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lundi 10 février 2025

Cinéma - « La pie voleuse » : petits larcins contre grande bonté

Pour aider sa famille, une aide à domicile dérobe des petites sommes à des personnes âgées. Le nouveau film de Robert Guédiguian, tourné dans le quartier de l’Estaque à Marseille, est profondément humain.


Bienvenue à l’Estaque, quartier de Marseille. Ses petites maisons typiques, sa population chaleureuse, sa vue imprenable sur la Méditerranée. L’Estaque, décor toujours aussi éblouissant de plusieurs films de Robert Guédiguian dont le dernier, La pie voleuse. Une histoire simple, de gens sans prétention, tentant de vivre dignement dans un monde de plus en plus dur et exigeant. Maria (Ariane Ascaride) est aide à domicile. Elle s’occupe du quotidien de quelques personnes âgées. Son mari, Bruno (Gérard Meylan), est au chômage et passe trop de temps au bistrot à jouer aux cartes. Et à perdre de l’argent.

Alors Maria pioche parfois dans les réserves de ses « petits vieux » pour renflouer le ménage qui croule sous les dettes. Et puis elle détourne aussi quelques chèques de M. Moreau (Jean-Pierre Darroussin) pour payer la location d’un piano pour son petit-fils qu’elle rêve de transformer en grand interprète. Petits larcins sans grandes conséquences, qui passent inaperçus.

L’art de joindre les deux bouts

Un bête concours de circonstances fait s’écrouler l’édifice mis en place par cette gentille pie voleuse, si dévouée pour ses « victimes » qu’elle considère comme sa seconde famille. La mésentente entre Laurent (Grégoire Leprince-Ringuet) le fils de M. Moreau, va pousser ce dernier à s’intéresser à ses comptes. Et découvrir qu’il loue un piano depuis quelques mois. Piano qui n’a jamais été installé chez lui mais chez une certaine Jennifer. Qui est cette femme ? La maîtresse du vieil homme qui ne se déplace plus qu’en fauteuil roulant ?

La chronique sociale aurait pu virer au fait divers. C’est sans compter avec l’incorrigible optimisme du réalisateur. Et à la force de l’amour. Un coup de foudre (superbement interprété par Marilou Aussilloux, comédienne originaire de Narbonne de plus en plus en vue et Grégoire Leprince-Ringuet) va bousculer l’ordre établi, rapprocher les contraires, permettre à la raison de l’emporter.

Un film résolument positif, sur la difficulté de rester dans les « clous » quand on est acculé financièrement. Mais que représente une petite pie voleuse face au hold-up (toujours très légal…) de certains milliardaires ?

Film de Robert Guédiguian avec Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan, Marilou Aussilloux, Grégoire Leprince-Ringuet

 

jeudi 6 février 2025

En vidéo - “Quand vient l’automne” de François Ozon


Deux vieilles amies (Hélène Vincent et Josiane Balasko) cherchent des champignons dans les forêts de Bourgogne quand vient l‘automne. Ces retraitées ont travaillé ensemble à Paris. Elles partagent ainsi un secret qui perturbe leurs familles.

Ce film de François Ozon, sur la fin de vie, les remords et la réputation, est profondément humain. Il permet à deux « anciennes » du cinéma français de rendre une copie parfaite.

La sortie en vidéo chez Diaphana est l’occasion d’une floraison de bonus. Les classiques entretiens avec réalisateur et comédiennes, les scènes et prises coupées ou les essais des costumes.

Enfin, vous pourrez voir le clip de la chanson Le large, interprétée par Françoise Hardy et réalisé par François Ozon.

mercredi 4 décembre 2024

Cinéma - Deux frères se retrouvent “En fanfare”

La pratique de la musique, classique ou populaire, est omniprésente dans ce film d’Emmanuel Courcol. Un trait d’union entre deux frères qui apprennent à se connaître.


Tout réussi à Thibaut Désormeaux (Benjamin Lavernhe). Ce chef d’orchestre réputé enchaîne les grandes salles et compose. Une vie de rêve et de passion. Jusqu’à la découverte d’une leucémie. Une greffe de moelle devient urgente. Il demande à sa petite sœur. Mais elle n’est pas compatible. Pire, le chirurgien découvre qu’ils n’ont aucun lien de parenté. Thibaut a été adopté. Une vérité qui bouscule son quotidien, ses certitudes. Et lui permet de nouveau de faire des projets. Il a un frère, Jimmy (Pierre Lottin). Reste à le convaincre de devenir donneur.

