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dimanche 2 février 2025

BD - Charleroi résiste aux Nazis avec les Amis de Spirou


Le scénariste Jean-David Morvan, longtemps cantonné à la science-fiction, a élargi sa palette en explorant le passé, notamment la période de la seconde guerre mondiale. Il a raconté la vie de résistante de Madeleine Richaud, celle d’Irena face à Klaus Barbie et aborde désormais la Résistance aux Nazis en Belgique.

Il a confié à David Evrard le dessin de l’histoire romancée des amis de Spirou, un club de lecteurs de l’hebdomadaire BD de Marcinelle, près de Charleroi en Belgique, créé par Jean Doisy. Les membres du club vont participer à la lutte contre l’occupation allemande. Comme Jean Doisy, le créateur de la rubrique du Fureteur, grand résistant belge devant l’éternel.

Dans cet album, basé sur de véritables personnages mais avec de jeunes héros imaginaires, la petite bande de lecteurs des aventures du groom de Valhardi ou de Tif et Tondu, va affronter un officier nazi spécialisé dans les animaux.

L’occasion pour Morvan d’utiliser un personnage emblématique des éditions Dupuis. Un superbe hommage, à la jeunesse qui ne se résigne pas, qui a des valeurs et prend tous les risques pour la liberté.
« Les amis de Spirou » (tome 2), Dupuis, 72 pages, 15,95 €

jeudi 24 octobre 2024

BD - Madeleine, l'indestructible


Remarquable travail de mémoire que celui entrepris par Morvan (scénario) et Bertail (dessin) en compagnie de Madeleine Riffaud. Cette dernière leur a ouvert son coeur, sa mémoire et ses archives pour raconter comment, étudiante à Paris, elle n'a pas hésité à rejoindre la Résistance à l'occupant nazi. Dans cette troisième partie, Madeleine est en très mauvaise posture. Alors que les Alliés viennent de débarquer en Normandie, elle vient de tuer un soldat allemand sur le pont de Solférino.

Capturée par la milice, elle est confiée aux bons soins de la police française. Celle qui collabore. Plus que de raison. Au commissaire divisionnaire Fernand David, surnommé « Les mains rouges ». Madeleine va comprendre d'où vient son surnom après être passée dans sa poigne de fer. Tabassée, torturée, Madeleine ne dira rien. Pas question qu'elle dévoile aux traîtres les noms de ses camarades. Une obstination, un courage, qui poussent à bout le commissaire. Il la livre à la Gestapo.


Durant de longues semaines Madeleine sera torturée, frappée, affamée. Mais jamais elle ne pliera. Elle aurait pu car elle sait parfaitement que trois jours après son arrestation, tous ses compagnons de Résistance auront fait le nécessaire pour disparaître. Mais c'est plus fort qu'elle, elle ne lâche pas le moindre nom. Après des jours de privation dans un cachot, le verdict tombe : fin des interrogatoires, dans une semaine elle sera passée par les armes.

Pourtant cette trompe-la-mort va s'en sortir et pourra même participer, à peine remise sur pied, à la libération de Paris et célébrer ses 20 ans en même temps que le départ des Allemands. Aujourd'hui Madeleine Riffaud vient de fêter ses 100 ans.

Une vie extraordinaire pour une femme d'exception. En plus des BD, elle continue à témoigner, notamment dans les écoles. Car si jamais elle ne s'est déclarée vaincue, elle sait aussi que la victoire s'oublie trop facilement. Les derniers événements en Europe prouvent que les générations futures n'apprennent pas assez des précédentes.

« Madeleine, Résistante » (tome 3), Dupuis Aire Libre, 128 pages, 23,50 €
 

mardi 10 janvier 2023

BD - Les Amis de Spirou résistent

Plus ancien hebdomadaire de bande dessinée pour les jeunes, Le Journal de Spirou a une très longue histoire derrière ses plus de 4400 numéros hebdomadaires. Lancée en 1938 sur une intuition par Jean Dupuis, un imprimeur de Marcinelle près de Charleroi en Belgique, cette revue se voulait une concurrence directe aux titres français qui inondaient le marché outre-Quiévrain.

