lundi 31 mars 2014

BD - Gare au Ninja malvoyant de "Blind Dog Rhapsody"


Si vous aimez les dialogues qui claquent et font sourire, cette BD est pour vous. Eric Hanna, le scénariste, a visiblement pris beaucoup de plaisir à imaginer les échanges entre ce héros non voyant, son maître fantôme ayant l'apparence d'un raton laveur et la pauvre serveuse de bar au chômage dont la principale utilité est d'avoir... de gros seins. Ça a le format d'un comics américain, mais l'histoire ressemble plus à un manga
Le héros, sans nom précis, est généralement nommé « sale bâtard blanc infirme ». Une insulte qu'il n'apprécie que moyennement. Expert en art martial, bien qu'il soit aveugle, il peut décimer une armée en quelques secondes. Sur les 100 pages de ce premier tome, il y a bien 40 pages de baston pure, avec os broyés et cervelles apparentes. Redec, le dessinateur, excelle dans ces combats aux noms si poétiques comme « attaque surprise de la queue cachée du crapaud » ou « Botte secrète de la chaussure flottante ». On rit beaucoup à la maladresse du héros, aux idées salaces du raton laveur et à la mégalomanie du méchant. Quant à Maï, la serveuse à forte poitrine, elle a d'autres atouts pour fasciner le lecteur.

« Blind Dog Rhapsody » (tome 1), Delcourt, 15,95 €

samedi 29 mars 2014

BD - Brumes ensorcelantes


On a parfois l'impression que toutes les sagas de fantasy se ressemblent. Il est vrai que la trame est souvent la même. Un ou une élue, des dieux en colère, quelques vaillants guerriers le tout saupoudré de trahisons. « Les brumes d'Asceltis », série écrite par Nicolas Jarry n'échappe pas à la règle. Mais on y retrouve quelques détails qui font la différence. Même après le changement de dessinateur Leoni et Negrin), Elya la jeune sylve reste sympathique. Mais surtout il y a la petite fée Nahi, si gironde avec ses petites ailes. Et aussi Galea, la blonde qui va prendre soin d'un bébé au destin immense. 
Galea peu vêtue, servante puis prostituée, mais au cœur d'or et prête à se sacrifier pour sauver l'enfant. Ce sixième tome voit le regroupement de tous les personnages principaux, une « convergence » qui se transforme en passage vers un autre monde.

« Les brumes d'Asceltis » (tome 6), Soleil, 13,95 €

vendredi 28 mars 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - Comme NKM, allez voter, mais avec classe !


Acte essentiel de la démocratie, le vote peut devenir glamour. Carrément orgasmique pour certains. Dans le dernier VSD, découvrez Nathalie Kosciusko-Morizet dans un de ces "moments de grâce" dont elle a le secret. La main suspendue au-dessus de l'isoloir, l'enveloppe encore au bout de ses doigts fins, elle rejette la tête en arrière, yeux fermés, cheveux en plein mouvement, telle une star hollywoodienne.



Je ne sais si elle ferait une bonne maire de Paris, mais dans le cas où elle échouerait dans sa conquête de l'Hôtel de ville, sa reconversion en mannequin est assurée. Même quand elle fume une clope en compagnie de SDF elle est lumineuse. A moins que tout cela ne soit qu'une mise en scène savamment orchestrée. Dans le secret de l'isoloir, elle fait la gueule comme tout le monde, craignant la défaite. Voire déchire rageusement le bulletin de son adversaire...
Un secret bien gardé car NKM n'a pas posté sa "selfisoloir", phénomène récurrent et distrayant de la longue journée de vote du premier tour des municipales. De petits malins ont eu la drôle idée de se photographier en cachette, bulletin de vote apparent, une fois le rideau tiré. Et de publier le cliché sur Twitter, Instagram et autre réseau social. L'exercice manque de variété mais présente l'avantage de favoriser la participation. Je suis sûr que certains se déplaceront dimanche uniquement pour exhiber leur bobine sur internet dans l'isoloir. Histoire de montrer aux amis qu'on est à la pointe de la tendance...
Mais positivons, cette nouvelle mode (éphémère par définition) est quand même beaucoup moins débile qu'un Harlem Shake.

Chronique "De choses et d'autres" parue ce vendredi en dernière page de l'Indépendant.

jeudi 27 mars 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - Chroniques mort-nées

Trouver une idée, une réflexion, un sourire ; bref un sujet pour cette chronique quotidienne s'apparente parfois à un véritable chemin de croix. Quand le vide résonne dans mon crâne tel l'écho dans le gouffre de Padirac, je n'ai plus que deux solutions : jeter l'éponge (j'ai déjà grillé trois jokers depuis le début de l'année) ou me lancer dans une recherche tous azimuts espérant en ressortir quelque chose d'exploitable.
Hier donc, à moins de 60 minutes de l'heure limite, j'ai phosphoré sur quelques thèmes. Les triangulaires aux municipales ? J'ai plein d'idées. Mais le propos est trop sérieux (risqué plus exactement) pour en rire.
Sur Twitter je découvre la dernière nouveauté commercialisée par la société Dorcel : un vibromasseur avec caméra intégrée. Là c'est le côté scabreux qui m'arrête rapidement.
Pourquoi ne pas me lancer dans une descente en flèche de Johnny Hallyday, acteur dans le dernier Lelouch ? Problème, j'ai vu le film en avant-première et à mon grand étonnement, j'ai trouvé le rocker vieillissant touchant dans son rôle de père délaissé.

Se moquer des chanteurs qui rêvent de faire carrière au cinéma, représente un filon pour certains (dont moi, j'avoue). Réalité de plus en plus infondée. Patrick Bruel, par exemple, se montre excellent dans l'adaptation des "Yeux jaunes du crocodile", roman de Katherine Pancol.
Reste la téléréalité. Trop convenu.
Sur le point d'abandonner, je m'aperçois que je suis trop long. Une fois de plus...

