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lundi 19 août 2024

Cinéma - “Almamula”, l’Argentine entre religion et croyance


Premier film de Juan Sebastian Torales, Almamula a des airs de conte fantastique. De tragédie aussi. Dans le nord de l’Argentine, Nino (Nicolás Díaz) est le souffre-douleur de ses camarades.

A 14 ans, il voit le monde différemment derrière ses lunettes. Son air efféminé, ses silences, loin des vociférations des petits mâles, le placent en dehors de la société machiste et très religieuse de cette province d’Amérique du Sud. Presque lynché, il est mis à l’abri par sa mère Natalia (Martina Grimaldi) à la campagne avec le reste de la famille. 

Un village perdu, juste à côté d’une immense forêt, le repaire de l’Almamula, une créature légendaire effrayante. Elle prendrait ceux qui commettent des péchés. Une croyance ancestrale, combattue par les curés et bigotes nombreuses dans la région, mais qui continue à faire peur à la jeunesse. Nino, face à son rejet d’une société dans laquelle il ne semble pas avoir sa place, fait tout pour que l’Almamula s’occupe de lui.

Ce film sur le désespoir d’un jeune homme différent et rejeté est paradoxalement d’une grande beauté. Juan Sebastian Torales, après quelques courts-métrages, signe une première réalisation ambitieuse rayonnante. Les scènes dans la forêt sont à couper le souffle. Par leur grandeur mais aussi leur côté angoissant.

Ce n’est certes pas du cinéma d’horreur classique, mais la peur est omniprésente. Un petit plus non négligeable dans un ensemble essentiellement porté parle le message de tolérance envers toutes les minorités. Ce n’est pas brillant en France, mais l’Argentine semble encore plus mal lotie.

 Film de Juan Sebastian Torales avec Nicolás Díaz, Martina Grimaldi, Maria Soldi.

samedi 15 janvier 2022

Roman - Pêche aux souvenirs dans « Ce n’est pas un fleuve » de Selva Almada


L’Argentine regorge de talents littéraires et de paysages uniques. Dans « Ce n’est pas un fleuve » de Selva Almada, l’action se déroule en grande partie sur une île posée au milieu de ce fleuve qui passe près de Santa Fe. Trois amis y campent pour le week-end. La journée ils pêchent la raie. Le soir ils grillent des saucisses et vont au bal. Une vie simple, routinière, mais qui va apporter son lot de surprise. 

Ils vont croiser des villageois aigris, des jeunes filles fantomatiques et toute sorte d’animaux : « Les sons changent en intensité à mesure qu’ils s’enfoncent dans la forêt. Des bestioles, des oiseaux peut-être, crient en même temps, à la fois effrayées et menaçantes. Des battements d’ailes, des herbes qui s’ouvrent au passage de quelque chose et se referment sur la créature qui vient de passer. » 

La peur est omniprésente. Peur de l’inconnu et surtout de la mort personnifiée par ce Noyé qui hante les pêcheurs. 

« Ce n’est pas un fleuve » de Selva Almada, Métailié, 16 €

mercredi 6 juin 2018

Cinéma : Cauchemars éveillés avec "No dormiras", thriller insomniaque

"Le sacrifice est propre à tous les grands artistes" explique le réalisateur de « No Dormiras », Gustavo Hernandez dans ses notes de production. Ce thriller, sur le monde artistique, explore les limites entre la création et la folie. La créatrice, c’est Alma (Belen Rueda), une dramaturge qui veut monter une pièce de théâtre dans un ancien asile psychiatrique à moitié en ruines.

Il s’agit de pousser les acteurs au bout de leurs limites en les privant de sommeil. Selon elle, au bout de 108 heures d’éveil en continu, la personne entre dans les « limbes » et est victime d’hallucinations. La pièce, tirée d’un véritable fait divers au cours duquel une femme a tué son mari puis son bébé, est intimement liée au lieu.


C’est dans cet asile que la femme a été internée jusqu’à sa mort. Pour l’interpréter, Alma doit trouver en urgence une actrice volontaire de tenter cette expérience de théâtre immersif. Deux amies, jeunes actrices prêtes à tout pour dé- crocher le rôle, Bianca (Eva de Dominici) et Cecilia (Natalia de Molina) sont mises en concurrence.

Elles tentent de s’intégrer à la petite troupe formée par un régisseur, une autre comédienne et le fils d’Alma. Tous se lancent dans ce marathon de l’insomnie. Très vite, Bianca a l’impression de voir des ombres fugitives dans le vieux bâtiment. Et plus le temps passe, plus ces visions sont fortes et terrifiantes.

Les limites de la création
Il est vrai que la folie, elle connaît : son père, paranoïaque, fait des séjours réguliers dans des cliniques psychiatriques. Elle-même a parfois des doutes sur son équilibre psychique. Sans surprise, c’est elle qui réagit le plus à la privation de sommeil.