A sa tête Jean Doisy, journaliste regorgeant d’idées. Il a inventé l’interactivité avant l’heure en proposant aux jeunes lecteurs de lui poser des questions sur tout et n’importe quoi. Il donnerai les solutions dans sa rubrique du Fureteur. Un Fureteur qui rapidement devient une des vedettes du journal avec Spirou, bien évidemment mais aussi Tif et Tondu ou Valhardi. Et à la demande des lecteurs, dès la fin de la première année de parution, il met en place une structure ressemblant à une organisation scout, Le club des Amis de Spirou. Des milliers de membres, une charte ou code d’honneur, un langage codé et la volonté d’inculquer des valeurs à cette jeunesse pleine de vitalité. Cette belle aventure, lancée en août 1938 arrive alors que l’Europe plonge dans la guerre.

La Belgique, rapidement occupée par l’armée allemande, vit sous la coupe des nazis. La collaboration bat son plein avec l’apparition du parti Rexiste.
Mais la Résistance n’est pas en reste avec l’union des communistes et de certains groupe catholiques. Le Club des Amis de Spirou, par sa philosophie altruiste trouve toute sa place, même si ses membres ne sont que des enfants. C’est cet engagement qui est au centre de cette nouvelle série écrite par Jean-David Morvan et mis en images par David Evrard. Un duo qui connaît parfaitement cette période sombre de l’Europe après le succès de leurs séries Irena et Simone (chez Glénat, ce dernier titre remportant le prix des collèges ce week-end à Angoulême).

Ce premier gros album de 72 pages raconte la formation de cette bande de six jeunes Belges de Marcinelle, privés de leur magazine à cause de la censure allemande. Ils décident d’entrer dans la clandestinité et d’imprimer eux aussi des feuilles volantes de gags se moquant des occupants. Un récit humoristique devenant grave quand Jean Doisy prononce l’oraison funèbre de deux des six Amis de Spirou, morts au combat une année plus tard.

Entre humour, pédagogie et émotion, cet album exemplaire est capital pour que les générations futures n’oublient pas le sacrifice de certains jeunes capables de dépasser leur propre petite personne pour oeuvrer en faveur de l’intérêt général, de la liberté et d’un idéal égalitaire. Et pour bien s’imprégner de l’époque, un poster est offert en fin de volume reprenant les 9 préceptes du code d’honneur dont le premier donne son titre à l’album : Un ami de Spirou est franc et droit.

« Les amis de Spirou » (tome 1) de Jean-David Morvan (scénario), David Evrard (dessin) et Ben BK (couleurs), Dupuis, 14,95 €


vendredi 17 avril 2020

BD - Les androïdes vont-ils au Paradis ?



L’intelligence artificielle est partout. Pas un objet du quotidien dont il n’existe une version dite connectée. Ainsi le savoir virtuel augmente, s’amplifie, va forcément prendre le dessus un jour au l’autre. 
Pour éviter tout dérapage, il suffit de brider l’autonomie de ces cerveaux électroniques. Il suffit… Le tome 7 de la série Androïdes aborde ce sujet et va beaucoup plus loin. Les androïdes en vedette dans cette histoire écrite par Morvan et dessinée par Elia Bonetti ont tous l’apparence de jeunes femmes souriantes. Logique car leur rôle est de recueillir les dernières volontés des Humains venant de mourir. 
Dans ce futur lointain, la Terre a colonisé des centaines de planètes. Et croisé la route d’une autre espèce à l’égo surdimentionné, les Insankatilers. Quand ils débarquent sur une colonie, ils sont sans pitié, tuant des milliers d’habitants. C’est juste après que les Anges n’interviennent. Pour recueillir les mémoires des morts. Des escouades d’androïdes et au milieu d’elles, une qui présente une malfaçon. Normalement, une fois les mémoires pompées, elles sont transférées sur une grand ordinateur et effacées dans le cortex des anges qui redeviennent vierges. 
L’androïde dont on suit l’évolution, conserve ces mémoires et va, petit à petit, emprunter aux humains leurs sentiments. Le récit, déroutant au début, prenant ensuite une direction très « résistance contre oppression », va finalement se conclure sur une note très étonnante. Pas étonnant quand on sait que ce 7e titre de la collection est signé Jean-David Morvan, un des meilleurs scénaristes de SF de la BD internationale actuelle.

« Androïdes » (tome 7), Soleil, 14,95 €


samedi 28 mars 2020

BD - Deux grands classiques adaptés

Loin de s’opposer à la littérature, la bande dessinée peut se révéler un excellent complément. Notamment en offrant des adaptations de grands classiques, sorte d’escabeau pour accéder à des textes parfois un peu difficiles. 



On retrouve à l’adaptation de « L’arrache-cœur » de Boris Vian un scénariste expérimenté. Morvan (Sillage) n’a jamais caché sa passion des grands écrivains contemporains. Après Edgar Allan Poe, Mark Twain ou Alexandre Dumas, c’est à une montagne qu’il s’attaque. Car L’arrache-cœur de Boris Vian est un roman âpre, touffu, et compliqué. Il s’en tire au final parfaitement avec l’aide des dessins en noir et blanc et au pinceau de Maxine Péroz. On est d’entrée mis dans le bain, le psychiatre, arrivant dans une maison isolée, découvre une femme sur le point d’accoucher. Elle pointe un revolver en direction d’une porte close.


Derrière il y a Angel, le mari, le père. Cela fait deux mois qu’il est enfermé dans cette pièce car sa femme « hait son gros ventre et ne veut pas qu’on la voie dans cet état. » Et comment a-t-il fait pour tenir aussi longtemps cloîtré (la réponse nous intéresse particulièrement, nous qui sommes de millions actuellement à garder la chambre) : « J’attends que tout soit fini en pensant à des choses intimes. Et en dormant, je pense à ses fesses. » Le ton est donné. Cet Arrache-cœur est diablement charnel.

Autre genre avec « Pot-Bouille » de Zola adapté par Cédric Simon et dessiné par Éric Stalner. Le roman de la saga des Rougon-Macquart raconte l’ascension d’Octave Mouret, jeune provincial monté à Paris en plein réaménagement par Haussmann. On suit ses manigances pour prendre le pouvoir en séduisant les bonnes personnes.


Là aussi c’est un roman charnel que les auteurs offrent aux lecteurs après leur excellente adaptation de « La curée ». En fin d’album, Philippe Mellot replace l’intrique dans son contexte historique avec des articles illustrés de photos et de gravures d’époque

« L’arrache-cœur », Delcourt, 17,50 €
« Pot-Bouille », Les Arènes BD, 20 €


dimanche 1 juillet 2018

BD - Solution finale, avant, pendant et après avec Wannsee et Irena


La bande dessinée comme outil de mémoire. Loin de n’être qu’un genre réservé aux plus jeunes ou à la distraction, la BD a gagné depuis longtemps ses lettres de noblesse. Ces deux albums sont l’exemple même d’un vecteur de communication grand public permettant de mettre en lumière des pans de notre histoire qu’il ne faut surtout pas oublier, les derniers développements de l’actualité (crise migratoire, populisme au pouvoir en Italie ou en Pologne) montrant que rien n’est gagné en ce qui concerne la paix en Europe. 

Fabrice Le Henanff aborde de façon frontale l’histoire de la solution finale des nazis contre les Juifs. Tout a débuté, de façon « pratique » et « matérielle », le 20 janvier 1942 dans une villa cossue de la banlieue de Berlin. 
À Wannsee, une vingtaine de cadres au cours d’une réunion voulue par Heydrich et dont le compte-rendu est rédigé par Heichmann. Là, dans un milieu bourgeois, entre champagne et buffet de charcuterie, sera élaborée la solution finale voulue pas Hitler : « nettoyer » l’Europe. Un plan pour évacuer puis exterminer dans des camps dotés de fours crématoires reliés aux chambres à gaz des millions de Juifs. 
La froideur du récit, donne l’ampleur de l’horreur de ces hommes dont certains échapperont longtemps à la justice. Un album à montrer dans toutes les écoles. 

Irena, la «Juste» Autre style avec « Irena » écrit par Morvan et Trefouël et dessiné par Evrard. Dessin « enfantin » pour montrer l’horreur de la mise en place des décisions de Wannsee. En Pologne, le ghetto est vidé de ses milliers d’habitants. Direction les fameux camps, sans espoir de retour. Sauf si vous avec la chance de croiser la route d’Irena Sendlerowa. 


Cette Polonaise, catholique, a sauvé des milliers d’enfants en les plaçant dans des familles polonaises sous de fausses identités. 
Dans cette troisième partie, on retrouve une de ces petites rescapées, aujourd’hui maman dans l’État d’Israël. L’histoire de cette Juste, exemplaire à bien des égards, ne peut qu’émouvoir. Surtout quand la vielle dame se retrouve confrontée aux milliers de fantômes de ceux qu’elle n’a pas réussi à sauver de la barbarie nazie. 
Là aussi, la lecture en classe devrait être obligatoire. 

➤ «Wannsee», Casterman, 18 €

➤ « Irena » (tome 3), Glénat, 14,95 €

samedi 4 mars 2017

BD : Irena, héroïne du ghetto de Varsovie



Le décalage est étonnant. Mais vite dépassé par la force du récit. Décalage entre le dessin très simple de David Evrard (mieux connu sous le pseudonyme de E411) et le récit du combat d’Irena Sendlerowa en faveur des enfants du ghetto de Varsovie en pleine guerre mondiale. En mars 1941, tous les Juifs de la capitale polonaise sont parqués dans le centre-ville. Interdiction pour eux de sortir. Famine et maladies font des ravages. Seuls les bénévoles du département d’aide sociale ont le droit d’aller les aider. Parmi eux Irena, jeune femme dévouée et courageuse. Face à l’innommable, elle se rebelle et malgré le danger, fait sortir clandestinement des enfants de cet enfer imaginé par les nazis pour exterminer à petit feu tout un peuple. Un biopic prévu en trois tomes, indispensable au fameux devoir de mémoire destiné aux générations futures.
➤ « Irena » (tome 1), Glénat, 14,95 €

dimanche 8 novembre 2015

BD : Sillage face à un redoutable virus psy


Nävis, la dernière humaine de la série de SF « Sillage », est de nouveau mise à contribution pour sauver le convoi d'espèces extraterrestres à la recherche de nouvelles planètes à coloniser. Alors qu'elle tente de faire intégrer la jeune Juliette à Sillage, une entité est libérée par mégarde. Il s'agit d'un virus qui s'attaque à toute espèce qui a des pouvoirs psy. L'effet est immédiat : dégradation physique et surtout, tels des zombies incontrôlables, l'envie de tuer et détruire. Bref rien ne va plus dans Sillage. Un scénario bourré d'action signé Morvan, dessiné par Buchet, toujours aussi pointilleux dans ses créations aliens. Bien que publiées en grand format, ces planches bourrées de détail mériteraient une exploitation encore plus grande. Alors si vous voulez pleinement profiter de ce grand art, munissez-vous d'une loupe et n'hésitez pas à détailler chaque case.

« Sillage » (tome 18), Delcourt, 14,50 €

lundi 9 février 2015

BD - Monde sauvage et primitif


Quand on parle d'enfant sauvage, on ne retient que l'histoire de Victor, le jeune découvert en Aveyron et dont François Truffaut a transformé l'existence (et surtout le retour à la vie civilisée) en chef-d'œuvre du cinéma. Mais il existe plusieurs cas similaires. 
Ce gros roman graphique de plus de 200 pages est la biographie de Marie-Angélique Le Blanc, née en 1712 aux Amériques et morte en 1775 à Paris. Morvan et Bévière, les scénaristes, se sont librement inspirés du livre de Serge Aroles. Gaëlle Hersent assure la mise en images. 
En Champagne, des chasseurs découvrent au bord d'une rivière le cadavre d'une jeune Noire. A ses côtés, ce qu'ils prennent pour un démon. En réalité c'est une fillette retournée à l'état sauvage. Quelques jours plus tard, la faim la pousse à s'approcher des habitations. Capturée, elle est confiée au noble du village. Celle qui n'a pas de nom (elle ne sait pas parler) devient la sauvageonne qui mange de la viande crue qu'elle chasse à main nue (lapin, grenouilles...) et dort à même le sol. Mais en 1731, toute créature de Dieu doit recevoir un enseignement religieux. Elle est placée dans un couvent et sous la férule de rigides sœurs, acquiert des rudiments de langage et de maintien. Par contre, côté alimentation, elle ne supporte pas les aliments cuits et dépérit dès qu'elle n'ingurgite plus sa ration de chair saignante. 
D'où vient-elle ? Par quelles épreuves est-elle passée ? Les auteurs alternent avec brio les scènes actuelles avec les retour sur le passé de celle qui se nomme en réalité Louve quand elle était dans une tribu indienne au Canada puis Marie-Angélique après son adoption par des colons français. Passionnante, cette vie de souffrance et d'errance donne matière à une BD d'une exceptionnelle densité. 
Au dessin, Gaëlle Hersent, pour sa première réalisation, place la barre très haut. Elle alterne les ambiances et les époques avec une même constance : rendre cette femme aussi mystérieuse qu'attachante, aussi sauvage que torturée par un secret inavouable.
« Sauvage », Delcourt, 24,65 € 

lundi 17 novembre 2014

BD : Mutations planétaires dans "La couleur de l'Air" de Bilal et "Sillage" de Morvan et Buchet

bilal, morcan, buchet, sillage, couleur de l'air, casterman, delcourtEt si notre bonne vieille planète, lasse de souffrir sous nos coups de boutoirs polluants, décidait elle-même de se réinitialiser. Comme une intelligence supérieure qui aurait donné sa chance aux humains, en vain. Ce scénario de science-fiction est au centre de la troisième et dernière partie de la trilogie initiée par Enki Bilal. Après Animal'z puis Julia & Roem, « La couleur de l'air » marque la fin de cette étonnante utopie naturaliste. Dans un zeppelin devenu incontrôlable, cohabitent un homme, le narrateur, une femme, un garde de la sécurité et deux fillettes, des jumelles. Devenu incontrôlable, l'engin dérive au dessus d'une terre en pleine mutation. Les villes sont englouties, certains continents se rapprochent les uns des autres, des montagnes s'effacent, des volcans naissent. Ils voient tout cela de la-haut, en traversant des nuages opaques aux effets surprenants, les fillettes se mettant à réciter des extraits d'oeuvres de philosophes. On retrouve également les personnages des deux précédents albums, Kim et Bacon dans leur villa luxueuse, le groupe des « shakespeariens » ou le couple aux mains d'un cannibale de la pire espèce, préfigurant l'évolution inéluctable de l'espèce humaine si rien n'est fait. Sans oublier toute une arche de Noé. Les poissons et mammifères marins se mettent à voler dans les airs, d'autres espèces (du lézard au gorille en passant par le crocodile) ont trouvé refuge sur le zeppelin. Cet album, très attendu, ne décevra pas les amateurs de Bilal. Il a multiplié les immenses cases format scope, comme pour nous faire regretter les moyens techniques trop limités du cinéma. Il joue avec les couleurs, du gris à l'arc-en-ciel en passant par un passage dans le noir complet que ne désavouerait certainement pas Soulages. Du grand art, bien au-delà de la simple bande dessinée.
bilal, morvan, buchet, sillage, couleur de l'air, casterman, delcourtLe 17e tome de la série Sillage est elle beaucoup plus classique dans sa forme. Cela n'enlève rien au talent de Philippe Buchet, le dessinateur. Le scénario de Morvan envoie l'héroïne, Navis, dernière humaine dans le convoi des mondes extra-terrestres, sur la planète Tri-JJ 768. Elle est parfaite dans cette mission (dérober un mystérieux objet) car elle connaît parfaitement le terrain. Elle y a déjà fait un séjour (Engrenages, tome 3) et a même eu un enfant avec un autochtone, Clément Vildieu, devenu chef de la rébellion. Un album particulièrement rythmé avec l'arrivée d'un nouveau personnage, Jules, neveu de Clément, petit génie intrépide mais pas aussi net qu'il y paraît. Il faudra donc attendre le tome 18 pour tout savoir sur les dessous cachés de cette mission périlleuse.
« La couleur de l'air », Casterman, 18 €

« Sillage » (tome 17), Delcourt, 13,95 €

samedi 17 mai 2014

BD - Espions de compétitions


Ça ne plaisante pas dans la petite coterie des espions internationaux. Pas de quartiers. Une acrimonie encore plus exacerbée tous les quatre ans lors du « Kontest ». Il s'agit d'une sorte de jeux olympiques des forces spéciales. Huit équipes, autant de codes à récupérer pour au final acquérir dans un coffre les dizaines de secrets d'État mis en jeu. L'idée de ce scénario est de Jean David Morvan. Le créateur de Sillage, pour cette série on ne peut plus internationale, a sélectionné un dessinateur coréen. Kim Jung Gi dessine les scènes d'actions, les explosions et les flingues comme d'autres, en France... les gros nez. Impossible de faire plus virtuose. 
La preuve en image : un flash code en couverture permet de voir l'artiste au travail. Certains dessinateurs européens, en visionnant la scène, ont abandonné le métier pour se reconvertir comme traders (fausse information propagée par le Gorafi mais qui a le mérite de faire sourire...) Parmi les 8 pays, la France : souvent qualifiée en finale mais jamais gagnante. Mais on est loin du concours de l'Eurovision. La claque graphique est monumentale !