Chronique "De choses et d'autres" parue ce jeudi en dernière page de l'Indépendant

Cinéma - George, marionnettiste en sursis dans "Aimer, boire et chanter", dernier film d'Alain Resnais

Trois couples et un malade. Avec cette configuration inhabituelle, Alain Resnais imagine nombre de combinaisons dans Aimer, boire et chanter, son dernier film.


George ! George ! George ! Elles sont trois, trois femmes mariées (Caroline Silhol, Sandrine Kiberlain et Sabine Azéma), toutes les trois de plus en plus obnubilées par ce fameux George, véritable vedette du dernier film d’Alain Resnais, « Aimer, boire et chanter ». Mais qu’a-t-il de si exceptionnel ce George dont tout le monde parle mais que l’on ne voit jamais ? Il est charmeur, vif, séduisant, plein d’allant... et condamné. Un cancer qui ne lui laisse que six mois à vivre.

Adaptée d’une pièce de théâtre anglaise, cette comédie met en scène trois couples. Colin (Hippolyte Girardot) est le médecin traitant de George. C’est lui qui vend la mèche à sa femme Kathryn qui s’empresse de le répéter à Jack (Michel Vuillermoz), meilleur ami du malade. Par ricochet, Tamara, femme de Jack l’apprend et l’annonce à Monica, l’ancienne compagne de George, aujourd’hui en ménage avec Simeon (André Dussollier), fermier. Des Britanniques aisés et cultivés, qui s’adonnent au théâtre en amateurs. Ils auront l’idée de proposer un rôle à George, histoire de lui changer les idées.
Quatre saisons
Alain Resnais a découpé son film au fil des saisons. L’annonce de la maladie se fait au printemps, les répétitions en été, les représentations en automne. L’hiver...
Rapidement, le rapprochement de George avec Tamara et Kathryn (actrices dans la pièce) va bouleverser leur quotidien. Elles vont tout faire pour l’aider et rapidement tomber sous le charme. Tamara, trompée par son mari, va se sentir désirée. Kathryn, qui s’ennuie mortellement, va redécouvrir la joie des imprévus. Quant à Monica, elle doute de plus en plus de son amour pour le paysan bougon et se met à regretter la vie avec George. Ce dernier, tel un marionnettiste se tenant hors cadre, manipule tout ce beau monde. Le paroxysme sera son idée de passer quinze jours de vacances à Ténérife. Il propose aux trois femmes du film de l’accompagner, séparément. Quand elles l’apprennent, elles sont sur le point de s’écharper. Les maris, trompés par anticipation, ils tombent dans les 36e dessous.
Comédiens impeccables, situations cocasses, rebondissement de dernière minute : “Aimer, boire et chanter” se laisse déguster comme un bon vin gouleyant, frais et plein de saveurs.
Alain Resnais s’est peut-être un peu reconnu dans cet homme de l’ombre, excellent directeur d’acteurs, obtenant ce qu’il veut d’hommes et de femmes fascinés par sa dextérité et son talent.

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Resnais ne nous fera plus rêver...

Film posthume, « Aimer, boire et chanter » sera donc l’ultime chapitre de longue et riche filmographie d’Alain Resnais. Décédé le 1er mars, il n’aura pas vu la sortie de son film. Mais savait qu’il était déjà apprécié puisqu’il a été récompensé au Festival de Berlin par le prix du “film ouvrant de nouvelles perspectives”. Une reconnaissance de modernité pour un cinéaste qui n’a jamais cessé d’innover. Malade, il n’était pas à Berlin. Il s’en désintéressait même. Son producteur a confié que Resnais pensait déjà au scénario de son prochain long-métrage.
A l’écoute des nouvelles tendances, Alain Resnais aimait la bande dessinée. Il a collaboré avec Bilal et pour cette comédie anglaise, il a fait appel à Blutch, dessinateur de Fluide Glacial. Les scènes se déroulent dans quatre maisons différentes. Après les images réelles, la liaison avec les décors de théâtre se fait par l’entremise de grandes illustrations de Blutch. C’est lui aussi qui signe l’affiche avec un George toujours aussi énigmatique, planant au-dessus des trois couples, la tête invisible, dans les étoiles.

mercredi 26 mars 2014

BD - Le flic et le vampire dans l'adaptation des "Vestiges de l'aube"


Énorme succès de librairie, le roman « Les vestiges de l'aube » de David S. Khara (Michel Lafon) bénéficie d'une jolie adaptation en BD. Côté textes, c'est Serge Le Tendre qui s'est frotté à cette histoire de flic américain et de vampire. Pour les dessins, Frédéric Peynet et son réalisme à toute épreuve dessine un New York noir à souhait. Barry Donovan est policier. Un bon. Fiable et efficace. Enfin, c'était vrai avant le 11 septembre. Dans l'attentat, il a perdu sa femme et sa petite fille. 

Depuis il erre de dépression en dépression, hanté par les images du bonheur passé. Quand il se retrouve sur une affaire de tueur en série, il ne se doute pas qu'un certain Werner Von Lowinsky l'observe. Il ne connait cet homme que par internet. Ils échangent sur des forums. Werner revit depuis la découverte du web. Il n'osait plus trop sortir de sa tanière, voir les humains s'agiter lui redonne un peu goût à la vie. Werner va donc aider Barry dans son enquête. Avec ses moyens. Werner est un vampire. 
Un mélange des genres qui passe parfaitement, entre romantisme et traque policière.

