jeudi 31 juillet 2014

DVD - Manu Payet se souvient de son amour de collège


Écrit, réalisé et interprété par Manu Payet, « Situation amoureuse, c'est compliqué » est un film parfois déroutant. On s'attend à une comédie désopilante dans la droite ligne des One man show de l'acteur d'origine réunionnaise, mais il a avant tout voulu mettre des sentiments dans cette romance entre passage à l'âge adulte et résurgence d'un amour de collège.

Ben est sur le point de se marier avec Juliette (Anaïs Demoustier) . Ils vivent ensemble depuis trois ans et ont décidé de franchir le pas. Mais à une semaine de la date fatidique, Vanessa (Emmanuelle Chriqui) revient à Paris
Cette Américaine, amour caché de Ben durant ses années collège, est devenue une bombe. Libre de surcroit. Ce ménage à trois va conduire Ben à la catastrophe. Un premier film parfois inégal, souvent trop invraisemblable, sauvé par des seconds rôles savoureux et eux, complètement déjantés, de l'ami d'enfance relou (Jean-François Cayrey) au futur beau-père (Philippe Duquesne) qui semble évadé d'un film de Mocky.
En bonus dans le DVD et le blu-ray, deux petites reportages sur le tournage et pas moins de 13 minutes de scènes coupées, dont un long mariage onirique qui en dit long sur la perturbation mentale de cet adulte encore gamin dans ses fantasmes.

Studiocanal, 14,99 €  





mercredi 30 juillet 2014

Livre - Les petits soldats du diable de Maxime Chattam

Maxime Chattam, dans « La patience du Diable » développe sa théorie de la violence latente, facile à réveiller à qui sait manipuler les esprits.

Maxime Chattam, comme Franck Thilliez, joue la carte des héros récurrents. Face au duo Sharko et Lucie de Thilliez, Ludivine se retrouve seule. Car Maxime Chattam n'est pas tendre avec ses personnages. Dans le précédent thriller « La conjuration primitive », Alexis le compagnon et collègue de la gendarme de la section de recherches est tombé au combat contre une ribambelle de serial killers. C'est donc seule, un peu dépressive et totalement obsédée par son travail que le lecteur retrouve Ludivine. Elle fait maintenant équipe avec Segnon, un géant Antillais, marié et père de deux enfants. Alexis est remplacé par Guilhem, une tête, plus porté sur les recherches en informatique que par le travail de terrain, au contact des tueurs et autres malades dangereux. Lui est sur le point de se marier. Des collègues normaux, comme pour canaliser une héroïne qui a tendance parfois à déraper.
Le mal, la violence, sont au centre de ce thriller aux accents très ésotériques. Tout débute par l'interception d'un go-fast sur l'autoroute du Nord. Opération mouvementée. Ludivine s'en tire bien, même si une nouvelle fois elle a pris beaucoup trop de risques. Tête de mule et tête brûlée vont souvent de pair... Par contre pas un gramme de drogue dans les bolides. Juste un sachet énigmatique qui se révèle être... de la peau humaine. Maxime Chattam franchit un cran dans l'horreur. Il lance ses personnages aux trousses d'un dépeceur qui aurait tout à fait eu sa place dans la série télé « True Detective », sauf que son antre n'est pas en Louisiane mais dans une vieille masure du Nord.

Ultraviolence
A côté de ces scènes de pure action, l'auteur développe sa théorie sur la violence innée des hommes dans la bouche de Ludivine : « L'homme est programmé pour la violence depuis qu'il est homme, pour survivre, c'est ce qui l'a hissé au sommet de la pyramide alimentaire. Mais les tueurs en série, eux, sont une sorte de quintessence de ça, de l'ultraviolence, de l'ultradomination. » Et puis en parallèle, les actes de violences gratuites se multiplient en France. Deux adolescents font un carnage dans un TGV, un homme abandonné par sa femme tue tous les clients d'un restaurant... Une ambiance malsaine, diabolique selon Ludivine qui se met à croire à l'intervention d'un monstre manipulateur.
Et l'amour dans tout cela ? Ne pourrait-il pas sauver la jeune femme ? C'est compliqué comme on le constate en lisant ces quelques lignes : « L'humanité avait longtemps cru aux vertus de l'alchimie en cherchant à transformer le plomb en or alors que l'unique alchimie de ce monde était plus cruelle. L'amour se transformait en une souffrance incommensurable sitôt que la mort le faisait passer dans son alambic sinistre. Le néant résiduel pour témoigner de la substance même de l'amour. » Vous voilà prévenu, avec Maxime Chattam, noir c'est noir. Passionnant aussi car c'est un grand conteur qui, comme ses héros, retombe toujours sur ses pieds d'indécrottable rationaliste.
« La patience du diable », Maxime Chattam, Albin Michel, 22,90 €

