vendredi 30 septembre 2016

BD : Maggy prise au piège


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Troisième et ultime volet des aventures de Maggy Garrisson. Une première saison, selon la terminologie devenue à la mode. Imaginée par Lewis Trondheim et dessinée par Stéphane Oiry, Maggy est une jeune Anglaise un peu boulotte, persuadée qu'elle ferait une excellente détective privée. Notamment pour aller dans les pubs boire des bières afin d'obtenir des informations. C'est comme ça qu'elle rencontre son boyfriend, un homme de main de la pègre locale. Début des embrouilles aussi avec la police et quelques-uns de ses éléments les plus corrompus. Le ton de la BD est unique, très cérébral, mais avec aussi son lot d'action (accident de voiture, bagarre dans une cuisine...). Cela ferait un excellent roman noir. C'est déjà une remarquable BD.
"Maggy Garrisson" (tome 3), Dupuis, 14,50 euros


DE CHOSES ET D'AUTRES : Occitanie à géographie variable

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Donc, nous habitons en Occitanie. Le Journal Officiel a publié le décret hier. Exit le Languedoc ou le Roussillon. Recalé le Pays Catalan. Ce sera Occitanie tout court. Car dans le décret, la mention « Pyrénées Méditerranée » ne figure nulle part alors qu'elle est rajoutée dans tous les documents publiés par l'institution régionale depuis cet été. Preuve qu'il y a une marge dans cette officialisation. Car ce que réclament les Catalans n'est pas l'abandon d'Occitanie mais le rajout de Pays Catalan.
Pourquoi ne pas imaginer alors une région à géographie variable ? A nom variable plus exactement. Avec la possibilité de le décliner en fonction de la localisation. Ainsi, à Perpignan, la région signerait « Occitanie Pays Catalan ». Cette solution permettrait également aux autres entités géographiques de continuer d'exister. Car le Pays Catalan n'est pas le seul à vouloir préserver son histoire à préserver. D'« Occitanie Rouergue » à « Occitanie Bigorre » en passant par « Occitanie Camargue » la démultiplication des points d'intérêts donnerait plus de sens à cette immense entité géographique, un peu abstraite et sans grande notoriété, avouons-le.
Mais il faut le faire rapidement. Avez-vous remarqué comme à la météo les présentateurs ne disent plus « Nord » mais « Hauts de France » ? D'ici trois ans, plus personne ne saura situer la Picardie sur une carte de France. Alors si le Pays Catalan veut exister, en plus de panneaux à l'entrée des villages, je lancerais une action de lobbying auprès d'Evelyne Dhéliat, Louis Bodin (venu récemment au Soler) ou Nathalie Rihouet.

jeudi 29 septembre 2016

DVD et blu-ray : Fille facile et gars benêts

Coffret Bridget Jones

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La semaine prochaine sort le troisième volet des aventures romantiques de Bridget Jones. Celle où elle attend un bébé... Histoire de vous replonger dans ce monde si féminin, profitez de la sortie du coffret des deux premiers films adaptés des romans d'Helen Fielding. Vendus à des millions d'exemplaires, ces romans typiques d'un certain humour british ont un peu perdu dans leur adaptation sur grand écran. Mais on retrouve l'esprit si torturé de la jolie Bridget, parfaitement incarnée par Renée Zellweger, pourtant Texane jusqu'au bout des ongles. Ses jolies courbes enchanteront les hommes et les spectatrices ne seront pas en reste avec Hugh Grant et Colin Firth au casting. Une femme, deux hommes : classique triangle amoureux, basé sur les histoires de Jane Austen, avec l'humour en plus.
"Coffret Bridget Jones", Studiocanal
The Nice Guys

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Sorti au moment du festival de Cannes, "The Nice Guys" avec son casting original (Ryan Gosling et Russell Crow) a dérouté nombre de cinéphiles. Normal, cette comédie policière est avant tout une… comédie. Les deux stars ne se prennent pas au sérieux et en font des tonnes dans leurs personnages respectifs. Une révélation pour Ryan Gosling, irrésistiblement comique dans ses apparitions. La scène quand il découvre un cadavre est digne du panthéon des expressions tellement surjouées qu'elles en deviennent œuvres d'art. Un De Funès en puissance. À regarder sans a priori et surtout sans la moindre envie de réflexion philosophique. Juste pour se marrer !
"The Nice Guys", EuropaCorp

DE CHOSES ET D'AUTRES : L'image de la femme

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Scandale aux USA. Une journaliste, musulmane et voilée, pose dans Playboy. Réaction immédiate du magazine en ligne « The Muslim Vibe » : « Playboy est synonyme de pornographie ». Racontée comme ça, l'histoire semble croustillante.
En réalité il n'y a là rien de sensationnel. Bien au contraire. Première erreur, Noor Tagouri, journaliste freelance d'origine libyenne qui présente ses reportages à la télévision la chevelure recouverte d'un hijab, ne pose pas dans Playboy. Elle y est simplement interviewée sur son difficile combat pour s'affirmer en tant que journaliste musulmane aux USA. Sur les photos illustrant l'article, elle ne dévoile pas un seul bout de peau en dehors de son visage et ses mains.
De toute manière, depuis plus d'un an, Playboy a entamé sa grande révolution culturelle. Terminées les playmates aux courbes généreuses et appâts largement dévoilés. La nouvelle formule n'offre même plus un téton aux lecteurs. Devenu un news magazine comme les autres, il a rajeuni son lectorat et vu ses ventes remonter. Pourtant, depuis la parution du magazine, la page Facebook de la jeune journaliste est inondée de messages désobligeants. L'image sulfureuse du Playboy ancienne formule risque de perdurer encore longtemps.
Il est vrai qu'à une époque, ces magazines faisaient le « buzz » sans l'aide d'internet. Souvenez-vous des photos dénudées de quelques célébrités de la fin du XXe siècle comme Stone (la chanteuse), Jane Birkin, Dani ou Sophie Favier. Sans oublier Pierrette Le Pen (épouse de J.-M.), la soubrette la plus improbable des magazines de charme.

mercredi 28 septembre 2016

Cinéma : "Aquarius" ou ces murs dont on fait une vie

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Clara a toujours vécu dans un bel immeuble nommé "Aquarius" au bord de la plage de la ville de Recife. Bâtiment menacé par un projet immobilier. Ce sera le combat de sa vie.


Il n'y a pas qu'en Espagne (et un peu dans la région) que les promoteurs immobiliers cherchent à bétonner les bords de mer. "Aquarius", second film du Brésilien Kleber Mendonça Filho, raconte comment un projet immobilier, moderne et forcément rentable, menace un immeuble, l'Aquarius, pourtant présent en bord de mer depuis des dizaines d'années. Racheté petit à petit par une société ambitieuse, l'Aquarius est désormais désert. Excepté Clara (Sonia Braga), vivant seule au premier étage. Cette femme, passionnée de musique, la soixantaine en retraite, a perdu son mari depuis quelques années. Ses trois enfants, adultes, ont fait leur vie. Ailleurs. Elle profite au quotidien de cette douceur de vie. Le matin elle va se baigner, juste en traversant la rue. Sur sa véranda, dans son hamac, elle lit, écoute de la musique, pense à son passé, ses bons et mauvais moments.
Une battante
Relativement long (près de 2 h 30), ce film présenté en compétition à Cannes se révèle en réalité bien court tant la vie de Clara est dense. La séquence d'ouverture, se déroulant dans les années 80, la montre jeune et les cheveux très courts. Dans cet appartement, occupé à l'époque par sa tante Lucia, elle vient de vaincre un cancer du sein. Au prix fort pour une femme d'à peine trente ans. De nos jours, elle en garde une cicatrice, entraperçue pudiquement en sortant de la salle de bain. Le film, dans cette séquence donne le ton. Le réalisateur fait tout en finesse, jamais de grandes démonstrations ou d'effets voyeurs. L'arrivée des promoteurs immobiliers chez Clara est du même acabit. Ils sont gentils, sirupeux, augmentent le prix d'achat de l'appartement. Pas de violence, mais quelques mots lâchés pour faire peur. Clara, têtue, refuse fermement. Commence alors une guerre d'usure insidieuse faite de tracas quotidiens (fête nocturne dans l'appartement vide du dessus) et de démarches administratives et judiciaires harassantes.

Sonia Braga, la star
Le film, d'une grande beauté, montrant Recife sous toutes ses coutures, les belles comme les pires, est littéralement porté par Sonia Braga. La grande actrice brésilienne, révélée dans les années 80, a fait carrière aux USA tournant pour Redford ou Eastwood. Mais elle a aussi conquis le public américain dans des séries télé de grande audience, d'Alias à Sex and the City en passant par Royal Pains. Son interprétation dans "Aquarius", toute en rage rentrée, aurait dû lui donner les prix d'interprétation féminine à Cannes. Le jury en a décidé autrement. Preuve que même les plus grands professionnels de la profession peuvent, parfois, se tromper ou oublier les fondements de leur métier.

DE CHOSES ET D'AUTRES : Joyeux anniversaire

anniversaire, facebookDe toutes les fonctionnalités de Facebook, celle des anniversaires est certainement, de mon point de vue, la plus détestable. Certes il n'est pas obligatoire de l'indiquer, mais fortement recommandé par les membres de la communauté virtuelle la plus importante du monde (de tout l'univers connu même, ne soyons pas avare de superlatifs avec ce réseau social). Car la tradition du « Joyeux anniversaire » est particulièrement appréciée par une large majorité des membres. D'autant plus facilement que l'on n'a pas à s'en souvenir, un message d'alerte s'affiche quand vous ouvrez le logiciel. Comme on accumule souvent plus d'amis que de jours dans l'année, on se retrouve quotidiennement avec un ou plusieurs anniversaires à souhaiter.
Jusqu'au jour où arrive le vôtre. Et de compter le nombre de messages reçus. Comme si Facebook servait aussi à mesurer sa popularité. Personnellement, dans la vraie vie, j'ai horreur qu'on me souhaite mon anniversaire. Donc vous imaginez mon désespoir le jour où nombre de mes « connaissances » se sont signalées sur ma page personnelle.
Comment tromper Facebook tout puissant ? Facile, lui expliquer que l'on accuse un an de plus non pas demain, mais depuis la semaine dernière. Cette année, pour ne pas recevoir ces messages impersonnels et faussement hypocrites, la veille de la date fatidique, je me suis vieilli de sept jours. Et dans trois jours, je remettrai la bonne date. Pour les 360 prochains jours.
Ne me blâmez pas, ce petit jeu est innocent. Au moins moi, je ne me rajeunis pas de dix ans (voire plus) comme certains.
(Dans la vraie vie, j'ai reçu un cadeau merveilleux :
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mardi 27 septembre 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Votes primaires

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Pour la première fois de son histoire, la droite française se lance dans des primaires pour désigner son candidat à la présidentielle. De Gaulle doit bien ricaner dans sa tombe. Preuve que les idées de démocratie participative ne cessent de progresser, les chantres de l'homme providentiel se tournent aux aussi vers une désignation plus transparente.
Avec pas mal de risques. De scission dans un premier temps. On ne s'affronte pas durant deux mois pour se rabibocher trois jours plus tard en ayant oublié toutes les vacheries balancées en public. Si Juppé l'emporte, que vont faire les soutiens de Sarkozy, beaucoup plus nombreux que ceux du maire de Bordeaux ?
A l'inverse, Juppé battu osera-t-il se rallier au panache du maire de Pau et monarque du Béarn ? Autre difficulté en vue, la validité des résultats. Pas à cause de procurations douteuses (elles sont tout simplement interdites) mais par la volonté affichée de militants de gauche d'aller voter, juste pour faire barrage à l'ancien président. Il leur en coûtera deux euros, mais ils estiment que c'est le prix à payer pour éviter le retour de Nicolas Sarkozy, encore plus détesté à gauche depuis qu'il marche ouvertement sur les plate-bandes du Front national.
Résultats contestables aussi avec les votes probables de certains soutiens de François Hollande beaucoup plus machiavéliques. Eux, au contraire, vont se déplacer pour aider Nicolas Sarkozy à l'emporter, adversaire le plus à la portée de l'actuel président. Un sacré micmac pour désigner celui que tous les sondages donnent comme futur président de la République.

lundi 26 septembre 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Boostez votre moral


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Parfois, sans que l'on sache trop pourquoi, notre moral est au plus bas. Pas dans les chaussettes, encore plus profond, genre couloir de mine, noir, humide, sans fin. Le blues vous tombe dessus et plus rien ne va. Les enfants de la voisine crient : vous avez envie de les étriper. Votre collègue vous raconte sa soirée : mais pourquoi à moi et maintenant ?
Et même seul, les plus sombres idées vous assaillent. Une chape de culpabilité insupportable. Vos pires méfaits vous reviennent à l'esprit et hantent vos nuits devenues insomniaques et interminables. Pour contrer cette grande dépression, on peut solliciter les petites pilules du bonheur. A consommer avec modération bien évidemment. Il existe aussi des solutions plus simples.
Perso, quand plus rien ne va, je me débrouille pour trouver un ordinateur et je passe en boucle le clip « Busy Earnin' » du groupe Jungle. Toujours pas trouvé mieux pour me mettre en joie. Un ami m'a confié sa solution. Face à la noirceur de son existence, rien ne vaut une journée passée sur toutes les téléréalités disponibles de la TNT. On a forcément un peu plus d'estime de soi après une bonne dose de « Marseillais », « Anges » et autre « Revanche des ex ». Autre possibilité, se plonger dans un bon roman. On oublie son morne quotidien pour un autre monde, plus abouti et talentueux. Attention, très efficace sur le moment mais sans effet à long terme.
Reste la dernière solution radicale pour oublier son mal de vivre : la maladie d'Alzheimer. Plus de questions existentielles puisqu'on ne sait même plus que l'on existe. Mais les bas ne constituent-ils pas le fondement de tout le sel de la vie ?

dimanche 25 septembre 2016

DVD et blu-ray : "Cell Phone", impulsion fatale


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Stephen King, maître absolu du roman terrifiant, après avoir vendu des millions d'exemplaires de ses livres partout dans le monde, les fait fructifier en signant des adaptations au cinéma ou à la télévision. Un univers unique, qu'il renouvelle sans cesse malgré les années. Tout le monde se souvient de "Christine", la voiture possédée, ou du "Fléau", vaste roman de fin du monde transformé en une mini-série un peu trop édulcorée (tout comme "Ça"). Souvent c'est très réussi. Parfois un peu moins. "Cell Phone", film de Tod Williams sorti directement en DVD et blu-ray est dans la juste moyenne. Tiré du roman "Cellulaire" il met en vedette John Cusack (pas plus convaincant que d'habitude), Samuel L. Jackson (brillant, quel que soit le projet) et la jeune Isabelle Fuhrman déjà vue dans "Hunger Games" ou "Masters of sex").


Tout commence très vite. Un dessinateur de BD, Clay, en transit dans un aéroport, tente de joindre sa femme et son fils. Mais son téléphone est à plat. Bien heureux héros, car tout à coup, tous ceux qui avaient un smartphone à l'oreille deviennent fous furieux, massacrant les épargnés. La faute à une impulsion qui a reformaté les cerveaux des victimes. Ils deviennent des "phoners", autre appellation des zombies à la sauce King. Clay parvient à se réfugier dans le métro et fera équipe avec Tom (Samuel L. Jackson), un vétéran du Vietnam (utile quand on a décidé de descendre le maximum de Phoners avec des armes récupérées chez un membre de l'association "National Rifle Association"). La suite se déroule comme un classique film de survivants traqués par des meutes de zombies avides de chair fraîche. À la différence qu'ils ont une conscience commune, comme des insectes. Reste à trouver la reine…
Quelques personnages déjantés plus tard, Clay se retrouve au pied de l'antenne relais d'où est partie l'impulsion. Le réalisateur, sans doute indécis, a visiblement tourné trois fins différentes. Et comme il est généreux, on a droit aux trois dans les deux dernières minutes. En bonus, les classiques coulisses du tournage, avec notamment le maquillage du grand méchant digne d'une émission de Ciné FX...
"Cell Phone", Marco Polo Production, 14,99 euros le DVD, 19,99 euros le blu-ray.