Le début du film d’Emmanuel Courcol mélange mélodrame (découverte de la maladie) puis comédie (deux frères de milieux sociaux totalement différents). Mais là où d’autres auraient réduit leur propos à un enchaînement de situations comiques et cocasses, le réalisateur livre une œuvre fine et aboutie, avec l’utilisation de la musique pour raconter l’histoire et le rapprochement de ces deux hommes privés d’une enfance commune. Pour réussir ce grand écart, le jeu des comédiens est essentiel. En confrontant Benjamin Lavernhe et Pierre Lottin, le réalisateur accomplit un tour de force génial.

Car tout semble opposer ces deux inconnus aux parcours si différents. A la base ils ont la même mère, incapable de s’occuper d’eux. Thibaut tire le bon numéro en intégrant une famille qui détecte très tôt un petit génie de la musique. À l’opposé, Jimmy va de famille en famille avant de se stabiliser dans le foyer d’un mineur du Nord. C’est là qu’il va faire sa vie, employé dans une cantine scolaire, divorcé, père d’une adolescente. Il a pourtant un point en commun avec Thibaut : l’oreille absolue. Il l’utilise chichement en participant à la fanfare du village. Il joue du trombone, adore la trompette et se débrouille au piano.

Sur fond de lutte sociale, de paupérisation des anciennes régions industrielles et de mise en avant de la solidarité et de la joie de vivre typiques du Nord, En fanfare est une ballade sublime entre grande musique, jazz et variétés. Une renaissance pour le chef d’orchestre, un peu déconnecté de la vraie vie à cause de son succès, une seconde chance inespérée pour Jimmy, incapable d’avoir suffisamment confiance en lui pour exploiter ses talents.

Une histoire de rédemption, joyeuse et émouvante, un grand film ou l’on retrouve deux géants déjà honorés récemment au cinéma : Ravel et Aznavour.

Film d’Emmanuel Courcol avec Benjamin Lavernhe, Pierre Lottin, Sarah Suco

 

dimanche 1 décembre 2024

En vidéo, “Pendant ce temps sur Terre”


Rares sont les réalisateurs français osant s’attaquer à la science-fiction. Jérémy Clapin, repéré après son film d’animation pour adultes J’ai perdu mon corps, a relevé le défi en écrivant et filmant e très énigmatique Pendant ce temps sur Terre. Elsa (Megan Northam), une jeune femme se pose beaucoup de questions après la disparition, en orbite, de son frère, spationaute.

Quand elle croit entendre la voix du disparu, elle comprend qu’il est aux mains de mystérieux extraterrestres. Avec un minimum d’effets spéciaux, le metteur en scène fait passer un message entre poésie et science.

L’édition DVD du film chez Diaphana offre des commentaires audio du réalisateur, un livret et un court-métrage de 2009.

vendredi 18 octobre 2024

Cinéma - Comment s’en sortir “Quand vient l’automne” ?

Thriller à la Simenon, « Quand vient l’automne » de François Ozon offre un superbe premier rôle à Hélène Vincent, 81 ans.


L’automne dont il est question dans ce film de François Ozon, c’est d’abord la saison, quand la campagne humide se prépare à se mettre en sommeil. Mais c’est aussi métaphoriquement l’automne de la vie des deux personnages principaux, Michelle (Hélène Vincent) et Marie-Claude (Josiane Balasko).

Elles vivent dans la même petite ville de Bourgogne, entourée de bois et de champs. La première dans une grande bâtisse avec un immense jardin, la seconde dans un petit pavillon. Deux femmes seules, qui ont un même secret lié à leur passé. Michelle a une fille, Valérie (Ludivine Sagnier) et Marie-Claude un garçon, Vincent (Pierre Lottin), tous les deux adultes.

La première est mariée, en instance de divorce, mère d’un jeune Lucas qui adore sa mamie. La situation est plus compliquée pour Marie-Claude. Vincent, après quelques « bêtises », se retrouve en prison. Quand il sort, il retourne chez sa mère et accepte de travailler dans le grand jardin de Michelle. Le début du film, pose les bases de l’histoire et se révèle déjà très intrigant. La réalisation, toute en délicatesse, en non-dits, plante l‘ambiance, renforcée par une musique obsédante de Evgueni et Sacha Galperine.

