Une maison au bout du monde, sur le Cap de Bonne-Espérance, imaginée par Vincent Crouzet. Un espion français va s'y damner.
Pas de doute, si Vincent Crouzet est un écrivain français, son inspiration il la trouve en Afrique australe. Après « Rouge Intense », thriller se déroulant dans le milieu des trafiquants de pierres précieuses, il revient sur ce bout de terre qu'il connaît bien en nous faisant visiter la « Villa Nirvana », maison au cœur de ce roman haletant et angoissant.François Vargas, agent de la DGSE, est envoyé en Afrique du Sud par sa hiérarchie. Cet homme de l'ombre, habitué aux actions dangereuses et violentes, écope d'une mission aussi étonnante que monotone. Moby Dick, surnom d'un gros bonnet du trafic d'armes, installé dans la région, devait être surveillé par un agent français, Bruno, un compagnon d'armes de François. Mais depuis quelques jours, Bruno ne donne plus aucun signe de vie. Que s'est-il passé ? François a pour mission de le découvrir, tout en reprenant la surveillance de Moby Dick. Pour ce faire, il va se faire passer pour le frère de Bruno.
Un vent obsédant
François débarque donc un beau matin dans le petit village touristique de Scarborough, prend contact avec la police locale et récupère les actifs de son supposé frère : une voiture (un vieille Coccinelle), une villa en location, du matériel de plongée, une bonne, une maîtresse... Tout ne viendra pas d'un coup. Le premier contact avec la vie de Bruno ce sera la maison. Villa Nirvana, bâtisse perdue au bout d'une impasse, accolée à une autre résidence en travaux. Travaux visiblement abandonnés. Les voisins les plus proches ce sont des babouins, agressifs et protégés car en voie d'extinction. Et puis le vent, le Docteur. Au souffle puissant et aliénant qui, telle la Tramontane parfois en Catalogne, a tendance à faire dérailler François Vargas : « Putain de vent. Au départ, il a gémi. Puis il a hululé. J'ai perçu comme un galop. Il ne doit subsister que de la lande dans ce coin, tout autour. Un désert de lande. Rien ne résiste éternellement à cette force pure, mais encore à ce bruit qui court longuement avant de frapper ».
Le grand requin blanc
Après avoir fait connaissance avec le décor et les éléments, François va aller au devant des habitants. Tous bien mystérieux. En majorité très pessimistes sur l'avenir de Bruno. Il aurait été boulotté par un grand requin blanc alors qu'il nageait dans l'océan Indien. C'est la version de trois vieilles commères et de l'épicier du coin. La bonne de Bruno, une superbe princesse de sang Xhosa, vivant dans un bidonville et nettoyant les crasses des Blancs pour survivre, fascine François. Il tente vainement de percer son mystère.
Et puis un jour apparaît Kimberley. Une jeune femme très sportive, chef des coast gards de la région, marquée dans sa chair. Adolescente, un hameçon lancé par un de ses frères lui a déchiré la bouche. Depuis elle ne sourit que d'un côté. Mais en permanence. Kim qui était la maîtresse de Bruno. Kim qui a déjà perdu, au cours de nuits de lune noire, son mari puis son fils. Tous mangés par un requin blanc gigantesque que depuis elle chasse.
Avec maestria, en excellent stratège littéraire, Vincent Crouzet place ses pions dans ce décor unique, avec cavaliers, fous et... Reines. Sans oublier de nous dévoiler, par petites touches, la véritable personnalité de François qui, espion oblige, a souvent menti au cours de sa vie professionnelle. Mais pour ce qui des menteurs, il semble être tombé sur un nid grouillant de spécimens tous plus virtuoses les uns que les autres. Il finira cependant par découvrir le vérité, l'incroyable vérité.
« Villa Nirvana », Vincent Crouzet, Flammarion, 19,90 €
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire