dimanche 25 novembre 2012

Les éditions Dupuis rendent un ultime hommage à Will

will, spirou, dupuis
Le dessinateur de Tif et Tondu et d'Isabelle est décédé en 2000. Depuis, l'intégrale de ses albums ont été réédités sous forme de gros volumes chronologiques. Une somme reflétant parfaitement l'incroyable talent de ce graphiste hors-pair. Will a débuté dans l'ombre de Jijé mais n'a pas toujours pu exprimer ses envies de nouveauté. Prisonnier d'une série à succès, il enchaînait les titres, sans pouvoir diversifier son trait. Heureusement, dans le cadre de l'animation du journal de Spirou, il se permettait des « récréations », notamment pour les numéros spéciaux. Quelques couvertures et des récits complets entre 1963 et 1997. Ce sont ces histoires courtes, entre contes, parodies et fantaisies délirantes qui sont reprises dans les 140 pages de ce luxueux recueil. Certaines ont un peu vieillie, d'autres sont encore d'une étonnante modernité. A ne pas manquer « L'ogresse des Carpates », un « faux » Oncle Paul scénarisé par Yann et Conrad, durant leur période « Hauts de pages ». Certains récits sont dessinées avec Eric Maltaite, son fils, alors qu'il était en plein apprentissage. Entre nostalgie et redécouverte, un album qui enchantera tous les cinquantenaires à la recherche de leurs madeleines illustrées...
« Will dans Spirou », Dupuis, 24 €

vendredi 23 novembre 2012

L'art du moment dans la revue "Hey !" de chez Ankama

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BD et art contemporain trouvent rarement un terrain d'entente. La première est trop commerciale, le second trop intransigeant pour permettre des passerelles. Une exception cependant : la revue « Hey ! » publiée par les éditions Ankama. Dirigée par Anne et Julien, découvreurs de génie, « Hey ! » en est à son 11e numéro. Chaque fois, ce sont près de 200 pages de découvertes graphiques. Cela va de la sculpture sur cailloux (Hirotoshi Ito) aux planches anatomiques (Christoph Mueller) en passant par les scènes naïves de Jim Woodring. Format à l'italienne, bourré de surprises dont deux comics de 16 pages en noir et blanc et une planche d'autocollants, « Hey ! » est un véritable laboratoire de recherche. Pour preuve les dizaines de logos imaginés par les contributeurs en pages de gardes. Ne manquez pas les tableaux de John Brophy, illustrateur de la couverture. Inspiré par Dali, ses madones hyper réalistes sont croisées avec des animaux mythiques ou des formules algébriques. Beau et angoissant à la fois.
« Hey ! » (numéro 11), Ankama Editions, 18,90 €

mercredi 21 novembre 2012

Chronique : la nouvelle débrouille passe par internet

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La crise ce n'est pas uniquement une note dégradée pour la France, elle représente aussi le quotidien de millions de Français. Comment s'en sortir ? La débrouille, en net regain, a de beaux jours devant elle, d'autant qu’internet permet d'utiliser de nouvelles pratiques.
Le succès du site leboncoin.fr est révélateur. Au lieu de faire un ou deux vide-greniers par an, on met son bric-à-brac en vente sur le site. En vivre, impossible, une petite rentrée d'argent bienvenue, certain. A l'autre bout de la chaîne, le quidam peut acheter à très bon prix de l'occasion. Et le bricoleur est doublement gagnant. On récupère, on retape, on revend... Difficile de faire plus écologique dans le recyclage. 
crise, vide-greniers, système d, leboncoin, supermarmite, débrouilleAutre volet de cette nouvelle débrouille, la vente ou le troc de services. Super-marmite.com est par excellence le concept du moment. Vous vous surpassez aux fourneaux, vos tartes ou sushis sont à tomber. Pourquoi ne pas en faire profiter les voisins en plus de votre famille et vos amis ? Une annonce sur le site et les personnes intéressées vous passent commande. On ne peut véritablement parler de concurrence pour les traiteurs (généralement il n'y a pas de choix), mais un petit plus financier pour le particulier. Surtout s'il aime cuisiner... 
Paradoxe de la crise et d'internet. On pourrait penser que le repli sur soi est la réaction primaire. Dans les faits, cela provoque une ouverture vers les autres. Le gagnant-gagnant du système D version numérique.
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" paru en dernière page de l'Indépendant ce mercredi.

Polar : Adolescentes transparentes

Lanester, policier au bord de la dépression, doit résoudre une affaire de disparition de jeunes filles, toutes souffrant d'anorexie.

lanester, françoise Guérin, le Masque, roman policierRoman psychologique avec un fond de polar ou roman policier résolument psychologique ? En refermant « Cherche jeunes filles à croquer » de Françoise Guérin, l'interrogation reste sans réponse. L'auteur a joué en permanence sur les deux tableaux, parvenant à passionner le lecteur tant par l'enquête sur la disparition de jeunes filles mal dans leur peau que par les états d'âme du commandant Lanester, le héros profileur chargé de les retrouver. On a presque l'impression, par moment, de lire deux romans en parallèle. Deux raisons supplémentaires pour ne pas lâcher ce bouquin dès qu'on le commence.