« Les vestiges de l'aube » (tome 1), Dargaud, 13,99 €


mardi 25 mars 2014

BD - Lady Elza enquête


Elle a du chien cette Lady Elza. Elle a aussi un chien, mais cela na rien à voir. Cette brune piquante, Anglaise jusqu'au bout des bottes de cuir, est née de l'imagination de Jean Dufaux. Pour lui donner un corps, Philippe Wurm a trempé sa plume dans une encre érotico-sensuelle. Une héroïne du style de celles que les fans de BD adorent tomber amoureux dans leurs rêves les plus fous. Au début de l'histoire, la belle cherche un appartement dans Londres suffisamment vaste pour accueillir ses 400 paires de chaussures. 
Elle pense avoir trouvé la perle rare. Problème, son ancien locataire a été assassiné et toutes les personnes intéressées par ce vaste duplex avec vue sur la Tamise n'ont pu signer le bail pour cause d'accident fortuit, au mieux invalidant, au pire mortel. En fait ce bien immobilier servirait de cachette à des photos compromettantes pour la famille royale. Lady Elza va foncer tête baissée dans le piège, mais sa ruse et son cynisme lui permettront de tirer les marrons du feu. C'est délicieusement british, subtil et alambiqué, du genre Blake et Mortimer en bas résille...

« Lady Elza » (tome 2), Glénat, 13,90 €

lundi 24 mars 2014

BD - Zita, joyeuse malade malgré sa Boule à zéro


Si pour certains enfants, le langage médical équivaut à de l'hébreu, ce n'est pas le cas pour la petite Zita, surnommée Boule à zéro, héroïne touchante et attachante de la série Boule à zéro écrite par Zidrou et dessinée par Ernst. Zita a 13 ans, en paraît à peine 8 et vit dans cet hôpital depuis 9 ans. Elle souffre d'une sorte de leucémie et a tout subi, des ponctions lombaires, aux bombardements de protons en passant par les chimio. 

Le sujet est grave, les enfants malades, mais son traitement est particulièrement délicat. Juste ce qu'il faut d'émotion, quelques espiègleries (une spécialité de Zita quand sa maladie la laisse un peu en paix) et des personnages vrais, malades, docteurs, infirmières, visiteurs... Dans ce troisième volume de la série, Zita se fait une nouvelle amie. Evelyne, une gentille blonde. Plus pour longtemps. 
Son traitement lui fait perdre les cheveux par poignée. Il n'y a que Boule à zéro pour trouver cela marrant. Il est vrai que cheveux et poils ont déserté son anatomie depuis longtemps. Sa copine a une tumeur dans le cerveau. Pour la détruire, le combat va être épique. Avec Zita à ses côtés (elles sont dans la même chambre), ce sera compliqué et douloureux, mais amusant aussi.

« Boule à zéro » (tome 3), Bamboo, 10,90 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - OK ou KO ?

Au lendemain d'un premier tour d'élection, certains candidats sont OK, d'autres KO. Deux expressions anglaises entrées dans le langage courant mondial.

OK fête ses 175 ans. Un chercheur affirme que les deux lettres sont apparues pour la première fois le 23 mars 1839 dans un journal de Boston. Le OK est définitivement devenu populaire aux USA l'année suivante quand le candidat démocrate, Martin Van Buren l'a régulièrement employé au cours de sa campagne. Président sortant, il est battu. Le symbole du OK se retrouve KO... L'origine de OK est source de débats depuis des décennies. La thèse principale prétend que la locution serait l'abréviation de "orl korrekt", déformation de "all correct" (tout est correct). Preuve que les ravages des SMS écrits en parler phonétique ne datent pas d'hier.
Formule la plus souvent prononcée ou écrite sur toute la planète (devant maman), OK représente le symbole de cette Amérique triomphante, positive et prometteuse de réponses. Une popularité que l'on retrouve dans le cinéma, du mythique "Règlement à OK Corral" à l'inénarrable "C'est okay !" de Jacouille dans les Visiteurs.

Les Américains tentent même de mettre en place une journée mondiale du OK. Je suis pour, si on a l'obligation de répondre OK à toutes les demandes. "Patron, pour mon augmentation ?" "OK", "Chéri, tu me prêtes ta voiture ? "OK", "Maman, je peux sortir ce soir ?" "OK"... Quelle belle journée en perspective. Mais gare au KO le lendemain.

dimanche 23 mars 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - Trinquons à la mort, mais avec discrétion et pas n'importe où...

A l'article de la mort, il est de coutume de préciser à ses proches ses dernières volontés. Certains, pour détendre l'atmosphère et dédramatiser l'échéance, expriment des exigences ludiques (tel Brel en son temps le chantait « A mon dernier repas je veux qu'on fasse ripaille »). Jean-Luc Couston, un Gardois de 61 ans, a demandé à son épouse de simplement boire un verre sur sa tombe le jour de son anniversaire. Transformer un moment triste en petite fête conviviale était la philosophie de vie de ce kiné très apprécié de ses patients.

Le 17 juillet dernier, comme promis, Josiane se rend sur la tombe de son mari défunt et boit un verre de champagne avec des amis. Une petite commémoration rapidement interrompue par trois policiers municipaux. Trouble à la quiétude des lieux et violation d'une interdiction édictée par décret. En l'occurrence, il est défendu de boire de l'alcool dans un cimetière. Josiane est condamnée à payer une amende de 38 euros. Jean-Luc, le responsable de tout ce pataquès doit regretter ses dernières volontés qui compliquent la vie de Josiane. Bien que cette dernière, arguant de sa bonne foi, refuse de payer la contravention dans l'attente d'une décision du tribunal de police d'Uzès.

Dans notre société pleine de préjugés et formatée à l'excès, il est compliqué de sortir du troupeau. Pourtant, Josiane a cru bien faire, en écoutant son cœur. Et si certains demandent que l'on laisse les morts en paix, qui nous prouve que ces derniers, dans leur immobilité et leur solitude éternelles, n'apprécieraient pas un peu de distraction ? (Illustration tirée de la série BD Pierre Tombal de Hardy et Cauvin chez Dupuis)

DE CHOSES ET D'AUTRES - Mickey vote Stromae

Plus rien n'arrête Stromae. Le chanteur belge, après avoir trusté les Victoires de la Musique et les ventes de disques, fait une entrée remarquée dans le classement annuel des personnalités préférées des 7 n 14 ans publié dans le Journal de Mickey. Loin d'être anecdotique, cette liste est toujours très attendue car elle préfigure la réussite des stars des prochaines décennies.

En accédant d'entrée à la première place avec une notoriété de 92 % et une note de 8,5 sur 10, Stromae semble bien parti pour une longue carrière. Un résultat quand même étonnant dans la mesure où les textes de ses chansons n'ont rien à voir avec les poèmes à deux balles de celles des autres chanteurs classés dans le "top 10 Mickey" comme Maître Gims, Tal ou M Pokora. Que peut comprendre un petit garçon de 8 ans au "jusqu'aux prochaines règles" du refrain de "Tous les mêmes" ?


Stromae, sous ses airs de chanteur à la mode, est un touche-à-tout de génie. Dernière trouvaille, une mise au placard (hélas) de sa tentative d'imposer l'un de ses morceaux comme hymne officiel à l'équipe de Belgique, les Diables rouges, qualifiés pour le prochain Mondial au Brésil. Dans la leçon n° 28, série de courts-métrages dans lesquels il explique son processus de création, il essaie de convaincre les joueurs de participer à un clip officiel. L'un doit interpréter... le ballon, l'autre la "mère" en train de passer la serpillière, le tout dans un gigantesque labyrinthe. Tourner une vidéo surréaliste avec du football, seul un grand artiste en est capable.
En France, on doit se contenter de Francis Lalanne...

samedi 22 mars 2014

Cinéma - Coup de foudre numérique dans "Her" de Spike Jonze

Dans un avenir proche miné par la solitude des grandes villes, un homme a le coup de foudre pour une intelligence artificielle. Her, de Spike Jonze explore les limites de l'amour.


Un film de science-fiction sans le moindre effet spécial, ni vaisseau inter-galactique et encore moins d'aliens. Le futur imaginé par Spike Jonze dans « Her » est purement intellectuel, cérébral. Dans le Los Angeles projeté, les gens se déplacent à pied, s'habillent comme dans les années 30 et portent en permanence une oreillette connectée qui leur débite les dernières informations ou le contenu de leurs emails. Ce monde ressemble beaucoup au nôtre. La grosse différence tient à la généralisation de la commande vocale. La voix prend donc une importance primordiale dans ce film centré autour de la personnalité de Theodore Twombly interprété par Joaquin Phoenix. Theodore exerce un de ces métiers qui n'existe pas encore de nos jours. Il est chargé d'écrire des lettres très personnelles pour des particuliers. Le petit-fils à sa grand-mère, le mari à sa femme... Il se fond dans le monde des clients et dicte de poétiques missives, imprimées en écriture cursive par la société portant le joli nom de « Belles lettres manuscrites ».


Si Theodore ressent autant d'empathie pour les autres, c'est peut-être parce qu'il ne s'est toujours pas remis d'une séparation douloureuse. Solitaire, limite dépressif, il tente bien les rencontres sur internet ou les rendez-vous arrangés par ses amis compatissants. Sans succès.

Samantha, la voix
Son quotidien bascule le jour où il achète un nouveau système d'exploitation pour son ordinateur. Avant de l'installer, une voix synthétique lui pose quelques questions personnelles destinées à l'adapter au mieux à ses attentes. Theodore choisit une voix féminine et l'incroyable histoire d'amour imaginée par Spike Jonze peut débuter. L'intelligence artificielle se choisit un prénom. Samantha (voix de Scarlett Johansson) devient dès lors la confidente et meilleure amie de Theodore. Toujours disponible, pleine d'humour et de compassion, se perfectionnant sans cesse, Samantha va rapidement mieux connaître son utilisateur que lui-même.
Au début, Theodore éprouve quelques réticences à se confier à cette voix immatérielle mais aux tonalités incroyablement humaines. Quand il ose le dire à Samantha, elle lui répond, pleine de bon sens : « Un être non-artificiel a forcément des difficultés à comprendre ». Au fil des jours, la complicité entre ces deux solitudes prend de plus en plus d'ampleur. Jusqu'à cette incroyable scène où Theodore avoue à Samantha : il est amoureux d'elle. Sentiment réciproque. Aussi étonnant que cela puisse paraître, cet amour virtuel nous paraît très plausible. Joaquin Phoenix est convaincant dans ses hésitations de petit garçon, Scarlett Johansson craquante avec sa voix grave et ses petits rires de gorge.
Mais ne vous attendez pas à une simple romance sentimentale sur l'amour virtuel, une bluette futuriste où l'amoureux promène sa petite amie (sous forme d'un téléphone portable) sur une plage bondée au soleil. Spike Jonze, comme dans son film « Dans la peau de John Malkovitch », va compliquer l'affaire. Si Theodore se contente pleinement de cette relation binaire, Samantha, intelligence artificielle en pleine expansion, veut aller plus loin. Beaucoup plus loin... Le final est digne des meilleurs romans de science-fiction et place la barre très haut, justifiant parfaitement l'Oscar 2014 du meilleur scénario original.

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Joaquin Phoenix, seul face à la caméra



« Her » repose sur les épaules de Joaquin Phoenix et la voix de Scarlett Johansson. Le premier est omniprésent à l'image. Pas un plan sans lui, au bureau, dans les rues aseptisées de Los Angeles, au restaurant, dans son appartement déshumanisé de célibataire dépressif. La seconde se contente de parler. Des réponses au début, beaucoup d'interrogations par la suite. La performance des deux acteurs est à placer au même niveau. Avec une nuance : Joaquin Phoenix doit jouer l'évolution de son état d'esprit durant les deux heures du film. Mélancolique, triste et dépressif, quasiment au ralenti dans la première partie, il retrouve goût à la vie après sa rencontre avec Samantha. Il court dans le métro, saute tel un cabri, fait des farces, profite à nouveau de ce corps qui semblait l'encombrer quelques jours plus tôt. Il doit en fait vivre pour deux, tenter de faire passer ces sensations très matérielles à son amie virtuelle. Une communion qui va jusqu'à la nuit d'amour, comme un couple ordinaire.