mardi 29 juillet 2014

BD - Couleurs sombres


Dessiner un roman graphique de près de 150 pages au Bic quatre couleurs, tel est le challenge relevé, avec brio, par Blaise Guignin. Une histoire d'étudiant, un peu glandeur, beaucoup séducteur. A chaque couleur, il associe une femme. Le bleu pour une mystérieuse brune que le héros, Grégoire, croise sans cesse. Vert pour sa prof d'histoire de l'art, pulpeuse et désirable. Rouge comme la chevelure de Mathilde, la petite amie de son meilleur copain. Enfin noir comme les habits de Chloé, l'ancienne petite amie de Grégoire, du temps du lycée. 
Il la retrouve à la faculté et elle semble bien décidé à prendre sa revanche (il l'a laissée tomber comme une vieille chaussette après avoir obtenu ce qu'il voulait, sa virginité). Or Grégoire, pour assurer son passage, a l'idée d'échanger son identité avec son meilleur pote. 
Histoire d'assurer à l'un et l'autre une bonne note dans leur matière de prédilection. Cela débute un peu comme « L'auberge espagnole », mais rapidement la noirceur des belligérants fait penser à un roman de Djian. Et c'est une belle réussite.

« Quatre couleurs », Vraoum!, 16 €


lundi 28 juillet 2014

BD - A fond les manettes


Pour le commun des mortels, le terme « Hayabusa » ne signifie pas grand chose. Par contre, tout motard qui se respecte a une admiration sans borne pour ce modèle de moto. Une Suzuki surpuissante, première moto commercialisée capable de dépasser le 300 km/h. Will, le héros de cette série écrite par Xavier Bétaucourt et dessinée par Laurent Astier, possède une Hayabusa. Une moto idéale pour aller vite et se faufiler en ville. Raison pour laquelle un gang de braqueurs de bijouteries l'utilise systématiquement. La dernière attaque tourne mal. Un autre motard tente de s'interposer. Les voyous l'abattent. 
Sa sœur, Emma, motarde elle aussi, croit retrouver le tueur quand elle croise la route de Will. Voilà comment ces deux, que tout oppose, vont finalement faire cause commune. Elle pour venger son frère, lui pour se disculper auprès des autorités. En 48 pages pleines de pétarades et de virages à la corde, les auteurs plantent un décor classique et moderne. Classique dans l'intrigue, moderne dans le matériel utilisé. De la bonne BD d'aventure, avec un dessin d'Astier ressemblant de plus en plus au trait de Jijé, période Valhardi.

« Angles morts » (tome 1), Paquet, 13,50 €

dimanche 27 juillet 2014

BD - Les rats nautiques de Ptiluc


Ptiluc, en plus de 30 ans de carrière, est devenu le dessinateur animalier le plus productif de la BD franco-belge. A la différence que ses rats n'ont rien à voir avec les gentilles souris et souriants mulots de Macherot. Dans « Pacush Blues » (13 volumes) il est question de dépression. Il a poursuivi dans le même style avec « Rat's », transposition de la lutte des classes dans un univers de rongeurs. « Pirat's » est la suite des aventures du peuple rat, en train de voguer sur l'océan infini, à la recherche d'un hypothétique monde meilleur. Les rats sont observés par les batraciens, le peuple crapo. Ils se battent, s'entretuent sans se douter que le véritable danger viendra du fond de la mer. 
Un monstre tentaculaire bien décidé à faire respecter « la bonne marche de la sérénité des profondeurs ». Parue sous forme de récits complets dans Fluide Glacial, ces métaphores animalières sont beaucoup plus intelligentes qu'il n'y paraît. De l'exercice solitaire du pouvoir à l'endoctrinement des masses en passant par la fameuse « l'union fait la force », les thèmes sont vastes et pertinents.

