vendredi 30 juin 2006

Thriller - Belle mais dangereuse....

Plongée dans les travers de la petite bourgeoisie de province. Un polar au goût de terroir signé Sylvie Granotier


On ne dira jamais assez le pouvoir néfaste des congés payés et autres RTT obligeant les stakhanovistes du travail à faire des breaks non désirés. Pierre Mangin, commissaire à la police judiciaire parisienne, a trop accumulé de retard dans ses repos légaux. Il accepte donc de faire une pause de quelques jours et décide, soyons fous, de passer ces moments de loisirs à la campagne. Et pas n'importe quelle campagne. Plutôt que de choisir la proche Normandie ou la dépaysante Provence, il opte pour la Creuse, « le bout du monde ». 
Il va rendre visite à de vieux amis, Robert et Anne-Marie, installés près de Guéret depuis des années. Mangin, le narrateur de ce polar écrit par Sylvie Granotier, décrit ainsi sa plongée dans le terroir : « La vraie panique surgit lorsque je me rendis compte que je ne traversais plus que des villages coupés en deux par la nationale, (...) autour de moi, la verdure gagnait, les champs aussi, vallonnés et remplis de vaches d'abord, de moutons placides ensuite. Seul un tracteur, de-ci de-là, rappelait la présence de l'homme. Et puis vint la forêt, de plus en plus envahissante, dans son état dénudé, le pire de l'année, même pas de neige pour habiller tout ça ». On le comprend, notre citadin regrette sa décision. Mais il a promis à ses amis de passer quelques jours en leur compagnie. Donc... 
 À son arrivée il tombe dans une famille on ne peut plus classique. Robert, entrepreneur débordé, passe toutes ses journées au travail, Anne-Marie, de jeune étudiante du temps de sa rencontre avec Mangin, s'est transformée en mère de famille en guerre avec ses deux ados. Le fils aîné, s'est réfugié dans la lecture et internet alors que la plus jeune, 14 ans, ne jure que par son portable et les aventures amoureuses de ses copines. Mangin, le devine vite, ce ne sera pas une sinécure. 

Ariane, l'apparition 
 Mais dans la grisaille, apparaît un rayon de soleil : Ariane. Il la rencontre brièvement au cours de sa première balade. Une jeune et farouche chercheuse de champignons. Second contact le soir même puisqu'elle fait partie des invités au grand repas organisé par Anne-Marie. Ariane, bibliothécaire, célibataire, mystérieuse, si belle. Mangin n'en croit pas ses yeux. Il aura fallu qu'il débarque dans ce trou perdu pour qu'il tombe éperdument amoureux. Mais la belle est insensible au charme viril du policier parisien. Elle repousse ses avances, avec calme mais détermination. 
 Mangin, déçu, cafardeux, va trouver un dérivatif en prêtant main forte au gendarme du cru dans la recherche d'un tueur en série de jeunes autostoppeurs. Et les rares indices vont le mener tout droit vers... Ariane. 
 Sylvie Granotier prend visiblement beaucoup de plaisir à décrire sans concession les mentalités parfois très obtuses et rétrogrades de cette petite bourgeoisie provinciale. Mais elle n'est pas tendre non plus pour son héros, Parigot, urbain, trop sûr de lui, fumeur invétéré car dit-il, « Aimant la vie, je ne renoncerai pas au tabac que j'aime, sous prétexte qu'il tue. ». Et puis, il y a surtout au centre de ce roman le personnage d'Ariane, complexe, tourmenté, au passé chargé de lourds secrets. Ange ou démon, jusqu'au bout le lecteur se posera la question. 

« Belle à tuer », Sylvie Granotier, Albin Michel 18 €.

jeudi 29 juin 2006

BD : La croisière de Martin Veyron nous amuse


Rien de tel qu’une bonne croisière pour oublier ses soucis de riche oisif. Dans Papy Plouf, Martin Veyron transforme cette balade nautique en jeu de massacre absolu. Quelques retraités engraissés avec les bénéficies des fonds de pensions dilapident une petite partie de leur fortune à bord d’un paquebot aussi luxueux que dangereux. Car cette croisière semble marquée par une incroyable malédiction. Les cadavres se ramassent à la pelle et la morgue est pleine. « Il y a largement la place d’en mettre deux tête-bêche » propose le second en ouvrant un tiroir. Le docteur, lui, commence à se faire du mouron. D’autant que le commandant, perdant de plus en plus les pédales, a tendance à mettre les récalcitrants aux fers, comme dans l’ancien temps. Mutinerie, changement de cap, attaque de pirates, tsunami : rien ne sera épargné aux personnages de Martin Veyron. Il n’y en pas un pour rattraper l’autre, tous plus lâches, pleutres et calculateurs les uns que les autres. A part l’infirmière. Mais comme elle est amoureuse… (Albin Michel, 13,90 €)