Disparues
Durement éprouvé par son combat contre Caïn, un tueur en série démoniaque (voir « A la vue, à la mort » Le Masque, 2007), le commandant Lanester se résout à suivre une psychanalyse. La quarantaine fringante, amoureux d'une délicieuse infirmière, comblé professionnellement, il est pourtant en plein paradoxe existentiel. « Est-ce que je ne suis pas trop sensible pour faire ce boulot ? » demande-t-il tout de go à son analyste. Elle n'a pas le temps de lui répondre, ni de lui donner des pistes : une nouvelle affaire va occuper le célèbre flic.
On lui demande de rouvrir des affaires de disparition de plusieurs jeunes filles dans la région d'Annecy. Delphine Langlois a disparu un lundi matin, alors que sa mère réglait un plein d'essence. Fugue ou enlèvement ? Les gendarmes ont retenu la première hypothèse car aucune demande de rançon n'est parvenue aux parents, de riches industriels.
Delphine était en chemin vers la clinique de la Grande-Sauve. Une établissement spécialisé dans les troubles de l'alimentation. Comme les autres jeunes filles disparues ces derniers mois, Delphine souffre d'anorexique mentale. C'est leur seul point commun et ce n'est pas assez pour Lanester. Habitué à échafauder des hypothèses en fonction des scènes de crime, il est perdu face à ces adolescentes transparentes.

Gendarme trop beau
Avec son équipe il débute les interrogatoires, mais dès le lendemain les événements se précipitent. Une nouvelle malade fugue de la clinique. Le commandant Pierrefeu, un gendarme est chargé de l'enquête. Il sollicite Lanester, mais ce dernier est de plus en mal à l'aise face à ce jeune officier, sportif, portant beau l'uniforme, autoritaire et à « la blondeur du Petit Prince en moins candide ». Une cohabitation compliquée, Lanester en perd tous ses moyens. Il se sent de plus en plus dépassé, comme inutile. Il piétine et décide finalement de revenir sur Paris. Essentiellement pour se confier à sa psychanalyste.
Seul, loin de la pression du terrain, il rencontrera des témoins lointains de l'affaire, notamment une ancienne surveillante de la clinique. Reconvertie dans l'art, elle tient une galerie à Montmartre. C'est en découvrant l'exposition des photos d'un ancien reporter de guerre qu'un déclic va se produire. « Très bien éclairées et agrandies à l'infini, les photos noir et blanc, scrutent, jusqu'à la nausée, des regards où se lit un effroi sans borne, comme si l'artiste avait tenté de saisir ce qui ne peut se dire du face à face intime avec la mort. » La mort va justement faire une arrivée remarquée dans l'enquête. Un premier corps, puis une avalanche.
On entre de plain-pied dans un roman noir, très noir, un de ces diamants littéraires dont on reste éblouis bien qu'ils soient sombres à l'infini.
Michel LITOUT
« Cherche jeunes filles à croquer », Françoise Guérin, Éditions du Masque, 19 €

lundi 19 novembre 2012

BD : Jacobs, le dessinateur à voix

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Alors que vient de sortir un nouveau « Blake et Mortimer », Rodolphe et Alloing signent une biographie passionnante et exhaustive de la vie et l'œuvre de Edgar P. Jacobs. Surdoué du dessin, il a pourtant durant de longues années vécu essentiellement de sa voix. Un baryton de talent, enchaînant les rôles à Bruxelles et Lille. Mais tout en dessinant, presque pour le plaisir, décors ou costumes. Durant l'occupation il met son crayon au service de l'hebdomadaire Bravo. Il lance « Le Rayon U », le baryton se tait définitivement, un des piliers de la BD franco-belge prend ses marques. En 1946, pour le lancement de l'hebdomadaire Tintin, il créé Blake et Mortimer... Mais il n'est pas que question de travail dans cet album. Amitié et amour sont aussi présents, Jacobs étant fidèle dans les deux cas.
« La marque Jacobs », Delcourt, 15 €, parution le 14 novembre

dimanche 18 novembre 2012

Chronique : quand l'ADN est au service de la haine

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Redoutable ADN. Son analyse permet de résoudre des affaires criminelles très anciennes. Exemple avec l’arrestation hier à Nice d’un gendarme, convaincu du meurtre d’une étudiante en 1995 à Lille. Les enquêteurs ont remonté la piste grâce à l’analyse d’un poil pubien retrouvé dans une baignoire.
La technique n’apparaît cependant pas infaillible. Au Soudan, en 2007, Wael est suspecté du meurtre de Wasel. Les enquêteurs sont certains de sa culpabilité. Mais incapables de la prouver. Ils ne trouvent qu’une seule trace d’ADN sur la victime. La sienne. Qui s’avère être aussi celle de Wael : ils sont jumeaux. L’acquittement vient d’être prononcé. Une page Facebook en hommage à Wasel a même été créée... par Wael. Encore plus compliqué que « Faux-semblants», le film de David Cronenberg (photo ci-dessus).
L’analyse ADN est à la portée de tous. Moyennant finances. Quantité de sociétés sur le net vous assurent une analyse en toute «confidentialité». Car le marché le plus porteur concerne surtout des maris pris de doute. Contre quelques centaines d’euros et deux prélèvements ADN, vous obtiendrez un test de paternité incontestable. Mieux, une société propose un «test d’infidélité». Il faut se transformer en détective: la société analyse «les profils ADN contenus dans un élément suspect (sous-vêtement, préservatif, chemise, mouchoir etc.)» Même les cocus peuvent se prendre pour des Experts... Mais que c’est glauque quand l’ADN se transforme en haine!