Le premier choc vient quand Valérie manque de mourir. Un midi, chez sa mère, elle a mangé des champignons ramassés la veille dans les bois. Elle seule en a mangé. Et frôle la mort. Elle quitte le soir même la maison de sa mère, refusant de lui laisser Lucas durant les vacances comme convenu. C’est aussi à partir de ce moment que l’on doute. Accident ou acte délibéré ? Michelle, sous ses airs de mamie gâteau ne cache-t-elle pas de profondes fractures psychologiques ?

L’explication viendra peut-être du métier qu’elle exerçait à Paris avant de se retirer à la campagne. Un climat, un sentiment de doutes et de soupçons, renforcés par l’attitude de Vincent. Le spectateur se pose beaucoup de questions au sujet de cet être, a priori frustre, joué avec naturel par Pierre Lottin. Un condensé de violence contenue d’où affleure une gentillesse désarmante.

La suite du film, surprenante, voire déconcertante tant François Ozon pousse loin le curseur de la rupture avec le politiquement correct, nous entraîne dans ces limbes de l’automne, quand la nature s’endort et que de sous les feuilles mortes sortent les champignons. Bons ou mauvais.

Film de François Ozon avec Hélène Vincent, Josiane Balasko, Ludivine Sagnier, Pierre Lottin.

mercredi 16 octobre 2024

En vidéo, “Le deuxième acte”



Quentin Dupieux fait partie des meilleurs cinéastes au monde. Il a tout compris au fonctionnement de ce divertissement, et de la frontière entre réalité et fiction.

Le deuxième acte est tout simplement génial et sa sortie en vidéo chez Diaphana permettra à tous ceux qui l’ont raté sur grand écran de bénéficier de cette master classe. Il y est question de paraître, d’intelligence artificielle, de superficialité, de travelling et d’arrogance.

Une histoire basique : un homme demande à son meilleur ami de séduire la femme qui le désire, en présence de son père, se déroulant dans un petit restaurant en bord de route. Les comédiens (Léa Drucker, Vincent Lindon, Louis Garrel, Raphaël Quenard et Manuel Guillot) réalisent des acrobaties périlleuses pour jongler entre fiction, réalité et un entre-deux, typique des films du réalisateur.

samedi 13 juillet 2024

En vidéo - “Daaaaaalí !” de Quentin Dupieux

 

Quentin Dupieux doit être un fan du jeu des 7 familles. Il s’en crée régulièrement de nouveaux. « Dans la famille de mes films sortis en 2024, je voudrais le 2e ». C’est Daaaaaalí ! qui vient de sortir en DVD et blu-ray chez Diaphana.

« Dans la famille des Dalí, je voudrais le 4e ». C’est Édouard Baer, après Jonathan Cohen, Gilles Lellouche, Pio Marmaï et avant Didier Flamand.

Cette comédie, aussi absurde que loufoque, voit plusieurs comédiens interpréter le peintre catalan. L’édition en vidéo est agrémentée de nombreux bonus comme un entretien avec Quentin Dupieux, Jonathan Cohen et Édouard Baer, Daaaaaalí à la plage, un extrait du documentaire Filmer fait penser réalisé par Charles Bosson, ainsi qu’une rencontre avec Salvador Dalí, reportage réalisé par Pierre Jourdan en 1971 et extrait des archives de l’INA.

mardi 23 avril 2024

Cinéma - “Le mal n’existe pas” au cœur des forêts du Japon

Film écologique, naturaliste et familial, « Le mal n’existe pas » de Ryusuke Hamaguchi donne à voir un autre Japon, partagé entre nature préservée et ambitions touristiques luxueuses. 

Le film débute par un long travelling sur les cimes d’arbres. Mais à l’opposé de nombre de génériques de série, ce n’est pas vu du ciel et à partir d’un drone que c’est filmé. La caméra avance et capte l’image des branches qui cachent en partie le ciel. La beauté de la forêt, mais admirée à hauteur d’homme, tête renversée. Ou d’enfant. Car ils sont deux à sillonner sans relâche cette zone protégée du Japon : Takumi (Hitoshi Omika) et sa fille Hana (Ryo Nishikawa).