mercredi 28 juin 2006

BD - Trois antiquaires particuliers sur les traces des Sapiens


En pleine canicule, une vieille dame meurt dans sa chambre d’hôtel. Le gérant expédie le corps à la morgue car son fils a disparu depuis quelques jours. Ce dernier, en volant de la limonade pour sa maman, s’est retrouvé en garde à vue. Quand il est enfin relâché, il n’y a plus rien dans la piaule. Tout a été récupéré par Simon, un brocanteur peu regardant sur la qualité de la marchandise. Simon qui découvre dans une boite en fer un reliquaire contenant un très vieux crâne humain. Avec sa petite amie, Rebecca, vendeuse de livres anciens, il contacte Ernst-Lazare, antiquaire de rang international. La découverte est tellement intéressante que le trio va former une association pour découvrir d’où provient exactement cette pièce unique. Philippe Riche reprend les personnages créés dans « Pas de chance », histoire en deux parties parue dans la collection Tohu Bohu. Un trio qui devra se méfier de trois furies, adeptes de la gâchette prêtes à tueur pour récupérer le reliquaire. Action, culture, fantastique : il y en a pour tous les goûts. (Les Humanoïdes Associés, 10 €)

mardi 27 juin 2006

BD - La magie du Codex angélique


La mort rode la nuit dans les rues de Paris à la belle époque. Au petit matin, la police retrouve les cadavres de prostituées proprement éventrées. Il manque généralement le cœur aux pauvres filles. La police fait du surplace mais cette série de faits divers n’intéresse pratiquement pas le jeune Thomas, étudiant dans une université huppée. Il doit subir la folie de son oncle. Son tuteur depuis que sa mère est morte. Enfin pas véritablement, car l’oncle, par ailleurs inventeur, a plongé le corps de sa sœur dans un mélange glacé. Il a bon espoir de lui rendre la vie. Mais pour cela il lui faut des formules magiques collectées dans le Codex angélique qui lui font défaut. Première collaboration entre deux jeunes auteurs débutants. Thierry Gloris, à la tête d’un diplôme d’historien, signe un scénario mêlant magie et jeux sexuels alors que Mikaël Bourgoin, fraîchement sorti de l’école Emile Cohl, a particulièrement travaillé les couleurs de cette série semblant vouloir basculer dans le fantastique et l’horreur. (Delcourt, 12,90 €)

lundi 26 juin 2006

BD - Un trou perdu comme un aven


Quel est ce secret qui rend l’atmosphère du petit village de Saint-Jean-en-Aven totalement irrespirable ? Au point que les suicides du haut pont dominant la commune se multiplient ? Léo Walec, jeune inspecteur de police, est envoyé sur place en ce mois d’août 69 pour tenter de faire toute la lumière sur ces péripéties faisant de plus en plus désordre. Mais ce n’est pas facile de délier les langues. L’autochtone est taciturne et peu causant. Heureusement, du côté du maire, il y a un peu plus de collaboration. Mais ce n’est pas pour cela que l’enquête progresse. Léo devra faire croire qu’il classe l’affaire pour enfin découvrir quelques pistes. Notamment celle des quatre conscrits qui à la veille de 39/45, ont fêté leur départ sous les drapeaux. Des quatre, il n’en reste plus qu’un : le maire, patron tout puissant de l’usine d’embouteillage de l’eau minérale jaillissant dans la commune. Et Léo, tout en surveillant son petit monde, tente de séduire la belle Chloé. Un petit bijou d’album, qui ne paye pas de mine, du au talent de Stephan (scénario) et Laurent Astier (dessin). (Vents d’Ouest, 9,40 €)

dimanche 25 juin 2006

BD - Rafales futuristes


Seb Christie, un photographe de presse, se retrouve bien malgré lui au centre d’un vaste complot mondial mené par une petite communauté d’hommes et de femmes radicalement différents. Ils seraient le résultat de l’évolution ultime des humains. Stephen Desberg, le scénariste, développe dans cette série entre science-fiction et thriller, une théorie qui tout en étant très originale n’a rien de farfelue. L’homme est le résultat d’une longue évolution. Mais elle n’est pas terminée. Et elle pourrait prendre deux directions. D’un côté des purs cérébraux, rejetant violence et ambition personnelle, de l’autre des instinctifs, bien décidés à prendre la place des humains classiques, simplement en les poussant à s’autodétruire. Résultat Seb assiste impuissant à l’explosion d’une usine chimique en Egypte, mais parvient à déjouer un attentat à Rome. Le dessin de Vallès, classique et rigoureux, crédibilise beaucoup ce récit futuriste. (Le Lombard, 9,80 euros)

samedi 24 juin 2006

Roman - Patrick Cauvin et la belle rencontre de "Belange"

Ce roman sans prétention de Patrick Cauvin a l’immense avantage, dans une époque très noire, de nous faire rêver quelques heures

Adrien Beaurecourt, éditeur parisien, est réglé comme du papier à musique. Chaque vendredi à 17 heures, après une semaine de travail, il prend sa voiture et se rend dans la maison familiale de Belange à 300 kilomètres de la capitale. Une résidence secondaire de luxe, gardant encore les traces de sa mère, autoritaire militaire qui s’obstinait à appeler son fils Eliane… Contre son avis, il n’est pas devenu général, mais a fait ce qu’il aimait le plus : lire. Du flair et de la chance dès ses débuts ont rapidement transformé sa maison d’édition en une affaire très rentable. A l’abri du besoin, il vivote entre ses livres et ses week-ends au calme. Parfois il passe les deux jours à Belange en compagnie d’une de ses conquêtes. Des maîtresses qu’il ne garde jamais bien longtemps. Trop casanier certainement. 