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue samedi en dernière page de l'Indépendant

samedi 17 novembre 2012

BD : Playmate sanglante dans "Miss Octobre" de Desberg et Queireix

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Stephen Desberg, scénariste prolifique (IRS, Scorpion, Empire USA), est né à Bruxelles, mais d'un père américain. Pas étonnant donc si une majorité de ses créations se déroulent outre-Atlantique. « Miss Octobre » est un polar ayant pour cadre la Californie du début des années 60. Un tueur en série s'inspire de la revue Playboy. Chaque mois, il assassine une jeune femme et réalise des photos d'elle, dénudée... et morte. Sur cette intrigue se greffent trois personnages : Viktor, sourde et voleuse, Clegg, flic à l'ancienne, chargé de l'enquête sur le tueur, Ariel, jeune policier ambitieux, sur la piste de Viktor. Le tout est dessiné par Queireix au dessin réaliste, efficace et précis.
« Miss Octobre » (tome1), Le Lombard, 9,99 €

jeudi 15 novembre 2012

BD : l'épilogue de la Balade au bout du monde de Makyo

balade au bout du monde, glénat
Lancée en 1981 dans la toute nouvelle revue « Gomme ! » des éditions Glénat, la série « Balade au bout du monde » voit enfin son épilogue, après quatre cycles et autant de dessinateurs. Un gros album de 64 pages, écrit par Makyo et illustré par Pelet (remplaçant de Vicomte), Hérenguel, Faure et Laval NG. Une dernière aventure pour Arthis, Aline et Joachim. Un trio de nouveau en opposition pour un enfant, Azhen, fils d'Aline. Enlevé par Joachim, le nourrisson oblige le couple de retourner dans le petit royaume oublié. Le lecteur ne boudera pas son plaisir. Il retrouve dans ces planches toute la magie du premier cycle, celui dessiné par Vicomte. Une nouvelle fois se posera la question de la divulgation au grand public de l'existence de cette société oubliée au milieu des marais. Autre débat : la science doit-elle aider cette communauté de plus en plus fragile et amoindrie ? Une dernière réflexion de Makyo sur sa création, sorte de résumé érudit et point final d'une belle aventure.
« Balade au bout du monde » (Epilogue), Glénat, 14,95 €

BD : Une princesse très seule victime de "Sortilèges"

sortilèges, munuera, dufaux, dargaud
Blanche, jeune fille fragile et romantique, voit son destin basculer le jour où son père meurt. Blanche est la fille du roi. La couronne devrait revenir à son frère aîné, mais le monarque sur son lit de mort a préféré confier les rênes de son pays à la frêle jeune fille. Elle va donc devoir devenir dure et autoritaire. Blanche abandonne Gaspard, son amant et prend les armes pour défendre le royaume.
C'est le fil rouge de ce récit écrit par Jean Dufaux et mis en images par Munuera. Intrigues de cour et sortilèges vont compliquer le devoir de la belle héroïne. Très poétique, cette BD prouve tout le talent de Munuera, bien plus à l'aise dans ce monde fantastique que dans la reprise de Spirou, avouons-le.
« Sortilèges » (tome 1), 14,99 €

mardi 13 novembre 2012

Chronique : Danse avec le ballon

Gros match samedi soir à la télévision. Je ne parle pas de la prestation du XV de France mais de la confrontation des téléspectateurs de TF1 et France 2 par Twitter interposé. Depuis la reprise de « Danse avec les stars », la Une cartonne en audience et en réactions à chaud sur le réseau social. Problème ce week-end, les danseurs se retrouvent face au match France Australie. Direct, suspense et émotion : les trois ingrédients du succès sont réunis.
shy'm, seins, nyanga, larmes, TF1, France 2, Rugby, danse avec les stars, twitterDépart en fanfare sur la Deux. Nyanga, le retour du « banni », pleure à chaudes larmes durant la Marseillaise. « Les larmes de Nyanga. Ah, on a pas eu celles d'Evra ou de Francky, hein. » relève sardoniquement Quentin Vinet. Question lacrymogène, TF1 n'est pas en reste. Gérard Vivès, un des candidats, s'y colle. Pas convaincant pour  Jesson : « Je suis peut-être cruel mais les larmes de crocodiles de Gérard Vivès ne me touchent absolument pas. »
shy'm, seins, nyanga, larmes, TF1, France 2, Rugby, danse avec les stars, twitterGrâce à Twitter, on peut zapper au bon moment. Quand tout le monde fait une réflexion sur les seins de Shy'm (membre du jury), l'audience doit monter en flèche... « Fofaaaaanaaa ! » hurlent des dizaines de twittos. Un essai ? Oui, et un beau. La veste de Chris Marques est le sujet de plaisanterie numéro 1 sur TF1, alors que sur France 2, pour une fois, le retour de Michalak ne fait pas rire.
Et quand tout se brouille à  force de passer d'un canal à l'autre, un tweet de Jéromeuh résume le malaise : « Lorie s'est trompée de chaîne, elle devrait jouer au rugby sur la 2 ». Pas gentil, mais pas faux. 
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce lundi en dernière page de l'Indépendant.

BD : Genèse de la Résistance par Derrien et Plumail

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Jamais une période de l'Histoire de France n'aura à ce point divisé le pays. L'occupation allemande, le gouvernement de Vichy : rares étaient ceux qui s'y sont opposés d'entrée. Il a fallu le travail de sape des premiers résistants pour que la majorité de la population prenne fait et cause contre les nazis et leurs valets tricolores. Le troisième épisode de « Résistances », série écrite par Jean-Christophe Derrien et dessinée par Claude Plumail, raconte comment une simple femme, par ses écrits, éveille les consciences. Sonia, jeune Juive, a pris le pseudonyme de Marianne. Elle écrit dans un journal clandestin pour dénoncer les exactions de l'occupant et réveiller la fibre patriotique française. Un rôle obscur, peu glorieux, mais qui a permis à certains de franchir le pas. Ensuite s'est posée la question de la lutte armée. Marianne est très réticente. Mais cela semble une évolution obligatoire. L'autre problème des Résistants, à cette époque, ce sont les dénonciateurs. Et les traîtres, ces hommes et femmes obligés de parler après des heures de torture. Une série édifiante, romancée mais empreinte d'une grande exactitude historique.
« Résistances » (tome 3), Le Lombard, 14,45 €

lundi 12 novembre 2012

Roman : déchets américains dans un polar de Brigitte Aubert

Quand Brigitte Aubert décrit l'Amérique, ce n'est pas gai. Flic alcoolo, rappeur drogué, bourgeois racistes, tueur pédophile : les USA ressemblent à une décharge.