On se demande quand même comment Theodore résiste aux charmes des femmes (en chair et en os) qu'il croise. Toutes plus belles les unes que les autres : son amie d'enfance (Rooney Mara) qu'il aime toujours un peu, sa voisine aussi triste que lui (Amy Adams), la célibataire d'un rendez-vous raté (Olivia Wilde) ou la doublure humaine d'un soir de Samantha (Portia Doubleday). Il fallait tout le charme de la voix de Scarlett Johansson pour rendre crédible cette histoire d'amour hors normes. 

BD - Cobayes en prison dans "Asylum" de Lehman et Teague


La série concept « La grande évasion » permet à des duos inédits de signer des histoires complètes sur l'univers carcéral. Dylan Teague, dessinateur anglais déjà remarqué sur Judge Dreed et un des tomes du « Casse », est associé à une pointure de la SF française : Serge Lehman. La cité d'Asylum, dans les entrailles de la terre, n'est peuplée que de criminels en puissance. Ils sont regroupés par déviances, les psychotiques violents sont habillés de jaune et les politiques en bleu. 
Le tout est surveillé depuis quatre générations par des robots placés sous le commandement d'un certain Pastor. Anton-5 n'est ni bleu ni jaune. Il est vert, issu de l'union (contrenature selon Pastor) d'un bleu et d'une jaune. Perdu dans cette société en vase clos, il va trouver un indice prouvant l'existence d'un ailleurs et tout faire pour s'évader. 
Un scénario rempli de références psychologiques, un dessin réaliste efficace : cet album est à classer dans la catégorie des grandes réussites. Même la fin est heureuse. Mais depuis le film Brazil, il faut se méfier des illusions finales.

« La grande évasion, Asylum », Delcourt, 14,95 €


vendredi 21 mars 2014

BD - Maggy la fouineuse


Débutées discrètement dans les pages de l'hebdo Spirou, les aventures de Maggy Garrisson s'imposent rapidement comme une de ces séries, à l'exemple de Soda ou Seuls, qui comptent dans une décennie. Pourtant, Lewis Trondheim, au scénario, s'attaque à un genre qu'il n'a que peu exploré : le polar urbain. 
Maggy, petite, célibataire, chômeuse et un peu ronde, a enfin dégoté un nouveau boulot dans cette Londres en pleine crise économique. Secrétaire d'un détective privé, elle résout une première énigme (un canari disparu) avec une facilité déconcertante. Il est vrai qu'elle n'a que peu de principes déontologiques quand il y a quelques dizaines de livres à gagner. Son patron, alcoolique et dépressif, cache bien des secrets. Quand il est agressé dans son bureau, Maggy reprend les affaires en main et va se lancer sur la piste de petits malfrats et d'un gros magot. Stéphane Oiry enlumine cette Angleterre humide et dépressogène. 
Heureusement l'héroïne et les pubs anglais ont de la ressource. Maggy, son scepticisme et son manque de morale, a tout pour devenir la nouvelle petite amie des amateurs de BD.

« Maggy Garrisson » (tome 1), Dupuis, 14,50 €

jeudi 20 mars 2014

BD - Hacker dans le temps


La curiosité d'Edgar Cadès, jeune génie de la physique quantique et hacker à ses heures perdues risque de le perdre. Alerté sur la recrudescence de micro séismes dans le secteur du bois de Vincennes, il se rend sur place en compagnie d'un ami, armé d'une caméra numérique, toujours à l'affût de phénomènes inexpliqués. Là, il découvre un bosquet gelé (alors que la température ambiante est largement supérieure à 20°) et un groupe d'hommes, nus et tatoués. Ces derniers, en le découvrant, l'attaquent immédiatement. Il ne doit son salut qu'à l'intervention des membres de la section infini. 
Le prologue de la série écrite par Laurent Queyssi et dessinée par Tocchini plonge rapidement le lecteur dans cette histoire de course dans le temps. Les hommes nus, des pirates, vont du futur au passé et luttent contre cette cellule secrète en action depuis un siècle et dont la direction est occupée par l'arrière petite-fille de la première victime des pirates. 
Outre son intrigue prenante, cette BD vaut par le dessin de Tocchini. Élégant, tout en mouvement et lignes de force, il fait parfois penser à Poïvet voire Gillon, autres experts en histoires de naufragés du temps.

« Section infini » (tome 1), Le Lombard, 13,99 €

mercredi 19 mars 2014

Livre - Graine de détective

Apprenti détective, Sigmundo Salvatrio va devoir résoudre une énigme se déroulant au cœur de jardins virtuels inspirés de l'Atlantide.

S'il est Argentin et que ses intrigues se déroulent à Buenos Aires, Pablo de Santis a tout du romancier français, tendance feuilletoniste de la fin du XIXe siècle. L'époque dans laquelle évolue son héros, apprenti détective. Sigmundo Salvatrio était le meilleur élève de l'agence Craig. Pour elle, il est même allé à Paris résoudre l'énigme du « Cercle des douze ». De retour en Amérique du Sud, il se retrouve seul dans l'agence en compagnie de Mme Craig. Le mentor, le mari, vient de mourir. Alors qu'il pense se retrouver au chômage sous peu, on propose à Salvatrio de résoudre une nouvelle affaire, la première où il devra agir en solo sans les conseils judicieux de son regretté maître. 
Un antiquaire a disparu. Sa femme ne croit pas à la fuite amoureuse (malgré les certitudes des policiers). Un de ses amis, poète et journaliste, charge Salvatrio de retrouver sa trace. Enquêtant méticuleusement, il remarque quelques éraflures au bord d'un bassin d'eau d'un jardin d'intérieur, à l'arrière de la boutique. Bingo ! Affaire résolue. L'antiquaire est retrouvé. Mort, mais retrouvé. Alors que la police, toujours aussi peu performante, conclue à un accident, plusieurs amis de l'antiquaire suspectent un crime. Nouvel engagement pour Salvatrio qui doit cette fois découvrir le meurtrier.

