mercredi 13 décembre 2006

BD - La vengeance impitoyable du Bouncer


White Elk aura presque attendu toute sa vie pour se venger. Le vieil indien va faire payer à 6 hommes blancs le massacre de sa tribu. A la place, ils ont construit Barro City, ville typique du far west où Bouncer est chargé de faire respecter l'ordre dans le saloon. Dans les premières planches de ce 5e et à priori dernier album de la série de Jodorowsky et Boucq, la foule tente d'empêcher la pendaison d'un meurtrier. Le bourreau est une femme. Derrière sa voilette de veuve noire, elle sait se faire respecter. Bouncer n'est pas insensible à son charme viril. Mais la nuit, l' Indien revient et il tue. Pourchassé, il ne devra son salut qu'au Bouncer... son fils. Violente, épique, tragique, grandiose : une série devenue incontournable. 
« Bouncer », éditions des Humanoïdes Associés, 12,90 euros

mercredi 25 octobre 2006

BD - Jeune BD coréenne


On parle beaucoup de la Corée ces derniers temps. Celle du Nord, qui tente de maîtriser l'arme nucléaire. Au Sud, dans une démocratie très capitalistique, la jeunesse se gorge de bande dessinée. Des centaines d'albums bons marchés, comme au Japon, peu ambitieux. Mais à côté de ce volet très commercial, quelques auteurs parviennent à proposer des récits adultes et ambitieux. Une jeune bande dessinée coréenne que Casterman a décidé de mettre en avant dans une nouvelle collection. Premier exemple avec « Le marécage » de Choi Kyu-sok. Un étudiant en bande dessinée, raconte dans ce courtes scénettes de 3 ou 4 pages, sa vie en cohabitation avec trois amis. Dans une minuscule pièce, ils mangent, dorment et travaillent. Problèmes de coeur, d'argent, d'étude ou de relations constituent le pain quotidien de cette BD qui nous en apprend beaucoup sur la jeunesse coréenne. On rit souvent, mais l'émotion n'est pas absente, l'auteur donnant parfois un ton très sérieux et politique à son propos. Une belle découverte. (Casterman, Hanguk, 15,75 €)

mardi 24 octobre 2006

BD - La saga africaine du "Peuple des endormis"


Didier Tronchet, à côté de ses albums d'humour pur, dont généralement il signe les scénarios, aime se dérouiller la main en dessinant des albums plus ambitieux graphiquement, tirés de romans qu'il a apprécié. Après plusieurs adaptations des romans d'Anne Sibran, sa compagne, il s'attaque au roman de Frédéric Richaud, "Le peuple des endormis", paru aux éditions Grasset. Dans le paris du XVIIe siècle, un jeune garçon s'évade en dessinant. Pour sa mère, à l'éducation stricte et religieuse, c'est une hérésie. Mais son père apprécie le talent de son fils. Il décide de partager son secret. Dans des caves secrètes, il tente de trouver la bonne solution pour empailler des animaux. Il travaille notamment pour le Marquis de Dunan, grand séducteur, cherchant un bon moyen pour se faire remarquer par le roi. Quand il décide de financer une expédition pour explorer l'Afrique, il emmène dans ses bagages le jeune dessinateur qui sera chargé de retranscrire sur le papier tous les animaux qu'ils croiseront. Violent, cruel, sans concession, époque oblige, cet album en surprendra plus d'un. (Dupuis, 13,50 €)

lundi 23 octobre 2006

BD - Watch, l'humanitaire sans condition


L'Unesco est une administration mondiale prônant paix et éducation pour tous les enfants de la planète. Mais pour obtenir des résultats, parfois, la méthode forte s'avère être la plus efficace. C'est dans ce cadre que Michaël Le Galli, le scénariste, a imaginé un service de l'Unesco agissant dans l'ombre. La section WATCH est basée à Montréal et intervient un peu partout dans le monde et n'hésite pas à recruter ses membres parmi les services secrets des États membres. Pour cette première mission, plusieurs de ses membres se rendent au Sri Lanka tenter de mettre fin au recrutement de force d'enfants soldats par les Tigres tamouls. Dessiné par Luca Erbetta, le premier tome permet au lecteur de mieux connaître les agents de la section, leurs origines, leur vie privée, leurs inimitiés et casseroles. Le second, paraissant simultanément, les plonge dans l'action. Bien documenté, très crédible, l'histoire permet de dénoncer ces chefs de guerre prêts à tout pour avoir des troupes dociles et malléables. Le prochain épisode est annoncé pour janvier prochain. La série inaugure une nouvelle collection, Impact. (Delcourt, 10,50 €)

dimanche 22 octobre 2006

BD - Un demi dragon à l'attaque


Dans un pays ressemblant à une principauté d'opérette, le maire, industriel local, meurt sans héritier direct. Ce sont ses deux petites-filles qui devront assurer la pérennité de la prospérité de cette vallée encaissée entre les montagnes. Au même moment, un paysan découvre au fond d'une caverne un oeuf qu'il ramène chez lui. Quand il l'offre à sa femme, cela bouge dans le sac. Ce petit être sera leur fils. On le retrouve quelques années plus tard. Brüssli est le souffre-douleur des autres enfants du village. Mais il s'en moque car une jeune fille vient de lui faire un compliment. Ce n'est pas dit explicitement, mais le lecteur comprend vite que Brüssli, en fait, est un jeune dragon qui n'a pas conscience de sa véritable identité. Premier tome d'une série pour les plus jeunes, écrite par Jean-Louis Fonteneau (Inspecteur Bayard), un habitué de la littérature jeunesse. Au dessin, Etienne fait exploser les couleurs, comme dans le premier tome de Gargouilles dont il est l'auteur. (Les Humanoïdes Associés, 12,90 €)



samedi 21 octobre 2006

"La corde aux jours impairs", polar décalé

"La corde aux jours impairs", premier roman policier de Thomas Taddeus est très déstabilisant, la réalité qu'il décrit semblant toujours altérée et la société viciée. 

Le héros de « La corde aux jours impairs » est policer. Un jeune flic qui vient juste de finir son école. Le lecteur se doute très vite que ce polar sortira de l'ordinaire car le héros s'appelle Bossa Nova. Son coéquipier Gabardine. Drôles de noms, mais drôle de pays également. Car l'action ne se situe pas en France ou dans un autre pays connu. Cette contrée imaginaire, fait parfois penser à une principauté, vivant recluse sur elle-même. 
Bossa Nova, loyal et droit, se sent un peu mal à l'aise dans ce monde très sécurisé. Son coéquipier, plus expérimentée, plus blasé aussi, tentera de lui ouvrir les yeux sur le mode d'emploi de son boulot, de la hiérarchie. Tout débite quand ils sont appelés pour enquêter sur le décès d'un homme inconnu des services de police. Il est retrouvé pendu, avec un mot manuscrit sur la table basse : « Je n'avais pas le choix ». Tout plaide pour le suicide. Mais lors de l'autopsie, effectuée par un ami de Bossa Nova, des traces de somnifères sont retrouvées dans le sang du mort. Beaucoup de somnifère. Pris bien avant l'heure supposée du suicide. En fait, au moment de sa mort, il dormait comme un bébé. 