brigitte Aubert, la ville des serpents d'eau, seuil, polar, USACloîtrée. Cela fait 19 ans que Susan est prisonnière d'un homme fou. Enlevée alors qu'elle avait 5 ans, elle est aujourd'hui une jeune femme. Une mère aussi. Son tortionnaire, qui se fait appeler Daddy, à force de la violer l'a mise enceinte. Une petite Amy est née. Elle aussi n'a jamais quitté cette cave sombre, la tanière du psychopathe. Elle va avoir 5 ans. Susan se doute qu'elle sera la suivante au tableau de chasse de Daddy. Il lui reste peu de temps pour tenter de la sauver. Amy en cavale, Daddy va exploser. Une violence extrême présente tout au long de ce thriller de Brigitte Aubert.
Comme tout bon thriller qui se respecte, l'enquête est menée par un flic malmené par sa hiérarchie. Deux exactement. Vince Limonta n'est plus policier. Renvoyé après une nouvelle bavure. Vince a longtemps côtoyé les bas-fonds de New York dans le cadre de son boulot. Pour résister, il plonge dans la boisson. Un jour, au cours d'un braquage, « l'intrépide lieutenant Limonta avait appuyé sur la détente. L'ivrogne Vince Limonta avait raté son coup. La balle était partie un poil de travers et avait fait sauter la tête d'une maman qui revenait de l'école avec son gamin. » Depuis Vince est jardinier de l'église de la petite ville d'Ennatown, la ville des serpents d'eau en langue iroquoise.

Gentil Black Dog
L'autre flic c'est Wayne Moore. Un Indien, quasiment le dernier de la région. Il fait partie de la patrouille équestre et surveille l'immense parc en lisière de la ville. C'est dans ce parc que la petite Amy va trouver refuge. Seule au début, elle va être aidée du personnage central du roman : Black Dog. Ce clochard de deux mètres, noir et simple d'esprit, survit dans un campement au milieu de la forêt. Il va prendre la fillette sous son aile car l'action se déroule fin décembre et la neige tombe drue. Amy, perdue dans ce monde réel qu'elle ne connaît que par l'intermédiaire des livres pour enfants donnés par Daddy ses jours calmes, oublie la mission confiée par sa maman : prévenir la police.
Mais dans la forêt, les « méchants » sont aussi présents. Trois braconniers tombent sur la planque de Black Dog. Ils découvrent Amy. Sont persuadés qu'il s'agit d'un enlèvement. Ils vont attaquer le colosse. Pas de chance, il avait une pioche en main. « Black Dog leva la pioche et l'abattit à la volée sur le crâne de Bud. Bud resta debout quelques secondes, l'air ahuri, la pointe tranchante de la pioche enfoncée dans le crâne, du sang giclant partout sur son visage. Il essayait de parler, sans succès. Du sang coulait de sa bouche. » La situation se complique pour le SDF. Il prend la fuite, la fillette dans les bras.

Mais qui est Daddy ?
La suite du roman raconte cette chasse à l'homme. On découvre un peu mieux la personnalité de Vince, son copain le rappeur Snake T. et Moore. Un trio de circonstance face aux notables de la ville. Car tout est fait pour préserver la tranquillité d'Ennatown. Certes elle héberge en son sein un malade mental, psychopathe et pédophile, mais il parvient parfaitement à se fondre dans la masse. Le lecteur commence à se demander qui est Daddy. Vince enquête, rouvre les vieux dossiers, même s'il n'est plus flic et que les brumes de l'alcool lui compliquent la tâche.
Le final se déroule au cours de la veillée de Noël, en présence des bons Samaritains du Comité de charité interconfessionnel. Citoyens au-dessus de tous soupçons... C'est là que la plume de Brigitte Aubert est la plus acérée. Elle décrit ces bourgeois hypocrites, aux apparences trompeuses. Black Dog n'en devient que plus sympathique. Quant à Daddy, il faut attendre les dernières pages pour découvrir sa véritable identité. Un dénouement totalement inattendu donnant encore plus de force à ce polar noir et pessimiste.
Michel LITOUT
« La ville des serpents d'eau », Brigitte Aubert, Seuil, 19,50 €

dimanche 11 novembre 2012

Chronique : Sam et Bob vont en boîte

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Sam en France, Bob en Belgique ont un point commun. Ils vont faire la fête en boîte de nuit, mais ne boivent pas une goutte d'alcool. Sam et Bob sont les sobriquets donnés par la Prévention routière au conducteur volontaire chargé de raccompagner à bon port les camarades alcoolisés. En Belgique, voilà des années que toute sortie d'un groupe d'amis débute par l'interrogation « Bon, qui fait Bob ce soir ? » Le volontaire (ou désigné d'office) s'engage à ne pas boire d'alcool. Retour sans risque assuré pour les autres. Et s'il croise une patrouille de gendarmes, son alcoolémie négative lui fera gagner un porte-clé Bob « qui brille dans la nuit »... 
La France vient de copier le concept et lancer le personnage de Sam, le capitaine de soirée. Il dispose d'une application pour smartphone et d'une page Facebook intitulée « Vie de Sam », un peu sur le principe de « Vie de merde ». Chaque Sam peut y raconter ses anecdotes les plus originales. Hadrien par exemple, désigné pour reconduire un pote, s'est doublement dévoué puisqu'en plus de l'ami, il s'est chargé de la jolie fille draguée durant la soirée. Le pote s'est endormi, Hadrien, sobre, a assuré... L'histoire recueillant le plus de « j'aime » sera illustrée et publiée sur Facebook. En jeu également chaque semaine une soirée VIP avec limousine et chauffeur. Le Sam sobre et sérieux pourra pour une fois se lâcher complètement. Mais attention, aucune précision dans le règlement du jeu ne prévoit le nettoyage de la moquette.
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue samedi 10 novembre en dernière page de l'Indépendant. 