Le premier est homme à tout faire dans cette petite ville loin de la frénésie de la capitale. Il élève seul sa fille de 8 ans qui passe plus de temps à courir la nature qu’à faire ses devoirs. Ce début de film pourrait sembler trop lent, sans la moindre action (par exemple cinq minutes durant lesquelles Takumi scie du bois puis fend des bûches…). Sauf si on lâche prise et qu’on écoute la musique de Eiko Ishibashi.

Le film est un dérivé d’une collaboration entre cette compositrice et le réalisateur. Il a filmé cette splendide forêt pour illustrer des concerts en live. Des images qu’il a reprises en partie dans le film, y greffant une intrigue qui prend toute son ampleur dans la seconde partie.

Des promoteurs ont acheté une partie de la forêt et veulent y implanter un « glamping ». Le concept fait fureur : un mélange de camping et de glamour. Cela apportera emplois et dynamisme économique. Mais lors d’une réunion de présentation du projet par deux jeunes investisseurs, les quelques habitants présents s’inquiètent surtout pour l’eau de la source qui alimente le village.

La fosse septique du « glamping » pourrait la polluer. Ils exigent que la fosse soit déplacée. Incompréhension des deux urbains. Le film se transforme en critique sociale et écologique. Car au Japon comme chez nous, les intérêts capitalistiques se moquent de la préservation de l’environnement. Et dans la suite de Le mal n’existe pas, Ryusuke retrouve la profondeur cinématographique de Drive my car. Les investisseurs sont parfaitement conscients que le projet est mal ficelé.

Mais une seule chose importe : le boucler le plus rapidement possible pour récupérer des subventions d’après crise sanitaire. La dernière partie du film voit les deux jeunes investisseurs revenir en forêt et tenter de persuader Takumi du bien-fondé de leur projet de glamping.

La confrontation de ces deux mondes et une fin totalement inattendue, toujours avec l’appui d’une bande-son virtuose, propulse ce film japonais vers le statut de chef-d’œuvre inattendu. Le Lion d’argent au dernier festival de Venise est dès lors tout à fait justifié.

Film de Ryusuke Hamaguchi avec Hitoshi Omika, Ryo Nishikawa, Ryûji Kosaka

 

mardi 16 janvier 2024

En vidéo, “Anti-squat”, un film sur la crise du logement

 


Jusqu’où peut-on aller pour se loger ? C’est le thème central du film Anti-squat de Nicolas Silhol, sa seconde réalisation qui vient de sortir en vidéo chez Diaphana. Inès (Louise Bourgoin), mère célibataire, après l’échec de son agence immobilière, se retrouve au pied du mur.

Sans revenu, elle est menacée d’expulsion de son appartement. Elle va accepter l’offre de la société Anti-Squat empêcher l’arrivée de squatteurs dans un immeuble de bureaux inoccupés. Elle sera chargée de recruter et de vivre avec six « faux » locataires, eux aussi dans une situation tout aussi précaire. Mais à une condition (qui vaut aussi pour les recrutés) : pas de visite, pas de fête et surtout pas d‘enfants. Or, Inès a un fils adolescent…

Un film sombre mais édifiant sur une réalité urbaine qui risque de se détériorer de plus en plus.

jeudi 21 décembre 2023

En vidéo, “Yannick”, star des planches


Si son prochain film s’attaque au mythe Dali (sortie le 7 février), Quentin Dupieux s’intéresse au théâtre dans Yannick qui vient de sortir en DVD et blu-ray chez Diaphana.

Un film court, percutant, révélant l’immense talent de Raphaël Quenard. Dans un théâtre parisien, le public rit mollement au jeu de Pio Marmaï et Blanche Gardin. Un spectateur ose s’indigner de la piètre qualité en échange de places relativement chères.

C’est Yannick (Raphaël Quenard), veilleur de nuit de province, monté à Paris passer du bon temps. Mécontent, il va littéralement prendre en otages comédiens et spectateurs.

Une comédie douce-amère remettant en cause abruptement la perception de l’art par le public et sa fabrication par des comédiens trop routiniers.


mercredi 29 novembre 2023

Sortie en DVD et blu-ray du film iranien "Les ombres persanes"

Les ombres persanes, qui sort en DVD et blu-ray chez Diaphana Vidéo, est un magistral thriller psychologique du réalisateur iranien Mani Haghighi. Dans un Téhéran crépusculaire, noyé sous une pluie battante incessante, une femme croit devenir folle. Farzaneh (Taraneh Alidoosti), monitrice d’auto-école, voit son mari Jalal (Navid Mohammadzadeh) prendre un bus et se rendre chez une autre femme qui est son propre sosie. Mais en réalité, il y a deux couples et deux sosies...