Odeur de cassoulet
Ce vendredi soir, en ouvrant les portes de la grande maison solitaire, il est interloqué car son odorat est agressé par une odeur de cassoulet. Rapidement il constate que quelqu’un, un squatteur, a profité de la cuisine et des réserves de Belange. Des piles de vaisselle sale dans l’évier, des boîtes de conserves vides et abandonnées, et, sacrilège absolu, le lit de sa chambre est défait, visiblement utilisé par le vagabond. Sur ses gardes, Adrien vérifie tout d’abord que l’intrus n’est plus dans les murs. Il passe ensuite son week-end à remettre de l’ordre et au moment de partir, pris d’une subite idée, il écrit au marqueur sur une feuille A4 : « Si vous revenez, continuez à ne rien casser, vous pouvez finir ce qui reste dans le frigo, mais par pitié, faites la vaisselle ». Première étape d’une correspondance qui va être au centre de ce roman racontant la rencontre entre deux êtres que tout oppose à priori. 
Adrien rentre donc à Paris, laissant Belange à son squatteur. 
Repas d’affaires, comité de lecture, rencontre avec des auteurs, ses journées de travail sont bien remplies mais il ne peut s’empêcher de penser à l’inconnu et ce qu’il peut bien faire dans les murs familiaux. Une obsession telle qu’il part même un jeudi pour le surprendre. Mais il fait chou blanc. Finalement, l’échange de lettres se passant de mieux en mieux, Adrien propose à son mystérieux visiteur de le rencontrer la semaine suivante. Après des journées de doute et d’angoisse il accepte et l’éditeur va enfin rencontrer de visu son squatteur… On n’en dira pas plus sur cette rencontre qui changera totalement l’existence d’Adrien. Patrick Cauvin a pris un malin plaisir à décortiquer la lente maturation du propriétaire face au locataire non voulu. 
Le romancier profite également de ce roman pour dresser quelques portraits irrésistibles de personnages évoluant dans le milieu de l’édition tel ce « nègre » pouvant pondre 300 pages sur une patineuse artistique anorexique ou cette femme tourmentée racontant avec le plus grand sérieux « l’histoire d’une fille laide et toujours lugubre qui tombait amoureuse d’un employé des postes tuberculeux et prématurément veuf. (…) L’auteur prétendait que l’intérêt du roman résidait dans le fait que Blême (c’était le surnom de l’héroïne) et son postier d’amour n’échangeaient pas une seule parole ». On retrouve dans ces passages le Patrick Cauvin incisif, caricaturiste inspiré d’un milieu qu’il connaît parfaitement.

« Belange », Patrick Cauvin, Albin Michel, 17 euros

vendredi 23 juin 2006

BD - John Lord et l'attaque sauvage


A New York, au début du siècle dernier, les titres des journaux délaissent la Grande Guerre pour une série de meurtres aussi sauvages qu’inexpliqués. John Lord et Clara Summers vont enquêter sur ces faits divers car parmi les victimes il y a le professeur Winkley dont ils étaient très proches. Ils vont trouver un embryon de piste en découvrant qu’en Louisiane, il y a quelques années, plusieurs meurtres ont été commis de la même façon dans une grande propriété bourgeoise. Les corps ont été lacérés à coup de griffe et pour certains éventrés. Le second tome écrit par Denis-Pierre Filippi fait alterner scènes muettes du passé et enquête actuelle des deux héros. Si ces derniers sont très bavards (trop parfois…), toute la force de la série se retrouve dans les dessins de Patrick Laumond, illustrateur venu du jeu vidéo, maîtrisant à la perfection l’anatomie féminine. Les scènes de chasse dans la jungle, ou de déchaînement bestial devraient rester longtemps imprégnées au fond de vos pupilles. (Les Humanoïdes Associés, 12,90 €)

jeudi 22 juin 2006

BD - La blondeur sauce Viking


Aëla est blonde. Aëla a les yeux bleus. Aëla est jolie. Mais ne vous avisez pas de vous moquer d’Aëla car cette nouvelle héroïne imaginée par Stéphane Duval (dessin) et Pascal Bertho (scénario) est avant tout une princesse viking. Et quand il y a de la castagne, la belle a du répondant. Pour preuve, fille aînée du roi Gudruun régnant sur le Helluland, quand ce dernier organise un tournoi de chevaliers pour désigner son successeur (aucune femme n’a régné sur ce royaume scandinave), elle y participe masquée et gagne haut la main. Ce n’est pas du goût des autres nobles qui considèrent ce fait d’armes comme une insulte aux dieux. Et dans la foulée, le pays est attaqué… Aëla, pour regagner la confiance de son peuple devra retrouver un frère caché, récemment enlevé par une horde de mongols. Un premier tome exemplaire avec ce qu’il faut de combats, de coups de théâtre, d’humour et de suspense. Ces deux jeunes auteurs maîtrisent parfaitement leur sujet. La suite s’annonce grandiose avec en toile de fond la chevauchée d’Aëla vers l’Est. (Dupuis, 9,80 €)

mercredi 21 juin 2006

BD - Lucie, à suivre...