BD : Lettres du front dans "Paroles de Poilus"

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En ce 11 novembre, ayons une pensée pour les soldats morts durant cet effroyable carnage que fut la guerre de 14/18. Les éditions Soleil, sous la direction de Jean Wacquet et des textes de Jean-Pierre Guéno, publient un second recueil de « Paroles de Poilus ». 14 histoires courtes dessinées par des pointures de la BD, de Jarbinet à Thierry Robin en passant par Servain ou Béatrice Tillier. Ces histoires, de 3 à 8 pages, racontent la déchirure du tissu familial. Certains Poilus étaient pères de famille. De jeunes pères n'ayant quasi pas connu leur enfant. A travers des lettres on revit ces drames. Comment Françoise Dolto a correspondu avec son oncle, mort au combat, pourquoi Jean Zay, futur ministre, s'est engagé... Il y a aussi ces récits d'anonymes, d'orphelins, de gueules cassées. Toute l'horreur de la guerre est condensée dans ces pages, parfois classiques, souvent très fortes comme celles de Marc-Renier à mille lieues de son style habituel, mais aux effets radicaux. Un ouvrage du Souvenir essentiel car il n'y a plus grand monde de vivant pour raconter la boucherie.
« Paroles de poilus » (tome 2), Soleil, 19,99 €

samedi 10 novembre 2012

BD : un best-seller de Maxime Chattam illustré

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Pas facile de se faire un nom dans la littérature de genre. Surtout s'il on est Français. Maxime Chattam est pourtant devenu en quelques années le meilleur vendeur de thriller de l'Hexagone. Il s'est fait un nom avec les titres de la Trilogie du Mal. Les faits se déroulent aux USA, à Portland, et c'est sans doute une des raisons de son succès. Ce best-seller est aujourd'hui adapté en bande dessinée par Michel Montheillet, illustrateur « officiel » de Chattam chez Albin Michel. Un serial killer sévit dans la paisible ville de Portland. Il s'attaque à de jeunes femmes. Il les torture, leur coupe les mains, les défigure et jette les corps dans une rivière ou un lac. L'enquête est confiée au jeune inspecteur Joshua Bolin. Alors qu'une tempête paralyse la ville, le flic, à l'intuition, va tenter de sauver une jeune étudiante, prochaine victime du Bourreau de Portland. Dessin hyper réaliste, montrant toute l'horreur du tueur, décors sans faille : on est happé par l'histoire. L'intrigue fonctionne toujours aussi bien. Une adaptation qui comblera les nombreux fans de Chattam.
« La trilogie du mal » (tome 1), Jungle Thrillers, 11,95 €


vendredi 9 novembre 2012

Chronique : Bilboquet Magazine, l'humour, le vrai

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Enfoncé Charlie Hebdo, ridiculisés les Canteloup, Gerra et autres amuseurs radiophoniques, dépassé le Groland. L'humour, le vrai, est à découvrir sur le site « Bilboquet Magazine ».
Ses concepteurs acquièrent une certaine notoriété grâce à un article, totalement inventé mais plus vrai que nature, sur une association de « personnes démunies » furieuses contre les Enfoirés. Truffé de témoignages, le reportage  semble donner, pour la première fois, la parole à ces pauvres désireux de « récupérer leur dignité musicale. » En résumé : « Aujourd’hui on n’a plus le droit ni d’avoir faim, ni d’avoir froid, mais surtout de laisser chanter Maurane et Catherine Lara ». Halte aux « chanteurs carrément has been », les Enfoirés doivent s'ouvrir à des interprètes plus talentueux comme « Radiohead, Arcade Fire, ou Lady Gaga. »
Beaucoup tombent dans le panneau. Des internautes laissent des commentaires scandalisés : « Ils feraient mieux de faire profil bas... » « Trop facile de dénigrer », certains journaux reprennent l'information au premier degré. Pourtant, les autres articles de Bilboquet Magazine sont sans équivoque. « Le prix Goncourt décerné au manuel utilisateur de l’iPad 3 », son auteur, Li Xiao Xiao est « un stagiaire chinois âgé d’à peine 37 ans, en poste chez Apple depuis 4 ans. » Encore plus farfelu, « Un Français champion du monde du lancer de boulette de papier dans une corbeille de bureau » avec un jet de « 64 mètres, sans bouger de sa chaise ».
Vous voulez rigoler ? Lisez le Bilboquet !
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce vendredi en dernière page de l'Indépendant