« Pirat's » (tome 2), Fluide Glacial, 10,80 €

samedi 26 juillet 2014

BD - Chemins d'espérance


Compostelle, terminus ! Quatrième et dernier tome de « Campus Stellae », la série historico-religieuse de Pierre-Roland Saint-Dizier (scénario) et Andrea Mutti (dessin). Quatre volumes, pour quatre chemins différents, sur les pèlerins de Compostelle. Après Conques, la Gironde et Le Languedoc, « La mort aux quatre visages » passe par Vézelay, Bourges et Crozant. En 1348, la peste fait des ravages dans le royaume de France. A tel point que le roi a signé une trêve avec les Anglais dans la terrible guerre de 100 ans
Grégoire, un mystérieux homme au passé obscur, découvre que son frère est atteint par la maladie. Il apprend qu'un moine aurait trouvé un remède. Grégoire prend son bâton de pèlerin et retrouve l'abbaye. Une fois le grimoire en sa possession, pour mettre toutes les chances de son côté, il décide de poursuivre son chemin vers Compostelle et le Cap Finisterre. Une belle histoire de rédemption, sans espoir mais symptomatique des croyances de l'époque. Bel ouvrage de Mutti, dessinateur italien talentueux et d'une rare efficacité : quatre albums en moins de deux ans...

« Campus Stellae » (tome 4), Glénat, 13,90 €


vendredi 25 juillet 2014

BD - Paloma, espionne italienne sexy et téméraire


Bellissima ! Paloma Crescendo est bellissima ! Imaginée par Ancestral Z et Mojo, l'espionne italienne doit beaucoup à Emma Peel, la bombe en bottes de cuir. Dessinée dans un style proche des dessins animés, cette BD se déroule durant les années 70. Paloma, au service de la Global Italian Service, est un agent secret d'élite. Fille de l'ancien directeur, elle continue à utiliser ses inventions pour mettre en déroute les « méchants ». Dans ce premier recueil de ses aventures, elle va de la Suisse à la Turquie en passant par le vignoble français. Elle est aux trousses d'un manuscrit détaillant une nouvelle forme d'énergie, économique et écologique. En plein choc pétrolier, il y a là de quoi devenir le maître du monde...
Les deux auteurs mènent un projet personnel en parallèle à leur occupation principale : fournir des pages et des pages du manga Dofus. Ancestral Z écrit le scénario et dessine les personnages, Mojo se charge des décors. L'ensemble est très cohérent tant les deux jeunes dessinateurs sont complices. Un hommage très distrayant, avec cependant une petite réserve : Paloma manque de scènes sexy pour faire plus vrai que vrai dans l'hommage.

« Paloma » (tome 1), Ankama, 11,90 €

jeudi 24 juillet 2014

BD - L'Atelier Mastodonte en vacances


Les auteurs de bande dessinée aiment se réunir en atelier pour rompre la solitude de leur activité. L'Atelier Mastodonte est la quintessence de toutes les structures existantes. Avec Lewis Trondheim en chef de bande, ils sont cinq ou six à créer leurs albums dans une ambiance de travail et de franche camaraderie. Enfin ça, c'est la théorie. Dans la réalité, chacun doit faire avec les défauts de l'autre. Cela donne des gags d'une demi-planche, dessinés à tour de rôle, distillés chaque semaine dans Spirou et repris en album dans ce second recueil à l'italienne avec une couverture signée... Peyo.
Trondheim, Feroumont, Yoann, Alfred, Bianco, Neel, Nob, Keramidas et Tebo s'amusent à s'égratigner les uns les autres. Le chef en prend plein les dents. Normal, il est obsédé par le travail, produit des dizaines de planches pendant que d'autres esquissent à peine une case. Aussi quand il propose de partir en vacances, ses collègues n'osent y croire. Et ils ont raison car pour Lewis le plan est simple, « On loue tous une maison au soleil... et on peut continuer à travailler sur place. » Une séquence vacances, dans un manoir hanté, particulièrement réussie. Mais il y également une dizaine de pages sur la disparition de Jean Giraud. Où comment des jeunes rendent hommage à un maître, avec une mention spéciale à l'histoire vraie de Trondheim et au dessin « à la façon de » de Julien Neel.
« L'atelier Mastodonte » (tome 2), Dupuis, 14,50 €

mercredi 23 juillet 2014

BD - Orphelins manipulés dans la "Hell School"


Une île au large en Méditerranée, une école de l'élite, des professeurs brillants, des élèves triés sur le volet. Mais que se passe-t-il exactement dans cette fabrique de l'élite ? Ers et Dugomier, dans leur série judicieusement intitulée « Hell School », ont planté le décor dans le premier tome. Ils ont développé l'intrigue dans le second et proposent une fin assez déconcertante dans cette troisième et dernière partie. Dans ce pensionnant, tout le monde a droit à plein d'égards. Sauf les « bâtards », les orphelins placés dans cette institution privée et très coûteuse, comme pour se donner bonne conscience. 
Pour Bastien, Hina et Boris, c'est véritablement l'enfer. Mais Bastien, le plus rebelle, parvient à se faire la belle. Il va tenter de découvrir ce qui se cache derrière cette éducation à la violence. Car sous couvert de bizutage, le chef de la confrérie d'étudiants (un peu à la mode américaine) a tué un élève. Un bâtard, évidemment... Hina et Boris mènent enquête dans les archives de l'école, Bastien se met à la recherche des familles d'accueil de tous les orphelins passés par l'école. Il va remonter jusqu'à un certain Mennert, richissime philanthrope aux méthodes trop belles pour être honnêtes.