De toutes les séries lancées dans la nouvelle collection 32 de Futuropolis c’est peut-être la plus ambitieuse. Certainement la plus longue puisque pas moins de 18 épisodes de 32 pages seront nécessaires à Kris, le scénariste, pour raconter le « Monde de Lucie ». Dans un futur proche, à la veille de Noël, une famille va à la nocturne d’un grand magasin. Malgré des consignes de sécurité très strictes, une bombe explose faisant des dizaines de morts. Des gosses des rues sont soupçonnés, mais le duo de flics va finalement s’orienter vers une autre piste avec le témoignage d’une fillette retrouvée indemne dans les décombres. Plongée dans une sorte de coma, elle revit l’explosion grâce à une technique d’hypnose télépathique. Le récit s’annonce dense, bourré de rebondissements et de trouvailles. De quoi permettre à Guillaume Martinez, le dessinateur, de faire l’étalage de son talent, tant en dessin pur qu’en mise en page. Le second épisode est annoncé pour fin août. (Futuropolis, 4,90 €)

BD - Ecorché talentueux


Ruben Pellejero, talentueux dessinateur espagnol, semble attirer les scénarios d’exception. Après « Un peu de fumée bleue » ou « Le tour de valse », il illustre la première partie de l’Ecorché sur un scénario de Giroud et Germaine. Et comme cette longue histoire de 64 pages se passe essentiellement dans le milieu de la peinture au début du XXe siècle, il en profite pour signer des planches d’une rare beauté. Tristan, fils adoptif d’un couple de bouchers, souffre d’une grave malformation du visage. Muet, c’est derrière un masque qu’il se montre en public. Un handicap qui ne l’empêche pas de trouver sa voie : il sera peintre. Mais un peintre maudit qui vivote dans une chambre de bonne, obligé de travailler aux abattoirs pour se payer ses couleurs, essentiellement du rouge… Et puis un jour une belle galiériste remarque son travail et décide de l’exposer. En filigrane, le lecteur est tenu en haleine par un chantage sur les véritables origines de Tristan. Passion, talent, secret : un triptyque gagnant pour un album qui deviendra vite un incontournable. (Dupuis, 13,50 euros)

mardi 20 juin 2006

BD - Secrets américains de la Branche Lincoln


Toutes les fortunes ne sont pas le fait d’un travail honnête et persévérant. Trop souvent, une ascension sociale est due à une opportunité peu flatteuse. C’est le cas de la famille Voss. Parti de rien, au début du XXe siècle aux USA, Charles Voss a su construire un véritable empire. Aujourd’hui, c’est Ted, le dernier représentant de la famille, qui en hérite. Et en réglant les derniers papiers administratifs, il découvre des carnets secrets ayant appartenu à son grand-père. Des rapports codés datant des années 40. Il ne comprend rien si ce n’est que cela parle de Cerbère et d’une certaine « Branche Lincoln ». Avec un ancien professeur de mathématiques et une amie journaliste, il va tenter de décrypter ces mystérieux carnets. Il ne se doute pas qu’avec ces recherches, il va s’attirer des milliards d’ennuis… Nouvelle série réaliste dans la veine de XIII écrite par une jeune scénariste, Emmanuel Herzet et dessinée par un nouveau surdoué polonais abreuvé de Rosinski dans son enfance, Piotr Kowalski. (Le Lombard, 13 €)

lundi 19 juin 2006

Littérature jeunesse - Un livre héros

Comment faire aimer la lecture aux plus jeunes ? En transformant les livres en véritables héros, telle est la solution de Matthew Skelton.


Roman sur l’apprentissage de la lecture, l’histoire de l’imprimerie et de l’utilité des bibliothèques, « Le secret d’Endymion Spring » de Matthew Skelton s’adresse plus particulièrement aux adolescents mais ravira tout autant les adultes passionnés par cette formidable invention que sont les livres. Endymion Spring est un jeune apprenti allemand En cette année 1452 à Mayence, il aide son maître à finaliser une invention qui changera la face du monde et surtout sa compréhension. Gutenberg vient d’inventer l’imprimerie et est bien décidé de démontrer la suprématie de sa technique en publiant plusieurs dizaines de bibles en un temps record. Les moines copistes vont vite rejoindre le cimetière des professions inutiles. Endymion, muet et naïf, ne se doute pas qu’il va être choisi par un livre magique fabriqué en peau de dragon pour détenir la somme de toutes les connaissances. Un lourd fardeau pour le jeune homme obligé de fuir l’Allemagne et un certain Fust, prêt à tout pour entrer en possession de cet objet suprême. 