BD : Fuite dans le vide avec "Void 01" de Hanna et Phillips

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Seul dans l'espace. Ce concept a été vu et revu des centaines de fois tant en roman, film que bande dessinée. Il permet pourtant à Herik Hanna et Sean Phillips de signer une BD aussi angoissante que réussie. 3e titre de la collection « La grande évasion », Void 01 se déroule dans l'immense vaisseau spatial chargé de convoyer des détenus. Une pluie d'astéroïdes endommage gravement la coque, l'engin se retrouve à la dérive dans le vide sidéral. Une seule solution : l'évacuation. C'est compter sans le sens du devoir du colonel Mercer, seul maître à bord après Dieu. Il considère que ce serait une évasion. Il s'oppose à l'abandon du vaisseau et préfère massacrer équipage et détenus pour éviter le pire. Reste un certain John, unique survivant, bien décidé à sauver sa peau. Un scénario machiavélique illustré par un virtuose américain, Sean Phillips, également à l'honneur dans les librairies avec une autre série, « Fatale », dont le premier tome vient de sortir.
« La grande évasion, Void 01 », Delcourt, 13,95 €

jeudi 8 novembre 2012

Chronique : ma nuit américaine sur les réseaux sociaux

barack obama, romney, USA, élections, twitter, facebook« Four more years » et une photo de Barack Obama enlaçant tendrement sa femme Michelle. Une image et ces trois mots, tweetés et publiés sur Facebook par l'équipe de campagne du candidat démocrate à 5 h 16, mercredi matin, mettent fin à une « nuit américaine » palpitante. « Quatre années de plus » au poste de président des USA. Le message prend presque de court les instituts de sondage. Immédiatement, des milliers de personnes propagent la nouvelle, phénomène de bouche à oreille virtuel sans précédent. Plus de 600 000 « retweets », 2,8 millions de « j'aime » sur Facebook à 14 heures, le « chouchou » des réseaux sociaux enfonce le clou. 
Durant cette nuit, le civisme  des électeurs américains s'étale au grand jour. Les messages annonçant « #Ivoted » sur Twitter déferlent au rythme de 2000 par minute. Une élection suivie aussi sur une carte interactive de Facebook. Chaque abonné peut signaler son passage dans l'isoloir. Près de 10 millions de personnes jouent le jeu, surtout des femmes et des jeunes. 
Les réseaux sociaux permettent aussi aux peoples de réagir instantanément. Joie pour Lady Gaga et son équipe après un concert.


Grosse fiesta chez Eva Longoria et un petit mot en français pour le rappeur Jay-Z : « Encore ». On attend toujours la réaction de Clint Eastwood. Les mauvaises langues prétendent qu'il demande conseil à une chaise vide...

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue en dernière page de l'Indépendant ce jeudi.


Pour les archives, la Chronique parue mercredi matin en dernière page de l'Indépendant. Ecrite la veille, sans connaître le résultat de l'élection...
Une mite dans la baraque

Barack Obama a remporté l'élection présidentielle américaine. Du moins, sur les réseaux sociaux. Parce que dans la vraie vie, celle où les citoyens votent (vieille invention d'un pays en perdition : la Grèce), à l'heure où sont imprimées ces lignes, le résultat est indécis. Reste les réseaux sociaux, boule de cristal moderne. Nombre d'abonnés sur Twitter, partages de ses messages, « like » sur Facebook : partout Barack casse la baraque (je me permets ce jeu de mot usé jusqu'à la corde car en cas de défaite, c'est ma dernière occasion de le placer...). Logique finalement car Romney, avec son image de chef de famille mormon, n'a rien du geek à la page. Il ferait plutôt penser à un costume sentant la naphtaline pour effrayer les mites, Romney (celui-là, il est carrément tiré par les cheveux, mais là aussi, s'il perd, difficile de le replacer...) De cette campagne électorale, vu du net, on ne retiendra que quelques images reprises à l'envi. Clint Eastwood, soutien du candidat républicain, dialoguant avec une chaise vide, Obama étrangement absent dans le premier débat, brillant dans le second avec sa tirade sur les baïonnettes. La palme revient quand même à Romney quand il s'est « attaqué » à Big Bird, un héros de Sesame Street, l'émission pour la jeunesse. Non il n'a pas la phobie des bêtes à plumes, il veut simplement réduire les crédits de la télévision publique. Et du coup toute la campagne se trouve résumée en une phrase : « Obama a tué Ben Laden, Romney va s'occuper de Big Bird ».

mercredi 7 novembre 2012

[Chronique] Materrazzi contre Zidane : provocation, acte 2

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Quand on a la provocation dans le sang, difficile d'aller contre ce penchant. Tel un second « coup de boule », une photo de Marco Materrazzi postée sur son compte Twitter dimanche soir, a ranimé une vieille querelle.
Materrazzi, obscur footballeur italien, passe de l'ombre à la lumière un soir de 2006. Finale du Mondial, il s'approche de Zidane, déjà passablement énervé, et lui dit du mal de sa sœur. Zizou pète les plombs et lui assène un coup de tête dans le poitrail. Materrazzi, qui n'a pourtant pas fait l'Actor's Studio, en rajoute des tonnes. Suffisamment pour que l'arbitre expulse le n° 10 français. Ce légendaire coup de boule inspire un artiste, Adel Abdessemed, qui l'immortalise dans une statue géante installée temporairement devant le centre Beaubourg. Materrazzi, de passage en France, prend la pose devant l’œuvre d'art. Comme s'il était fier de ce fait de guerre.
Sur Twitter, le cliché est repris des milliers de fois et lance une nouvelle polémique: certains y voient un hommage tardif. Mais la majorité ne croit qu'à une seconde provocation. Hier, Zizou, grand seigneur, s'est abstenu de réagir.
PS : Pour mémoire, le fameux coup de boule...