Tueur en série
Le suicide se transforme en meurtre et le suspect en plus devient tueur en série puisque deux jours plus tard, un autre homme est retrouvé pendu chez lui, avec le même mot manuscrit, la signature du tueur. Bossa Nova va enquêter sur le passé des deux victimes, tenter de trouver un point commun, mais le premier était courtier en bourse, le second peintre sans le sou. Quand un troisième pendu, toujours avec le même type de corde, toujours un jour impair, est découvert, c'est le grand branle-bas de combat dans les hautes sphères. 
Le chef de la police, contre l'avis de ses subordonnés, fait appel à un célèbre romancier, spécialiste du polar. Un homme imbu de sa personnalité, persuadé d'avoir toujours raison. Cela donne ce savoureux passage extrait d'un article qu'il publie dans le journal local pour expliquer pourquoi les autorités attendent beaucoup de lui : « Il est bien triste de voir souvent la littérature policière si souvent dénigrée, dévalorisée, par d'obtus critiques. Loin d'être un simple produit de consommation destiné à faire frissonner le lecteur, le roman policier permet d'étendre le territoire du bien en rationalisant l'inutilité du mal. Ce faisant, il indique la direction morale que se doit de prendre une communauté, une société, une civilisation ». Attention, les chevilles enflent. Avec un avocat véreux et un grand patron, Pierlouis Vinegaar, le romancier, fait partie de ces personnages que l'on se surprend à haïr avec une certaine délectation. 
Mais le roman de Thomas Taddeus, sous des airs de manichéisme, est beaucoup plus riche. Bossa Nova parvient même à démasquer le tueur assez rapidement. Mais une fois en prison, un nouveau pendu vient brouiller toutes les pistes. Le lecteur est totalement désorienté et interrogatif : l'auteur a bien réussi son coup, l'entraînant sur un territoire qu'il n'aurait jamais imaginé en ouvrant ce roman. 
« La corde des jours impairs », Thomas Taddeus, Flammarion, 18 €

vendredi 20 octobre 2006

BD - Petit poison deviendra grande


Elle est vraiment craquante la petite Miss Swampy. Dans son bayou en Louisiane à la fin des années 30, elle vit comme une sauvageonne en compagnie de son frère qui lui ne rêve que d'aviation de guerre. Swampy pêche le poisson-chat, capture des crapauds, se méfie des alligators... et des jeunes mâles de la région. Elle n'est encore qu'une fillette pouvant se promener torse nue sans choquer. Mais un soir, alors qu'elle surprend des espions japonais, ces derniers tentent de l'empoisonner avec des baies de Poison Ivy. Une vieille prêtresse vaudou la sauve, mais elle en garde quelques effets secondaires. En premier un corps de femme, avec toutes les rondeurs là où il faut. Mais elle découvre également que ses baisers sont empoisonnés. Quiconque touche ses lèvres trépasse dans la minute. Accusée de meurtre, elle est capturée par l'armée américaine qui va l'intégrer à la section WOW pour « Women on war ». Yann, le scénariste, retrouve toute sa truculence des premiers Innommables, Berthet, au dessin, se régale dans ce premier tome des "exploits de Poison Ivy". (Dargaud, 9,80 €)

jeudi 12 octobre 2006

BD - La vie de Landru par Chabouté, un fait divers fumeux


Chabouté, après une expérience en couleur, revient au roman BD en noir et blanc, style dans lequel il excelle. Pas de sorcellerie pour ce « Henri Désiré Landru », mais une explication tout à fait plausible de l'affaire Landru. Dans cette France saignée aux quatre veines par la guerre des tranchées, Landru, père de famille nombreuse, améliore l'ordinaire en escroquant des femmes célibataires fortunées. Il se contente de les délester de quelques liquidités. A la fin de son procès, scène d'ouverture de cet album de 144 pages, il clame son innocence, affirmant solennellement au jury qui vient de le condamner à mort « Le tribunal s'est trompé ! Je n'ai jamais tué personne ! » Et le lecteur, au fil des pages va découvrir l'incroyable machination dont Landru aurait été victime. C'est alambiqué, mais tout à fait plausible. 
Henri Désiré Landru, Vents d'Ouest, 17,99 €

mercredi 11 octobre 2006

BD - Adaptation explosive d'un polar de Fajardie


Roman culte des années 70, « La nuit des chats bottés » de Frédéric H. Fajardie est enfin adapté en bande dessinée. Violent, anarchiste, sans concession, ce brûlot fait rêver des générations d'étudiants. Boris Beuzelin a osé s'attaquer au monument. Stephan et P aul, deux anciens militaires, décident de venger une belle orpheline. Jeanne raconte toutes les brimades dont son père a été victime au fil des ans. Ils n'hésitent pas à plastiquer tout ce qui est symbolique de l'oppression. Ils débutent par un bar PMU puis enchaînent par l'assassinat d'un huissier puis les boutiques des commerçants qui ont refusé de faire crédit. Avec pour apothéose la destruction « de l'odieux Sacré-Coeur des charognes versaillaises ». Beuzelin, dans un noir et blanc de rigueur, met en scène ce petit bijou d'utopie anarchiste. 
La nuit des chats bottés, Casterman, 12,95 €

mardi 10 octobre 2006

BD - La Secret Box de Mounier chez Bamboo


Récit d'espionage dont le premier cycle est en trois partie, « Box » d'Alain Mounier a le potentiel d'un XIII mélangé au Décalogue. Avec un petit plus dès les premières pages : une héroïne, Erica, très sexy et strip-teaseuse de métier. L'action de cet album se déroule en plusieurs lieux dispersés aux quatre coins de la planète. Aux USA, là où Erica travaille et tente de retrouver un peu de dignité, mais également en Afghanistan où apparaît pour la première fois la fameuse « Box », vieille de 4000 ans, puis sur la Mer de Barentz, en Russie, où de gros moyens militaires sont employés par les Russes pour récupérer l'objet tant convoité. Mais finalement il finira par arriver aux USA et croisera le chemin d'Erica qui aura sa vie totalement bouleversée. Des personnages à la psychologie complexe, des forces obscures agissant dans l'ombre, un objet dont on ne sait pas grand choses si ce n'est qu'il aurait la possibilité de ressusciter les morts : Mounier parvient à agencer tous ces éléments pour transformer ces 48 pages en intrigue passionnante. (Bamboo, Grand angle, 12,90 €)

lundi 9 octobre 2006

BD - Rêves de gamin


Tuff est un petit garçon débordant d'imagination. Il est persuadé que sa peluche, représentant un koala, est dotée d'une vie propre. Souvent, quand il fait une sieste, il a l'impression de se réveiller dans des pays magiques et merveilleux. Ecrite par Curd Ridel et dessinée par Philippe Fenech, cette série, réservée aux plus petits, après le western, explore un moyen âge de légende. Parti visiter une cité médiévale, Tuff reste aux pieds des remparts pendant que ses parents s'éloignent un peu. Il se retrouve prisonnier, avec son Koala, d'arbres apparemment vivcants. Des gnomes lui passent sous le nez et ouvrent une porte magique communicant avec le royaume de Mieuzamieux. Il mettra son épée (en plastique...) au service d'un jeune prince évincé du pouvoir par le seigneur Yvon de Malempire. Il volera également au secours de la jeune princesse Sahira de Mieuzamieux. Le dessin de Fenech, chaud et rond, aux couleurs chatoyantes, est idéal pour cette histoire n'ayant d'autre prétention que de faire rêver, un peu, les jeunes lecteurs. (Soleil, 8,45 €)