« Hell School » (tome 3), Le Lombard, 10,60 €

mardi 22 juillet 2014

BD - Droit au but, le minot a grandi


Si la coupe du monde nous a fait vibrer, notamment les plus jeunes, c'est on ne peut plus normal. Avant de passer en équipe nationale, les joueurs se font une réputation et un palmarès en clubs. Prenez Valbuena par exemple. S'il n'avait pas brillé avec l'Olympique de Marseille, comment ce joueur « format poche » aurait-il pu accéder au plus haut niveau ? La série « OM droit au but ! » raconte en filigrane cette belle aventure. Nino est un minot de Marseille. Il se passionne pour les résultats de son équipe fétiche. Joue un peu, progresse et finalement intègre l'équipe des jeunes de l'OM. Son évolution est le fil rouge de la série dessinée par Garréra sur des scénarios d'Agnello et Davoine
Le 11e tome, « La victoire au bout des crampons » montre Nino devenu capitaine de l'équipe et pièce maîtresse pour aller au bout du rêve, la finale du tournoi Football Génération. Mais il risque de manquer les derniers matches car le coach des pros, José Anigo, l'a repéré et voudrait lui donner une chance au plus haut niveau. Et pas contre n'importe quel club : le Barça en personne. Nino va donc se frotter à Messi et Neymar, le temps d'un match d'anthologie.

« Droit au but » (tome 11), Hugo, 10,45 €

lundi 21 juillet 2014

Livre - Fuite désespérée dans "Monstres en cavale" de Cloé Mehdi au Masque

Damien, le personnage principal de ce roman de Cloé Mehdi, n'a que 13 ans quand il tue sauvagement son père et sa petite sœur. Six ans plus tard, il est en cavale.


Chaque année, les éditions du Masque, en association avec le festival de Beaune, publient un premier roman policier inédit. Véritable creuset de talent, ce prix permet à des auteurs en devenir de mettre le pied à l'étrier. Le cru 2014 est exemplaire de la démarche. « Monstres en cavale » est un gros bouquin de 600 pages, denses et bourrées d'invention. Pourtant son auteur, Cloé Mehdi, n'a que 22 ans. Elle a remporté quantité de concours de nouvelles avant de se lancer dans ce récit au long cours. Malgré son jeune âge, elle a quasiment 10 ans d'expérience... Et sans doute beaucoup plus d'années à occuper le devant de la scène littéraire noire. 
Sans être à proprement parler un polar, « Monstres en cavale » évolue dans un monde où les héros sont recherchés par la police alors que les forces de l'ordre et les autorités ont tout de salauds en puissance. Le personnage principal, Damien, est un jeune homme de 18 ans. A peine majeur mais déjà 6 années derrière les barreaux. Damien, à 13 ans, est devenu l'assassin le plus précoce de France. Un soir, quand sa mère rentre dans le petit pavillon de banlieue, elle découvre Damien sur le pas de la porte. Recouvert de sang il vient de tuer son père et sa petite sœur. Sous son bras, il a encore la tête de cette dernière qu'il a consciencieusement découpé. Après un procès retentissant, il est incarcéré en prison.

Pays de liberté
Le roman débute véritablement six ans plus tard. Il est sur le point d'être transféré. Terminé l'étroite cellule, place à une grande... cage. Dans ce futur fantasmé de Cloé Mehdi, la société française a un peu changé. Pour que les détenus ne soient plus à la charge de la société, des sociétés privées ont obtenu le droit de les exhiber comme de vulgaires animaux. « Le safari des monstres », en plein cœur de Paris, est un des plus célèbres. La patronne, Madame Rose, sélectionne avec rigueur ses pensionnaires. Damien est une recrue de choix, de quoi faire frissonner les familles voyeuses.
L'entame du roman, par son invention et son parti-pris de noirceur absolue, fait parfois penser à certains textes de Serge Brussolo, avant qu'il ne mette sa plume inventive au service de récits historiques aseptisés. On retrouve dans la description de ce Safari des monstres des outrances et une démesure qui manquent dans une production littéraire française devenue bien sage. Damien, dont on ne sait au début s'il est véritablement un monstre, un demeuré ou une victime, se laisse porter par les événements. Quand une fusillade éclate dans le zoo de la honte, il en profite pour se faire la belle, en compagnie d'une fillette qui elle aussi semble fuir la police. Cab, espiègle et intelligente, est la fille d'un célèbre couple de truands. Son père est mort dans un casse, sa mère a pris la fuite. Depuis elle est surveillée par la police. C'est un des hommes de la mère de Cab qui a déclenché la fusillade. Cab, son frère, Damien et le mercenaire se retrouvent et se lancent dans un road movie à travers l'Europe. Leur but : rejoindre le mythique « pays des neiges émeraude », un lieu où le monde souterrain vit au grand jour, loin de la justice et des policiers.
Lentement, avec une science consommée du coup de théâtre et des rapports humains, Cloé Mehdi nous fait découvrir les psychologies des personnages, Damien et Cab devenant les meilleurs amis du monde dans cette fuite désespérée.
« Monstres en cavale », Cloé Mehdi, Éditions du Masque, 7,90 €