 Le scénario, subtil, permet à ces Ombres persanes de toucher à l’universalité. Et malgré une interprétation impeccable des deux comédiens iraniens, c’est l’œuvre idéale pour être adaptée aux USA et devenir un immense succès à l’international.

mardi 14 novembre 2023

Cinéma - “Et la fête continue !” pour Robert Guédiguian


Le nouveau film de Robert Guédiguian parle de misère sociale à Marseille, d’hôpitaux débordés, d’immeubles vétustes qui s’écroulent, de guerre en Arménie… Et pourtant, le titre transpire l’optimisme : Et la fête continue ! Explications du scénariste et réalisateur dans ses notes d’intention : « Le titre a existé tout de suite. Nous avions pris la décision irrévocable de faire un film qui se terminerait bien. » Un parti pris assumé avec un final digne d’une love story, avec belles promesses de partages et de découvertes. Mais ne vous effrayez pas, le réalisateur qui a fait de Marseille et de l’Arménie son terrain de prédilection ne s’est pas reconverti dans les sirupeux téléfilms de Noël. Au contraire, cette opposition permet de mieux faire ressentir la force de la mobilisation populaire après le drame du 5 novembre 2018.

Le film débute par les images des journaux télévisés montrant cette montagne de gravats. Deux immeubles vétustes viennent de s’écrouler, 8 personnes sont retrouvées mortes. Dans un grand méli-mélo de ses sujets d’inspiration, Robert Guédiguian filme la mobilisation des habitants du quartier, menée par Alice (Lola Naymark). Une intermittente du spectacle qui est amoureuse de Sarkis (Robinson Stévenin), patron d’un bar arménien et fils de Rosa (Ariane Ascaride), infirmière à l’hôpital, engagée à gauche avec les écolos et candidate aux municipales.

Des vies de lutte (contre l’insalubrité, le génocide arménien, l’abandon du secteur de la santé) qui n’empêchent pas l’amour de tout bousculer. Notamment quand Henri, le père d’Alice (Jean-Pierre Darroussin), jeune retraité, s’invite dans la vie de Rosa, veuve depuis trop longtemps. Un film revigorant, qui redonne foi en l’avenir, fait passer des messages avec intelligence et se termine bien dans cette ville de Marseille filmée avec amour.

 Film de Robert Guédiguian avec Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Lola Naymark


dimanche 15 octobre 2023

Cinéma - “Le ravissement” ou le comblement d’une absence


Lydia (Hafsia Herzi), sage femme, a participé à la naissance de centaines d’enfants. Une jeune femme dynamique et positive. Alors qu’elle s’apprête à fêter l’anniversaire de sa meilleure amie Salomé (Nina Meurisse), son petit ami lui annonce qu’il l’a trompée. Lydia a l’impression que son existence s’effondre. Sa force, juste apparente, disparaît en un instant. Une longue chute, fil rouge de ce film sensible et très humain d’Iris Kaltenbäck.

Son amitié avec Salomé pourrait la sauver. Mais au contraire, c’est ce qui va l’entraîner vers son nadir. Car entre les deux amies, comme reliées, les émotions sont souvent contraires. Quand Salomé est heureuse, Lydia déprime.

Or Salomé, le soir de son anniversaire et de la rupture de Lydia, apprend qu’elle est enceinte. Lydia, retrouvant ses réflexes professionnels, va soigneusement s’occuper de la grossesse de Salomé, volontaire pour mener l’accouchement. Une naissance agitée. La petite fille a failli mourir. Sauvée par les gestes experts de Lydia. Est-ce cette péripétie qui a touché au plus profond Lydia ? Ou sa rencontre avec un ancien amant de passage, Milos (Alexis Manenti) ?

De normale, son attitude va devenir atypique, provoquant un bouleversement dans son existence et celles de ses proches. Comme une chute inéluctable pour trouver une fausse solution à une situation intenable.

 Film français d’Iris Kaltenbäck avec Hafsia Herzi, Alexis Manenti.


jeudi 14 septembre 2023

Cinéma - Un amour naissant sous “Les feuilles mortes”

"Les feuilles mortes", un film d’Aki Kaurismäki avec Alma Pöysti, Jussi Vatanen, Janne Hyytiäinen.