Livres de poche : secrets inavouables et faces cachées


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Le CFR, consortium de falsification du réel, organisation secrète, agit sur tout. Antoine Bello imagine les manigances de ces hommes et femmes qui s'efforcent de maintenir une harmonie relative sur la planète en construisant des légendes dont l'humanité a besoin. Mais rien ne va plus dans ce monde de faux-semblants. Dernier volume de la trilogie comprenant déjà « Les falsificateurs » et « Les éclaireurs ».
« Les producteurs », Folio, 7,70 €

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Jonathan Kellerman s'associe à son fils, Jesse, pour signer un thriller particulièrement ambitieux. Une tête sans corps dans une maison abandonnée d'Hollywood. Sur le plan de travail de la cuisine, le mot « justice », gravé en hébreu. L'enquête est confiée à l'inspecteur Jacob Lev de la mystérieuse section des "Projets spéciaux". Paru précédemment sous le titre « Le Golem d'Hollywood », ce roman se prolongera en novembre avec « Que la bête s'échappe » au Seuil.
« Que la bête s'éveille », Points, 8,60 €

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Deenie et ses meilleures amies Lise, Gabby et Skye spont des adolescentes insouciantes. Un matin, Lise est prise d'une violente crise de convulsions. Ses amies aussi souffrent de ce mal étrange. La panique submerge petit à petit la communauté entière. Qui sera la prochaine victime de cette mystérieuse fièvre ? Le nouveau thriller de Megan Abbott, « Avant que tout se brise » vient de paraître aux éditions du Masque.
« Fièvre », Le Livre de Poche, 7,60 €


samedi 24 septembre 2016

BD : Ce cher Hubert chez les Grecs


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Il est des vieux héros qu'il fait toujours bon de retrouver. Sans doute par nostalgie. Ou dérision. Hubert Bonisseur de la Bath, alias OSS 117 en fait partie. L'espion français, imaginé par Jean Bruce, repris par son épouse dans quantité de romans dits de gare (populaires est plus adapté), après le cinéma renaît de ses cendres sous forme de bande dessinée. Gihef au scénario, Andrea Cuneo au dessin, reprennent les recettes simples des romans originaux. Hubert est beau, intelligent, toujours en avance d'un coup et très séducteur. Son acolyte, Enrique Sagarra, Catalan, est moins futé mais expert en maniement des armes. Quand on lui demande de faire le ménage, il nettoie plu que de raison... Dans ce second tomes, ils sont en Grèce, dans ces années 60 où la guerre Froide permettait aux espions de manger à leur faim. Parfaitement désuet, léger et sans prétention. A lire au second degré comme on redécouvre des films de série B de cette époque insouciante.
«OSS 117» (tome 2), Soleil, 11,95 €

vendredi 23 septembre 2016

BD : Dans les rues malfamées de Paris avec "L'apache et la cocotte"


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Au début du XXe siècle, « monter » à Paris était souvent la seule solution aux jeunes des campagnes françaises. Ange, Auvergnat bon teint, accumule les bêtises dans la ferme familiale. Obligé de quitter le pays, il monte à Paris se mettre sous l'aile d'un oncle, bougnat. Le gamin va découvrir un monde différent, avec ses codes, sa violence et ses interdits. D'entrée il tente d'intervenir dans une dispute dans la rue. Cléo, jeune prostituée, se fait houspiller par son souteneur. Il en sera quitte pour une bonne dérouillée. Stéphane Betbeder, dans cette scène clé, se fait rencontrer pour la première fois ses deux personnages principaux qui donnent son nom à la série « L'apache et la cocotte ». Ils se retrouveront, s'aimeront mais ne trouveront jamais la paix et le bonheur. Ange se transforme en petit truand, Cléo en favorite d'une courtisane de luxe, maladivement jalouse. Une plongée dans le passé parisien dessiné par Hervé Duphot.
«L'apache et la cocotte» (tome 1), Glénat, 14,50 €


DE CHOSES ET D'AUTRES : Gégé le Gaulois

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En plein débat sur l'importance de notre héritage gaulois dans l'identité nationale, un spécialiste de la question vient de rendre un avis tranché. Spécialiste, il le revendique : il a interprété à plusieurs reprises un des plus célèbres Gaulois qui soit : Obélix. L'omnipotent (à ne pas confondre avec impotent) Gérard Depardieu, en tournée de promotion en Italie pour son dernier livre intitulé "Innocent", s'insurge quand on lui demande s'il se sent toujours Français, lui qui détient désormais un passeport russe remis en mains propres par Poutine. Fureur de notre Gégé national : "Non, je suis un citoyen du monde. La France risque de devenir un Disneyland pour les étrangers, peuplé d'imbéciles qui font du vin et du fromage qui pue pour les touristes." Comme d'habitude avec l'inoubliable acteur des "Valseuses", c'est du lourd. Étonnant comme il arrive à se caricaturer tout seul. Car en dehors de ses activités cinématographiques, il est également producteur de vin, bouteilles qu'il vend d'autant plus cher par le simple ajout de son nom sur l'étiquette. Pour le fromage qui pue, il n'a pas encore trouvé le bon filon financier. Mais on lui fait confiance pour lancer une marque de camembert du style "Le Gégé, rond et à point" Quant à critiquer Disneyland, il ferait mieux de se renseigner. Le complexe touristique axé sur les héros américains n'est pas au mieux de sa forme. Par contre le Parc Astérix, en 2015, a vu sa fréquentation augmenter de 8 %. Alors oui, les Gaulois attirent plus les touristes étrangers que la souris aux grandes oreilles, mais faut-il s'en désoler ou saluer une réussite purement commerciale ?

jeudi 22 septembre 2016

BD : La guerre des inventeurs


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Nouvelle série très steampunk, « Les trois fantômes de Tesla » raconte la bagarre entre deux inventeurs de génie : Edison et Tesla. Marazano, le scénariste, a cependant pris beaucoup de libertés avec l'histoire officielle pour imaginer ce monde entre uchronie, guerre avec les nazis et inventions improbables. Dans un New York encore sous la menace des bombes allemandes et japonaises (nous sommes en 1942), Travis, jeune garçon très intelligent, s'installe avec sa mère, jeune veuve, dans un appartement triste d'un immeuble de Manhattan. Son voisin, vieux monsieur paranoïaque, l'espionne. Il a ses raisons, persuadé que des espions veulent l'enlever pour qu'il termine ses travaux sur une nouvelle énergie. Travis vit à côté de Tesla et va se transformer en relais d'une formidable machination avec robots, armures et autres objets volants très dangereux. Au dessin, Guilhem abandonne le trait rond du très classique style franco-belge (Zarla) pour un réalisme sombre dans lequel il excelle, comme son frère le très célèbre Christophe Bec.
«Les trois fantômes de Tesla», Le Lombard, 13,99 €


DE CHOSES ET D'AUTRES : Les failles de Bloctel

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Dès la première semaine de sa mise en service, je me suis inscrit à Bloctel, le service qui normalement empêche les sociétés privées de vous démarcher au téléphone. Effectivement, je reçois un peu moins d'appels non désirés. Moins, pas plus du tout. Car les filous ont trouvé l'astuce. "Non, je n'ai rien à vous vendre, c'est pour un sondage... » Ben voyons, "et la marmotte elle emballe le chocolat !" Dernier exemple en date hier matin vers 11 heures. "Bonjour Monsieur Litout, c'est la 'XXX' du meuble. J'ai quelques questions à vous poser. Non, ce n'est pas les impôts. Au niveau mobilier, quel serait votre prochain achat entre canapé, sommier ou lit ?" Au lieu de raccrocher très impoliment, ce que je fais 9 fois sur 10, je joue le jeu. "Un canapé". "Mais c'est un cri du cœur" me répond le commercial. "Et quel type de canapé, trois places, d'angle ? (...) Bon je note tout ça, j'espère que je ne vous ai pas trop dérangé. Peut-être que vous êtes sur le point d'aller travailler." Là, j'avoue avoir eu un moment de flottement. Je devine la question subsidiaire qui permet au vendeur d'en savoir un peu plus sur son client potentiel. Vendre un canapé à un travailleur, parfait. Alors que le chômeur ne pourra pas le payer. Pas le temps d'inventer une troisième hypothèse que mon interlocuteur a déjà raccroché. Peut-être aussi s'est-il douté que je le faisais marcher (je suis un piètre menteur) et que si je le dénonce à Bloctel, il risque une amende de 75 000 euros. Il devra amasser un sacré paquet de commission avant de pouvoir réunir la somme.

mercredi 21 septembre 2016

Cinéma : la cellule familiale éclatée de "Juste la fin du monde" de Xavier Dolan

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Xavier Dolan adapte une pièce de théâtre sur un huis clos familial. Acteurs époustouflants, dialogues hyper réalistes : on se reconnaît tous dans "Juste la fin du monde".