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce mardi en dernière page de l'indépendant.

mardi 6 novembre 2012

BD : Siorn, un Barbare en colère chez Soleil

Viozat, Tanco, Siorn, soleil
Dans la famille des barbares en colère, un nouveau venu devrait mettre d'accord tous les autres. Siorn est une série écrite par Viozat et dessinée par Tanco. Ce chef de clan a tenté de voler des gemmes à la redoutable reine Ysbel. Une fois capturé, la magicienne lui propose un marché : sa clémence contre la tête du roi Olshorn. Siorn n'hésite pas une seconde. Il faut qu'il reste en vie pour protéger sa tribu. Il part donc affronter l'armée d'Olshorn, escorté par une mercenaire à la solde d'Ysbel. Le couple se retrouve au centre d'une immense bataille. Le roi doit résister à la rébellion de son frère. Ce dernier a l'appui de barbares, les ennemis héréditaires de Siorn. Les auteurs campent par petite touche les différents protagonistes de cette saga. Tous violents, ambitieux, prêts à tuer frères, sœurs et amis pour un peu plus de pouvoir.
On est bluffé par les dessins, tout en muscles et testostérones, de Morgann Tanco, un jeune auteur toulousain qui a déjà à son actif « L'ivresse des fantômes » et « Le droit chemin » chez Delcourt.
« Siorn » (tome 1), Soleil, 13,95 €

lundi 5 novembre 2012

Thriller : Inquiétante campagne islandaise

L'Islande, ses geysers, ses glaciers, ses maisons abandonnées propices aux cauchemars. « Je sais qui tu es » est un thriller qui fait froid dans le dos.

Yrsa Sigurdardottir, islande, disparition, enfants, maison hantée, anne carrièreL'Islande, immense île glacée dans l'Atlantique nord n'est pas très peuplée. La population se concentre dans les zones urbaines autour de la capitale Reykjavík. Le reste du territoire est quasi désertique. « Je sais qui tu es », thriller de Yrsa Sigurdardottir, a pour cadre le nord-ouest du pays. La petite ville d'Isafjorour et le hameau abandonné d'Hesteyri au cœur d'un parc naturel protégé.
La crise économique a durement touché le pays au milieu des années 2000. Les faillites de plusieurs banques a laissé des traders habitués à vivre à crédit sur le carreau. Garoar est de ceux-là. Au chômage depuis quelques mois, il a investi ses dernières économies dans l'achat d'une maison à Hesteyri. Il a pour ambition de transformer la bâtisse en gîte. Idéalement située au cœur du parc naturel, elle ne devrait pas désemplir en été.

Trio isolé
Pour l'heure, il va en prendre possession et débuter les premiers travaux d'aménagement. Pour s'y rendre, seule solution en cette fin d'automne : le bateau. Il débarque donc avec matériel et vivres pour une semaine de travaux intensifs. Il n'est pas seul. Accompagné de sa femme, Katrin et de Lif, la veuve de son meilleur ami, associé mort d'une crise cardiaque avant l'aboutissement du projet. Pour ces trois trentenaires c'est une découverte complète. Dans cette baraque en bois, délabrée, sans électricité ni sanitaires, au chauffage rudimentaire, le séjour se transforme en cauchemar. Et pas uniquement en raison des contraintes matérielles.
Une inquiétante ambiance s'installe dans le hameau désert. Katrin est persuadée d'avoir vue une silhouette au loin. Lif aussi croise une ombre. La nuit des bruits de pas au rez-de-chaussée se font entendre. Le décor est planté, le lecteur frissonne. De froid et de peur.
Mais les tribulations du trio ne sont pas l'unique intrigue du roman. En parallèle, l'auteur suit les activités de Freyr, un psychiatre exilé dans cette ville de 2600 âmes, blottie au fond d'un fjord. Ce matin il est sollicité par la police pour une affaire de vandalisme dans une école. Tout le matériel a été cassé et des graffitis énigmatiques inscrits sur les murs. Est-ce l’œuvre d'un fou lui demande l'inspectrice Dagny ? Freyr découvrira avec stupéfaction que 60 ans auparavant, une scène identique s'est déroulée dans la même école.

Enfant disparu
Au même moment, une femme est retrouvée pendue dans une église. Un suicide. Mais il se trouve qu'elle était élève au moment du premier saccage. Et dans son mot d'adieu, elle fait allusion au fils de Freyr, disparu trois ans plus tôt. L'intrigue se met en place, avec quantité de possibilités, de recoupements et de fausses pistes. Freyr a l'impression de devenir fou. Les trois naufragés d'Hesteyri aussi. Une nuit, il voient au loin la silhouette d'un inconnu. « L'individu se tenait la tête penchée en avant, recouverte d'une capuche et les bras ballants. On aurait dit qu'il ou elle avait cédé sous le poids de toute l'injustice du monde. » Un premier choc suivi d'un second quand le trio découvre avec effarement que ce n'est qu'un enfant.
L'angoisse va alors aller crescendo, notamment dans le hameau perdu. Ce thriller vous dissuadera à vie de vous rendre dans des endroits isolés et coupés du monde. Le cadre majestueux et sauvage devient source inépuisable de terreur. Rarement un roman aura suscité autant d'angoisse au lecteur. A ne pas lire seul dans sa maison de campagne. A moins de rechercher des sensations fortes. Mais vous pourriez le regretter quand les hurlements poussés dans votre cauchemar vous réveilleront trempé de sueur froide...
Michel LITOUT
« Je sais qui tu es », Yrsa Sigurdardottir, Anne Carrière, 22 €

samedi 3 novembre 2012

BD : Largo et son frère

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Nouveau coup de théâtre dans la série Largo Winch. Le milliardaire imaginé par Jean Van Hamme a un frère, Iorg. Les retrouvailles sont tumultueuses. Trafiquant d'armes, Iorg veut prendre sa revanche. Il implique Largo dans son trafic et espère le faire tomber. Derrière toute cette manigance se trouve Sybil, la mère de Iorg, servante géorgienne séduite puis abandonnée par le père de Largo. L'album se déroule essentiellement sur un cargo. L'ambiance tendue est mise en place par le dessin nerveux de Francq. Il gagne en fluidité, certaines cases sont très proches des meilleurs Bernard Prince de Hermann. Le côté comique de l'album est assuré par Simon, tombé dans le piège d'une riche (et vilaine) héritière suisse...
« Largo Winch » (tome 18), Dupuis, 12,95 €