Est-ce que tomber amoureux est à la portée de tout le monde ? Le bonheur se partage-t-il équitablement dans toutes les classes sociales ? Les feuilles mortes, nouveau film d’Aki Kaurismäki, en compétition au dernier festival de Cannes, reparti avec le prix du Jury, tente de répondre à ces légitimes interrogations en observant le quotidien de Ansa (Alma Pöysti) et Holappa (Jussi Vatanen).

Solitaires, célibataires, pauvres, quasiment mutiques : ces deux âmes en peine se croisent une première fois dans un bar qui fait aussi karaoké. Ils se remarquent à peine, même si Haloppa remarque le visage doux et placide d’Ansa. Quelques jours plus tard, alors qu’Ansa va travailler, Holappa ose l’aborder dans la rue. Un café ? Un cinéma ? La jeune femme dit oui à tout.

Mais à la fin de la soirée, elle ne que donner son numéro de téléphone à son courtisant. Qu’il égare dans la foulée. Dès lors Ansa attend un signe alors qu’Holappa refait incessamment le chemin inverse, notamment à la sortie du cinéma pour tenter de croiser sa dulcinée.

Un film d’une extrême simplicité, avec cette touche unique du cinéaste finlandais entre documentaire social (les deux protagonistes font partie du sous prolétariat), hommage au 7e art européen (notamment la nouvelle vague française) et brûlot contre l’alcoolisme.

On ne peut qu’être touché par cette petite romance, sorte de coup de foudre en douceur et au ralenti, compliqué par les deux errances des amoureux. On apprécie aussi la bande originale entre rock et balade finlandaise, avec au final, cette version de la chanson Les Feuilles mortes qui donne son titre au film.

vendredi 25 août 2023

En vidéo, “Dalva”, fille sous emprise


Petite sensation lors du dernier festival de Cannes, Dalva, premier film d’Emmanuelle Nicot sort en DVD (Diaphana) avec de nombreux bonus. Deux courts-métrages de la jeune réalisatrice belge ainsi que son portrait réalisé dans le cadre de la Fondation GAN pour le cinéma. Dalva a 12 ans. Kidnappé par son père, elle vit avec lui et les services sociaux suspectent un possible inceste. 

Le film débute par l’arrestation du père et les cris de désespoir de Dalva qui veut le défendre. Car l’adolescente est totalement sous emprise. Le film raconte avec une crudité extrême son placement en foyer et le long travail des éducateurs et encadrants dépendants de la Justice. 

La performance de Zelda Samson, jeune inconnue à la présence magnétique, a été saluée unanimement par la critique.

jeudi 10 août 2023

Cinéma - “Yannick”, petite pépite d’humour à la Quentin Dupieux

Tourné en six jours et en salles depuis le 2 août, « Yannick », le nouveau film de Quentin Dupieux est une déflagration d’humour intelligent.

Méfiez-vous de l’effet miroir. Si vous allez voir Yannick au cinéma à partir de ce mercredi (on ne peut que vous le conseiller !), attendez-vous à vous retrouver dans une salle remplie de rires. Mais pas forcément là où vous allez rigoler. C’est la force de Quentin Dupieux : son cinéma est tellement original et imprévisible que tout le monde peut y trouver de quoi se gondoler à tout moment. Le miroir serait qu’un spectateur se lève et interrompe la projection. Mais ne rêvons pas, des situations aussi improbables il n’y en a que dans les films de ce réalisateur iconoclaste.

Tout en étant dans une salle de théâtre, le spectateur de Yannick se retrouve également au théâtre. Sur scène, Pio Marmaï et Blanche Gardin tentent de donner un peu de rythme à un vaudeville poussif. Une pièce intitulée Le cocu, avec le beau Pio dans le rôle principal (mais rendu ridicule avec une moustache de beauf et une mèche bouclée indomptable) et la caustique Blanche dans celui de la traîtresse. Le public, clairsemé, ne rit pas beaucoup malgré l’abattage du Cocu.