Dans le silence d’Oxford
Le roman se passe donc en 1452, mais également de nos jours dans l’enceinte de la prestigieuse bibliothèque d’Oxford. C’est dans ces salles silencieuses et studieuses que Blake Somers, s’ennuie désespérément. Ce jeune Américain a suivi sa mère, brillante universitaire ayant décroché une autorisation temporaire pour faire des recherches dans les archives de ce temple européen de la culture. Mais lui, les livres, ce n’est pas sa tasse de thé. Au contraire de sa sœur Duck, plus jeune mais passionnée par tout ce qui est écrit, comme sa mère, il ne trouve aucun intérêt à feuilleter un ouvrage, quel qu’il soit. Jusqu’à ce qu’il découvre un vieux volume égaré dans les rayonnages. Il a littéralement été agressé par deux petits bouts de fer en forme de crochet de serpent, servant à tenir le livre fermé. Pas de référence visibles et surtout, toutes les pages sont blanches. Enfin pas toujours, car en y regardant bien, il déchiffre des phrases énigmatiques. Et là où cela se corse, c’est quand il constate que ces inscriptions, il n’y a que lui qui parvient à les voir… 

Un livre « vivant »
Ce bouquin très différent commence à obséder Blake, il s’interroge : « Les livres n’agressent pas. Ils ennuient, ils échappent à la compréhension, ils se couvrent de poussière… Ils n’agressent pas. Ce sont des objets. Pas des êtres vivants ! » Un rapport très particulier va s’instaurer entre Blake et ce livre magique. Une union, presque une fusion, qui va conduire l’adolescent sur des chemins périlleux car même de nos jours, alors que le multimédia règne en maître, des hommes sont capables des pires extrémités pour posséder ces quelques pages reliées par une couverture de cuir.
Matthew Skelton parvient à rendre passionnantes, parfois inquiétantes, les péripéties de Blake dans les sous-sols d’Oxford et la fuite d’Endymion, sur fond de carnaval à Mayence. Et tous ceux qui aiment lire, ne peuvent s’empêcher de rêver, un jour, d’avoir la possibilité de feuilleter ce livre magique, véritable héros du roman. 
« Le secret d’Endymion Spring », Matthew Skelton, Pocket Jeunesse, 19 €

dimanche 18 juin 2006

BD - Nouveau départ pour le Choucas


Le Choucas prend ses aises. Le détective privé imaginé par Lax quitte un format trop étriqué pour ses aventures et déploie ses ailes dans un grand format du plus bel effet. Nouveau format, nouveau rythme et nouvelle destination pour ce licencié économique, ayant rebondit après avoir beaucoup lu de romans policiers, essentiellement des Série Noire ayant pour héros des détectives privés. Cette fois il est contacté par des assurances. Elles rechignent à payer une grosse prime à la femme d'un avocat sulfureux retrouvé mort dans son lit. Un avocat qui après avoir défendu les pires escrocs et hommes politiques corrompus, a tout plaqué pour ouvrir un petit restaurant au Népal. C'est là qu'il a trouvé la mort. C'est également là que le Choucas se rend pour tenter de prouver que cette mort n'a rien de naturelle. Pour s'entraîner aux pentes abruptes, notre héros enchaîne plusieurs ascensions de Montmartre et finit par la tour Eiffel. Arrivé sur place, sa condition physique reviendra lentement, mais sûrement. Il rencontrera en chemin quelques maoistes, une Française nymphomane, un statisticien et même une ancienne gloire de la télévision reconvertie en moine. Humour et dépaysement assurés. (Dupuis, 13 €)

samedi 17 juin 2006

BD - Ambiance de Bretagne par Oger et Prugne


En cette fin du 19e siècle en Bretagne, l’industrialisation commence à faire des ravages dans le monde ouvrier, mais les croyances et superstitions sont encore solidement ancrées dans l’imaginaire populaire. Un écrivain parisien recueille les souvenirs de l’aubergiste. Il se souvient de cette jeune fille disparue durant des années et qui est réapparue du jour au lendemain, comme revenue des enfers. Les villageois prétendent que c’est une sorcière. Et il est vrai qu’elle parvient à guérir les animaux et même parfois les humains. Mais quand d’autres personnes disparaissent mystérieusement, elle est la première suspecte. Une BD historique qui fleure bon le goémon et les chapeaux ronds. Dans "L'auberge du bout du monde", Tiburce Oger écrit une histoire fantastique prenante mise en images par Prugne, particulièrement à l’aise en couleurs directes et paysages marins. Une série classique et sérieuse surfant sur la mode des contes celtiques immémoriaux. (Casterman, 9,80 euros)

vendredi 16 juin 2006

BD - Andréas franchit la frontière


En 1937, l’Espagne est ravagée par une terrible guerre civile. Les Républicains savent qu’ils n’en ont plus pour longtemps et les rares combattants, espagnols ou étrangers, préfèrent fuir vers la frontière française. "Quintos", BD d’Andréas (avec des couleurs d’Isa Cochet) se penche sur le destin d’un petit groupe d’idéalistes en fuite. Dès les premières planches, le camion les transportant est détruit par un obus de l’aviation allemande. C’est à pied, dans des villages hostiles, qu’ils tenteront de sauver leur peau. Au cours de ce périple, l’auteur détaille petit à petit les personnalités de chacun. Un postier belge couard, une Française prétentieuse, un Américain ne jurant que par l’action, un Espagnol idéaliste… Ils ne se ressemblent pas et le fragile équilibre du groupe va vite être rompu face aux dangers multiples et incessants. Mort, trahison, désillusion sont les rendez-vous obligés de ces égarés de la « cause ». Ce n’est pas spécialement joyeux, juste réaliste, très réaliste. La nature humaine est encore très perfectible. (Dargaud, 13,50 euros)