vendredi 2 novembre 2012

Chronique : Disney achète une étoile à 4 milliards de dollars

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Ceux qui doutaient de la prochaine fin du monde ont l'air fin aujourd'hui. Le temps n'est plus aux interrogations depuis l'annonce, ce lundi soir, de l'achat de la société de production Lucas Film par le géant Disney. Une transaction de 4 milliards de dollars. Georges Lucas, créateur de Star Wars, est donc passé du côté obscur. S'il abandonne sa franchise, acceptant même la mise en chantier d'un septième opus (sortie annoncée en 2015), tout espoir est mort. Cet extraordinaire visionnaire empoche le pactole. Cela lui laisse moins de deux mois pour le dilapider. A moins qu'avec cette montagne de dollars il ne se rabatte sur un autre sommet, le fameux Pic de Bugarach... 
georges lucas, lucas filmp, disney, star wars, jedi, mickey, bugarachCe qui est certain, c'est que la vente de Star Wars provoque une pléthore de réactions sur les réseaux sociaux. Le moindre geek connaît sa trilogie par cœur, tel un séminariste les évangiles. La greffe de Disney sur cet univers donne beaucoup d'idées, souvent farfelues, de remakes sauce « grandes oreilles » : « L'empire contre Tic et Tac », « La belle Leïa au bois dormant », « Ewoks et Rouky »... Dark Vador avec des oreilles de Mickey, est-ce plus ou moins effrayant pour les générations futures ? Harrison Ford va-t-il devoir prendre des cours de chant s'il veut rempiler pour Star Wars  7 ? Il ne reste plus à Disney qu'à racheter Spielberg (détenteur des droits ciné de Tintin) pour lancer le héros ultime : Mickey en pantalons de golf armé d'un sabre laser. Pauvre de nous...  
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce jeudi en dernière page de l'Indépendant.

BD : Mondes opposés dans "Le Grand Mort" de Loisel, Djian et Mallié

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On retrouve beaucoup du souffle de la Balade au bout du monde dans « Le grand Mort » de Loisel, Djian (scénario) et Mallié (dessin). Deux mondes parallèles, le nôtre, normal mais en pleine déliquescence et un fantastique, celui du petit peuple, craintif et magique. Entre ces deux univers, un passeur, Erwan, véritable héros de la série, même s'il se fait souvent voler la vedette par les femmes. Il y a Gaëlle, la rousse et ronde, romantique et fleur bleue. Et Pauline, sérieuse et inquiète depuis son retour du Pays du Grand Mort et la naissance de sa fille, Blanche, gamine mystérieuse, aux yeux de braise. Les grands bouleversements des équilibres provoquent des tremblements de terre un peu partout. Pauline et Gaëlle, fâchées, vont se réconcilier dans l'épreuve. Un épisode de transition, comme pour consolider et clarifier les rapports humains des personnages principaux.
« Le Grand Mort » (tome 4), Vents d'Ouest 14,95 €

jeudi 1 novembre 2012

Chronique : Suicides d'adolescents après des harcèlements sur le net

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Va-t-on bientôt voir, au bas des pages d'accueil des réseaux sociaux, cet avertissement : « Attention, l'abus d'internet tue » ? Ce raccourci, à priori excessif, s'avère pourtant parfaitement justifié dans les cas d'Amanda et de Gauthier, une adolescente canadienne et un jeune Brestois, retrouvés morts chez eux. Deux suicides directement liés à des histoires de harcèlement sur le net.
Gauthier, au cours d'une conversation via webcam sur le site chatroulette, accepte de se montrer nu pour une amie. Cette dernière enregistre la performance et menace Gauthier d'en diffuser un extrait sur Facebook s'il ne lui fait pas parvenir 200 euros. C'en est trop pour le jeune homme de 18 ans qui se pend le 10 octobre dans le cabanon de jardin de la demeure familiale. La police criminelle de Brest cherche à identifier la maître-chanteuse.
C'est aussi une photo de nu qui conduit Amanda, Canadienne de 15 ans, à la dernière extrémité. Devant sa webcam, elle accepte de dévoiler sa poitrine pour un « ami ». La photo est publiée sur le mur Facebook de ses connaissances. Honte, déprime, harcèlement : la descente aux enfers débute pour la lycéenne. N'en pouvant plus, elle poste une vidéo particulièrement émouvante où elle raconte sa détresse sur des feuilles de papier. Quelques jours plus tard, Amanda se donne la mort.
Oui, internet peut se transformer en arme mortelle. Ce média si puissant peut décupler une situation déjà problématique. Mais il est du ressort de chacun de se méfier, d'être attentif, notamment les parents.

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce mercredi en dernière page de l'Indépendant.

BD : la planète Aâma en mutation

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Dépaysement absolu avec cette série de science-fiction signée du Suisse Frederik Peeters. Sur une planète morte, aux confins de la galaxie, Verloc et son frère rejoignent un groupe de scientifiques isolés. Une expérience est en cours. De la matière Aâma a été implantée dans une région précise. Depuis, la vie se développe à vitesse exponentielle. Le second tome est essentiellement consacré à l'expédition dans cette foisonnante nature en perpétuelle mutation. Amateurs de monstres, plantes carnivores et autres insectes géants, vous serez comblé. La BD vaut aussi pour les interrogations philosophiques des personnages. Notamment Verloc, encore mal remis du départ de sa femme, le privant de sa petite fille, Lilja.
« Aâma » (tome 2), Gallimard, 17,25 €