« Spy Games » (tome 1), Glénat, 13,90 €
En bonus, le dessinateur virtuose en plein travail :




jeudi 10 avril 2014

BD - Sherlock Fox le renard curieux de Morvan et Du Yu


Commissaire de police méticuleux et intransigeant, Sherlock Fox est un renard curieux et observateur. Il est le meilleur dans sa catégorie. Une excellence au détriment de sa vie personnelle, vide et solitaire. Ce héros imaginé par Morvan et dessiné par Du Yu (encore un petit génie chinois déniché par le scénariste de Sillage) est un « animain », des animaux qui ont su abandonner leurs instincts et vivre comme des humains. Après avoir résolu une énigme à base de fuite de capitaux pour cause d'addiction au jeu, le policier velu est chargé de découvrir à qui appartiennent des ossements retrouvés dans des bois. 
Sherlock va faire une découverte horrible : les os ont été rongés ! Une affaire de zoophagie ! C'est la première de sa carrière et cela remet bien des certitudes en doute dans cette société pacifiée. Mais ses découvertes ne s'arrêtent pas là : les os sont ceux d'une espèce inconnue des autorités scientifiques. 
Dans cette enquête policière classique, Morvan a mis beaucoup de philosophie et d'interrogation existentielle. L'immoralité d'être vivants s'entre dévorant peut sans problème être ramenée aux dérives de notre société d'exploitation du faible par le puissant.

« Sherlock Fox » (tome 1), Glénat, 14,95 €

mardi 8 octobre 2013

BD - La famille de Nävis


Au rythme soutenu d'un album par an, Jean-David Morvan et Philippe Buchet font vivre le monde de Sillage. Des aventures spatiales épatantes avec en toile de fond la quête de Nävis, dernière terrienne, autour de son identité. Les aléas du convoi (immense train de vaisseaux spatiaux dérivant dans la galaxie) sont un peu mis de côté pour recentrer l'intrigue sur la belle et fougueuse orpheline. Celle qui a longtemps cru être la dernière représentante de son espèce a finalement retrouvé quelques humains. Un contact de courte durée mais qui lui a permis de découvrir l'amour et d'avoir un enfant. Oui, Nävis maman ! Que les fans se rassurent, l'aventurière ne va pas remiser ses sabres pour les couches culottes. Morvan, le scénariste, a trouvé la parade non seulement pour éviter la grossesse, l'accouchement et l'allaitement, mais également l'enfance du marmot. C'est un adulte, aussi impétueux qu'elle, que Nävis découvre au détour d'un complot. Et dans ce 16e tome, ils ne seront pas trop de deux pour sauver Sillage d'une destruction programmée. Beaucoup de baston, des aliens en pagaille et quelques pleurs : un savant dosage pour une série devenue incontournable.

« Sillage » (tome 16), Delcourt, 13,95 €

lundi 15 avril 2013

BD - Tous les visages de Spirou

Rob-Vel
est le créateur de Spirou. Dessinateur français, embauché par Dupuis pour animer le journal qu'il venait de créer, Spirou devait incarner cette jeunesse espiègle et débrouillarde. Son métier lui permet de croiser quantité de personnes. Problème, le décor, le Moustic Hôtel, est trop réducteur.


Jijé, touche-à-tout et stakhanoviste de la planche à dessin reprend les destinées du personnage vedette de la revue à la faveur de la guerre. Premier ajout d'importance le personnage de Fantasio. Spirou, trop sérieux, se retrouve en duo avec un farfelu permettant de multiplier les situations cocasses. Les histoires sont courtes et résolument comiques.


Franquin
hérite de Spirou par défaut. Jijé, part aux USA avec l'espoir d'être embauché dans les studios Disney. Le jeune apprenti prend le relais en pleine histoire. Il lui faudra quelques années pour s'accaparer cet univers. Rapidement il lancera son héros dans des histoires plus longues, avec plus d'aventure, des intrigues complexes et des voyages. C'est l'âge d'or du personnage, avec l'arrivée du comte de Champignac, du Marsupilami de Zorglub ou de Zantafio.

Fournier est « désigné » pour succéder à Franquin, dépressif et accaparé par Gaston. Le jeune dessinateur breton imagine un Spirou plus impliqué dans le monde actuel. Son trait se bonifie rapidement. Problème : Franquin a refusé de céder le Marsupilami. Fournier est écarté après des albums jugés trop « politiques ». Trop à gauche et tiers-mondistes pour les héritiers Dupuis...

Nic, avec Cauvin au scénario, assure un court intérim. Dessin sommaire, histoires creuses, c'est une période (seulement trois albums) que les fans préfèrent oublier.


Tome et Janry,
reviennent aux sources. Ils admirent Franquin, son dessin, ses ambiances. Spirou repart sur de bonnes bases. La meilleure reprise pour beaucoup, la plus longue aussi. Mais comme Franquin, le duo va se désintéresser du héros principal pour les gags du Petit Spirou. Tout le monde croit à la fin de l'aventure après « Machine qui rêve », histoire où Spirou, devenu adulte, est dessiné de façon réaliste.