La distribution du nouveau film de Xavier Dolan en impose. Le réalisateur canadien a puisé dans le vivier des acteurs français "bankables" pour monter son projet d'adaptation de la pièce de théâtre de Jean-Luc Lagarce. On aurait pu objectivement craindre qu'il perde son authenticité face à ces grands comédiens, habitués à jouer d'une certaine façon et peu enclins à toucher à leur image de marque. Pas pour Nathalie Baye, déjà passée par tous les rôles, mais comment diriger Léa Seydoux (ex-James Bond girl), Vincent Cassel ou l'oscarisée Marion Cotillard ? Juste en leur demandant de respecter le texte et de se glisser dans la peau des personnages. Et surtout de suivre la direction de Xavier Dolan qui se révèle un très grand metteur en scène. Car rapidement, en découvrant les premières images de cette réunion de famille tendue, on oublie totalement le parcours des acteurs. Ne reste que le fils prodigue de retour au bercail pour une journée, la sœur rebelle, le frère jaloux et brimé, sa femme timide et effacée et la mère foldingue, nostalgique du passé et toujours amoureuse du père, le grand absent.
Dans le rôle du fils, Louis, revenu pour annoncer sa mort prochaine à ses proches, Gaspard Ulliel a sans doute la tâche la plus compliquée. Il doit dire sans parler, exprimer en étant de marbre. Ravalant ses larmes, repoussant l'échéance, il est conscient que sa réussite (il est un écrivain à succès) l'éloigne inexorablement de sa famille. Une famille qu'il a délaissé depuis 10 ans, comme honteux de leurs vies trop simples, trop primaires.
Plus que du théâtre filmé
Le film permet aux différents acteurs d'avoir leur scène, leur petit moment de gloire, en plus des réunions où, tous au complet, ils se gueulent dessus comme des chats énervés. Léa Seydoux, malheureuse dans sa province, complètement défoncée à l'herbe, est aussi triste qu'elle est belle. Louis aimerait l'aider. La prendre sous son aile. Mais c'est trop tard. Pour lui comme pour elle. Antoine le grand frère, sous des airs de violent compulsif, cache une profonde dépréciation personnelle. Il se persuade être le raté face à ce frère plus jeune mais si brillant. Même s'il se dévoile à un moment en expliquant que s'il est silencieux en société "Ce n'est pas parce que je sais écouter les gens. C'est parce que je veux leur donner l'exemple. Se taire". Quant à Catherine, la femme d'Antoine, elle semble avoir tout compris. "Vous en avez pour combien de temps ?" lâche-t-elle à Louis qui n'a encore rien dit.
"Juste la fin du monde", pour les détracteurs de Xavier Dolan, ne serait que du théâtre filmé. Certes, mais du grand théâtre avec d'excellents comédiens et une mise en scène parfaite. Juste de quoi expliquer le grand prix récolté à Cannes.
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 Xavier Dolan, réalisateur adulte
dolan, cotillard, lagarce, ulliel, seydoux, casselL'enfant terrible du cinéma canadien semble avoir franchi un cap dans sa carrière. Le formidable succès planétaire de "Mommy" ne lui a pas coupé l'envie de filmer. On sent cependant une moindre appétence à la nouveauté, à l'expérimentation. "Juste la fin du monde" est selon lui "Mon premier film en tant qu'homme". Cette pièce de théâtre lui a été conseillée par son actrice fétiche Anne Dorval en 2010. Mais il n'a pas accroché. "J'avais à l'égard de l'histoire et des personnages un blocage intellectuel qui m'empêchait d'aimer la pièce tant vantée par mon amie, explique-t-il dans des notes de productions. J'étais sans doute trop pris par l'impatience d'un projet ou l'élaboration de ma prochaine coiffure pour ressentir la profondeur de cette première lecture diagonale." Ce n'est que quelques années plus tard qu'il est parvenu à rentrer dans l'univers du dramaturge français, mort du sida en 1995 à l'âge de 38 ans. Pour l'adaptation, il a décidé d'être le plus fidèle possible aux textes de Lagarce : "Que l'on 'sente' où non le théâtre dans un film m'importe peu. Que le théâtre nourrisse le cinéma… N'ont-ils pas besoin l'un de l'autre de toute façon ?" Le résultat est remarquable, les deux mondes de Lagarce et de Dolan semblant se répondre à travers les années.

DE CHOSES ET D'AUTRES : Drapeaux

drapeaux,nice,foncia,scandale,polémiqueÉtrange pays que cette France qui n'ose plus afficher son patriotisme. Le 9 septembre dernier, un couple de retraités niçois reçoit une lettre du syndic de leur copropriété. Il leur est instamment demandé de retirer le drapeau tricolore planté dans leur jardin. Motif invoqué : "Les activités sportives estivales sont terminées". Cela empêchera ainsi "d'éviter tout débordement". Refus sec et net des propriétaires qui médiatisent illico l'affaire.
La vague d'indignation dépasse rapidement les frontières des seuls réseaux sociaux. Depuis, la société a présenté ses plus plates excuses mais des interrogations restent sur la véritable motivation de cette injonction. Tout d'abord, il était faux de prétexter la fin des activités sportives puisque la lettre est arrivée en pleins jeux paralympiques. Pas du tout sympa pour ces handicapés courageux qui eux aussi, espèrent un soutien de la population à propos de leurs performances d'autant plus méritoires. Mais surtout quels sont les "débordements" redoutés par le seul fait d'arborer un drapeau français ? Voilà quelques mois, le gouvernement demandait à chacun d'afficher les couleurs nationales aux fenêtres et balcons en signe d'hommage aux victimes des attentats terroristes. Certains y sont encore accrochés.
Enfin, comment ne pas comprendre que ce drapeau justement, demeure le plus beau symbole pour honorer la mémoire des 84 victimes de la Promenade des Anglais de même que celles des précédents, innocents fauchés par la folie humaine.

mardi 20 septembre 2016

Rentrée littéraire : La cuisine à trois des "Cannibales"

Échanges de lettres entre une mère, son fils et la maîtresse de ce dernier. Succulent trio animé par Régis Jauffret.

Petit bijou de style et d'érudition, « Cannibales », roman épistolaire de Régis Jauffret, dans la première liste du Goncourt, désarçonne dans sa forme. Pas de description ni de dialogues, les 180 pages sont constituées d'une suite de lettres que les trois personnages principaux s'envoient chronologiquement. Noémie, la première, écrit à Jeanne, la mère de son amant Geoffrey. Elle lui explique pourquoi elle a préféré rompre avec cet architecte de trente ans son ainé. La mère, furieuse dans un premier temps, se laisse séduire par les lettres légères et très personnelles de la belle Noémie. Au point qu'on a l'impression que la mère tombe à son tour amoureuse de cette jeune artiste peintre. Jeanne ne se prive pas de donner des conseils à la jeune femme « Un dernier mot : aimez. L'amour est une picoterie, une démangeaison dont on ne saura jamais si le plaisir du soulagement que nous procure la caresse de l'amant vaut les désagréments de son incessant prurit. » Noémie, de son côté, est bien consciente que Geoffrey souffre de sa rupture. Elle le raconte sans fioritures à sa génitrice. « Avec moi, de l'amour il (Geoffrey) en a peut-être eu le goût sur la langue. C'est ça le chagrin, le souvenir d'un instant défunt. » La poésie, la grâce et la beauté s'invitent souvent dans les lettres des deux femmes. Comme si au calme face à leur page blanche elles parvenaient à merveille comprendre le sens du monde.
A la broche
régis jauffret,cannibales,lettres,seuilMais elles dérapent aussi parfois. Une fois proches, elles se délectent à imaginer une mort violente pour ce Geoffrey qui, au final, les aura toujours un peu déçu. On comprend alors le titre du roman, « Cannibales », quand Noémie s'imagine cuisiner son cadavre. « Après avoir salé et poivré sa dépouille, tenant chacune une extrémité du manche sur lequel nous l'aurons empalé, nous le ferons griller à la broche au-dessus d'un feu de sarments de vigne et de bois d'olivier. Nous pilerons ses os dans un mortier afin de pouvoir nous repaître de sa moelle montée en mousseline avec un kilo de bon beurre. » Moins glamour cette obsession, qui s'achèvera en un étrange barbecue.
« Cannibales » de Régis Jauffret, Seuil, 17 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Vote à la russe

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Élections législatives en Russie ce week-end. Les premiers sondages donnaient seulement 44 % au parti de Vladimir Poutine. Mais une fois le dépouillement terminé, Russie unie explose tous les pronostics avec plus de 54 % des votes et une majorité écrasante à la Douma.
Pour une fois, les instituts de sondage n'ont pas tout faux. Le score du parti au pouvoir est très certainement faussé par quelques petites fraudes de-ci de-là. Enfin, le qualificatif de "petites" pour désigner ces exactions paraît faible. Des activistes russes ont judicieusement placé des webcams dans certains bureaux de vote. Les vidéos diffusées depuis s'avèrent édifiantes. La fraude est massive et jamais l'expression "bourrage d'urnes" n'aura été autant justifiée. À côté, les chaussettes de Perpignan restent pets de lapins.
Plus étonnante, l'identité des fraudeurs. Des dames tout ce qu'il y a de plus sérieuses et propres sur elles, chargées de superviser le scrutin. Sur l'une des vidéos, on aperçoit la fraudeuse enfourner des dizaines de bulletins de vote, cachée des regards par trois autres employés. Sur une autre, la fraudeuse saisit une liasse de bulletins, puis la cache quand un électeur arrive. Dès qu'il a tourné le dos, elle reprend les bulletins et les glisse dans l'urne en quelques secondes, toujours à l'abri des regards grâce un complice interposé. Malgré ce déluge de preuves le résultat des élections a peu de chance d'être remis en cause. Simplement, le pouvoir russe aura intérêt à mieux "protéger" les bureaux de vote en 2018 pour la présidentielle et la réélection inéluctable de Poutine à son 4e mandat.

lundi 19 septembre 2016

Rentrée littéraire : Sadorski, le pire des salauds

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Pour raconter l'occupation allemande, Romain Slocombe n'y va pas par quatre chemins : il se met dans la peau des pires salauds et raconte à la première personne leurs motivations nauséabondes. Après l'écrivain dénonciateur de juifs dans « Monsieur le commandant », place à Léon Sadorski, inspecteur de la police française, spécialisé dans les renseignements généraux et plus spécialement la surveillance des Juifs. Sado pour les collègues, vénère le maréchal Pétain et collabore avec la Gestapo. Aussi quand il est arrêté un matin et conduit à Berlin pour subir plusieurs jours d'interrogatoires il ne comprend pas du tout. Il se retrouve dans la peau des ces « sous hommes » qu'il aime malmener au quai des Orfèvres.
Le bourreau dans le rôle de la victime, c'est l'essentiel de la première partie de ce roman policier historique, sélectionné dans le première liste du Goncourt. La suite se déroule à Paris, Sadorski devra retrouver une de ses anciennes maîtresses suspectée d'activité antinazis.
Un roman témoignage, aux scènes parfois dures, mais qui reflètent l'époque. En préambule, l'auteur et l'éditeur préviennent ne pas « cautionner les propos tenus par le personnage principal ». Car Sadorski, effectivement, est le pire des salauds.
« L'affaire Léon Sadorski », Romain Slocombe, Robert Laffont, 21 €

De choses et d'autres : Rayane !!!