dimanche 8 octobre 2006

BD - La création ultime de la Grande toile


Imaginez, dans un futur proche, une ville uniquement peublée de peintres et d'artistes. Unanima est située au fin fond de l'Antarctique. Pour y accéder, le bateau est la meilleure solution. C'est ce que choisissent Laïluka, une femme et Lorenzo, un homme. Ils vont pouvoir approcher de près Mastrangelo, l'artiste majeur de la ville qui est à la tête d'un projet gigantesque, l'oeuvre d'art ultime, "La grande toile". Mastrangelo entend utiliser les 6 000 m2 de la banquise pour y dessiner la grande toile qui donne son nom à cet album d'Agrimbau et Ipolitti, deux auteurs italiens. Mais Mastrangelo, ne veut pas imposer sa propre vision des choses, il veut que tout le monde participe. Mais sous couvert de démocratie, il espère l'unanimité pour un ralliement complet de tous les artistes à son projet. Un seul résiste, Ego. Il recevra l'appui de Lailuka qui, sans le savoir, est la seule et unique artiste ultime. Une fable triste sur la création, ses manipulations, son impossible jugement impartial. (Albin Michel, 14,90 €)

samedi 7 octobre 2006

BD - Le Spirou de Morvan et Munuera visite Tokyo


Quand Jean-David Morvan a accepté de reprendre le scénario des aventures de Spirou et Fantasio, on pouvait se douter que ce passionné du Japon emmènerait les deux personnages emblématiques des éditions Dupuis au Pays du soleil levant. C'est chose faite avec cette 49e aventure dessinée par Munuera. Nos deux héros, dès les premières pages, sont plongés dans le Japon médiéval. Pas de voyage dans le temps, simplement la visite très mouvementée d'un parc d'attraction. Ils vont rapidement croiser le chemin de deux enfants, un frère et sa soeur, au centre de cette intrigue permettant au lecteur, sur 64 pages, de découvrir tous les quartiers de la mégapole japonaise. Si Spirou est sensible à la tradition du pays, Fantasio craque pour la multitude de gadgets qui s'offrent aux heureux détenteurs d'une carte de crédit. Le personnage de Itoh Kata, magicien imaginé par Fournier, rappelle au lecteur que le monde de Spirou se nourrit en permanence des créations des différents auteurs ayant animé le personnage. En parallèle à cet album classique, un « 49Z » raconte le voyage des auteurs dans le vrai Tokyo. (Dupuis, 8,50 € et 19,50 €)

vendredi 6 octobre 2006

BD - Yann et Conrad invitent leur Tigresse Blanche à San Francisco


Alix Yin Fu, jeune et belle Chinoise en formation dans les services secrets chinois, est fin prête pour ses premières missions. Reste à savoir si elle sera une « mouche qui butine » ou une « mouche qui pique ». Dans le premier cas elle devra obtenir des informations en usant de ses charmes, dans le second on lui demandera simplement de tuer pour le Parti. C'est encore indécise qu'elle débarque à San Francisco pour tenter d'oeuvrer en pays ennemi. Elle sera placée sous la responsabilité d'un agent français, lui aussi prêt à tout pour aider le gouvernement chinois. Chantages, meurtres, séances de torture et autres joyeusetés du même acabit sont au programme de la formation d'Alix. Cette série, séquelle de l'univers des Innommables, est désormais écrite et dessinée par Conrad, sans son scénariste attitré, Yann. 
Tigresse Blanche, Dargaud, 11 €

mercredi 4 octobre 2006

BD - Paris sur crime avec l'Etrangleur de Tardi et Siniac


Tardi a tenu en haleine ses lecteurs durant cinq mois avec la publication, sous forme de feuilleton, de cette BD tirée d'un roman de Siniac. Voici l'histoire reprise en un gros album de près de 100 pages offrant en plus de nombreuses variantes finales. En 1959, alors qu'un brouillard persistant s'épanche sur les rues de Paris, un mystérieux étrangleur sème la terreur. Il peut d'autant plus facilement réaliser ses forfaits que la police est en grève. Le jeune Antoine, fils d'un assassin recueilli par le policier qui a conduit son père sur la guillotine, pense connaître l'identité du tueur en série. Esbirol, libraire du quartier, semble en savoir beaucoup sur « Le secret de l'étrangleur ». Deux versions sont disponibles, simple en noir et blanc ou luxe, en couleur et avec un DVD en cadeau. 
Le secret de l'étrangleur, Casterman, 14,95 ou 29 €


mardi 3 octobre 2006

Roman - La passion, la haine, la défaite


Une absence totale d'instinct", est une histoire d'amour qui finit mal. Ce roman de Sibylle Grimbert, son quatrième, entraîne le lecteur dans un tourbillon de passion, d'affrontements et de haine. Lise et Vincent se sont trouvé. Le gros et bel amour, immédiat, puissant, renversant tout sur son passage. Jeunes gens modernes, gravitant dans les milieux artistiques, littéraires essentiellement, ils s'accommodent, dans un premier temps de leurs différences flagrantes. La chair permet souvent d'aplanir ces disparités. Mais le quotidien, fait de repas, de réveils et de partages triviaux pourrit vite la situation idyllique des premières semaines. Un roman en trois parties, trois étapes d'un déchirement inéluctable : le terrain, la bataille, la défaite. 
Entre New York et Paris, d'un cocktail à un dîner en ville, leur relation s'effrite, se délite. Et quand le cap est passé, on en arrive aux extrêmes : « Une nuit, elle dansa autour de lui de manière volontairement ridicule en lui chantant qu'il était gros, un gros patapouf, chanta-t-elle, en tournant comme une folle à trois centimètres de son corps, en pointant son ventre de son doigt, en se baissant et en se relevant de façon grotesque comme elle imaginait une danse indienne autour d'un totem. Le lendemain elle pleura toute la journée en lui demandant de lui pardonner. Il refusa. » Implacable dans sa logique, ce roman dresse la carte du tendre des amours désenchantées de la jeunesse des années 2000.
« Une absence totale d'instinct », Sibylle Grimbert, Seuil, 12,50 €