dimanche 20 juillet 2014

BD - Wika, jolie petite fée


Attention, claque graphique assurée. Si la couverture déjà en jette un maximum, l'intérieur est sublime. Olivier Ledroit travaille sur ce projet depuis plus de deux ans mais cela valait la peine d'attendre. Il signe des planches en couleurs directes d'une incroyable richesse. Impossible de lire cet album en dix minutes. En fait, c'est le temps qu'il faudrait consacrer à chaque case pour en apprécier tous les détails. Alors si vous êtes du genre pressé, lisez ce tome 1 d'un coup, mais surtout reprenez-le après et savourez chaque composition. 
Dans cet univers d'heroic fantasy mâtiné de steampunk, le prince Obéron prend le pouvoir en tuant le duc Claymore Grimm et la duchesse Titania. Mais sa victoire n'est pas totale car leur petite fille, Wika, est sauvée. Pour passer inaperçue, son protecteur coupe les ailes de cette jeune fée. 13 années plus tard, Wika quitte la ferme où elle a été élevée et va à la grande ville, Avalon. Elle y rencontre un jeune voleur, Bran, et apprend l'art de dérober aux plus riches. Devenue adulte, Wika, en plus de l'amour, découvre ses pouvoirs magiques. Elle ne peut plus se cacher d'Obéron et ses sbires, ses sept enfants-loups et l'ogre Kabulguen. L'histoire, imaginée par Ledroit, est retravaillée par Thomas Day, écrivain de SF français régulièrement primé.

« Wika » (tome 1), Glénat, 14,95 €

samedi 19 juillet 2014

BD : Courts mais bons


Les revues de BD se font de plus en plus rares. Un modèle économique triomphant dans les années 80, complètement dépassé dans ce 21e siècle. Mais cela n'empêche pas certains auteurs de toujours rechercher les bienfaits de la prépublication. Lewis Trondheim, jamais en mal d'idées, a lancé « Papier », une revue trimestrielle, format manga, en noir et blanc, composé de récits de 5 à 30 pages. Les auteurs viennent de tous les horizons. 
Dans la troisième livraison, sur le thème de la magie, deux récits sortent du lot. Boulet revisite l'histoire du prince charmant, de la gentille princesse et du méchant sorcier. Du rêve à la réalité, le célèbre blogueur tord le cou à quelques clichés et propose une fin machiavélique. L'autre histoire à ne pas manquer est signée Trondheim en personne. Un dialogue surréaliste entre deux copains, l'un juge, l'autre s'énerve. Dessin minimaliste mais intelligence supérieure.

« Papier » (Numéro 3), Delcourt, 9,95 €

vendredi 18 juillet 2014

Cinéma - Faut-il courir voir le film "FastLife" de Thomas Ngijol ?

Thomas Ngijol réalise un film hybride sur l'air du temps.


Comédie ou réflexion philosophique ? Parodie ou premier degré ? Démarche sincère ou simple machine à fric ? En sortant de la projection de « FastLife », second film de Thomas Ngijol, on a l'esprit encombré d'une multitude de questions. Quel est le véritable message de ce film sur un sprinter français tombé dans l'oubli après une grande performance de classe internationale ? On balance entre le « Tous pourris » et « Il y a toujours un espoir de rédemption ». Cette indécision est-elle aussi voulue ? Nouvelle interrogation dont on n'a pas plus la réponse...
Comme nombre de petits Africains, Franklin Ebagé (Thomas Ngijol) est repéré par un agent français. Il rejoint la métropole et progresse rapidement dans sa discipline de prédilection : le sprint. Jusqu'à la consécration, une médaille d'argent aux Jeux Olympiques. C'est la belle vie. Un temps... Le film, après cette intro très paillettes, débute sept ans plus tard. Franklin n'est plus au top physiquement, mais dans sa tête il est toujours persuadé d'être le meilleur.

Il redescend sur terre quand son agent (Julien Boisselier) lui annonce que son image ne fait plus vendre. Il n'est plus sur la « liste » des équipementiers. Tout ce qu'il peut lui proposer c'est une campagne de promotion pour des... poulets fermiers. Grandeur et décadence ! Et pour couronner le tout, sa copine Pauline (Karole Rocher) lui annonce qu'elle est enceinte.

Olivier Marchal irrésistible
Entre grosse comédie et presque drame social, la frontière est étroite parfois. En montrant le chemin de croix de cet homme trop vite adulé par les foules, Thomas Ngijol frappe parfois juste. Mais la caricature semble toujours l'emporter. Saluons au passage la composition parfaite d'Olivier Marchal, en gros bonnet de la volaille estampillée « Made in France », ancien rebelle rock reconvertit au capitalisme cynique. Le flic aux rôles sombres et dépressifs donne de plus en plus à sa carrière un côté fun et rigolo.
Reste le retour au pays natal (Aimé Césaire est d'ailleurs cité) de Franklin. Dans ce Cameroun grouillant de vie et de jeunesse, non contaminée encore par les artifices de la vie moderne, le sprinter se ressource, retrouve ses racines et la volonté de vaincre. Les dernières scènes du film, tournées dans le Stade de France durant un authentique meeting d'athlétisme, est un tour de force étonnant, le comique parvenant à remporter un 100 mètres de légende face aux meilleurs spécialistes. Mais là aussi il faut nuancer le propos, Thomas Ngijol ne semble jamais se contenter d'une seule et unique fin.

jeudi 17 juillet 2014

BD - Manipulations à Rio dans le 3e tome de "Mermaid Project"


Dans un futur proche imaginé par Léo et Jamar, l'équilibre du monde a basculé. Les pays émergents ont pris le dessus sur les vieux empires. Ainsi les Européens sont devenus les parias de ce monde dominé par l'Asie, l'Amérique du Sud et l'Afrique. Romane Pennac, policière à Paris, a un gros handicap : elle est blanche. Blonde de surcroit. Elle doit donc être deux fois meilleure que ses collègues basanés pour être remarquée. Envoyée à New York pour enquêter sur un mystérieux cadavre, elle est recrutée par les services secrets pour tenter de démasquer les agissements d'une multinationale qui joue un peu à l'apprenti sorcier dans le domaine des manipulations génétiques
Dans ce troisième chapitre, elle est envoyée à Rio, pour prendre contact avec son frère, chercheur dans la fameuse multinationale. Dessinée par Fred Simon, cette série de science-fiction a pour elle d'être tout à fait réaliste. Les « horreurs génétiques » dénoncées dans la BD sont peut-être déjà en pleine expérimentation...

« Mermaid Project » (tome 3), Dargaud, 13,99 €

mercredi 16 juillet 2014

DVD - Petite Jungle vaguement effrayante


Depuis le projet Blair Witch, les films d'horreur à petit budget peuvent terroriser sans rien montrer. Il suffit que l'image soit sautillante, floue et fugitive pour que l'angoisse monte. Andrew Traucki, réalisateur australien spécialisé dans les grosse bêtes dentées (crocodiles et requins), s'essaye au genre avec « The Jungle ». Ce n'est pas toujours convaincant, mais suffisamment bien fichu pour filer les chocottes une petite heure. 
Un écologiste part en Indonésie filmer les dernières panthères de Sumatra. Avec son équipe de pisteurs locaux, il s'enfonce dans une jungle de plus en plus oppressante, isolée et dangereuse. Jusqu'à cette zone maudite où un démon sévit. Bien que le film soit court (1 h 20), il y a malgré tout de nombreuses longueurs. Notamment les interminables disputes entre l'Occidental et les locaux pour savoir s'il faut continuer ou rebrousser chemin. Bref, un petit film d'horreur réservé aux inconditionnels du genre.
« The Jungle », inédit au cinéma, sort en version DVD minimale avec un unique bonus : la bande annonce qui en montre autant que le long-métrage.

« The Jungle », Wild Side, 14,99 €

mardi 15 juillet 2014

BD - Natacha d'hier et d'aujourd'hui


Héroïne de BD la plus sexy depuis des décennies, Natacha n'a pas pris une ride. Sous le pinceau de Walthéry elle vit toujours des aventures mouvementées aux quatre coins de la planète. La belle hôtesse de l'air a une double actualité : un nouvel album, le 22e de la série, et une intégrale des aventures parues dans les années 90. 