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Ce samedi, sous mon autre casquette de critique cinéma, je me rends à l'avant-première de Tamara, un film adapté d'une BD de Zidrou et Darasse. Série que j'apprécie depuis des années, les affres au quotidien d'une jeune fille un peu enrobée. Arrivé dans la salle, je me me sens pris à un guet-apens. L'assistance (plus de 150 personnes) est composée à 80 % d'adolescentes. De 7 à 16 ans, elles papotent bruyamment en se montrant des photos sur leurs smartphones. Et régulièrement, l'une ou l'autre bondit sur son siège, se tourne vers le fond de la salle en criant « voilà Rayane ! »
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J'ai beau être à l'écoute des modes, tenter de me tenir au courant des dernières nouveautés, je passe forcément à côté de certains trucs. Le phénomène Rayane Bensetti par exemple. Ce jeune acteur français interprète Diego dans le film, le petit ami de Tamara. L'archétype du beau gosse. Agitées avant qu'il n'arrive, lorsqu'il fait son entrée, bondissant, le fan-club se déchaîne. Les flashes crépitent. Et ce n'est que le début. La traditionnelle séance de questions se transforme en foire d'empoigne à selfies. Une marée humaine de gamines surexcitées se précipite sur la scène. Pour approcher leur idole elles jouent des coudes, poussent, trépignent. Même face à la première ligne de l'Usap elles fonceraient sans crainte.
Rayane, depuis sa victoire à « Danse avec les stars », a acquis une énorme popularité. Les quelques cinéphiles venus voir le film ont dû patienter plus de 35 minutes avant de découvrir les première images, les dernières admiratrices s'accrochant au cou de Rayane malgré l'extinction des lumières. Mais au final, le film est excellent.

dimanche 18 septembre 2016

DVD et blu-ray : Apprentissage dans les années 30 au "Café Society" entre New York et Los Angeles


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Woody Allen est un grand cinéaste. Très âgé aussi. Il semble vivre un peu dans le passé, comme porté par une époque révolue, qu'il n'a même pas connu mais qui semble encore et toujours l'inspirer. "Café Society" se déroule dans les années trente, entre New York et Los Angeles. La grisaille et l'intelligence d'un côté des USA, le soleil et la superficialité de l'autre. Pour montrer l'opposition entre ces deux mondes, les deux faces d'un même pays écartelé, Woody Allen place sa caméra dans les pas de Bobby (Jesse Eisenbeg), jeune Juif lassé de l'étroitesse de sa vie entre une mère étouffante, un père bijoutier, une sœur trop idéaliste et un frère gangster.


Il s'envole donc pour Los Angeles se placer sous les bons offices de son oncle Phil (Steve Carell), agent de stars du cinéma. Simple coursier dans un premier temps, Bobby monte un peu dans l'organigramme pour passer à la relecture de scénarios. Surtout il tombe sous le charme d'une belle Californienne. Il s'attendait à succomber aux charmes d'une star du cinéma mais finalement c'est une simple secrétaire, dans l'entreprise de son oncle, qui le fait chavirer. Mais Véronica, alias Vonnie (Kristen Stewart), a le cœur déjà pris. Depuis un an elle sort avec un homme marié qui ne cesse de lui promettre qu'il va quitter sa femme… sans jamais le faire.
La seconde Véronica
Un soir, elle sonne en pleurs chez son "ami" Bobby et lui confie que son amant vient de rompre. Bobby la réconforte et à force d'attentions et de gentillesse gagne son amour. Une simple bluette le dernier Woody Allen ? Ce serait mal connaître le réalisateur américain expert en retournement de situations. Le conte de fée tourne au cauchemar quand Vonnie apprend que son ancien amant vient de divorcer. Entre le riche Californien et le petit juif new-yorkais sans grande envergure son choix est vite fait. Même s'il s'agit, selon elle, d'une décision uniquement dictée par l'amour. De retour à New York, Bobby, pour tenter d'oublier sa jolie Vonnie, épouse une ravissante blonde qui, comme par hasard, s'appelle, elle aussi, Véronica. Avec son frère gangster il ouvre une boîte de nuit sélect, devient un ponte des nuits de Manhattan. Et un jour, Vonnie débarque…
« Café Society" n'est certainement pas le meilleur film de Woody Allen, mais on retrouve son style dans quelques portraits hilarants (la mère de Bobby, son frère…) et surtout une certaine nostalgie de ces années folles où certes tout était plus lent mais où aussi tout était possible aux audacieux et originaux.
Présenté hors compétition en ouverture du dernier festival de Cannes, "Café Society" n'a malheureusement pas le moindre bonus dans ses versions DVD et bluy-ray alors que les cinéphiles serraient ravis de voir le maître sur un plateau de tournage ou mieux, lors de l'écriture du scénario. Dommage.
"Café Society", Studiocanal, 19,99 €

samedi 17 septembre 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : L'autre rentrée des classes

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Pourquoi, une fois ses études terminées, se sent-on obligé de procréer ? N'oubliez pas que dans quelques années ce gentil bébé gigoteur devra lui aussi aller à l'école. Et vous, le père ou la mère vous ferez un devoir de l'accompagner et remettre les pieds dans cette géhenne qu'est l'éducation nationale. Lionnel Sellem vous prévient dans ce charmant petit recueil d'humour noir intitulé « Au secours, je suis parent d'élève ! ». Durant une année complète, de septembre à juin, on suit les déboires de ce papa catastrophe. Si au début il est enthousiaste (« La maîtresse est une bombe ! ») il déchante rapidement. Et devra même se faire porter pâle à la sortie piscine pour cause de régime raté et de ventre proéminent. Très vite, il aura aussi l'occasion de découvrir son enfant sous un jour nouveau et notera, dès la mi-septembre « Ne plus tenir la main de Paul sur le trajet de l'école. C'est un grand maintenant, il a trop honte, il a 5 ans. » Tout se termine en apothéose avec la kermesse de l'école et sa participation à la tenue du stand des poissons rouges... Quelle année d'enfer !
« Au secours, je suis parent d'élève ! », éditions J'ai Lu, inédit, 6 euros

vendredi 16 septembre 2016

BD : La guerre n'est pas zen dans "La déconfiture" de Rabaté

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Pascal Rabaté, après avoir réalisé quelques films, revient à ses premières amours, la bande dessinée. Sans détour, il aborde de front "La déconfiture" de l'armée française en juin 1940 lors de l'avancée des troupes allemandes. Cette débandade ou déculottée, on la vit à travers l'expérience de Vildegrain, soldat du 11e régiment. A moto, il tente d'éviter les balles des mitraillettes des Stukas. Laissé à l'arrière, il ne parvient plus à retrouver son régiment. Une errance sur des routes inhospitalières, remplies de cadavres, d'autres soldats perdus avec les hordes de "boches" aux fesses. Un récit clinique sur la faillite d'un pays, sa résignation. Dessiné simplement, sans grands effets ni recherches de vérité historique, la force de certaines cases vaut largement celles de Tardi sur la précédente guerre. Dur, mais authentique.
"La déconfiture" (tome 1), Futuropolis, 19 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Rentrée médiatique tronquée