lundi 2 octobre 2006

BD - Après la mort de Dupa, Cubitus se modernise avec Aucaigne et Rodrigue


Difficile, très difficile de succéder à Dupa. Créateur de Cubitus, série de gags légendaire du journal Tintin (il fut même un temps envisagé de rebaptiser la revue du nom du chien blanc à queue en pompon jaune…). Dupa disparu prématurément. Le personnage devait cependant lui succéder. Après quelques années de silence, il est de retour avec cette fois deux gagmen pour renouveler son petit monde. Pierre Aucaigne, humoriste aussi connu en Belgique que Laurent Gerra en France, signe les scénarios, Michel Rodrigue, se charge du dessin avec un maximum de fidélité au trait rond et fluide de Dupa. Le second tome de ces « nouvelles aventures » voit l’arrivée d’un nouveau personnage : Bidule, le neveu de Cubitus. C’est la copie conforme, en réduction, de ce bon gros Cubitus. Il a le même esprit que son tonton, n’aimant pas qu’on le dérange en pleine sieste, surtout quand c’est Sénéchal, le chat. Ce dernier, tout en conservant son rôle de tête de Turc, est un peu moins méchant qu’avant. Plus victime que manipulateur. Aucaigne et Rodrigue n’oublient pas Sémaphore, le maître de Cubitus, qui pourrait bien ne plus être célibataire après une rencontre virtuelle sur le net…. (Le Lombard, 8,70 €)

dimanche 1 octobre 2006

BD - Les gags urgents des postiers de Godard et De Vigan


La collection Bamboo Job s’enrichit d’un nouveau corps de métiers : les postiers. Ce sont Godard (dessin) et Du Vigan (dessin) qui se chargent de tailler un costard à cette corporation de la fonction publique trop souvent décriée. Car les auteurs se moquent de certains de leurs défauts, mais dans l’ensemble les plaignent plus qu’autre chose. Il est vrai que ces employés sont souvent au contact du public et doivent régulièrement lutter pour conserver leur intégrité physique. Tel ce facteur, harcelé par une nymphomane prétextant le moindre recommandé pour le capturer dans son appartement. Où cette autre vieille dame, réclamant des intérêts sur son compte en banque affichant un très riquiqui zéro au niveau du solde. C’est compliqué aussi derrière les guichets quand les collègues s’y mettent. La jeune Marlène a le chic pour troubler la gent masculine avec des tenues affriolantes. C’est quand même très utile pour calmer le client récalcitrant. Une série s’appuyant sur des faits précis et réels pour mieux rire de l’absurdité de notre société. On reconnaît la pâte de Christian Godard, scénariste très aguerri (La Jungle en Folie, Toupet), bien servi par un jeune dessinateur déjà très sûr dans ses caricatures. (Bamboo, 9,45 €)

samedi 30 septembre 2006

BD - Si on aime Game Over, l'important est d'apprendre à perdre


Il était une fois un petit guerrier persévérant mais pas toujours très futé. Dans ses mondes virtuels, il doit affronter des Blorks vicieux et fourbes. Souvent , il croit avoir enfin trouvé l’astuce qui lui permettra de passer au niveau supérieur. Systématiquement il se retrouve avec le fatidique « Game Over » qui a donné son nom à cette série de gags muets imaginée par Midam. Midam, le créateur de Kid Paddle. On retrouve dans ce second recueil l’esprit gore et trash du nouveau héros des cours de récréation. Ce qui semblait au début un simple défouloir pour un auteur qui pouvait tout se permettre le succès aidant, est devenu une véritable série. Il en a gardé la maîtrise tout en se faisant aider au niveau scénario par Augustin et par Adam pour les dessins. A l’arrivée cela fait plus d’une quarantaine de variation pour une fin tragique du guerrier numérique. Des exemples : propulsé dans l’espace par des chaussures rebondissantes, enfoui sous terre par un pistolet déplace matière, électrocuté par la foudre dans une armure rouillée, écrasé par un tank, découpé par un samouraï… Le pire, c’est que le résultat est toujours le même : le lecteur éclate de rire à ses déconvenues… (Dupuis, 8,50 €)


vendredi 29 septembre 2006

BD - Rions avec nos amis belges...


Après le succès des Blagues de Toto, découvrez dans la même veine les blagues belges mises en images, dans un style gros nez très maîtrisé, par Eric Dérian et Philippe Larbier. A la collecte de ces fameuses histoires qui ont fait le succès de Coluche et de nombre de pilier de bar on retrouve un Belge, un vrai, Luc Parthoens qui signe sous le pseudo de Pluk. Luc Parthoens a fait toute sa carrière au studio Peyo, c’est lui qui a repris l’encrage des plus récents des albums des petits lutins bleus. En couverture le manneken piss et Jes, un des deux Belges de base récurrents dans ces histoires qui ne brillent pas pour leur originalité. Avec son copain Jos, par exemple, ils partent en forêt couper un sapin pour la Noël. Et ils en cherchent un, en vain, avec les boules. Où quand Jos se ruine à vider un distributeur de boisson se justifiant par un « Moi, tant que je gagne, je joue ». Certes cela ne vole pas très haut mais on ne peut s’empêcher parfois de sourire à la bêtise de ces personnages. Eric Dérian, sur son blog, aux lecteurs critiques lui reprochant de s’être « vendu au grand capital » répond : « Je m’en fous parce que je vais être riche. L’étape suivante c’est maître du monde !!! » Une fois, serait-on tenté de rajouter… (Delcourt, 9,80 €)

jeudi 28 septembre 2006

Roman - Les chroniques d'Oliver Alban

Personnage de bande dessiné imaginé par Floc'h et Rivière, Oliver Alban, critique littéraire anglais, nous livre une sélection de ses chroniques.

François Rivière, biographe reconnu d'Agatha Christie ou de J. M. Barrie, le créateur de Peter Pan, a transformé sa passion pour la littérature anglaise en une mine pour des scénarios de bande dessinée, notamment illustrés par Floc'h. Le personnage de Francis Albany est apparu dans « Les rendez-vous de Sevenoaks » aux éditions Dargaud en 1977. Le dernier album du duo, paru l'an dernier, raconte la vie d'Olivia Sturgess, romancière imaginaire, amie d'Albany. Ces deux, au fil des histoires élaborées par Floc'h et Rivière, se sont trouvé de plus en plus de points commun. Jusqu'à inventer une signature leur permettant de parler de leurs collègues indirectement. 

Critique virtuel
Oliver Alban a publié de très nombreuses chroniques. Critique virtuel, ce n'est que récemment qu'un historien travaillant sur l'oeuvre de Francis Albany a découvert au fond d'une malle des chroniques inédites. Et le doute s'insinue dans son esprit : « Et si Oliver Alban avait véritablement existé ? » Pas de réponse formelle, mais pour étayer cette hypothèse, voici quelques-unes des chroniques inédites, réunies par ordre chronologique. Ce sont en fait des petits portraits des plus célèbres intellectuels de l'époque. On apprend ainsi quelques secrets sur la vie et les manies de plusieurs écrivains anglais comme P. G. Wodehouse, Daphne du Maurier ou Patricia Highsmith. Chaque chronique est illustrée par un portrait au trait signé Floc'h. 
De Francis Albany (en 1947) à Somerset Maugham (en 1977), ces petits textes délicieux de malice et d'élégance, dressent un panégyrique de tout ce que l'Angleterre (et le monde anglo-saxon par extension) compte d'intelligent et de brillant. Oliver Alban rencontre également les célébrités de la télévision (il est sous le charme de Diana Rigg, l'inoubliable interprète de Chapeau melon et bottes de cuir) ou du cinéma comme Hitchcock. Sur ce dernier il recueille la confidence de quelqu'un qui l'a bien connu : « Hitch est un homme imprévisible, il passe de l'exquis à l'imprévisible sans raison apparente. En vérité, c'est un grand timide et un peureux. C'est du reste le secret de son génie ».
Ce livre est un petit bijou, vibrant hommage à tout ce que Floc'h et Rivière aiment dans la littérature anglaise. Et il donne envie de se plonger dans ces classiques outre-Manche encore trop méconnus ce de côté-ci du Channel... 

