mardi 31 juillet 2018

BD - Le groom rebelle du futur


Avouons-le, le Spirou imaginé par Denis-Pierre Filippi et Fabrice Lebeault est de plus dé- stabilisant pour les fans de la série. En plaçant leur intrigue dans un futur indéterminé entre univers de « Blade Runner » et « Cinquième élément », ils prennent un risque. I faut pourtant aller au bout des 68 pages pour comprendre où ils veulent conduire le lecteur et découvrir qu’ils sont en réalité parmi les plus fidèles de l’univers, période Franquin.

Spirou est un agent administratif d’une société ressemblant fortement au Big Brother d’Orwell. Sa sœur, Seccotine, est une rebelle. Elle lutte pour la liberté. Quand leur grand-père, chercheur émérite est enlevé, ils se lancent à la poursuite des ravisseurs, certainement des sbires de la Fondation Z. Z comme Zorglub.

Décors futuristes majestueux, un Fantasio à des millions de kilomètres du farceur maladroit d’origine, un Spip androïde. On se demande longtemps où les auteurs nous mènent. Jusqu’au dénouement final qui a un peu des airs de Brazil, le film culte de Terry Gillian...

➤ « Le spirou de... (Fondation Z), Dupuis, 14,50 €

lundi 30 juillet 2018

Roman : Amours et mystères gardois


Envie de soleil, de fêtes de village, d’amours et de mystère ? Ouvrez « L’été retrouvé » de Dany Rousson, vous trouverez votre bonheur. Un roman de terroir selon l’acceptation officielle du genre, se déroulant essentiellement dans le Gard.

Lazare, célibataire, travaille dans le bois, ébéniste passionné par son métier. Il bénéficie de l’attention particulière de sa voisine, la jolie Séraphine. Elle aussi vit seule, mais avec sa petite fille Pia. Deux cœurs brisés qui se cherchent et se trouveront, ces romans se terminent toujours bien. Mais avant cela les épreuves seront nombreuses. Et débuteront par l’arrivée chez Lazare de Gérald. Un ami d’enfance. Mais une femme les a mis en concurrence. Depuis, ils ne se parlent plus. Pourquoi Gérald revient-il voir Lazare ? Qu’est devenue la belle Elisa, l’objet de leur brouille ? Comment va réagir Séraphine en découvrant une personnalité nouvelle de son si charmant voisin ?

L’autre intérêt du roman, en plus d’une description minutieuse de ce Gard profond des années 90 ; réside en un long passage se déroulant à Collioure. La ville catalane servira d’écrin pour la concrétisation du bel amour: « Le soleil était déjà radieux sur Collioure. Lazare s’appuya au balcon pour admirer la vue. Elle était magnifique. On apercevait la baie déjà occupée par des baigneurs matinaux. (...) Tout était encore paisible. Lazare ferma les yeux un instant, soulagé d’avoir parlé à Séraphine. »


➤ « L’été retrouvé », Dany Rousson, Presses de la Cité, 19 €

samedi 28 juillet 2018

Série télé - Orange est toujours à la mode


De toutes les séries lancées sur Netflix, « Orange is the new black » est certainement la plus remarquable. Remettant au goût du jour un genre cinématographique passé de mode, le spectateur va se passionner pour la vie dans une prison de femmes. Mais on est loin des séries Z réalisées par des hommes pour des hommes. On trouve aux manettes Jenji Kohan, une scénariste qui a déjà plusieurs succès derrière elle, de Weeds à Glow. Piper Chapman (Taylor Schilling), emprisonnée pour une année, est toujours derrière les barreaux de la prison de Litchfield.

Depuis fin juillet, elle est de retour avec ses copines pour une sixième saison diffusée en exclusivité sur Netflix. Enfermées dans une prison de haute sécurité, les amitiés seront testées et de nouvelles alliances seront créées. Vont-elles se liguer les unes contre les autres ou rester unies ?

Une série qui sait alterner les émotions. La violence du milieu n’empêche pas les amours ou l’amitié, l’entraide ou la trahison. Un condensé de notre monde si souvent injuste.

➤ « Orange is the new Black » (intégrale saisons 1 à 4 en bluray et saison 5) chez Sony. Les 13 épisodes de 50 minutes de la saison 6 sont disponibles sur Netflix.

vendredi 27 juillet 2018

BD - N'est pas Tintin qui veut


Il rêvait de marcher sur les traces du héros de son enfance. Bertin Timbert a donc tout fait pour devenir journaliste comme Tintin. Mais le grand reporter du Petit Vingtième n’est pas passé par la case « chiens écrasés » de la presse quotidienne régionale. Bertin décroche un premier poste au service nécrologie de l’Echo du Mont de Dour-Uduluc.