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Yann Barthès sur TMC, Thomas Thouroude sur France 2, Yves Calvi sur LCI, Victor Robert aux rênes du Grand Journal : la rentrée médiatique, vaste jeu de chaises musicales, est pourtant incomplète cette année. Normalement, chaque soir, entre 18 heures et 19 heures, le grand bateleur des news, le roi du direct, du rire sardonique et du dentier éclatant de blancheur devait animer une session d'informations sur Cnews, la nouvelle Itélé. Heureusement pour Cyril Hanouna et ses concurrents, ce monstre de travail, abonné aux audiences exponentielles et aux scoops de dernière minute, a déclaré forfait à l'ultime limite. Pas de son plein gré. Une triste histoire avec la justice pour des castings gays et vaguement pornos. Jean-Marc Morandini (même les plus isolés du fin fond de la montagne l'auront reconnu dans ce portrait bourré de superlatif, comme ses émissions) attend toujours de savoir si les plaintes de plusieurs comédiens pour « corruption de mineur » et « harcèlement sexuel et travail clandestin » vont le conduire devant les prétoires ou lui rendre ses fauteuils à Europe1 et Cnews, blanchi de tout soupçon (comme ses dents).
En attendant, terminée la ration de Morandini en direct. Il n'y a bien que Nicolas Canteloup qui se permette de l'imiter dans sa chronique matinale. Mais on devine des rires jaunes dans le studio. Les fans doivent se contenter de « Crimes », émissions enregistrées sur NRJ12. En attendant son nouveau concept qu'il trépigne de lancer : « Déclaré innocent ! » 

jeudi 15 septembre 2016

BD : LE ZEN AU BORD DE LA ROUTE


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Quand la BD décide d'investir le créneau du "livre de développement personnel", on peut s'attendre au pire. Pourtant "Le jour où le bus est reparti sans elle" écrit par Béka (Les rugbymen) et dessiné par Marko (Les Godillots) parvient à émouvoir sans mièvrerie. Clémentine, jeune femme en quête de sagesse et d'harmonie, décide de participer à un séminaire de méditation en groupe. En chemin vers le domaine où tous vont tenter de découvrir les voies de la sagesse, ils font un arrêt dans une épicerie. Clémentine va aux toilettes. Quand elle en sort, le bus est parti. Seule, abandonnée, sa confiance en elle en prend un sacré coup. Mais il y a l'épicier qui se révèle beaucoup plus intéressant. Subtil, parfois amusant, illustré de contes zen, cet album regonflera automatiquement votre joie de vivre.
"Le jour où le bus est reparti sans elle", Bamboo, 15,90 €


DE CHOSES ET D'AUTRES : Ciotti au garde à vous

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Ah le coquin ! Éric Ciotti, un des fervents défenseurs de la droite dure, réclame le retour du service militaire obligatoire. Il sait de quoi il parle... puisqu'il ne l'a pas fait.
Avant d'être député des Alpes-Maritimes, il a été jeune. Et comme cela date d'il y a quelques années, il devait comme tout jeune Français effectuer son service militaire. A 25 ans, il a déjà repoussé au maximum son incorporation. Le Canard Enchaîné paru hier prouve, document à l'appui, qu'il a tenté d'échapper à ces dix mois sous les drapeaux. À l'époque il était assistant parlementaire de Christian Estrosi. Ce dernier a sollicité François Fillon qui a donc écrit à Jean-Pierre Chevènement, ministre de la Défense de l'époque, pour exempter le jeune Ciotti. Un passe-droit sans effet car si finalement le futur député de droite échappe au devoir national, c'est pour "soutien de famille", son épouse attendant un enfant.
Cette petite histoire est pleine d'enseignements. Sans s'étendre sur le double langage des politiques, du style : "Je suis pour le service militaire mais personnellement j'ai magouillé pour ne pas le faire", on apprend que Ciotti, assistant parlementaire puis élu, n'a jamais non plus véritablement "travaillé" dans ce secteur privé, pourtant glorifié par son camp. Il en a sans doute été exempté comme pour sa carrière militaire.
Autre bizarrerie, sa réaction publiée par le Canard : il nie toute demande de piston. Mieux, il pense que les initiatives d'Estrosi et de Fillon partent d'un bon sentiment et ont été réalisées dans son dos. "À l'insu de mon plein gré !" Ciotti et Virenque, même combat.

mercredi 14 septembre 2016

Cinéma : Victoria, femme à problèmes

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Virginie Efira interprète "Victoria", jeune femme dévorée par son métier d'avocate, délaissant ses enfants ainsi que toute envie de romantisme et par là même sa vie sexuelle.


Si certains films français ont la mauvaise habitude de commencer mollement, ce n'est pas le cas de "Victoria" de Justine Triet. Dès les premières minutes on est emporté dans la tornade de la vie de cette avocate jouée par Virginie Efira. Toujours en train de courir, dépassée par les événements, elle se fait virer par son baby-sitter (elle a deux petites filles qu'elle élève seule depuis le départ de son ex, écrivain maudit), en trouve une de rechange (une amie bonne poire) à la dernière minute pour aller à un mariage. Là elle boit trop, se fait draguer par un scientifique assommant et doit subir les jérémiades de son meilleur ami, Vincent (Melvin Poupaud) en pleine rupture avec sa petite amie. Elle croise aussi Sam (Vincent Lacoste), un de ses anciens clients, dealer d'occasion, à la recherche d'un stage dans le milieu juridique. Dix premières minutes où le spectateur est scotché à son siège, subissant cette vie de folie. Pourtant Victoria s'ennuie. Profondément, abominablement, désespérément. Virginie Efira est parfaite en executivewoman, sans cesse occupée mais à la vie triste et creuse. Dans ce mariage, tout le monde fait la fête autour d'elle, mais cela n'a plus prise sur sa réalité. On la devine torturée par son existence vaine. Bien des questions se bousculent dans son inconscient. Elle tente de les mettre à plat lors d'une psychanalyse. Ou lors de séances de voyance. Mais n'est-ce pas au final pour trouver les mêmes réponses ?
La vie de Victoria bascule à la fin du mariage. La petite amie de Vincent revient sur la piste de danse le ventre en sang. Elle l'accuse de l'avoir poignardé après avoir fait l'amour dans les toilettes. Garde à vue, interrogatoires… Vincent veut absolument que Victoria la défende. Une grave erreur qui risque de plomber sa carrière en robe noire.
Film sucré-salé
Le film utilise ce procès en fil rouge, avec notamment le témoignage du chien de la victime (lire ci-contre). Mais la vie de Victoria est affreusement compliquée. Son ex dévoile ses turpitudes passées dans un blog littéraire. Nouveau procès. Mais dans le rôle de la victime cette fois. Sans baby-sitter, elle se décide à recruter Sam. Et comme il est à la rue, elle l'héberge dans le salon. Il dort dans le canapé quand la jolie blonde, reçoit les hommes dragués sur une application de rencontre. Et ce qui devait arriver arriva : Victoria craque.
S'inspirant des grandes comédies américaines, la réalisatrice dont c'est le second film réussit la prouesse de rendre sympathique cette avocate un peu fofolle mais surtout totalement irresponsable, plus que borderline. Sa chute a dans les trente-sixièmes dessous fait basculer le film dans le mélodrame.
Tel un plat sucré-salé, "Victoria" doit se déguster sans a priori ni dogmatisme, accepter simplement ce contraste de sensations, de situations, un mélange des genres qui fait phosphorer le cerveau au même titre que les papilles d'un gastronome.
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 Un chien à la barre

victoria,justine triet,virginie efira,vincent lacoste,procès,chien"Victoria" reste avant tout un portrait de femme. Trop active, débordée, lassée des échecs sentimentaux, obligée de se forger une carapace pour ne pas se faire engloutir par un métier encore dominé par les hommes. On rit pourtant beaucoup durant le film de Justine Triet. Pas aux dépens de l'héroïne, mais lors du procès de son ami accusé d'avoir poignardé sa petite amie. L'agression s'est déroulée dans les toilettes à la fin d'une soirée de mariage où ils étaient tous invités (Victoria compris). C'est parole contre parole car le personnage interprété par Melvin Poupaud affirme que sa maîtresse s'est auto poignardée après qu'il lui a annoncé son intention de la quitter.
Il y a pourtant un témoin de la scène : le chien de la victime. Le juge d'instruction décide de tester les réactions de l'animal en présence de Vincent. Un expert vient à la barre, avec l'animal, pour expliquer que ce dalmatien réagit quand il est face à une personne qui fait du mal à sa maîtresse. Loufoque ? Pas du tout car la réalisatrice a confié s'être inspirée d'un véritable fait divers. "Celui d'une femme qui a été retrouvée pendue et de tests pratiqués sur son dalmatien pour évaluer comment il réagissait à l'odeur de ses proches accusés."
Un procès dans le film marqué par le règne animal, le dénouement étant finalement fourni par une preuve irréfutable apportée par… un chimpanzé.