« L'épervier bleu » est tiré d'un scénario de Sirius. Le créateur de Timour, avant de disparaître, a comme bien d'autres célébrités de la BD belge, écrit des scénarios pour un Walthéry toujours avide de nouveaux horizons. Natacha, bloquée un soir de Noël dans un hôtel pour cause de tempête de neige, raconte à Walter les aventures de sa grand-mère. A la fin des années 40, sur un voilier, elle parcourt les îles du Pacifique Sud et se lance sur les traces de voleurs de perles. Paysages paradisiaques pour un album hors du temps. 
C'est un peu aussi le cas des trois récits repris dans l'intégrale, sur des scénarios de Peyo, Tillieux et Mythic.

« Natacha » (tome 22), Dupuis, 10,60 €, Intégrale, 20,50 €

lundi 14 juillet 2014

Thriller : "Le sourire des pendus" édité au format poche au Livre de Poche


« W3 », la nouvelle série de Jérôme Camut et Nathalie Hug plonge les lecteurs dans un monde perverti. La mise en bouche de ce roman est percutante. En juillet 2002, des hommes cagoulés pénètrent dans une riche demeure. Ils tuent la femme et enlèvent les enfants avant de se charger du propriétaire des lieux, un célèbre avocat, Eric Moreau. Le tueur s'appelle Ilya Kalinine
Dix ans plus tard, Lara Mendès, jeune journaliste à la télévision, cherche par tous les moyens a découvrir le fin mot de ce meurtre sauvage. Parfaitement découpé, ce roman, déjà sombre dans ses premières pages, devient de plus en plus noir. 
Les auteurs, en observateurs attentifs des dérives de notre société, mettent en lumière les agissements de véritables monstres. (Le Livre de Poche, 8,90 €)

dimanche 13 juillet 2014

BD - Les sacrifices de Betty


Sympathique et très sexy personnage récurrent de la série XIII, Betty Barnowsky se retrouve sur le devant de la scène dans le 7e opus de XIII Mystery. Lancées en parallèle à la reprise de la saga d'espionnage imaginée par Vance et Van Hamme, ces histoires complètes se penchent sur les personnages secondaires, comme pour donner aux fans plus d'éléments pour mieux comprendre cet univers si riche en péripéties. Une simple opération marketing pour certains râleurs. Si le travail était bâclé, ce serait certainement vrai, mais chaque titre est d'une très grande qualité. 
Cette fois ce sont Callède et Vallée qui « récupèrent » Betty à la fin de l'album « Rouge Total ». La belle militaire, encore toute émotionnée de ses aventures au San Miguel en pleine rébellion des SPADS et de ses rencontres avec XIII et le Marquis de Préseau, vient d'être décorée par le président des USA en personne. Mais ce n'est pas encore l'heure du repos pour la bouillante rousse. Elle va rempiler pour finir le travail en compagnie du général Carrington. Une mission risquée qui va rapidement tourner à la débâcle. On en apprend un peu sur le passé de Betty, sa propension à craquer pour les beaux mecs et aussi comment elle a définitivement tourné la page avec le distingué Marquis. Sylvain Vallée, au dessin, excelle dans ce style réaliste parfaite symbiose entre les styles de Vance et Giraud.

« XIII Mystery » (tome 7), Dargaud, 11,99 €

samedi 12 juillet 2014

BD - Temps glacial pour Lancaster, nouveau héros de Bec et Dzialowski


Si Christophe Bec s'est imposé dans la BD en tant que dessinateur, il a rapidement débordé de projets. Incapable matériellement de dessiner toutes les histoires issues de son imaginaire fécond, il a distribué ses intrigues à plusieurs illustrateurs. Voilà comment le scénario de Lancaster est arrivé entre les mains de Dzialowski
Ce récit, hommage assumé aux grandes séries des années 50 et 60 comme Bob Morane ou Valhardi..., met en scène Jim Lancaster, lord anglais épaulé par un ami Français, Robert, amateur de jolies filles, de cognac et de bagarre. Ils ont été contactés par un savant pour aller explorer un mystérieux gouffre découvert en Antarctique. Le scénariste a mis un maximum de références dans ces 48 pages très denses : civilisation perdue, nazis revanchards, voyage dans le temps sans oublier une pin-up, la journaliste Audrey. Impossible de réaliser mieux dans le genre « faisons du neuf avec du vieux ».
« Lancaster » (tome 2), Glénat, 13,90 €