Rien que ce début est captivant. Les deux comédiens parviennent à mal interpréter leur texte avec une dextérité qui en dit long sur leur talent. Tout bascule quand Yannick (Raphaël Quenard), spectateur, se lève et proteste. Il ne trouve pas cela drôle. Or il est venu de Melun pour se distraire, oublier ses soucis de gardien de nuit. Cette pièce lui file carrément le bourdon.
Alors, pour ne pas gâcher sa soirée de congé, il demande gentiment aux comédiens d’arrêter cette idiotie et d’interpréter à la place une autre pièce. Ce dialogue, surréaliste, est porté par un Raphaël Quenard au sommet de sa coolitude. Son débit traînant et populaire apporte un degré de réalisme rarement atteint. Sur scène, les comédiens ne comprennent pas. C’est une première pour eux et ils mettront de longues minutes à se débarrasser de cet olibrius qui n’a que peu de respect pour leur travail. Mais ce n’est que le début de la confrontation entre des artistes et leur public. Et cela va saigner.

Ce projet secret de Quentin Dupieux, mené en six jours seulement, est sans doute son meilleur film. Écriture au cordeau, interprètes géniaux, ellipses vertigineuses (le public devient auteur, les comédiens ne jouent plus…), laissez-vous gagner par la folie à la Yannick.

Film de Quentin Dupieux avec Raphaël Quenard, Pio Marmaï, Blanche Gardin

 

lundi 31 juillet 2023

Cinéma - “Les ombres persanes” et son couple en double

Un thriller iranien de Mani Haghighi sur la rencontre de deux couples de sosies. 


Magistral thriller psychologique que ce film iranien de Mani Haghighi. Dans un Téhéran crépusculaire, noyé sous une pluie battante incessante, une femme croit devenir folle. Farzaneh (Taraneh Alidoosti), monitrice d’auto-école, voit son mari Jalal (Navid Mohammadzadeh) prendre un bus. Elle décide de le suivre et découvre qu’il se rend dans un immeuble.

De la rue, elle le voit à la fenêtre en pleine conversation avec une autre femme. Le lendemain, elle lui demande des explications. Mais il prétend ne jamais avoir pris ce bus. Il se rend à cette adresse et la porte s’ouvre sur une femme, Bita, qui est le sosie parfait, quasiment le clone, de son épouse. Cette dernière est, elle aussi, éberluée car l’homme qui vient de sonner est la copie conforme de son mari, Mohsen.

L’histoire prend alors un tour quasi fantastique. Farzaneh doute de sa santé mentale, Jalal tombe sous le charme de Bita qui lui rappelle tant sa femme quand elle était plus jeune, Bita est sensible à la gentillesse de ce dernier, sa délicatesse. Reste Mohsen, jaloux et violent. Il sera le dernier à être mis au courant. Pris dans une précédente affaire de violence au travail, il ne comprend pas cette situation, comme si son honneur était une nouvelle fois mis à l’épreuve.
Le scénario, subtil, toujours surprenant, jamais dans la facilité, permet à ces Ombres persanes de toucher à l’universalité. Et malgré une interprétation impeccable des deux comédiens iraniens, c’est l’œuvre idéale pour être adaptée par des scénaristes hollywoodiens (quand ils ne seront plus en grève…) pour devenir un immense succès à l’international.

Film de Mani Haghighi avec Taraneh Alidoosti, Navid Mohammadzadeh

 

vendredi 16 juin 2023

DVD - L’astronaute de Nicolas Giraud

Toucher les étoiles. Tel est le rêve de Jim, ingénieur en aéronautique chez ArianeGroup et raconté par L’astronaute qui sort en vidéo chez Diaphana. S’il travaille sur les fusées, il veut avant tout aller dans l’espace. Non sélectionné pour un vol habité, il décide de fabriquer dans une ferme isolée son propre engin.

Un film sur l’espace mais surtout la passion. Passion d’un homme pour son travail et la volonté de se dépasser. Si le scénario est un peu léger, le réalisateur, Nicolas Giraud, qui endosse également le scaphandre de Jim, a mis beaucoup de passion dans ce rôle que l’on devine très personnel. La distribution est magistralement complétée par Mathieu Kassovitz et Hélène Vincent.

En bonus, des entretiens avec le réalisateur, Mathieu Kassovitz et Jean-François Clervoy, ancien spationaute et conseiller technique sur le long-métrage.

dimanche 28 mai 2023

Cinéma - “Showing Up”, l’art fait son cinéma

La vie d’artiste. On a beaucoup glosé sur les tourments des créateurs passés, actuels ou futurs. Kelly Reichardt prend le pari de transformer ce quotidien parfois banal en film signifiant et aussi esthétique que les dizaines d’œuvres filmées sous toutes les coutures. La réalisatrice américaine, unique dans son genre, après le western écolo-rétro First Cow, revient à l’époque contemporaine avec ses considérations parfois très terre à terre. 