« Les chroniques d'Oliver Alban », Floc'h & Rivière, Robert Laffont, 19 €

mercredi 27 septembre 2006

BD - Diaboliques souvenirs d'enfance


Olivier Ka a gardé longtemps le secret en lui. Le secret de l’été de ses 12 ans. Depuis quelques années il connaît Pierre, un curé de gauche, jovial, cool et drôle. Pierre organise une colonie de vacances. Olivier y passe des étés de rêve. Jusqu’à ce que Pierre révèle son côté obscur. Une nuit, il rejoint Olivier et… Olivier Ka explique pourquoi, plus de vingt ans après les faits, il a besoin de raconter. Un texte, mis en images par Alfred. Mieux qu’une thérapie, l’histoire pathétique d’un gamin naïf, n’osant pas refuser, pour ne pas décevoir son « ami ». Une œuvre essentielle pour la compréhension de la mentalité des pédophiles, savoir comment ces monstres manipulent les enfants et pourquoi si peu de victimes, même 20 ans après, osent raconter leur martyr.

Pourquoi j’ai tué Pierre ?, Delcourt, 14,95 euros

BD - Les noires combines de Brrémaud et Duhamel


Dans le Harlem du milieu des années 70, Ce trio de pieds Nickelés new look a la particularité d’être mixte et noir. Mose, le docker aux pectoraux très convaincants, est l’ami de Lennox, moins costaud et toujours à la recherche d’une bonne combine pour se renflouer. Il entraîne dans ses arnaques sa petite amie, Dolorès pin-up très panthère noire… Le trio va se lancer dans deux arnaques en parallèle qui vont finalement se rejoindre dans une apothéose calamiteuse. Mose, redoutable boxeur, a accepté de se coucher contre un moins bon que lui. A la clé pas mal de fric dans les paris et surtout une place pour interpréter Mohamed Ali dans la reconstitution filmée de son combat légendaire à Kinshasa contre George Foreman. Par ailleurs, Lennox et Dolorès vont braquer des camions qui déchargent deux fois par semaine dans le port de mystérieuses caisses. Le jour J tout dérape : Mose met son adversaire KO, Lennox constate que le trafic (des armes lourdes) est organisé par la police. On rigole beaucoup en lisant cet enchaînement de quiproquos aux conséquences désastreuses. Le scénario est de Brrémaud, le dessin de Duhamel : un duo (comme leur trio de héros) à suivre. (Vents d’Ouest, 9,40 €)

mardi 26 septembre 2006

BD - Quand Satan rend visite à Bois-Maury



Hermann au dessin, son fils Yves au scénario : le chevalier de Bois-Maury fait étape dans la Flandre en pleine inquisition. Le jeune Toone assiste à l’arrestation puis à l’exécution de ses parents accusés d’être luthériens. Il se vengera du haut des toits enneigés de cette ville plongée dans la terreur. Un album directement inspiré d’un tableau, « Dulle Griet » de Pieter Bruegel l’ancien reproduit en début d’ouvrage. Herman signe quelques planches très épurées. Comme un hommage aux anciens maîtres de la peinture. Une tragédie semblant clore la saga Bois-Maury. Offert avec cet album, un livret de 32 pages retraçant « Les itinéraires de Bois-Maury ».
Bois-Maury, tome 13, Glénat, 9,40 euros

lundi 25 septembre 2006

BD - Du vaudou dans le tome 3 de WEST


Cuba vient d’accueillir le sommet des pays non-alignés. Mais cette fière république n’a pas toujours été indépendante. Le troisième épisode de cette série écrite par Xavier Dorison et Fabien Nury avec Christian Rossi au dessin entraîne le lecteur au début du XXe siècle, alors que la grande île des Caraïbes vient de bouter les Espagnols avec l’aide des Américains. Des Américains qui aimeraient garder un pouvoir total sur ce pays aux ressources alléchantes. Les hommes de Morton Chapel ont pour mission de lever la menace Islero, sorcier vaudou au pouvoir grandissant. Il refuse les élections démocratiques et prône la lutte armée contre l’envahisseur yankee. Une armée de zombies semble sur le point de se lever. 
W.E.S.T., tome 3, Dargaud, 13 euros

dimanche 24 septembre 2006

Polar - Lediacre, flic atypique

Le divisionnaire Lediacre est un flic hors du commun. Avec un minimum de moyens, il fait tomber un maximum de truands…


Loin des clichés, le nouveau héros policier imaginé par Didier Sénécal n’est pas là pour épater la galerie. Au contraire, il aime agir dans l’ombre, quasiment aux frontières de la légalité, et avec une équipe réduite au minimum. Et pour l’instant, son équipe se résume à une personne : Jean-Louis Pommérieux, ancien des services secrets, travaillant presque à mi-temps puisqu’il ne passe au bureau qu’une fois dans la journée, en fin d’après-midi. Mais sa moisson est généralement très bonne : noms de dealers, d’acheteurs, date d’arrivage de drogue et de règlement de compte, il est le flic le mieux informé de Paris.

Une fliquette sous le charme
L’équipe de Lediacre qui va être renforcée avec l’arrivée du capitaine Hélène Vermeulen. C’est cette dernière qui va raconter ses débuts dans ce service peu banal. Elle raconte notamment sa première rencontre avec Lediacre, après avoir noté que son bureau se situe au dessus des ateliers de réparation des véhicules de la police. « Moyen, voilà l’impression que Lediacre donnait. Plutôt svelte pour quelqu’un de son âge, car ses cheveux grisonnants et son visage ridé indiquaient qu’il approchait de la cinquantaine. Son costume gris bien coupé et sa cravate à rayures auraient convenus à la moitié des hauts fonctionnaires de la place de Paris, ainsi qu’à des milliers de directeurs de banque, d’assureurs ou d’experts-comptables. C’est exactement cela : il avait une allure d’expert-comptable. » Mais les apparences sont souvent trompeuses et Vermeulen va rapidement s’en apercevoir. Si les méthodes de Lediacre sont peu banales, ses cibles non plus. Le commissaire aime s’attaquer à ce qu’il appelle les « Intouchables ». En gros, les dealers et toxicos du showbiz, les diplomates étrangers mouillés dans le trafic de cocaïne ou les avocats acoquinés avec le milieu.

Les starlettes au poste
Il va rapidement demander à Hélène Vermeulen de collecter un maximum de renseignements sur un dealer de banlieue attiré par le strass des vedettes médiatiques. Réceptionnant des kilos de cocaïne, il va livrer les grosses doses lui-même, rien que pour le plaisir de s’afficher avec la dernière starlette à la mode ou le plus célèbre chanteur de rock français, en haut de l’affiche depuis près d’un demi-siècle. C’est chez ce dernier, lors d’une fête mémorable, que Lediacre va frapper un grand coup. Mais avec ses effectifs réduits, il est obligé de demander de l’aide des stups, de la gendarmerie et même des services secrets français. Il pilotera cependant à distance toute l’opération avec dans la place, la belle Vermeulen, obligée de se faire passer pour un mannequin slave, légèrement idiote et peu vertueuse. Un rôle de composition pour cette austère fille du Nord, célibataire et jamais maquillée. Le récit des excès de ces demi-célébrités, ravies de s’encanailler dans une soirée huppée où la cocaïne est consommée comme du caviar à la petite cuillère, est d’autant plus réjouissant qu’ils finissent tous au poste malgré leurs cris d’orfraies.
Une opération spectaculaire mais qui n’est que la partie visible de la vaste machination ourdie par Lediacre pour faire tomber ses « Intouchables ». Il a une technique d’interrogatoire d’une rare efficacité mise au point depuis des années : « noyage du poisson, anesthésie de l’adversaire, question faussement naïve, attaque aussi soudaine que brutale, sans négliger le coup de pied à l’homme à terre. » Ce roman policier, très réaliste tant dans sa forme que sur le fond, permet au lecteur de découvrir une facette cachée de la police française. Pas clinquante, mais très efficace.

« Lediacre et les intouchables », Didier Sénécal, Fleuve Noir, 18 €

samedi 23 septembre 2006

Roman - une baigneuse belle, mais morte


Moitié enquête policière, moitié réflexion sur l'art, ce premier roman de Philippe Authié laisse une impression bizarre d'inachevé, de mystère non résolu. Le narrateur quitte la capitale pour les montagnes ariégeoises. Il vient d'hériter d'une maison perdue dans une vallée après la disparition d'Adam, son cousin, un ancien peintre et critique d'art. Passé les premiers jours de tranquillité, le nouveau locataire découvre qu'Adam était obnibulé dans les derniers temps par un dramatique faits divers ayant secoué la région quelques mois plus tôt. Une jeune fille avait été retrouvée morte et nue au bord d'une rivière. Son père avait lui aussi été assassiné à quelques mètres. Une photo du cadavre a été pris et c'est ce cliché qui est au centre du roman. L'assassin a pris la peine de placer le corps exactement comme une peinture du XIXe siècle. La photo s'est retrouvée sur le net et un véritable culte s'est développé autour du "corps de la baigneuse". Gendarme curieux, photographe profiteur, antiquaire véreux... la galerie des personnages imaginés par Philippe Authié ne fait qu'accentuer la bizarrerie de ce roman qui fait par ailleurs la part belle à la place de l'art dans notre vie de tous les jours.
"Le corps de la baigneuse" de Philippe Authié. Editions du Seuil. 19 euros.

vendredi 22 septembre 2006

Roman historique - Alexandre et Alestria, amour historique

Alexandre le Grand a conquis la moitié de l'Europe et de l'Asie. Au prix de guerres sanglantes, romancées dans cet ouvrage épique de Shan Sa. 


 Alexandre le Grand fait partie de ces personnages historiques à la gloire sulfureuse auréolée de mystère. Un guerrier, un conquérant, intrépide et sans limite. Ce personnage, Shan Sa, se l'est approprié pour bâtir un roman épique et grandiose, plein de batailles, de complots, de grandes étendues sauvages... et d'amour.
Alexandre, quand il était enfant, s'habillait en fille. Le garçonnet, précieux et sensible, était à l'opposé de son père, Philippe, roi des rois, vainqueur des Grecs. Tout en recevant l'éducation d'Aristote, Alexandre doit finalement rejoindre l'école militaire sous les injonctions de son père. Un père violent, brutal, aimant faire la guerre et rudoyer son fils. Un fils qui en gagnant des amitiés dans la jeune élite de la Macédoine, va réussir là où beaucoup d'autres ont échoué : renverser Philippe. Il le fait assassiner et devient donc le maître incontesté en Macédoine et en Grèce. Mais cela ne suffit plus au guerrier fièrement monté sur son cheval Bucéphale. Il va partir à la conquête des territoires orientaux, attaquant les Perses pour étendre son empire. Partout où il passe, ses armées l'emporte. Il brûle des villes, récupère des généraux à l'adversaire, élabore des traités de paix audacieux, sait caresser dans le sens du poil avant de frapper à mort les comploteurs.

Au firmament du pouvoir
En quelques années d'une ascension continue, il règne sur un territoire immense. Tout le monde en parle comme le maître de l'univers. Alexandre en a conscience mais explique cette montée vers le firmament du pouvoir d'une façon très prosaïque : « Depuis la nuit des temps, la couronne terrestre n'attendait qu'un maître. Tous ceux qui la désiraient avaient échoué. Je l'avais saisie, non parce que j'étais plus fort, plus tactique, plus déterminé que mes rivaux. Moi, Alexandre de Macédoine, je ne craignais pas les astres de la décadence. Là où les hommes avaient reculé, j'avais avancé. Là où les hommes avaient renoncé, j'avais persévéré. »
Alexandre, très marqué par la violence de son père et la douceur de sa mère, espère toujours rencontrer la reine qui assurera sa descendance, sera une compagne pour la fin de ses jours. Mais il ne rencontre que courtisanes ou femelles obséquieuses. Il se console dans les bras de fiers guerriers comme Hephaestion ou Bagoas (il fait cependant émasculer ce dernier pour mieux le dominer).

Corps à corps avec une Amazone
Plus il avance vers l'Est, plus sa troupe s'amenuise. Il veut absolument tuer Darius, le roi des Perses, en fuite vers les steppes orientales. A la tête d'une petite troupe, il rencontre des guerriers nomades. Un combat féroce s'engage. Alexandre se lance dans un duel avec le plus fougueux d'entre eux. Durant quatre jours ils voyageront en se battant, s'isolant des autres militaires. Jusqu'à la révélation : le guerrier est une femme, une Amazone, Alestria. Alexandre est sous le charme, ils s'aiment, seuls dans les prairies immenses. Après, Alestria va se baigner, Alexandre raconte son bonheur : « Elle sortit de l'eau et vint vers moi. Son corps était celui d'une guerrière. Ses deux tresses noires scintillaient jusqu'à son nombril. Ses seins, ses hanches, ses cuisses brillaient et exhibaient de longues cicatrices et des plaies profondes comme des trophées. Son visage mouillé était celui d'une enfant aux lèvres charnues, aux joues brunies par le soleil. Elle me sauta au cou et me serra contre elle. » Début d'une belle histoire d'amour ? Ce serait sans compter avec les aléas de l'Histoire, la farouche détermination des Amazones, le sens tactique d'Alexandre. Sans oublier Shan Sa, seule maître à bord de ce roman rude, presque animal. Elle parvient à brosser les portraits de deux êtres d'exception, presque éternels. Victimes de leur amour fou.
« Alexandre et Alestria », Shan Sa, Albin Michel, 19,50 €