Morvan et Munuera vont relever le défi. Remettre Spirou au goût du jour. Le changement est radical. Un peu trop. En lorgnant vers la science-fiction la série perd des fans et n'en gagne pas assez...

Yoann et Vehlmann ont hérité depuis 2010 des destinées du groom le plus célèbre du monde de la bande dessinée. Ils ont trois albums à leur actif dont un, très sombre, se déroulant sur la Lune. 

  

dimanche 14 avril 2013

BD - Spirou : septante-cinq ans de groomeries

Spirou, personnage de bande dessinée et journal pour la jeunesse, fête en ce mois d'avril ses 75 ans. Gros plan sur le groom rouge.

Qu'est-ce qui est rouge, qui monte et qui descend ? Un groom dans un ascenseur. Quel est le groom rouge le plus célèbre au monde ? Spirou, pour toujours.
Personnage de bande dessinée lancé dans les pages de l'hebdomadaire éponyme en avril 1938, Spirou n'a quasiment pas cessé de vivre des aventures, dans la revue puis en albums. Une longévité due à ses propriétaires. Contrairement à Tintin, création d'Hergé qui ne lui aura pas survécu, Spirou, simple groom au Moustic Hôtel, est attaché aux éditions Dupuis. L'éditeur a toute latitude pour confier les rênes de la série au dessinateur de son choix. Si Spirou doit beaucoup de son succès planétaire au talent de Franquin, il a survécu quand le créateur de Gaston a jeté l'éponge. Un second âge d'or a même vu le jour avec l'arrivée de Tome et Janry aux manettes.
Aujourd'hui, les destinées de Spirou et Fantasio sont confiées à Vehlmann (scénario) et Yoann (dessin). Mais à côté de la série mère, plusieurs déclinaisons amplifient ce phénomène éditorial. D'abord le Petit Spirou, rejeton de Tome et Janry, continue d'amuser des millions de grands enfants dans des gags pleins de sous-entendus scabreux. Mais surtout Spirou, tel un monument national, est désormais revisité par des auteurs confirmés pour qu'ils donnent leur version du célèbre groom. Des albums en dehors du décompte, aux univers très diversifiés. C'est comme ça que Vehlmann a mis le pied à l'étrier. La plus belle réussite dans le genre est à mettre à l'actif d'Emile Bravo avec « Le journal d'un ingénu », sorte de jeunesse de Spirou à la sauce Jijé.

Pour ces 75 ans, les éditions Dupuis ont décidé de voir grand. Nouveauté en janvier : « Dans les griffes de la Vipère », réédition des histoires courtes introuvables de Rob-Vel ou du Spirou d'Yves Chaland, recueil de 200 hommages par les auteurs d'aujourd'hui dans « La galerie des illustres », expositions et tournée en Europe (étape à Montpellier en juillet). Sans oublier la clé de voute à cette incroyable saga éditoriale : Spirou, l'hebdomadaire découvreur de talents depuis quatre générations, encore diffusé à 60 000 exemplaires et dont une version numérique, « Spirou Z » sera lancée ce 23 avril, le jour anniversaire.
A 75 ans, Spirou n'a pas pris une ride. Et il a encore de beaux jours devant lui, l'univers de la série s'enrichissant à chaque reprise. Comme le bon vin, il se bonifie au fil des ans, des arômes nouveaux s'ajoutent aux anciens.
Dossier paru dans l'Indépendant le 6 aril 2013.
Demain : tous les visages de Spirou

samedi 23 mars 2013

BD - Nomade en approche

Retour aux sources pour
Jean-David Morvan. Le scénariste de Sillage avait fait le pari, à ses débuts, de lancer une série inspirée du rythme des mangas. Nomad, feuilleton de science-fiction, était dessiné par Buchet et Savoia qui eux aussi ont fait une belle carrière par la suite. Avec cette fois Carette au dessin, Morvan relance son héros sur les routes de ce futur technologique et totalitaire.
Retiré dans le désert du Sahel avec sa femme et son enfant, Nomad voulait oublier les péripéties liées à son pouvoir de contrôler les technologies. Mais sa famille est enlevée par un commando nord coréen. Il va devoir rejoindre l'Asie pour les libérer. Première difficulté, quitter cette Afrique violente et repliée sur elle-même.
Un premier épisode sans temps mort, avec en guest-star une dizaine de planches signées Savoia, toujours impliqué dans le projet.
« Nomad 2.0 » (tome 1), Glénat, 13,50 €