Après une courte période d’observation, il gravit rapidement les échelons et va pouvoir mettre sa plume et son sens de l’observation acéré au service de sujets plus passionnants que les noces de diamant de Eugène et Marthe Rabiaux, l’inauguration du nouveau camion des pompiers ou la pose de la première pierre d’un pont.

Mais comme la BD de Devig et Derycke est aussi éloignée de la vraie vie que le quotidien d’un militant d’En Marche, il découvre chez Marthe une tendance à la nymphomanie, surprend la femme du maire accrochée à la barre des pompiers et que les employés de l’entreprise de BTP, en plus du pont, participent à la construction de la piscine privée du fils du député. La caricature de la vie journalistique de province est grossière. Mais sonne pourtant étonnamment juste...

➤ « Bertin Timbert, grand reporter », Fluide Glacial, 4,50 €

mercredi 25 juillet 2018

BD - La vraie vie de Dracula, un grand méchant



La nature humaine est ainsi faite : on ne s’intéresse qu’aux pires choses. Entre un grand bienfaiteur de l’Humanité et un tortionnaire de première, on est toujours attiré par le méchant. Cela a donné l’idée à Bernard Swyssen de raconter la véritable existence de quelques « salauds » de première.

Nouvelle collection inaugurée par Dracula, titre illustré par Julien Solé. Vlad Dracul a passé sa vie à conquérir le pouvoir. Luttant contre les Ottomans et les voisins occidentaux, il a trouvé une excellente (toute relative) idée pour se faire connaître et respecter: empaler à tout va. Une activité si plaisante qu’il aime déjeuner en plein air entouré de pieux sanguinolents. Un pique-nique dans toute l’acception du terme.

Loin d’être pénible cette leçon d’histoire est un parfait passe-temps, les auteurs truffant le récit de gags et références comiques. Un excellent album, empalez c’est pesé !

➤ « Les méchants de l’histoire » (Dracula), Dupuis, 12,50 €

mardi 24 juillet 2018

Polar - Toute puissante justice


Le personnage principal de «Reconnu coupable », roman policier de John Fairfax, pourrait donner des leçons à notre classe politique. William Benson, étudiant en philosophie, est accusé du meurtre d’un jeune homme après une rixe dans un bar. Il clame son innocence mais est quand même condamné. Le prix de sa réhabilitation passe par la reconnaissance de sa culpabilité. 16 ans plus tard, il est enfin libre, a suivi des études de droit et compte s’installer à son compte comme avocat. Benson est innocent mais avoue un meurtre qu’il n’a pas commis pour avoir les armes de sa défense. Les politiques actuels devraient en prendre de la graine.

Au lieu de se défausser sur des fusibles ou nier l’évidence, être droit dans ses bottes, assumer pour mieux repartir est une option qui visiblement n’existe pas dans ce milieu où tout doit aller très vite et selon leur propre scénario.

Passé cette parenthèse liée à l’actualité, le roman est passionnant. Benson, marqué pas son incarcération, n’a pas changé dans sa volonté, mais il a découvert un monde qu’il ne soupçonnait pas : celui des condamnés qui jamais plus n’auront la possibilité de vivre sans se faire mettre sur le dos l’étiquette infâme d’ancien prisonnier. Sa première cliente est une femme accusée d’avoir tué son patron. Avant le procès il mène l’enquête et ses nouveaux amis (les détenus relâchés), se révéleront d’une grande utilité.

➤ « Reconnu coupable » de John Fairfax, Éditions du Masque, 8 €

mercredi 18 juillet 2018

DVD ET BLU-RAY - Bagdad Café, retour gagnant


Film allemand tourné dans le désert californien, «Bagdad Café » de Percy Adlon a remporté un succès exceptionnel en France. Un engouement toujours d’actualité, le réalisateur montant de nouveau les marches de Cannes cette année pour y présenter la version restaurée de son film. Une version que l’on retrouve dans ce blu-ray exploitant toute la beauté des images d’un film lumineux. Jasmin, une grosse bavaroise (merveilleuse Marianne Sägebrecht) échoue dans un café-motel miteux du désert californien tenu par l’acariatre Brenda (CCH Bounder). Une blanche européenne et une afro américaine que tout oppose. Brenda va même jusqu’à dénoncer Jasmin à la police. Mais la touriste, abandonnée par son mari, va utiliser toute sa délicatesse pour conquérir les habitués du lieu, des enfants de Brenda à ses clients dont le peintre Cox (Jack Palance). Et les deux femmes vont se rapprocher, s’apprécier.