Jardiner les mots
Pablo de Santis semble prendre un malin plaisir à compliquer les pistes à explorer. La graine de détective est en plein doute existentiel : il est attiré par la veuve Craig, aime toujours une certaine Greta, devenue assistante d'un autre détective, et déteste Troy, son rival dans la reprise des affaires de l'agence Craig. Malgré ces difficultés, il doit se plonger dans les vieilles histoires de ce cercle d'amis qui se réunissaient pour tenter d'élaborer le jardin parfait. Plusieurs théories s'opposent entre jardin à la française, strict et discipliné et celui, libre et désordonné prôné par les Anglais.
Mais c'est surtout la notion intellectuelle de jardin qui est débattue entre l'antiquaire (mort), un chasseur, un médecin, le journaliste et le riche entrepreneur. Ce dernier explique à Salvatrio qu'un « jardin doit être comme un livre : on ne commence jamais par le milieu ou par la fin. Tailler une plante ou arracher une fleur fanée, c'est comme corriger un poème, comme biffer les mots qui n'ont plus de vie ». De poésie il en sera aussi question dans les indices disséminés par le meurtrier.
Le jeune enquêteur, avant de démasquer le tueur et découvrir ses motivations, va devoir visiter nombre de jardins et subir les explications savantes de spécialistes. Ce qui lui provoque cette réflexion : « Pourquoi alourdir les arbres de paroles, alors que ce qu'il y a de merveilleux dans les plantes c'est qu'elles ne parlent pas, ne grognent pas, n'aboient pas ? » Ce polar botanique aux multiples rebondissements ancre Salvatrio dans le cercle fermé des détectives qui comptent, ceux qui ont toujours une longueur d'avance sur les assassins. Et les lecteurs.
Michel LITOUT

« Crimes et jardins », Pablo de Santis, Métailié, 20 €

mardi 18 mars 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - #OuiJeVote et je le dis !

La bataille de l'abstention aux élections municipales s'annonce rude. Face au désintérêt des Français pour la chose publique, il faut absolument trouver de nouveaux attraits à cette démocratie de moins en moins sollicitée.
Pour toucher les jeunes, principale réserve parmi les régiments d'abstentionnistes, une campagne sur les réseaux sociaux s'imposait. Facile et pas cher (sauf quand le boulot est confié à une agence "amie" qui surfacture allègrement), l'efficacité n'en est cependant pas garantie. Loin de là.
Donc sur Twitter, le mot-dièse pour inciter à la participation est #OuiJeVote. Une rapide recherche montre que l'utilisation massive concerne surtout les partisans de certains candidats, qui y accolent le nom de leur champion. Pour démontrer la simplicité du vote, la formule "Voter c'est tweeter en vrai" me semble un poil excessive. Chez beaucoup de jeunes, tweeter est devenu presque un toc. Aller expliquer à un jeune adulte qui "pond" plus de 100 messages chaque jour qu'il n'a droit qu'à un seul et unique vote. Et pour une seule liste de sa commune. Lui aimerait voter en rafale, pour tous ceux qui ont retweeté l'un de leur selfie...
Pareil sur Facebook : "Vous aimez liker ? Votez !" Sauf que l'on n'est pas limité en like. Et puis ce n'est pas parce que l'on aime un point du programme du candidat qu'on en approuve l'ensemble. Alors non, voter n'a rien à voir avec les pratiques en cours sur les réseaux sociaux. Une fois le bulletin glissé dans l'urne, aucun moyen de revenir en arrière, contrairement aux "like" qui se retirent aussi facilement qu'ils s'accordent.

Chronique "De choses et d'autres" parue ce mardi en dernière page de l'Indépendant. 

DE CHOSES ET D'AUTRES - Vrrraoooum...

La nouvelle saison de Formule 1 a débuté hier en Australie. Comme chaque année, la réglementation a énormément changé. En plus de l'adjonction de l'électrique, la puissance des moteurs à explosion est moindre. Une nouveauté qui fait jaser.
En leur imposant de passer de 8 à 6 cylindres, la Fédération internationale de l'automobile a chamboulé l'un des charmes de la F1 : le hurlement des moteurs. La mélodie précisent immédiatement les puristes. Tout au long de la course, les commentateurs ne cessent pas de regretter le vacarme du V8, trouvent des accents ridicules au V6. En fait, il produit deux fois moins de décibels. Si discret que l'on entend désormais les pneus crisser dans les virages, autre bruit qui fait se hérisser les poils des fondus de vitesse. Bizarre comme ces passionnés restent aussi les plus conservateurs.
Il est vrai qu'en matière de course automobile, le "plus gros, plus fort, plus vite" a longtemps été la seule ligne de conduite. Alors forcément, les nouvelles monoplaces avec leur murmure de tondeuses à gazon font un peu moins rêver les amateurs de "Vrrraoooum... », ces énormes onomatopées qui accompagnaient les images de la BD Michel Vaillant de Jean Graton. De toute manière, dans quelques années les moteurs seront tous électriques (comme c'est déjà le cas dans le dernier titre de la série reprise par Lapière et Bourgne).
Les amateurs de F1 devront se contenter des grincements de caoutchouc sur le bitume et d'un petit "BBzzzzzz" au niveau des roulements. Des grondements des V12 d'une époque révolue ne subsistent plus qu'un vague souvenir. Du temps où le pétrole dirigeait le sport automobile... et le monde.