jeudi 13 décembre 2012

BD - 2013, l'année Groom

Septante-cinq ans ! Spirou fête ses 75 ans en 2013. Le groom en rouge fait figure de grand ancien dans le monde de la BD franco-belge. Il a aussi la particularité de ne pas appartenir à son créateur, Rob-Vel, mais aux éditions Dupuis. Spirou a traversé les décennies passant de mains en mains. Avec cependant une période reine, quand Franquin s'est approprié le personnage après Jijé. La série a gagné en cohérence, en profondeur et en magie quand est apparu le Marsupilami. Spirou a également été dessiné par Fournier, Nic, Tome & Janry, Munuera et Yoann. 

La 53e aventure de Spirou et Fantasio, « Dans les griffes de la vipère » sera en librairie le 11 janvier. Premier étage d'une fusée à multiples moteurs qui sera en orbite vers novembre avec la parution de « La femme-léopard », le second Spirou par Yann et Schwartz, suite très attendue du « Groom vert-de-gris ».  

dimanche 4 novembre 2012

BD - Zaya agent intemporel au service de la Spirale

Tueuse au service de la Spirale, organisation du crime planétaire, Zaya profitait d'une paisible retraite en compagnie de ses deux filles. Rappelée pour une opération spéciale, elle se retrouve hôtesse sur un immense paquebot de croisière. Sa mission, protéger les arrières d'une centaine d'agents de la Spirale mobilisés pour abattre un certain Siegam. Il a osé trahir la Spirale. 

Aidée de son intelligence artificielle, Zaya va assister à l'opération en retrait. Heureusement pour elle car c'est un piège. Siegam sert d’appât pour capturer en flagrant délit le maximum de membres de l'organisation criminelle. Le combat s'étire sur une vingtaine de planches, les scènes d'action ne faisant pas peur à Huangjiawei, le dessinateur chinois de cette série écrite par Morvan. L'histoire bascule alors dans la SF pure. 

Zaya, pour échapper aux policiers, franchit l'hyperespace. Une limite dangereuse car susceptible de modifier radicalement son monde. A son retour, elle constate qu'elle est désormais dans un contre-espace radicalement différent. 

Beaucoup d'action, une héroïne à croquer, un rebondissement inattendu : à priori Zaya a de beaux jours devant elle.

« Zaya » (tome 2), Dargaud, 14,99 € 

dimanche 28 octobre 2012

BD - Hommes de compagnie d'après Stéfan Wul


Connaissez-vous Pierre Pairault ? Ce nom ne doit pas dire grand chose au grand public. C'est pourtant le véritable nom d'un des plus grands écrivains de science-fiction français. Il a 12 romans (chefs-d’œuvre plus exactement) à son actif sous le pseudonyme de Stéfan Wul. Un univers qui a inspiré des centaines d'auteurs contemporains et qui est remis au goût du jour par les éditions Ankama. Olivier Vatine a revisité « Niourk » alors que Morvan et Mike Hawthorne ont relevé le défi de « Oms en série ». Un défi car ce roman, certainement le plus connu, a servi de trame au long métrage d'animation de René Laloux « La planète sauvage ». La vision de cette histoire d'asservissement de l'homme par des extraterrestres bénéficie de la virtuosité du dessinateur américain, ayant fait ses premières armes chez Marvel et Dark Horse. 
Sauvage et violent, le scénario de Morvan est fidèle au texte de Stéphan Wul
« Oms en série » (tome 1), Ankama, 13,90 €


samedi 20 octobre 2012

BD - Une chasseuse sachant chasser dans Sillage


La crise frappe aussi dans le monde de la science-fiction. Navïs, l'héroïne de la série Sillage de Morvan et Buchet, se retrouve acculée par les dettes. Elle accepte n'importe quel job un peu rémunérateur. Elle se retrouve donc sélectionnée pour « nettoyer » un astéroïde peuplé de grosses bébêtes toutes plus dangereuse les unes que les autres. La jeune humaine n'en oublie quand même pas ses principes et plutôt que d'exterminer les monstres, elle les capture pour les réimplanter dans un autre monde, plus vaste et réservé. Mais la chasseuse se retrouve transformée en gibier par des nemrods ayant moins de scrupules. 
Récit complet à part dans la saga, cet album permet aux auteurs de rendre plusieurs hommages (notamment la tenue de Navïs directement inspirée de celle du Major Fatal) à un maître récemment disparu : Moëbius.
« Sillage » (tome 15), Delcourt, 13,95 €