jeudi 15 juin 2006

BD - La Suisse inconnue


Daniel Ceppi, 55 ans, est une valeur sûre de la BD suisse. Son héros, Stéphane, bourlingue depuis des années en Asie. Cet auteur exigeant, et donc rare, aurait pu se contenter de ce filon. Mais c’est mal connaître Ceppi qui vient de changer d’éditeur et de se lancer dans une nouvelle série, beaucoup plus dans l’air du temps, "CH Confidentiel". La brigade des enquêtes réservées est un peu l’élite de la police suisse. Petite structure placée sous la responsabilité de Louis Noverraz, un politicien assez cynique, les trois principaux membres de ce groupe sont Zoé Zemp, Etan Loeffel et Mathéus Rime. Un trio sachant utiliser tout l’arsenal informatique pour résoudre ses enquêtes, sans négliger le travail sur le terrain. 
Dans ce premier tome, ils vont être plongés dans une affaire de trafic d’armes lourdes, prenant sa source en Italie et devant finir par un attentat retentissant contre un des symboles de la diplomatie helvète. Narration très hachée, multitude de personnages : d’un premier abord assez austère, cet album se révèle au fil des pages passionnant et bénéficiant d’une intrigue très soignée. (Le Lombard, 9,80 €)

mercredi 14 juin 2006

BD - Les animaux de Prince Lao


Dix ans que Philippe Gauckler n’avait plus rien publié. Dix années de silence rompus avec le premier tome de "Prince Tao", BD pour les plus jeunes se passant en Asie. Abandonnant la science-fiction, ce dessinateur surdoué ayant beaucoup travaillé pour la publicité, a imaginé un monde magique peuplé d’animaux pouvant parler et certainement plus humains que la majorité des bipèdes pensants. Le jeune Lao, devenu orphelin après une avalanche meurtrière, est recueilli par Chabala. Ce géant couvert de poils blancs est un des derniers représentants de la race des yétis. Lao découvrira également les autres habitants de ces montagnes sauvages : Sheyen, un grand léopard blanc, Mirro, un rapace géant pouvant porter Lao sur son dos. Loin de tout, ils sont pourtant menacés par les hommes de Kayen. Un ancien militaire fasciné par les fauves, cherchant à les capturer pour organiser des combats à mort, distraction appréciée par ses hommes de main. Lao va tenter d’aider ses nouveaux compagnons à retrouver la liberté. (Le Lombard, 8,70 €)

mardi 13 juin 2006

BD - Polly et les gentils pirates


La jeune Polly Ann, 12 ans, n’a jamais connu sa maman. Et son père, ambassadeur en Vervenvanie, ne peut pas s’occuper d’elle. Résultat elle est cloîtrée dans un pensionnat huppé mais très strict. Pourtant elle vit très bien cette existence contraignante. Sage, travailleuse, obéissante, c’est la préférée de Mme Lovejoy. Ce n’est pas le cas de sa meilleure copine, Anastasia, désireuse de découvrir « la vraie vie ». Polly, elle, préfère la chaleur douillette de son lit. Et pourtant c’est elle qui va se retrouvée entraînée dans une incroyable aventure, sans quitter ce lit qu’elle chérit tant. D’ailleurs au début elle croira simplement rêver. Et non, elle vient bel et bien d’être enlevée dans de redoutables forbans, les hommes de Meg Malloy, la reine des pirates. Premier tome très prometteur d’une série américaine de Ted Naifeh, auteur au trait délicat et à l’imagination débordante. Polly, de petite fille sage, va se transformer en redoutable meneuse d’hommes. (Les Humanoïdes Associés, 8,90 €)

lundi 12 juin 2006

BD - Bientôt une "guerre civile" ?


Ricard et Morvan racontent, Gaultier dessine. Le postulat de départ est très simple. Et si les dernières émeutes en banlieue avaient vraiment mal tourné ? Le retour à l’ordre devenu impossible, la France aurait sombré dans une série de guerres civiles larvées un peu partout dans l’Hexagone. Et face à cette situation d’exception, comment réagirait-on ? Morvan, Ricard et Gaultier ont donc décidé sur neuf tomes de 32 pages de se mettre en scène dans ce pays en déroute. Dès les premières pages, Morvan constate qu’il a un look de Kosovar des années 90 et part à la recherche d’essence. Dans la file d’attente, il devra passer son tour quand les chars de l’armée arrivent… 
Le quotidien de Sylvain Ricard est encore plus chamboulé. Au guidon de sa moto, il est pris en chasse par des petites frappes désireuses d’en découdre. Le trio tente de vivre comme si de rien n’était mais quand il croise les premiers cadavres, la prise de conscience est immédiate. A partir du second tome (déjà dans les bacs normalement), ils n’auront plus qu’un but : sauver leur peau… (Futuropolis, 4,90 €)