Chronique "De choses et d'autres" parue ce lundi en dernière page de l'Indépendant. 

BD - Débrouille et embrouilles dans "Ordures" de Piatzszek et Cinna

Ils sont rares les scénaristes de BD qui ont tout bon. Un sans faute et même un certain crescendo dans les trouvailles, l'univers. Stéphane Piatzszek fait partie de cette infime minorité. Son Commandant Achab va compter dans les séries policières et sa nouvelle création, « Ordures », avec Olivier Cinna, est largement du niveau de leur première collaboration « Fête des morts ». Ces « Ordures » ce sont les matières premières du travail de Moudy, le Noir, et Alex, le Blanc. Ils sont employés dans un centre de tri de déchets en banlieue parisienne. Moudy, qui aime les garçons, ne supporte plus la promiscuité du foyer de travailleurs immigrés. 
Il décide de squatter une immense usine vouée à la démolition dans une semaine. Tel Di Caprio sur le Titanic, il se sent le roi du monde dans ce « loft » de 20 000 m2. Le duo va croiser la route de Samir, un petit Arabe qui survit en vendant des cigarettes de contrebande. 
Toute la misère sociale de la France des années 2000 est résumée dans ces 72 pages en noir et blanc. Sa violence aussi, entre réseau islamiste, bande de roms et répression policière. Une histoire âpre, au ton juste, même si la Justice en est totalement absente.

« Ordures » (tome 1), Futuropolis, 17 €

lundi 17 mars 2014

BD - Bataille de démons dans "Orféa" de Corteggiani et Barison

Quand le diable décide de revenir sur Terre pour accroître son pouvoir (pourtant déjà très important) les humains ont quelques inquiétudes à avoir. Heureusement il existe encore des gardiens des portes, aux épées redoutablement efficaces. « Orféa » écrit par Corteggiani et dessiné par Barison raconte une de ces batailles épiques. Orféa est une jeune femme ignorante de son destin. Quand son fiancé se suicide en prison, elle ne sait pas encore qu'un pont vient de se former entre elle et les ténèbres. 
Elle en prend conscience lors de l'enterrement. L'ectoplasme de son amour lui apparaît et la supplie de venir le chercher... Elle devient alors une cible pour le démon qui lâche ses chiens de l'enfer à ses trousses. Heureusement le Baron Samedi veille. Une histoire purement fantastique, mais ancrée dans le réel. 
Ce gros album de 150 pages est en fait le regroupement de trois titres classiques de 46 pages. Une BD qui semble avoir eu quelques difficultés à voir le jour, une des planches de la première histoire ayant été dessinée en 2006... Comme le souligne le scénariste sur son blog : « La patience est parait-il une vertu. »
« Orféa », Dargaud, 17,95 €


dimanche 16 mars 2014

BD - Auguste Blanqui entre les cases


Qui se souvient encore de Blanqui ? Il existe bien quelques rues Auguste Blanqui en France (dont une à Carcassonne, cité de Barbès, son meilleur ami devenu pire ennemi, ironie de l'histoire) mais son discours s'est effacé des mémoires. Pourtant il est l'inventeur de cette formule reprise comme titre de sa biographie dessinée : « Ni Dieu ni maître ». Maximilien Le Roy en a écrit le scénario illustré par Loïc Locatelli Kournwsky sur près de 200 pages. Une gageure car Blanqui, aussi surnommé « l'enfermé » a passé 33 ans en prison et plus de dix ans en exil ou en résidence surveillée. 
Fervent républicain, aussi intransigeant contre la noblesse que la bourgeoisie, Blanqui a clairement milité pour la révolte armée. Il a souvent été arrêté les armes à la main, devant des hommes et femmes en colère face aux injustices. Jamais il n'a baissé pavillon, refusant la moindre compromission. 
Dans cet album on revit ses grands combats, ses longues périodes d'enfermement et comment il a marqué toute une génération de républicains avant de devenir le maître à penser d'une partie de l'ultra-gauche. La BD lui rend hommage, pour qu'il reste plus que quelques rues pour porter le nom et le message politique du redoutable et inflexible Auguste Blanqui

« Ni Dieu ni maître », Casterman, 23 euros

samedi 15 mars 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - Ode politique à Balkany sur un air de Goldman

Jean-Jacques Goldman n'est pas du genre à se laisser récupérer politiquement. Engagé auprès des Restos du cœur depuis toujours, il a dû s'étouffer en entendant les membres du comité de soutien à Patrick Balkany, maire sortant de Levallois-Perret, candidat à sa réélection, entonner le refrain d'un clip à sa gloire. Lesquels ont légèrement modifié les paroles de la chanson « Tu es de ma famille ». Jean-Jacques Goldman a obtenu le retrait de la vidéo des plateformes de streaming. Une victoire salutaire, pas forcément sur le plan politique mais surtout acoustique. Les militants UMP chantent effectivement comme des casseroles. Ce qui ne détonne pas tellement dans le paysage de Levallois-Perret, connaissant la batterie de cuisine que le couple (Patrick et Isabelle) traîne derrière lui depuis 1995. A la base, ce clip était « une surprise » des militants pour les Balkany et seulement pour eux. C'était sans compter sur les fuites inévitables. Parmi les couplets, tous dignes d'une chanson de propagande pro gouvernementale en Corée du Nord, on relève ce passage : « Tu as l'âme d'un conquérant (…) On baissera jamais les bras et tu tomberas pas, parce qu'on a trop besoin de toi. »
Mettre la campagne en musique, mieux vaut le laisser aux professionnels. Les chansonniers par exemple, qui ont certainement en stock deux versions des « Petites femmes de Pigalle » de Serge Lama, l'une avec Hidalgo et l'autre avec NKM. Quant à Sarkozy, pas candidat (pas encore exactement...), il fera son retour sur la mélodie du « Téléphone pleure» de Claude François.