Un film universel sur l’amitié, la tolérance et la compréhension des autres. Un chef-d’œuvre à jamais raconté par Percy Adlon, 30 années après sa sortie, dans un documentaire tourné sur place. 

➤ «Bagdad Café», Studiocanal, 19,99 €

lundi 16 juillet 2018

BD - Brindille, fée en fuite


Des étincelles, comme autant de lucioles multicolores virevoltent dans cesse au dessus de sa tête. Cette petite fille, que ses sauveurs vont surnommer Brindille, est en fuite. Nue, elle a grimpé au sommet d’un immense mur, pourchassée par un violent incendie. Elle a rampé dans la forêt ne s’arrêtant, épuisée qu’au fond d’une grotte. C’est là qu’un lutin l’a découverte. Vêtue de feuilles d’arbres, elle devra se contenter de cultiver la terre et surveiller les enfants. La chasse, c’est pour les hommes.

Rebelle et désireuse d’apprendre d’où elle vient (elle ne se souvient rien d’avant l’incendie), elle quitte la sécurité du village et participe à la battue. C’est là qu’elle se découvre un don pour dominer les animaux.

Cette nouvelle série écrite par Brrémaud, plonge le lecteur dans un monde végétal féerique. Car peu de doute, Brindille est une fée. Mais dans ce monde étrange elle n’est pas la bienvenue et rapidement une armée de fantômes et autres monstres horribles se met à la pourchasser. Elle recevra l’aide d’un loup. L’occasion pour Bertolucci, le dessinateur de croquer ces animaux qu’il aime tant comme dans son autre série, « Love ». 

➤ « Brindille » (tome 1), Vents d’Ouest, 96 pages, 17,50 €

samedi 14 juillet 2018

Série Télé - Kimmy, femme taupe à New York


Il y a un peu de Candide de Voltaire dans « Unbreakable Kimmy Schmidt », série de Robert Carlock et Tina Fey. Kimmy (Elie Kemper) est enlevée par un révérend fou au fin fond de l’Amérique profonde.

Il lui fait croire que la fin du monde arrive et pour la « protéger », l’enferme dans un bunker avec trois autres malheureuses.

15 ans plus tard, elle est libérée et devient célèbre en tant que « femme taupe ». Mais au lieu de rentrer dans sa cambrouse, elle reste à New York pour rattraper sa jeunesse perdue.

Kimmy la naïve, mais à la volonté de fer se met en colocation avec Titus (Tituss Burgess) dans un appartement miteux propriété de Lilian (Carol Kane). Toute l’alchimie de la série réside dans ces trois personnages antagonistes. Lilian est paranoïaque, vivant encore dans le passé quand elle était mariée à un musicien noir. Titus, gros, maniéré est la quintessence de l’artiste gay incompris.

Comment Kimmy​​​​​​​ peut-elle comprendre notre société elle qui en est restée aux premiers épisodes de Friends ? Tina Fey (qui s’offre un rôle de psy déjantée), produit et insuffle un second degré dévastateur à une série qui fait la part belle à la musique (Titus chante très bien et à tout bout de chanp) et au vivre ensemble, malgré nos différences.

Les quatre saisons sont diffusées sur Netflix

mercredi 11 juillet 2018

Polar - Surveillance abusive


Un lieu clos, une dizaine de personnages, une angoisse allant crescendo : « Sécurité » de Gina Wohlsdorf marque par son économie de moyen. Cette histoire de massacre dans un grand hôtel sur la côte américaine à trois jours de son ouverture officielle est racontée au présent, dans un style direct, percutant. Un peu comme si l’on assistait à un film réalisé avec les images issues des centaines de caméras de vidéo surveillance voulues par le milliardaire à l’origine du projet.

Pour organiser cette réception majestueuse, Tessa est aux manettes. «Tessa est jolie mais pas d’une séduction évidente». «Tessa est le genre de personne qui se jette sur les critiques avec reconnaissance et considère les compliments comme une insulte. C’est exaspérant.» Longtemps on ne sait pas qui est le narrateur. Seule certitude, il est dans le poste de contrôle de la sécurité à scruter les membres du personnel. Un chef français (caricatural mais hilarant, il faut l’admettre), un couple chargé de la décoration et quelques femmes de ménage.

Et puis l’élément extérieur, Brian, le presque frère de Tessa, cascadeur à moto, si protecteur pour celle qui comme lui a vécu une dizaine d’années dans la même famille d’accueil. Tout bascule quand un tueur entre en jeu. Un pro, méthodique. Sadique aussi. Un excellent thriller qui vous dégoûtera des grands hôtels et des labyrinthes végétaux. 