Showing Up raconte les quelques jours précédents le vernissage de l’exposition de Lizzie (Michelle Williams). Cette sculptrice, employée dans une école d’art à des tâches administratives pour remplir son frigo et le bol de croquettes de son chat, vit dans une vieille maison qu’elle loue à Joe (Hong Chau), sa voisine et meilleure amie, artiste elle aussi et qui comme Lizzie prépare une exposition. Deux exactement. Dans le garage, Lizzie modèle la terre. Elle multiplie les statuettes de femmes, les peignant pour qu’elles prennent d e multiples couleurs une fois cuites dans le four de l’école.  Le long-métrage, à la limite du contemplatif parfois, filme longuement Lizzie en train de travailler sur la matière. 

Une partie artistique passionnante, à mettre en parallèle avec le quotidien de la jeune femme un peu casanière. Son gros problème du moment, en plus de légèrement paniquer à quelques jours de l’expo alors que toutes ses œuvres ne sont pas terminées, c’est la défaillance de la chaudière. Elle harcèle Jo pour qu’elle la répare et ait enfin d l’eau chaude dans sa salle de bains. Autre tracas, l’arrivée inopinée d’un pigeon dans l’appartement. Le chat lui casse une aile, Lizzie, s’en débarrasse par la fenêtre. 

Mais le lendemain matin, Joe vient lui montrer l’adorable pigeon blessé trouvé devant sa porte qu’elle vient d’adopter et soigner. Un pigeon dont Lizzie va récupérer la « garde », comme pour se déculpabiliser de son geste nocturne.  

Un film atypique, comme toutes les œuvres de Kelly Reichardt, tranche de vie d’une artiste en recherche de reconnaissance, peu sûre d’elle. Loin du génie (plutôt du côté de Joe) trop souvent glorifié dans le cinéma clinquant. 

Film de Kelly Reichardt avec Michelle Williams, Hong Chau, Maryann Plunkett

dimanche 26 mars 2023

DVD et blu-ray - « Close » ou comment faire son deuil de l’amitié

Grand prix au festival de Cannes, nommé aux Oscars, le film belge de Lukas Dhont est un bloc d’émotion surfant sur l’amitié défunte de deux jeunes garçons.

Ils ont 13 ans, sont amis depuis des années et passent de merveilleuses vacances entre courses dans les champs, guerre imaginaire et nuit à se raconter des histoires, à spéculer sur leur avenir. Rémi (Gustav de Waele) et Léo (Eden Dambrine) se retrouvent à la rentrée. Ils intègrent le collège, sont dans la même classe par chance. Mais très vite l’ambiance change. Dans cette grande compétition et concours permanent entre adolescents, ils font figure de bêtes à part.


Leur amitié fusion est incomprise. Interprétée. Pour preuve, une fille leur demande tout de go s’ils sont en couple. Si Rémi, le plus introverti, n’est pas gêné, Léo, plus regardant à son image, réfute violemment cette interrogation. Comme si effectivement il ne voulait pas reconnaître l’évidence.
Pourtant il ne s’est jamais rien passé entre eux deux. Les scènes du début du film sont sensuelles, douces, pleines de complicité. Mais rien qui ne va au-delà d’une amitié forte. Même si ce sont deux garçons. C’est le message qu’a voulu faire passer le réalisateur, qui a souffert de ces jugements dans son enfance. Léo, pour faire cesser les bruits, rejette son meilleur ami, préférant rejoindre une bande plus masculine, qui parle foot et pratique le hockey sur glace, sport viril par excellence.

La fin de cette amitié, brutale, va perturber Rémi. Il ne comprend pas, se retrouve déboussolé, comme abandonné. La fin du film ne montre que Rémi, seul, perdu, de plus en plus coupable de cette attitude dictée par les diktats de la masculinité. Il va se rapprocher de la mère de Rémi, interprétée par une Émilie Dequenne qui apporte une humanité fragile à un drame déchirant.

La sortie en DVD et blu-ray (Diaphana) de ce film alors qu’il était en compétition aux Oscars, s’accompagne par un court bonus mais très éclairant. Une entrevue avec le réalisateur qui explique le processus d’écriture, ses sources d’inspirations et le casting.