jeudi 21 septembre 2006

BD - Les portes magiques de Wisher


Les éditions du Lombard, pour leur 60e anniversaire, loin de se reposer sur leurs lauriers, lancent une nouvelle collection. Portail se veut une ouverture sur le monde fantastique : « Au-delà du Portail, la réalité que nous connaissons n’a plus cours », prévient l’éditeur. Wisher est donc le premier titre de cet univers nouveau mais que la vénérable maison belge connaît bien avec Thorgal ou Aria. Sébastien Latour, le scénariste, signe son premier album. Le second suit en octobre, toujours au Lombard, avec Griffo au dessin. De Vita s’est chargé de l’illustration de Wisher. Dans un Londres futuriste (mais pas trop), un jeune marchand d’art, Nigel, est sur le point de conclure une affaire importante avec un faussaire, Karfeld. Une rame de métro en décide autrement. Karfeld semble s’être suicidé. Mais tout le monde doute, Nigel le premier. Il va devenir un personnage très recherché découvrant qu’il est au centre d’une guerre millénaire entre les hommes et les créatures féeriques. L’intrigue est bien menée, certains personnages (comme les policiers du M10) très réussis. De Vita gagne en assurance et en inventivité à chaque album. Un surdoué qui ira loin. (Le Lombard, 13 €)

mardi 19 septembre 2006

BD - Fuis, petit, fuis !


1941, dans une campagne du Nord de la France. Le jeune Simon ne se doute pas du drame dans lequel est plongé le pays. Il aime, en allant à l’école, regarder les oiseaux. Il aime tant les voir voler. Simon est dans une pension chez le curé du village. Ce dernier, bon cœur, ne peut pas grand-chose contre les forces maléfiques qui s’abattent sur le région. Le Juif est devenu l’ennemi de la Nation. Simon est juif, ce n’est qu’un enfant, mais il est des « bons Français » pour le dénoncer. Et les gendarmes font leur travail. Sans trop se poser de question. Heureusement, le curé a de la ressource et envoie Simon à Paris, dans le dernier refuge qu’il connaisse : une maison de correction. Le petit Simon, l’ami des oiseaux, va se retrouver en cage avec des petits caïds qui vont eux aussi lui faire comprendre qu’il n’est pas comme les autres. Un peu dans la veine du « Sac de billes » de Joseph Joffo, cette BD de Galandon (scénario) et Monin (dessin) intitulée "L’envolée sauvage" raconte la fuite de cet innocent dans une France prête aux pires extrémités pour bien se faire voir de l’occupant. (Bamboo, Angle de vue, 12,90 €)

lundi 11 septembre 2006

BD - Amours transparentes ches les Passe-murailles


Ils sont jeunes, urbains, modernes. Ils ont l'air normaux. En couple ou célibataires, leur vie est faite de repas entre amis, de soirées, de journées de travail... Mais ils, ou plus exactement elles, ont un secret fantastique . Le pouvoir de passer à travers les murs et les êtres humains. Cette goutte d'extraordinaire dans un quotidien banal transforme ces tranches de vie en nouvelles passionnantes. Corinne, par exemple, partage sa vie entre son petit ami, Michel, son amie Brigitte et son python, Monty. Quand ce dernier avale la veste en latex de Michel, Corinne dévoile son secret et va récupérer le vêtement à l'intérieur de son serpent. Elle y trouve également un deuxième bout de tissu qui va changer sa vie. Corinne qui, quand elle était jeune, a joué avec son pouvoir, jusqu'à l'extrême. Laurence a le même don. Elle l'utilise, un soir de beuverie, pour se venger d'un voisin un peu trop dragueur. Sans en mesurer toutes les conséquences. Ecrites par Cornette, ces histoires sont dessinées par Oiry qui, sous un trait qui semble parfois hésitant, bluffe le lecteur par ses ambiances. (Les Humanoïdes associés, 10 €)

dimanche 10 septembre 2006

BD - Luka pratique un sport dangereux


Malgré toute sa bonne volonté et une cascade périlleuse, Luka n'a pas réussi à empêcher un commando d'enlever un jeune footballeur prometteur. Carlito Quaranta est d'origine cubaine. Repéré en Floride, il vient d'être « acheté » par un club de la côte d'Azur dont le président est très ambitieux. Mais le passé de Carlito semble le rattraper. Le passé de sa famille exactement car son père est un des responsables des associations anticastristes qui militent pour la chute de Fidel Castro. Luka, qui était chargé de le protéger, s'en veut énormément. Et se demande qui sont ces hommes sur armés arrivés en hélicoptère. Il aura un début de réponse quand le père de Carlito réapparaît et explique que la CIA serait derrière cette opération. Une course contre la montre est lancée. Denis Lapière, le scénariste, délaisse un peu la psychologie de ses personnages pour se concentrer sur l'action. Une aubaine pour Mezzomo, le dessinateur, qui jongle entre voitures, jets privés, blindés et autres moyens de locomotion. Et pour une fois, Luka n'utilise pas son VTT... (Dupuis, 9,80 €)

samedi 9 septembre 2006

BD - Grosses amourettes des coeurs boudinés de Krassinsky


Elles sont un peu rondes mais très appétissantes. Les trois héroïnes de ce deuxième tomes des « coeurs boudinés » de Krassinsky. Fanny, Martha et Mimi sont au centre de ces trois récits complets se déroulant dans le Sud de la France, New York et la région parisienne. Dans la première histoire, Ricky Duffaux, célèbre chanteur pour midinettes, tombe sous le charme de Fanny, jeune journaliste rondouillarde. Il devient rapidement la risée de la presse à scandale car il était plutôt abonné aux top-models. Martha est serveuse le jour, grande prêtresse d'une communauté gothique la nuit. Quand son patron lui refuse une augmentation et lui fait des remarques sur son embonpoint, elle se venge en demandant l'aide de ses amis disciples « vampires ». Enfin Mireille, récemment larguée, se lance dans des opérations de séduction tous azimuts tout en adoptant un chien. Mais à trop lancer de lignes, elles risquent de s'emmêler. Des nouvelles rafraîchissantes, parfaitement racontées et dessinées par Krassinsky. (Dargaud, 13 €)

vendredi 8 septembre 2006

BD - Le poney sauvage quitte son blog


Il y a eu Frantico, voici Lisa Mandel. Les blogs dessinés finissent parfois en album. Frantico était un imposture, Lisa Mandel elle est une véritable dessinatrice de BD. Nini Patalo chez Glénat, Eddy Milvieux chez Milan : elle s'adresse plutôt aux jeunes. Dans ce blog, commencé en août 2005 et terminé en mars 2006, elle raconte notamment son installation provisoire en Argentine. Dans un avant-propos inédit, elle explique au lecteur l'avantage du blog : « Je peux y raconter mon quotidien, tout en préservant mon intimité. C'est aussi un moyen de relativiser, de prendre de la distance avec les événements ». C'est dans ce dernier exercice qu'elle excelle le plus. Elle n'a pas son pareil pour se moquer de sa fainéantise, de sa parano, de tous ces travers qui lui pourrissent la vie. En Argentine elle tente de prendre un nouveau départ. A l'issue de ce premier séjour, elle décide de s'y installer définitivement quelques mois plus tard.  (Delcourt, 12,90 €)

jeudi 7 septembre 2006

Roman - L'appel du collège

Jeanne Benameur, riche de son expérience personnelle dans l'enseignement, raconte par le menu le quotidien d'un collège dans "Présent !". 