« Sécurité » de Gina Wohlsdorf, Actes Sud, 21,80 €

lundi 9 juillet 2018

BD : Se soigner par les voyages

Entre les châteaux Cathares et ceux d’Espagne, que choisissez-vous ? La question se pose aux membres de ce voyage organisé peu commun raconté par Louis (scénario) et Marty (dessin) dans « Road Therapy ». Thérapie car les excursionnistes sont des patients d’une clinique psychiatrique.

Une anorexique, une maniaco-dépressive, une autre atteinte du syndrome de la Tourrette : le voyage vers les Pyrénées s’annonce mouvementé.


Du moins si le chauffeur daigne arriver. Malade, il est remplacé au pied levé par Igor, inconnu et donc forcément suspect aux yeux des deux infirmiers encadrants.

Igor un peu trop enthousiaste pour ces malades craignant la nouveauté ou la vitesse.

Mais dès qu’il évoque les fameux châteaux en Espagne, mirage qui parle à ces zinzins, les ruines cathares perdent de leur attrait.

Ce roman graphique, très dialogué, donne l’occasion aux auteurs de mettre en lumière ces « patients », « malades de la tête », mais conscients de tout ce qui les entoure et souvent plus sensibles aux thérapies alternatives que les bonnes vieilles recettes des infirmiers expérimentés.

« Road Therapy » de Louis et Marty, Bamboo, 72 pages, 16,90 €

mercredi 4 juillet 2018

BD - Dernier rendez-vous au phare



Les récits d’angoisse et d’horreur sont à la mode. L’action de « Ni terre, ni mer » se déroule dans un phare sur un caillou rocheux au large. Un voilier y fait naufrage. Ses cinq passagers, trois filles et deux garçons de très bonnes familles, sont recueillis par les deux hommes qui gardent le phare. 
Deux cadavres plus tard, on retrouve les survivants pour la seconde partie de cette intrigue imaginée par Olivier Mégaton et dessiné par l’Italien Genzianella au dessin épuré, un peu à la Paul Gillon. 


L’ensemble est plus que convaincant, logique car Mégaton est un as de la mise en scène qui s’est illustré sur des productions Besson comme Taken ou le Transporteur. 

« Ni terre, ni mer » (tome 2), Dupuis, 14,50 €

lundi 2 juillet 2018

DE CHOSES ET D’AUTRES - Tombée du ciel

Quand je suis en stand-by comme la semaine dernière, me balader sur internet sans but précis fait partie de mes occupations favorites. « Pure perte de temps » me glisse perfidement mon épouse, toujours prompte à me trouver des activités plus utiles à la bonne marche du foyer.
 Reste que j’y trouve des images incroyables. Comme cette vidéo de cinq secondes découverte samedi. Tirée d’une caméra de vidéo surveillance d’un magasin situé à Alberta au Canada. On y voit un présentoir de produits ménagers. Tout à coup des morceaux de plafond s’écroulent, suivis par une femme qui chute lourdement sur le dos, roule sur le sol, se relève et court vers une porte, les bras en l’air. 
D’où sort cette femme « tombée du ciel » ? Par quelle incroyable circonstance a-t-elle été filmée en pleine chute et surtout, pourquoi ces images sont-elles diffusées ? J’ai parcouru péniblement (merci Google traduction) plusieurs articles en anglais pour comprendre qu’il s’agissait d’une voleuse présumée. Elle paye ses achats avec une carte bancaire volée. Découverte, elle tente de se cacher dans le faux plafond de la boutique à l’arrivée de la police. On la voit grimper sur les rayons et disparaître dans une ouverture. 
La vidéo a connu un beau succès. Mais je m’interroge sur le côté voyeur du fait divers. Car la présumée voleuse semble se faire mal en tombant. Et la suite de l’arrestation est assez musclée. 
Peut-on rire du malheur des autres même si, sur le coup, on trouve la scène cocasse ? 
Enfin, il faut avouer que toutes les situations comiques partent du même principe. Du jardinier qui se prend un râteau (au sens propre) au célèbre arroseur arrosé des débuts du cinéma. 
N’empêche. Dans ce cas précis, j’ai ri jaune. 

