnages du prolifique Tillieux.
« Marc Jaguar, les camions du diable », Dupuis, 17,50 €

mercredi 17 octobre 2018

BD - Ouvrir la boîte de ses origines

Longtemps, les familles en mal d’enfant ont privilégié une adoption à l’étranger. La filière de Corée du Sud a laissé des traces en France et en Belgique. Parmi ces enfants déracinés il y a quelques décennies, plusieurs ont percé comme Fleur Pelerin, ancienne ministre, Jean-Vincent Placé, politicien ou Jung, dessinateur. Ce dernier revient sur le phénomène dans son nouvel album, « Babybox ». Cette box d’un genre particulier, c’est le sas inventé et placé dans la rue par un pasteur. A Séoul, il permet aux mères dépassées d’abandonner leur enfant en toute sécurité. L’héroïne de ce roman graphique de 156 pages, Claire, ne connaissait pas la babybox. 

Ses parents sont Coréens. Ils vivent en France depuis longtemps. Elle y est née comme son petit frère. Mais quand la mère meurt dans un accident de la route et que son père se retrouve dans le coma, Claire va devoir se plonger dans les papiers de la famille et découvrir qu’elle a été adoptée à l’âge d’un an. Elle a été trouvée dans une babybox. Pour faire le deuil de sa mère qui ne l’était pas, elle va en Corée pour tenter de retrouver sa véritable mère. Un récit initiatique peut-être encore plus fort que les mémoires dessinées de Jung, « Couleur de peau : miel ».
« Babybox », Soleil Noctambule, 18,95 €