dimanche 11 juin 2006

BD - Cowboy en colère


Attention Durando est de retour et il n’est pas content. Le cow-boy taciturne armé d’un pistolet automatique allemand s’était posé à Nortonville en compagnie d’une charmante héritière. On le retrouve dans les premières pages de cette 14e aventure, toujours écrite par Yves Swolfs mais dessinée désormais par Thierry Girod, armé et vindicatif. Il en a après une bande de malfrats. Il cherche à connaître leur patron et n’hésite pas à employer la méthode forte pour obtenir ce renseignement. Etape suivante dans une petite ville perdue au pied des Rocheuses. D’autres hommes de main viennent acheter de force une mine à un riche propriétaire de la région. Il refuse, malgré les menaces. C’est là que se jouera le drame. Entre Durango, les tueurs et une autre héritière. Un western classique, avec duels, fusillades et vengeance impitoyable. Swolfs a donc abandonné le dessin de sa série vedette à Girod. Ce dernier, sans trahir l’esprit de la BD, parvient à imposer sa pâte toute personnelle. (Soleil, 9,45 €)

samedi 10 juin 2006

BD - Baranko raconte l'Amérique d'antan


Depuis toujours les Indiens d’Amérique ont inspiré les auteurs de BD. Igor Baranko, Ukrainien installé aux USA depuis 2000, est visiblement lui aussi fasciné par l’histoire de ce peuple aujourd’hui disparu. Il situe l’action de sa « Danse du temps » peu de temps après la découverte du Nouveau Monde par les conquistadores espagnols. Sur un continent immense que se partagent les différentes tribus, les rêves ont encore une très grande importance. C’est un rêve qui a provoqué l’union entre Lune-dans-le-nuages et Quatre-Vents. Une union qui permet temporairement une paix prospère entre deux tribus naguère ennemies. Mais Quatre-Vents est obnubilé par les démons Wasicus, les visages pâles apparus il y a quelques années. C’est en allant conquérir la ville de Mexico avec une armée de combattants qu’il découvre l’existence d’un Wasicus, fou et perdu, mais doté d’une arme redoutable. (Les Humanoïdes Associés, 12,90 €)

vendredi 9 juin 2006

BD - La guerre des Seed


Second opus d’une série fantastique écrite par Adrian A. Cruz, un spécialiste des comics américains et dessinée par Marc Riou, Breton installé à Paris s’étant fait connaître avec la série Miss en compagnie de Marc Vigouroux. Les Seed ce sont des démons disséminés sur Terre pour, le jour venu, permettre au maître des enfers de reprendre le pouvoir. Une scission s’est faite dans cette armée dotée de pouvoirs paranormaux. Talbot est fidèle au but initial alors que Solomon, malgré des problèmes de santé, tente de l’en empêcher. Deux jeunes frères jumeaux aux prodigieux pouvoirs sont au centre de cet album rempli de cauchemars, de scènes de meurtres et de torture. Car tous les coups sont permis dans cette guerre à mort. En fin d’album, Talbot expliquera sa vision de l’avenir : « Imaginez un monde où vous n’éprouveriez plus de honte, plus de culpabilité ou même de tristesse. Vos instincts, vos envies, vos désirs naturels seraient admis en tant que tels. » Joli programme, mais à quel prix ? (Les Humanoïdes Associés, 12,90 €)

jeudi 8 juin 2006

Roman - Amours générationnels de Françoise Dorner

Rencontre magique entre une jeune femme et un vieux monsieur dans "La douceur assassine", roman lumineux signé Françoise Dorner.


La première rencontre entre Armand et Pauline est tout ce qu’il y a de plus banale. Dans un bus, le vieil homme, déséquilibré par un coup de frein, manque de tomber et lâche sa canne. La jeune femme la lui ramasse et ils descendent ensemble à l’arrêt suivant. Ils font quelques mètres côte à côte mais Pauline est en retard à son travail. Armand, le narrateur de ce roman de Françoise Dorner, sent immédiatement que sa morne retraite vient de basculer : « Elle a traversé la rue en courant, et je l’ai regardée disparaître. J’étais incapable de bouger, comme si le temps m’avait rejeté en arrière, dans un vague souvenir d’adolescent troublé. » Veuf, ancien professeur de philosophie, la vie sociale d’Armand se limitait jusqu’à présent à un repas mensuel dans une brasserie en compagnie d’une collègue, elle aussi à la retraite. Ses élèves l’ont tous oublié, son fils presque. Pharmacien à Dijon, il ne le voit qu’épisodiquement. 

L’orpheline et le veuf
Alors Armand, séduit par une mèche rebelle du chignon de la jeune fille et sa robe plissée, se met à la recherche de la belle inconnue. Comme un jeune homme fougueux, prêt à tout pour conquérir cette beauté. Mais il y quand même 50 ans d’écart entre ces deux-là. Cela ne les empêche pas de se retrouver au détour d’une rue, de se reconnaître et de partager un sandwich pendant la pause de la jeune employée de commerce. Ce qu’Armand ne sait pas, c’est que Pauline est en mal de famille. Orpheline très jeune, elle recherche désespérément des parents de substitution. Elle collectionne les amants pour tester une possible belle-famille. Mais après de nombreuses déceptions, elle se dit que ce charmant vieil homme, si gentil et distingué, ferait un très bon grand-père. Il vont donc passer de longs moments ensemble, tentant de découvrir le monde de l’autre, sans a priori ni contrainte. 