Chronique parue le lundi 2 juillet 2018 en dernière page de l'Indépendant

BD - L’éducation par l’enfermement



Paru chez Syros, la trilogie de Méto d’Yves Grevet inaugure la nouvelle collection « Log’In » de chez Glénat. Un premier volume qui campe le décor. Angoissant. 
Dans une maison sur une île quasi déserte, 64 garçons vivent dans un pensionnat aux règles draconiennes. Ils dorment tous dans un immense dortoir et si, par malheur, l’un d’entre eux détériore les parois de son lit, la nuit venue, des créatures de métal viennent l’enlever pendant que ses camarades doivent fermer les yeux et rester immobiles. 

Le lendemain, il sera remplacé par un plus jeune. 
L’histoire débute par le départ de Quintus et l’arrivée de Crassus.
 Il est placé sous la responsabilité de Méto, obligé de lui apprendre les règles. Adapté par Lylian, dessiné par Nesmo, cet album qui ressemble par certains aspects à un comic, en impose par sa virtuosité graphique mise entièrement au service de l’histoire. 

«Méto » (tome 1), Glénat, 16,90 €

dimanche 1 juillet 2018

BD - Solution finale, avant, pendant et après avec Wannsee et Irena


La bande dessinée comme outil de mémoire. Loin de n’être qu’un genre réservé aux plus jeunes ou à la distraction, la BD a gagné depuis longtemps ses lettres de noblesse. Ces deux albums sont l’exemple même d’un vecteur de communication grand public permettant de mettre en lumière des pans de notre histoire qu’il ne faut surtout pas oublier, les derniers développements de l’actualité (crise migratoire, populisme au pouvoir en Italie ou en Pologne) montrant que rien n’est gagné en ce qui concerne la paix en Europe. 

Fabrice Le Henanff aborde de façon frontale l’histoire de la solution finale des nazis contre les Juifs. Tout a débuté, de façon « pratique » et « matérielle », le 20 janvier 1942 dans une villa cossue de la banlieue de Berlin. 
À Wannsee, une vingtaine de cadres au cours d’une réunion voulue par Heydrich et dont le compte-rendu est rédigé par Heichmann. Là, dans un milieu bourgeois, entre champagne et buffet de charcuterie, sera élaborée la solution finale voulue pas Hitler : « nettoyer » l’Europe. Un plan pour évacuer puis exterminer dans des camps dotés de fours crématoires reliés aux chambres à gaz des millions de Juifs. 
La froideur du récit, donne l’ampleur de l’horreur de ces hommes dont certains échapperont longtemps à la justice. Un album à montrer dans toutes les écoles. 

Irena, la «Juste» Autre style avec « Irena » écrit par Morvan et Trefouël et dessiné par Evrard. Dessin « enfantin » pour montrer l’horreur de la mise en place des décisions de Wannsee. En Pologne, le ghetto est vidé de ses milliers d’habitants. Direction les fameux camps, sans espoir de retour. Sauf si vous avec la chance de croiser la route d’Irena Sendlerowa. 


Cette Polonaise, catholique, a sauvé des milliers d’enfants en les plaçant dans des familles polonaises sous de fausses identités. 
Dans cette troisième partie, on retrouve une de ces petites rescapées, aujourd’hui maman dans l’État d’Israël. L’histoire de cette Juste, exemplaire à bien des égards, ne peut qu’émouvoir. Surtout quand la vielle dame se retrouve confrontée aux milliers de fantômes de ceux qu’elle n’a pas réussi à sauver de la barbarie nazie. 
Là aussi, la lecture en classe devrait être obligatoire. 

➤ «Wannsee», Casterman, 18 €

➤ « Irena » (tome 3), Glénat, 14,95 €

BD - Vacances et mensonges



Les vacances dans la France profonde des années 80 ne sont pas toujours très passionnantes. Hervé et Romuald s’ennuient à mourir. La journée, ils ont pour seule occupation de zoner sous les piliers en béton du projet d’aérotrain abandonné au milieu des années 70 au détriment du TGV. Hervé, l’aîné, vient de tripler sa 3e. Romuald, par contre, a brillamment réussi son année scolaire. Mais il n’a pas osé le dire à son pote. La crainte de le décevoir. Surtout de ne plus aller en cours avec lui...
 Un duo qui, le soir, retrouve Mathilde. Caissière dans le supermarché du coin, elle compense son surpoids par un bagou d’enfer. Des amis sans véritable avenir quand ils tombent sur Lucie. Blonde, filiforme, audacieuse elle va les faire rêver à tour de rôle. Mais attention, Lucie semble une experte en mensonge. 
Ce roman graphique de Ducoudray, illustré par Corgié, s’achève dramatiquement. Un peu comme le destin de cet aérotrain, prometteur mais abandonné car trop coûteux et rouillant dans un hangar. 

« Les lumières de l’aérotrain », Bamboo, 16,90 €