Elle obtient le rôle, mais à quel prix ?

Sans effets sanguinolents, juste en instaurant une ambiance de doute et de peur, Gustavo Hernandez signe un film qui ne laisse pas indiffé- rent. On ne peut s’empêcher de penser que le cap des 108 heures est réellement un point de non-retour. Et loin de se contenter de cette intrigue, déjà glaçante d’effroi, le réalisateur y rajoute des coups de théâtre concernant les véritables personnalités de différents protagonistes et le but final de l’expérience menée par Alma.

« No Dormiras » fait peur, indéniablement. Mais il donne aussi à réfléchir sur les limites de l’art et de l’implication des créateurs. Presque une fable. Mais sous forme de cauchemar éveillé.

 ➤ « No Dormiras », thriller de Gustavo Hernandez (Argentine, 1 h 46) avec Eva de Dominici, Belén Rueda, Natalia de Molina

lundi 22 février 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : La tombe de la voiture

Pourquoi se simplifier la vie quand on peut la compliquer ? L'histoire de ce chauffard en Argentine pourrait être hilarante s'il n'y avait pas à la clé la mort de trois innocents. Dans cette bourgade du nord du pays, carnaval bat son plein. Au retour d'une fête, le conducteur d'une voiture fauche un groupe de six personnes. Trois meurent sur le coup.
Le chauffard, pris de panique, ne s'arrête pas et rentre chez lui. Conscient de la gravité de ses actes, au lieu de faire face, il décide de camoufler son crime. L'arme du crime exactement. Il décide donc d'enterrer sa voiture au fond du jardin. Comment lui est venue cette drôle d'idée ? Mystère... Peut-être dans un polar où le meurtrier, pour ne pas laisser de traces, enterre son pistolet ou son couteau. Ni vu, ni connu.
Les policiers, qui ont retrouvé sa trace grâce à des témoins, découvriront stupéfaits la carcasse de l'auto sous deux mètres de terre. Certes la panique est souvent mauvaise conseillère, mais creuser un trou de la dimension d'une piscine pour y faire disparaître sa voiture reste la solution la plus bizarre (et invraisemblable) qu'aurait imaginée un romancier.
Malgré tout le chauffard aurait pu faire plus compliqué. De la même manière que certains tueurs démembrent leur victime pour l'évacuer en petits morceaux dans les poubelles, il aurait pu démantibuler son auto, pièce par pièce. Et d'ailleurs, il a poussé le vice jusqu'au bout : dans un coin du garage, les policiers ont retrouvé le moteur, proprement démonté. Pour cet affreux, tuer trois personnes ne justifie visiblement pas la perte d'un bon moteur.

mercredi 19 mars 2014

Livre - Graine de détective

Apprenti détective, Sigmundo Salvatrio va devoir résoudre une énigme se déroulant au cœur de jardins virtuels inspirés de l'Atlantide.

S'il est Argentin et que ses intrigues se déroulent à Buenos Aires, Pablo de Santis a tout du romancier français, tendance feuilletoniste de la fin du XIXe siècle. L'époque dans laquelle évolue son héros, apprenti détective. Sigmundo Salvatrio était le meilleur élève de l'agence Craig. Pour elle, il est même allé à Paris résoudre l'énigme du « Cercle des douze ». De retour en Amérique du Sud, il se retrouve seul dans l'agence en compagnie de Mme Craig. Le mentor, le mari, vient de mourir. Alors qu'il pense se retrouver au chômage sous peu, on propose à Salvatrio de résoudre une nouvelle affaire, la première où il devra agir en solo sans les conseils judicieux de son regretté maître. 
Un antiquaire a disparu. Sa femme ne croit pas à la fuite amoureuse (malgré les certitudes des policiers). Un de ses amis, poète et journaliste, charge Salvatrio de retrouver sa trace. Enquêtant méticuleusement, il remarque quelques éraflures au bord d'un bassin d'eau d'un jardin d'intérieur, à l'arrière de la boutique. Bingo ! Affaire résolue. L'antiquaire est retrouvé. Mort, mais retrouvé. Alors que la police, toujours aussi peu performante, conclue à un accident, plusieurs amis de l'antiquaire suspectent un crime. Nouvel engagement pour Salvatrio qui doit cette fois découvrir le meurtrier.