BD - Crisse imagine la jeunesse d'Atalante


Crisse, dessinateur et scénariste aux multiples casquette, a cependant un faible pour les héroïnes. Si Nahomi, sa première création, était une fillette japonaise, les suivantes étaient adultes et parfois bien en chair. Dans Atalante l'Odyssée, il propose l'enfance de son héroïne, amazone sensuelle et fougueuse. Il en a confié le dessin à Evana Kisa qui a coulé son trait rond dans celui de son maître. La grande astuce, c'est de faire intervenir également une autre héroïne de l'univers de Crisse : Ishanti, l'apprentie danseuse du temple d'Isis. Cette dernière, pour retrouver son chat Ramsès (Bonjour Alice...) passe par un tunnel et débouche dans la forêt du Pélion, chez Atalante
Les deux jeunes filles vont devoir s'unir pour récupérer le chaton et surtout empêcher Seth de lever une armée en vue de conquérir la terre. Une BD distrayante par excellence, même si les ficelles sont parfois un peu grosses.

« Atalante l'Odyssée » (tome 1), Soleil, 14,50 €

vendredi 14 mars 2014

BD - "Les souliers rouges" explore la Résistance en Bretagne


Gérard Cousseau, le scénariste des « Souliers rouges », BD historique de la collection Grand Angle, est plus connu dans le monde de la BD sous le pseudonyme de Gégé. Un Breton pure souche, dans la lignée de Fournier, qui a beaucoup œuvré dans la BD humoristique (Gontran et les autres, Les Ripoupons ou les Toubibs). Sous son véritable nom, il signe une œuvre forte en émotion, tirée des souvenirs de son grand-père. 
En Bretagne Centre, en ce printemps 1944, les rumeurs de débarquement se font de plus en plus pressantes. Jules, un jeune du coin, fait la connaissance de Georges, Russe blanc exilé dans la région pour se soigner. Ensemble ils courent la nature à braconner grives, merles et écureuils pour améliorer l'ordinaire. 
L'arrivée d'un contingent d'Allemands chargés d'éradiquer la Résistance avec l'aide de la Milice locale va bouleverser leur quotidien. Un album dessiné par Cuvillier, qui a délaissé l'encre de Chine pour les tons pastels de l'aquarelle. Des couleurs directes de toute beauté.

« Les souliers rouges » (tome 1), Bamboo, 13,90 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Lost, au-delà du réel

La disparition du Boeing 777 de la Malaysia Airlines a tout du feuilleton haletant. Et le grand amateur de séries télé que je suis n'a pu s'empêcher de penser, dès le premier jour, à une certaine similitude avec « Lost ». Tant que les autorités n'auront pas trouvé des débris de l'avion, l'espoir demeurera.

Plus les recherches sont vaines, plus j'imagine une partie des 239 passagers sur une île perdue en pleine mer de Chine tels des Robinson des temps modernes. Pour ceux qui auraient raté l'intrigue du phénomène télévisuel du début des années 2000, petit rappel des grandes lignes. Un avion, reliant l'Australie à la Californie, s'égare au-dessus du Pacifique. Il est pris dans un champ électro-magnétique et coupé en deux. Deux groupes de rescapés tentent de survivre sur une île occupée par les « Autres », peu hospitaliers.
Si dans la première saison l'avion se crashe, dans la sixième et ultime, un autre avion parvient à se poser sur l'île. Sans vous en dévoiler la véritable fin, il parvient même à redécoller pour rejoindre la civilisation. Qui sait, le vol MH370 peut réapparaître, comme par enchantement.
En attendant, toute une armada de navires et une escadrille d'avions ratissent la zone. Même les internautes sont sollicités. Ils peuvent scruter les images satellites récentes et signaler toute anomalie à la société Digital Globe. L'absence de résultat contribue à renforcer toutes les hypothèses farfelues et « complotistes ». Lost, d'histoire de science-fiction un peu tirée par les cheveux, en devient presque une œuvre prophétique un peu plus culte encore.

Chronique "De choses et d'autres" parue ce vendredi en dernière page de l'Indépendant. 

jeudi 13 mars 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - Les publicitaires rendent la bureautique sexy

Si la théorie du genre fait peur à certains, pas d'inquiétude à avoir chez les publicitaires et certains industriels. Pour eux, on trouve forcément des différences entre hommes et femmes. Et si par hasard elles n'existent pas, il suffit de les créer.

Mesdames, avez-vous conscience qu'en utilisant des surligneurs classiques, vous abandonnez une part essentielle de votre féminité ? Heureusement, la principale marque de cette fourniture de bureau remédie à cette faute de goût. Voici le surligneur "Néon" de chez Stabilo®, pensé pour les femmes. Toute une campagne de publicité se met en place pour valoriser "une nouveauté sexy, unique et différente. La conception du tube est frappante et attire l'attention, ce qui en fait le sujet de conversation de tous ceux souhaitant se démarquer en matière de style". 
Certaines, en découvrant l'argumentaire, pensent à une blague. D'autant que "même sur le point de vente, Néon reste féminin avec une présentation inattendue en filet résille". Et pourtant, cette publicité est bien réelle et validée par la société. Les photos montrent une main délicatement manucurée, la couleur de son surligneur assortie à celle de ses bracelets.
Disponible en quatre teintes, le bleu est volontairement absent, trop masculin certainement. Maintenant, gare aux accidents. Si les femmes sont aussi idiotes que le pensent ces publicitaires sexistes, elles risquent de se tartiner les lèvres ou les paupières au surligneur, à cause de la similitude du conditionnement avec un produit de beauté.

Chronique "De choses et d'autres" parue ce jeudi en dernière page de l'Indépendant.