Grand-père
Il lui parle de sa femme, morte il y quelques années à l’hôpital après des mois d’agonie, de sa fille installée au Canada, de son fils si distant ; elle raconte comment ses parents sont morts dans un accident de voiture qu’elle a involontairement provoqué, de ses amants éphémères, de son travail. On ne sait pas qui apprivoise qui mais au final Armand et Pauline s’apprécient de plus en plus et passent beaucoup de temps ensemble. La jeune fille n’hésite plus à l’appeler « grand-père » en public et lui a parfois un délicieux frisson quand certains s’imaginent qu’elle pourrait être sa maîtresse. Un roman simple, lumineux et plein d’espoir, comme cette dernière scène qui se passe pourtant dans un cimetière, en plein enterrement… 
« La douceur assassine », Françoise Dorner, Albin Michel, 15 €

mercredi 7 juin 2006

BD - Rigolade ovale


Méfiez-vous, les rugbymen du PAC (Paillar Athlétic Club) sont de nouveau de sortie. Troisième album des aventures de Loupiote, la Couane, l’Anesthésiste, la Teigne et Bourrichon, tous joueurs de champ du PAC sous la houlette de Bernard Duteroir, l’Entraîneur. Beka (scénario) et Poupard (dessin) ont tout compris de l’esprit rugby de village. Ils caricaturent à l’excès ces sportifs au QI assez limité et qui accordent beaucoup plus d’importance au menu de la troisième mi-temps qu’à l’état du terrain. 
On apprécie particulièrement dans cet album la tournée effectuée par le PAC en Angleterre sur une vingtaine de gags. Nos bourrins de l’ovalie ont des problèmes dès le passage de la frontière quand les douaniers découvrent dans les bagages des joueurs poulets, cochons et autres canards encore en vie. Sur le terrain, pas facile de s’adapter au ballon glissant. Par contre dans les pubs, la communion est complète autour des chopes de bière. Mais l’arme absolue des Anglais reste leur cuisine, très efficace pour mettre sur les rotules nos vaillants rugbymen. (Bamboo, 9,45 €)

mardi 6 juin 2006

BD - IL, du Tezuka fantastique


Osuma Tezuka est tout simplement surnommé « le Dieu du manga ». Je ne peux que vous conseiller de lire ce recueil d’histoires fantastiques datant des années 70. Le créateur d’Astro Boy avait en fait une palette de styles infinie. Ces 14 histoires complètes content les aventures d’un jeune cinéaste abandonné des producteurs, Daisaku, découvrant dans une maison en ruines une jeune femme reposant dans un cercueil.

Le comte Alucard lui explique que I.L peut prendre l’apparence de n’importe quelle autre femme. Sous la direction de Daisaku, metteur en scène du réel, la femme-caméléon va permettre, par exemple, à un condamné à mort de passer les dix dernières minutes de sa vie en compagnie de sa femme. Dans un autre récit, elle démasquera un ancien amant tenté de dénoncer sa maîtresse à la police politique d’une république socialiste imaginaire.

A ne pas manquer la très poétique et triste « Yoshiko la bohème ». La déchéance d’une adolescente errant dans les rues et survivant en se faisant tatouer, contre un peu d’argent, des milliers de fleurs sur tout son corps. (Casterman-Sakka, 11,95 €)

lundi 5 juin 2006

BD - L’homme qui s’évada


En 1928, les reportages et livres d’Albert Londres sur le bagne de Cayenne en Guyane ont provoqué un vaste mouvement d’indignation. Il décrivait, avec ce sens du détail humain caractéristique du plus grand reporter français de tous les temps, l’enfer quotidien promis aux bagnards. Et dans les condamnés, il y avait des innocents comme Dieudonné, simple militant anarchiste ayant payé lourdement son amitié avec des membres de la bande à Bonnot. Dieudonné rencontré une première fois en prison, puis au Brésil, après son évasion. De ce récit, Laurent Maffre en a tiré un gros album noir et blanc de 128 pages. La première partie décrit la vie des bagnards et la seconde, la plus longue et passionnante, la cavale de Dieudonné et de ses compagnons. Ils ont du affronter les maladies, les bêtes sauvages, les chasseurs de primes et les escrocs avant de pouvoir enfin espérer reprendre une vie normale au Brésil. Un témoignage poignant sur la liberté. Et ce n’est pas si vieux, moins d’un siècle… (Actes Sud BD, 22 €)

dimanche 4 juin 2006

BD - Vlad par Hermann


Dracula est devenu en quelques dizaines d’années une figure incontournable de la littérature fantastique. Mais derrière le mythe, il y a un véritable personnage historique, moins effrayant que sa copie littéraire, mais certainement plus cruel. Hermann a illustré ce long récit historique (60 pages) sur un scénario de son fils, Yves H. De 1430, année de sa naissance à l’hiver 1476 qui a vu sa mort sur un champ de bataille, Dracula aura la plupart du temps terrorisé la population de son petit état, la Transylvanie. Une principauté servant de tampon entre le royaume chrétien de Hongrie et le Bosphore aux mains des musulmans. Ces derniers cherchent sans cesse de gagner du terrain, de remonter vers le Nord. Par la force, mais également en signant des traités avec les autorités locales. Dracula, prisonnier du sultan dans son enfance, sera un allié de ce dernier avant de se convertir au catholicisme et décimer les hommes au croissant. Des méthodes expéditives pour les perdants : le pal. Une sinistre légende illustrée par Hermann avec son brio habituel. (Casterman, 14,75 €)