Jardiner les mots
Pablo de Santis semble prendre un malin plaisir à compliquer les pistes à explorer. La graine de détective est en plein doute existentiel : il est attiré par la veuve Craig, aime toujours une certaine Greta, devenue assistante d'un autre détective, et déteste Troy, son rival dans la reprise des affaires de l'agence Craig. Malgré ces difficultés, il doit se plonger dans les vieilles histoires de ce cercle d'amis qui se réunissaient pour tenter d'élaborer le jardin parfait. Plusieurs théories s'opposent entre jardin à la française, strict et discipliné et celui, libre et désordonné prôné par les Anglais.
Mais c'est surtout la notion intellectuelle de jardin qui est débattue entre l'antiquaire (mort), un chasseur, un médecin, le journaliste et le riche entrepreneur. Ce dernier explique à Salvatrio qu'un « jardin doit être comme un livre : on ne commence jamais par le milieu ou par la fin. Tailler une plante ou arracher une fleur fanée, c'est comme corriger un poème, comme biffer les mots qui n'ont plus de vie ». De poésie il en sera aussi question dans les indices disséminés par le meurtrier.
Le jeune enquêteur, avant de démasquer le tueur et découvrir ses motivations, va devoir visiter nombre de jardins et subir les explications savantes de spécialistes. Ce qui lui provoque cette réflexion : « Pourquoi alourdir les arbres de paroles, alors que ce qu'il y a de merveilleux dans les plantes c'est qu'elles ne parlent pas, ne grognent pas, n'aboient pas ? » Ce polar botanique aux multiples rebondissements ancre Salvatrio dans le cercle fermé des détectives qui comptent, ceux qui ont toujours une longueur d'avance sur les assassins. Et les lecteurs.
Michel LITOUT

« Crimes et jardins », Pablo de Santis, Métailié, 20 €

dimanche 31 mars 2013

BD - Entraide fasciste

La seconde guerre mondiale, en Europe, a coupé la France en deux. On oublie trop souvent que durant les années d'occupation, une importante partie de la population française, au lieu de choisir la Résistance, a été fidèle au gouvernement officiel, celui de Pétain. Un choix parfois motivé par la politique. Ainsi à l'époque, la peur du communisme a poussé de nombreux citoyens dans les bras de partis nationalistes. Et beaucoup ont même fait le forcing pour s'engager dans le combat pour prêter main forte aux nazis dans leur conquête de Moscou. Michel Dufranne ouvre ce dossier noir dans « Odessa », série complète en deux volumes.
Un résistant part à la recherche de son frère, supposé disparu sur le front de l'Est alors qu'il portait l'uniforme vert de gris. Il va plonger dans ces milieux fascistes, très efficaces quand il a fallu « exfiltrer » certaines têtes pensantes vers l'Amérique latine.
De Bruxelles aux plaines russes en passant par la pampa argentine, un périple peu glorieux illustré par Peka, dessinateur au trait très comparable à celui de Kas.
« Odessa » (tomes 1 et 2), Casterman, 12,95 € chaque volume



samedi 30 mars 2013

BD - L'abbé Shelton en mission en Argentine

Wayne Shelton, héros aventurier imaginé par Jean Van Hamme, a le profil rêvé pour être au centre d'histoires mouvementées et dépaysantes. Millionnaire, prêt à tout pour augmenter sa fortune, Wayne, malgré ses tempes blanches est encore très vert. Et cela ne date pas d'hier. 
Dans sa jeunesse, il a traversé l'Amérique latine en moto. Heureusement pour le lecteur il n'a pas finit comme le Che. Mais ce passé de liberté et d'insouciance lui revient en pleine figure quand il il est accusé par la police argentine d'avoir violé une jeune héritière. C'était il y a 30 ans, mais ce pays très catholique sait se souvenir quand il y a l'honneur d'une famille en jeu. Wayne est victime d'un complot. La belle qui a succombé à ses charmes a aujourd'hui besoin de notre héros pour récupérer le ticket gagnant à la loterie nationale. Pour assurer sa liberté, Wayne endosse l'habit de prêtre et va au fin fond des montagnes retrouver un curé peu scrupuleux. 
Dessinée par Denayer, toujours aussi efficace, cette aventure est légère, pleine d'humour et de bons sentiments. Rien de bien transcendant pour certains. En fait de la belle ouvrage, ce qui fait le succès de la BD depuis des décennies, devenu malheureusement trop rare de nos jours.
« Wayne Shelton » (tome 11), Dargaud, 11,99 €


dimanche 9 décembre 2012

BD - Le Che à l'Eden hôtel



L'engagement politique du Che débute en pleine seconde guerre mondiale. Le jeune Argentin fait partie, avec son père, de Action Argentina, une organisation dénonçant les agissements de l'Allemagne fasciste en Amérique du Sud. Sur cette base historique, Diego Agrimpau imagine une « folle rencontre » près des ruines de l'Eden Hôtel dans la province de Cordoba. Cet hôtel est la tête de proue de la communauté allemande de la région. Depuis les années 30, on y vénère le culte du Fuhrer. 
Le Che va infiltrer cette communauté pour le compte des Alliés. Il y nouera une brève histoire d'amour avec l'autre héroïne de l'histoire, Helena Werber, sublime jeune fille sous le pinceau de Gabriel Ippoliti, le dessinateur de cette brillante fiction historique.
« Eden Hôtel », Casterman, 13,50 €