DE CHOSES ET D'AUTRES : La maigre et le gros

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On parle beaucoup de sexisme, mais un autre fléau passe trop souvent inaperçu : le racisme anti-gros. La semaine dernière sur le plateau du Grand Journal de Canal +, Jonah Hill est invité pour parler de son nouveau film, "War dogs", dans toutes les salles dès aujourd'hui (lire en page cinéma).
Jonah Hill fait partie de ces acteurs au physique atypique. Comique talentueux, capable d'endosser toutes les personnalités, ses rondeurs et son esprit caustique le transforment en l'un des comédiens les plus en vue d'Hollywood. Quand je dis rondeurs, d'autre pensent "gros, adipeux, obèse... » Opinion sans nul doute ancrée dans le crâne de la nouvelle Miss Météo, censée faire rire avant de décrire le temps du lendemain. Grande, maigre et forcément belle (selon les canons de beauté des miss) elle manque surtout de tact. "J'ai un fantasme avec vous Jonah, explique Ornella Fleury. Ça serait qu'on se retrouve tous les deux dans une chambre d'hôtel le soir. On discute, vous me faites rire, vous me faites beaucoup rire, et là, d'un coup, vous ramenez vos potes DiCaprio et Brad Pitt... Et vous partez." Traduit en langage clair de gravure de mode : "je veux bien que le petit gros me fasse rigoler. Mais pour coucher je veux du beau, du musclé, du classe. Comme moi quoi... »
Mesquin et prétentieux. Réponse du comédien, un peu blessé quand même : "Je ne suis vraiment pas venu pour rien. D'être ridiculisé par la miss météo locale, ça fait plaisir... Merci beaucoup." Elle a beau s'être excusée le lendemain, nous, les gros, on s'en souviendra !

mardi 13 septembre 2016

Rentrée littéraire : "Le sanglier", symbole d'une journée de merde


Réveillés aux aurores, Christian et Carole vont vivre une véritable journée de merde. Ce samedi matin, ils doivent aller à la ville déposer un chèque et faire des courses. Un couple assez dépareillé, marqué par la vie. Christian, grand angoissé, travaille dans une scierie. Il habite dans une vieille bicoque loin, très loin d'un petit village. Carole a tout plaqué pour le retrouver. Avant tout le monde elle a senti venir la mode des vêtements vintage. Après achat dans des friperies, elle les "customise" et les vend sur le net. Ils ne roulent pas sur l'or, s'aiment tant bien que mal, et cette journée de merde ressemble en fait à toutes les autres. Myriam Chirousse (photo ci-dessus), dont c'est le troisième roman, s'approche d'un naturalisme extrême. Elle décrit la route sinueuse, les centres commerciaux sans personnalité et les angoisses du quotidien. Christian se sent agressé par l'extérieur. Carole au contraire est indifférente, persuadée que personne ne la remarque. Leur relation est résumée dans cette tirade de la jeune femme : "Dans le fond on est pareils. Peut-être qu'en apparence on ne le dirait pas, toi qui t'énerves et moi qui pleurniche, mais aucun n'arrive à se contrôler. Ça nous prend et on ne sait pas quoi faire. Mais faut qu'on essaie de se maîtriser, qu'on fasse un effort pour que ça ne se passe plus comme ça." Et pour terminer, un sanglier fera son apparition...
"Le sanglier" de Myriam Chirousse, Buchet-Chastel, 14 €.

DE CHOSES ET D'AUTRES : Assos en fête

Ce week-end, dans mon village, les associations étaient à la fête. Un "Forum" chargé de présenter aux visiteurs d'un jour la diversité des activités culturelles ou sportives proposées par le foisonnant tissu associatif. En déambulant dans l'allée centrale sous un soleil de plomb, entre le maire qui serrait des mains et l'animateur chargé de rendre joyeuse et informative cette après-midi, je me suis senti bien petit face à ces passionnés, capables de sacrifier un samedi et surtout nombre de journées et de soirées. Du rugby féminin à l'escrime en passant par la broderie ou les danses de salon, le choix était vaste. Le café philo a choisi pour le thème de sa rentrée un sujet d'actualité "Fanatisme et tolérance". Espérons que d'ici le rendez-vous, le 24 novembre à la Brasserie de l'Europe, les fanatiques n'aient pas apporté un peu d'eau au moulin de notre limite de tolérance. Les judokas, par besoin d'espace, sont restés dans leur salle attitrée, à une dizaine de mètres du forum. Les majorettes, courageuses, défilaient devant les badauds, transpirant dans leurs bottes et corsets serrés. Je les ai plaints. Et pour illustrer immédiatement cette fameuse tolérance, le stand du Krav maga faisait face à celui du Taï chi. D'un côté une technique de combat redoutable, de l'autre le must de la relaxation chinoise. Le ying et le yang. Mais tous se retrouveront certainement les 12 et 13 octobre chez les donneurs de sang, toujours en quête de bonnes volontés pour sauver des vies. Sans nul doute la meilleure des façons de donner un peu de sa personne.

lundi 12 septembre 2016

BD : Le zen comme religion d'état dans "Karma City" de Gabrion


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Bienvenue dans Karma City, la ville où on ne peut entrer que si son karma est positif. Dans ce futur proche, après une catastrophe (la vague), des scientifiques ont mis au point des machines capables de mesurer son karma, soit le "baromètre en temps réel de sa santé mentale et de son état psychique". Cela ressemble un peu au monde de 1984, beaucoup de policiers pour contrôler papiers et état d'esprit. Autour de Karma City, une zone grise et, encore plus loin, les zones barbares. Une jeune chercheuse en archéologie karmique revient de la zone grise. Elle passe les barrages et sur la route sa voiture plonge dans un ravin. Victime d'un AVC foudroyant. Rien de naturel pour l'inspecteur Napoli qui fait équipe avec la jeune et brillante Kate Cooper, un peu trop psychorigide à son avis. Une enquête policière classique se greffe sur cette réflexion sur la recherche du bonheur. Mais peut-on encore parler de bonheur quand il est imposé ? Découpé comme un comics par grands chapitres d'une trentaine de pages, cet album au trait sombre et réaliste embarque le lecteur dans un cauchemar encore plus horrible qu'il n'y paraît. Distrayant tout en étant très instructif : un des albums les plus originaux de cette rentrée.
"Karma City" (tome 1), Dupuis, 20,50 €


DE CHOSES ET D'AUTRES : « Ké ! Ké ! Ké ! Arglll... »

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"Je regrette d'avoir acheté ce truc !" L'aveu, entre deux quintes de toux, est sans appel. Depuis trois jours, mon épouse est malade. Un bête refroidissement contracté alors qu'elle m'accompagnait à une visite... chez le médecin. De la salle d'attente hyper climatisée au bureau du toubib, on comptait bien 15 degrés de différence. Situation idéale pour lui obstruer le nez, la faire tousser et cracher ses poumons.
Samedi, direction la pharmacie. La responsable de l'officine lui conseille un produit fort et efficace . De retour à la maison, elle lit la notice et découvre une méthodologie pour le moins étrange. "Se placer devant un lavabo, renverser la tête en arrière et faire couler le produit dans une narine. Respirer par la bouche en prononçant de façon répétée la syllabe "ké"". "Ké" ? Kézaco ? Bonne élève, elle s'exécute. La scène vire au surréalisme. Ma chérie, consciencieusement placée devant l'évier de la cuisine, se remplit la narine et tente de prononcer le mot magique. Au bout de trois "ké", elle manque de s'étouffer, crache tout par la bouche et les narines en poussant un râle de fin d'existence. Elle tente l'autre narine. Encore moins concluant car, sans pitié, j'éclate de rire. Rire contagieux. Ses "ké" se terminent dans un fou rire entre crachats et reniflements.
Le pire ? Elle n'est pas guérie. Oublié le "ké", place aux inhalations d'huile essentielle d'eucalyptus. En silence et sous un torchon. Moins marrant mais plus efficace.
En bonus, du "Ké ! Ké ! Ké !" en live...

dimanche 11 septembre 2016

BD : Un réactionnaire bien sympathique

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Marié, père de famille, Morgan Navarro a le malheur de ne côtoyer que des bobos, dangereux extrémistes de gauche et même, le pire parmi la lie de l'humanité avec qui il doit partager l'air qu'il respire : des féministes, lesbiennes, vegan et tatouées. Morgan Navarro, on l'a compris, n'est pas un homme de progrès, ouvert d'esprit. Sous sa calvitie bonhomme se cache un véritable réactionnaire, nostalgique du passé, celui de Pompidou, pas de Mitterrand. Il transforme ses colères et indignations en histoires courtes publiées sur la plateforme du Monde (Le Figaro doit se mordre les doigts). Cette opposition entre des hommes et femmes humanistes et partageurs et Morgan, indécrottable pessimiste, persuadé que le monde court à sa perte, se révèle un ressort comique inépuisable. Et tout le paradoxe de cette BD, au trait classique cela va de soit, est que le réac reste sympathique. Car il a conscience de ses dérives, pour preuve il se sent sans cesse obligé de demander à ses potes d'origines maghrébines s'il est raciste. La réponse, tout en lui faisant un peu honte, le rassure. Paradoxe d'un homme mal dans son temps mais qui n'a jamais perdu le sens de l'autodérision. Preuve au final, qu'il n'est pas si réac que cela finalement...
«Ma vie de réac", Dargaud, 17,95 €


DVD : "Eperdument", une détenue modèle et un directeur amoureux


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Sur le papier, la distribution a de la gueule : Guillaume Gallienne et Adèle Exarchopoulos réunis, ce sont deux César qui se donnent la réplique. Le thème du film de Pierre Godeau a de plus l'avantage d'être tiré d'un fait divers récent qui a fait couler beaucoup d'encre. Le résultat n'est pas transcendant, la faute à un trop grand classicisme et une retenue dans le jeu qui vire parfois au presque faux.