Dans un collège, la première chose que l’on fait une fois en classe, c’est l’appel. La principale, en marchant dans les couloirs vides, le constate. « Les professeurs s’assurent, nom après nom, que les élèves sont bien là. De qu’elle présence s’assure-t-on ainsi chaque matin ? On fait l’appel à l’armée, dans les prisons, à l’école. Comme si, dans les lieux clos, il fallait toujours que la présence soit établie. Il faut un registre, une feuille ; il faut noter. C’est un comble. Est-ce que la clôture crée le doute ? » Jeanne Benameur, professeur dans les établissement dits difficiles jusqu’en 2001, aborde un thème qui visiblement lui tient très à cœur. Il y a eu déjà des centaines d’essais sur l’enseignement, le blues des professeurs, la baisse de niveau des élèves et autre problème perpétuellement remis sur le tapis. Mais Jeanne Benameur, loin de l’étude théorique, s’est appuyée pour écrire ce roman sur ce qu’un collège a de plus cher : les êtres humains. Car un professeur, un élève et même la principale restent avant tout des êtres humains, avec leurs doutes et leurs passions.

Le miracle Kafka
Par petites touches, comme des scènes en couleur dans une longue journée grise, on va faire connaissance avec quelques-uns de ces habitués du collège. Il y a le prof de littérature, qui ne lit plus par plaisir, le gardien, insipide, invisible, mais qui sait tout des 30 dernières années du collège, la déléguée de classe prenant son rôle, comme la démocratie, très au sérieux, la jeune prof en pleine dépression, l’élève introvertie ou la petite brute qui pense que le respect ne s’obtient que par la force. Tout un petit monde, résumé de notre société ne fonctionnant que grâce à ses contradictions. Il y a surtout dans ce roman plusieurs moments très émouvants comme quand le prof de français décide de ne pas faire l’appel, de simplement lire un texte de Kafka à ses élèves et qu’il s’étonne de les voir captivés. Ou quand la responsable du centre de documentation justifie la réussite de ses ateliers d’écriture car « quand les élèves croient en ce qu’ils font, ils ne s’arrêtent plus. Ils travaillent. Ne rien faire n’est pas ce qu’ils recherchent. Il faut du sens à ce qu’on leur demande, c’est tout. »
Inoubliable aussi le portrait de cette professeur des Sciences de la vie et de la terre, larguée, désespérée, incapable de retourner en classe. « Elle se regarde dans le miroir de la salle de bains. Si on lui disait Demain tu ne verras plus d’élèves, tu gagneras ta vie autrement, elle se sentirait libre et joyeuse à nouveau. Jeune. Elle aurait à nouveau envie de tout ».
Une journée au collège qui s’achève par le conseil d’orientation d’une classe de troisième. Des gamins qui ne savent pas ce qu’ils vont faire de leur vie. Et qui risquent déjà de se retrouver sur une voie de garage. Loin de la caricature, Jeanne Benameur offre une galerie de portraits émouvants et justes.
« Présent ! » de Jeanne Benameur. Éditions Denoël. 16 euros.

mercredi 6 septembre 2006

BD - Chasse à la bête dans le Marquis d'Anaon


Pas facile de se faire un nom dans les dessinateurs réalistes. Après les Giraud, Hermann et autres Blanc-Dumont on se dit que tout a déjà été fait. Que ce niveau de perfection est inégalable, qu'on ne peut pas faire mieux. Erreur. Mathieu Bonhomme avec sa série « Le Marquis d'Anaon » prouve que des jeunes, dans cet exercice de classicisme périlleux, peuvent se hisser au niveau des grands maîtres. Ce quatrième tome des aventures de ce anti-héros absolu relate la chasse, dans les Alpes, d'une bête qui décime les troupeaux. Ecrite par Fabien Vehlmann, cette BD se retrouve au coeur de l'actualité avec la mort de l'ourse Palouma. Mais ce n'est qu'une anecdote à côté des planches, véritables tableaux, se passant dans les sommets enneigés. 
Dargaud, 13 €

mardi 5 septembre 2006

BD - Rockeurs français rêvant de Londres


1990 en Provence. Deux copains, Thibault et Alex ont pris leur décision : au soleil de Marseille, ils préfèrent la pluie de Londres. Exactement c'est le milieu musical londonien qui les fait rêver. Ils prennent une année sabbatique et rejoignent l'Angleterre en bus. Ils ne partent pas tout à fait à l'aventure puisque Thibault a déjà vécu une année outre-Manche dans le cadre d'un échange Erasmus. Il compte se faire héberger chez son ancien correspondant. Mais arrivé sur place, il trouve porte close. Andrew a déménagé. C'est le début d'une grosse galère. Sylvain Runberg a puisé dans ses périples britanniques pour élaborer cette histoire  dessinée par Phicil.
Futuropolis, 4,90 €

lundi 4 septembre 2006

BD - Raspoutine, le grand manipulateur


Mais que faisait Raspoutine dans les montagnes syriennes en 1900 ? Tarek, le scénariste de cette nouvelle série dessinée par Vincent Pompetti donne une partie de réponse. Ce manipulateur né aurait volé dans un monastère orthodoxe un manuscrit portant un des secrets les mieux gardé de l'Eglise. Avec cette arme absolue il va pouvoir se lancer à la conquête du pouvoir en Russie. Mais au Vatican, les plus hauts responsables voient d'un très mauvais oeil l'ascension de ce « fornicateur ». Si la première partie de l'album est un peu austère, la suite, quand Raspoutine impose sa fascination à toutes les jouvencelles de Saint-Pétersbourg, est beaucoup plus intéressante. Sa science de la conspiration fait des merveilles. EP Éditions, 12,60 €

dimanche 3 septembre 2006

BD - Aventures au cimetière


La bande dessinée se féminise. Notamment côté dessin. Depuis quelques années on assiste à l'éclosion de nouveaux talents. Souvent influencées par le manga, ces petites nouvelles font merveille dès qu'il y a un peu de sentiment et de féerie. Lillycat fait partie de cette prometteuse génération. Son premier album a pour héroïne Mina, une jeune adolescente renfermée et nostalgique. Sa maman est morte il y quelques années. Ce n'est pas dit clairement mais le lecteur comprend qu'elle s'est suicidée. Le père tente de refaire sa vie. Mina rejette ses conquêtes et la veille d'Halloween décide même de passer la nuit sur la tombe de sa mère. Mais la nuit, dans le cimetières, des phénomènes étranges et mystérieux peuvent se produire. Mina va être entraînée au pays des goulues. Un monde fermé aux vivants. C'est à cette occasion que Mina se rend compte qu'elle n'est pas comme toutes les petites filles. Elle possède un « coeur de cramé ». De ce fait elle se retrouve avec des puissances ténébreuses aux trousses. Une série pleine d'invention écrite par Lylian et Nori. (Les Humanoïdes Associés, 12,90 €)