Mais il a l'excuse d'être un premier film. "Éperdument" est l'histoire d'amour impossible entre une détenue et le directeur de la prison. Anna, avant son procès (le film ne dit jamais de quoi elle est accusée, mais on apprend au détour d'une conversation avec son avocate qu'elle risque dix ans de réclusion criminelle), est transférée dans une petite prison pour femme.
Amour impossible
Jean y règne en maître absolu. Ce père de famille, marié à une surveillante (affectée dans une autre prison), essaie d'être juste. Mais quand il croise le regard d'Anna, tout son monde s'écroule. Un amour fou naît entre ces murs froids. Anna va elle aussi se raccrocher à cet homme qu'elle désire. Au mépris de toutes les lois, ils vont mener une relation secrète, à l'intérieur même de la prison. Anna sera affectée au service général, une sorte d'administration composée de détenues, directement sous les ordres du directeur. Pratique pour passer de longues heures à deux dans la salle informatique ou pour la convoquer afin de faire le ménage dans son bureau. La romance ne reste pas secrète. Dénoncé par une détenue rancunière, Jean est mis à pied, jugé, condamné. Et dans le film, comme dans la réalité, en plus de perdre sa femme et sa fille, il sera rejeté par la belle Anna dès qu'elle sera remise en liberté.
On retiendra surtout de ce film carcéral la performance d'Adèle Exarchopoulos. La jeune actrice, découverte dans "La vie d'Adèle" s'est fortement impliquée dans ce rôle, passant de longues semaines en compagnie de véritables détenues pour être la plus juste possible. Le DVD offre en bonus un making of centré sur le décor, la prison de la Santé.
"Éperdument", Studiocanal, 16,99 €

samedi 10 septembre 2016

BD : Dans les griffes du chat "Enragé"

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Remarquable roman graphique de Nicolas Otero, 'Enragé' est la vie d'un enfant, contaminé par la rage après l'attaque d'un chat Au Maroc. Liam, de retour en métropole, va se transformer, perdant de son humanité à chacune de ses crises de rage. Entre fantastique, recherche de soi et explication médicales sur une maladie tombée dans l'oubli, cet album de plus de 120 pages est d'une maîtrise graphique plus que bluffante.
"Confessions d'un enragé", Glénat, 25 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Julie jolie

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Contrairement au titre très provocateur de Libération hier, François Hollande ne plaisante plus. "Pépère se réveille" constate le journal en Une. Erreur, il entre en campagne, tout simplement. Un discours pendant lequel il a parfaitement montré sa différence avec tous ses challengers. Avec en plus un atout dans sa manche, préservé le plus longtemps possible : Julie Gayet.
S'il ne démord pas de sa ligne de conduite de refuser tout mélange entre vie publique et privée, ce n'est plus le cas pour elle. Julie Gayet, sans grande actualité culturelle à promouvoir (son dernier film, "C'est quoi cette famille" est sorti en août) se retrouve cette semaine à la Une de Paris Match et du Parisien Magazine. Motif : elle s'investit totalement dans la campagne contre le sexisme. Une bonne occasion pour parler du rôle des femmes, se plaçant ainsi, en filigrane, dans la posture pourtant tabou de "première dame de France".
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Sur les couvertures, elle pose seule, volontaire, souriante. Mais on a comme l'impression qu'il ne s'agit que d'une sorte de répétition avant l'entrée du président dans le champ de l'objectif. L'affaire devient de plus en plus flagrante. Paris Match notamment cite l'entourage de l'actrice qui aimerait être "plus officielle".
Reste maintenant à François Hollande à trouver le bon équilibre entre le président sortant, sobre, investi de sa mission au service de la France et le candidat qui devra forcément casser l'armure, redevenir humain, capable de sentiments comme l'ensemble de ses électeurs.

vendredi 9 septembre 2016

Cinéma : "Frantz" ou la quête d'un pardon impossible

Frantz__1.jpg
Un an après la fin de la grande guerre, un soldat français tente de se faire pardonner. "Frantz", film très esthétique et en noir et blanc de François Ozon sur la résilience.

Tourné en grande partie en noir et blanc dans une petite bourgade allemande, "Frantz" de François Ozon fait partie de ces films au fort pouvoir de rémanence. Pris par l'histoire, on n'est pas sensible immédiatement à la beauté des images. Puis, une fois sorti de la salle, des flashs picturaux nous reviennent en mémoire. Les gros plans sur le visage lumineux de l'actrice principale, ces branches d'arbres qui bruissent dans le vent, les ambiances des cafés en Allemagne comme en France, avec en toile de fond une fierté nationale qui appelle à de nouveaux combats, le cimetière, calme et reposant. Une époque reconstituée, sans beaucoup de moyens, mais avec toute son âme.
Mensonge pieu
D'âme, il en est beaucoup question dans ce film sur le pardon. Adrien Rivoire (Pierre Niney), jeune soldat français fraîchement retourné dans le civil après l'Armistice, se rend dans cette petite ville allemande qui accueille la tombe de Frantz. Lui aussi soldat. Dans l'autre camp. Et moins chanceux puisqu'il est mort au combat. Il croise dans le cimetière Anna (Paula Beer), la fiancée inconsolable de Frantz. Entre ces deux jeunes que tout oppose, une complicité, une amitié, voire plus, va se nouer. Malgré l'ambiance générale qui pousse la majorité des Allemands à cracher au passage d'Adrien. Adrien prétend avoir connu Frantz avant la guerre, quand ils étaient étudiants à Paris. Il raconte à Anna et aux parents du jeune Allemand disparu leurs visites au Louvre, les soirées dans les cafés animés, leur passion pour la musique, le violon en particulier. Le père (Ernst Stötzner), après avoir rejeté violemment Adrien, accepte de l'écouter et va éprouver beaucoup de plaisir à retrouver une partie de la vie de son fils. Mais tout n'est que mensonge. La relation entre Adrien et Frantz est tout autre.
Longtemps durant la première partie du film on suspecte une relation homosexuelle. Il n'en est rien, François Ozon a respecté le scénario original du film de Lubitsch. Adrien est simplement le meurtrier de Frantz, croisé dans une tranchée sous la mitraille des deux camps. Il veut se faire pardonner, tout dire aux parents. Anna l'en dissuade, veut se raccrocher désespérément à ce bel inconnu si charmeur qui lui rappelle tant son amour. Frantz, omniprésent au début du film, va peu à peu s'effacer des mémoires et Adrien comme Anna vont enfin accepter de tourner la page.
François Ozon, sans la moindre ostentation, raconte comment un mensonge peut parfois être plus constructif que la cruelle vérité. Même si vivre avec ce secret est une souffrance de tous les jours pour les initiés.
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Radieuse Paula Beer
Frantz__2.jpgUn amateur éclairé du cinéma de François Ozon souligne combien le réalisateur sait mettre en valeur les actrices qu'il choisit. Après Ludivine Sagnier ou Marine Vatch, il braque son objectif sur la belle Paula Beer. Jeune actrice allemande pleine d'avenir, elle endosse le rôle d'Anna avec une grâce touchante. Belle, elle se dissimule derrière des habits de veuve, elle qui pourtant n'était que fiancée. Elle refuse les avances d'un notable persuadé qu'il saura lui faire oublier son malheur. Par contre elle se trouve toute tourneboulée quand Adrien évoque ces poèmes français que Frantz aimait plus que tout. Sa tristesse initiale va lentement s'estomper pour laisser place à une joie de vivre qui lui manquait tant.
Remarquable en veuve éplorée, Laura Beer l'est encore plus quand elle enfile une robe vaporeuse pour aller au bal au bras du "Français", malgré les regards désapprobateurs de ses amis allemands, torturés, déjà, par l'envie de revanche. Certes elle est belle, bonne actrice, tant en allemand qu'en français, mais cette joliesse, ce mignon minois, doit aussi beaucoup à la délicatesse de François Ozon. Il filme ce visage avec une rare intensité, comme si Paula Beer portait en elle toute la finalité du film : le malheur, la résilience, l'espoir d'une vie meilleure, la décision de vivre, malgré la peine. Seule une grande actrice peut relever un tel défi.