vendredi 11 juillet 2014

BD - Black-out mondial dans le passionnant "Prométhée" de Bec et Raffaele


Série la plus ambitieuse de Christophe Bec, « Prométhée » est en phase finale. La tension est à son comble, les rebondissements se multiplient, l'heure est grave. Dans ce 10e épisode (chaque album ressemble à un chapitre de roman fantastique), à 13 h 13, un jour avant la date fatidique, l'électricité disparaît de la surface du globe. 
Une partie de l'histoire montre comment la planète réagit à ce retour aux âges sombres. Transports stoppés, avions en perdition, centrales nucléaires en surchauffe, communications coupées... la civilisation risque de s'éteindre en quelques heures. Heureusement quelques vieilleries fonctionnent encore pour permettre aux personnages principaux de poursuivre leur course contre la montre. Arrivé à ce stade de l'histoire, impossible de prendre le récit en cours. Il faut absolument avoir lu les précédents épisodes pour saisir toutes les péripéties. Un véritable feuilleton, à rythme accéléré grâce à la virtuosité et la dextérité de Stefano Raffaele, le dessinateur.

« Prométhée » (tome 10), Soleil, 13,95 €

jeudi 10 juillet 2014

Cinéma : Les jolies vacances du Petit Nicolas


La nostalgie est omniprésente dans le second film inspiré du personnage de Goscinny et Sempé. « Les vacances du Petit Nicolas » ensoleilleront votre été.


Une douce nostalgie est distillée dans « Les vacances du Petit Nicolas », film de Laurent Tirard tiré des œuvres de Goscinny et Sempé. On peut, au gré des plans, savourer quelques clins d'œil aux cinéphiles ou simples amoureux de cette époque révolue des années 50/60. Un gamin, sur la plage, est plongé dans la lecture d'un Spirou, période demi-planche en couverture; un vacancier tente en vain de régler un transistor portatif, ancêtre des ipods de nos jours; si le père de Nicolas enfourche un vieux vélo, il semble intégrer un film de Jacques Tati, quand il dépasse sans se retourner de vigoureux sportifs.

Le film s'adresse essentiellement aux plus jeunes, mais ces mini-hommages rendent le long-métrage très agréable à toutes les générations. Le spectacle familial par excellence à ne pas manquer cet été. Quand il pleut (ou fait trop chaud) sur la plage.

Terrifiante Isabelle
Dernier jour d'école. Le Petit Nicolas (Mathéo Boisselier) est désespéré de quitter son amoureuse, Marie-Edwige, mais il doit d'abord assister à la traditionnelle dispute entre son père (Kad Mérad) et sa mère (Valérie Lemercier) sur leur destination de vacances. Et pour une fois, le papa a le dernier mot. Ce sera la mer. « Avec ma mère » précise immédiatement la perfide maman. Mémé (Dominique Lavanant) est la grande et belle nouveauté de ce second film. Une belle-mère caricaturale mais géniale. Son « Un bisou ! » reste longtemps dans les mémoires.
Une fois à l'hôtel Beau-rivage, la famille va passer ses journées à bronzer sur la plage (quand il ne pleut pas...), nager et déjeuner au restaurant de l'hôtel. Nicolas, tout en écrivant régulièrement à Marie-Edwige se fait de nouveaux copains. Des gamins aux caractères bien trempés, de celui qui veut toujours avoir raison à celui qui mange tout en n'importe quoi sans oublier le plus petit de la bande, toujours à la traîne, toujours en train de se plaindre et de pleurer. Le père de Nicolas, en retrouvant un ami d'enfance, Bernique (Bouli Lanners, toujours aussi irrésistible), impose aussi Isabelle, la fille de ce dernier, aux jeux de Nicolas. Les vacances se transforment en cauchemar tant la fillette semble terrifiante. Au passage, le réalisateur glisse de nouveaux hommages aux films d'horreur, Shining notamment.
Les vacances ne seront donc pas de tout repos pour les enfants. Les parents aussi auront leur lot de surprise. Si le père ne peut s'empêcher de remarquer quelques jolies filles sur la plage, la mère ne laisse pas les vacanciers mâles indifférents, notamment un producteur de cinéma. Au final le divertissement est plaisant et saura séduire les petits comme les grands.

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Une œuvre foisonnante

 Le Petit Nicolas, création de René Goscinny et Jean-Jacques Sempé, semble intemporel. Les relations de ce gamin avec ses parents, ses professeurs et surtout ses copains sont universelles. Écrites durant les années 60 par le créateur d'Astérix, ces nouvelles sont régulièrement rééditées. Depuis quelques années ce sont les éditions IMAV, notamment dirigées par la fille de Goscinny, la romancière Anne, qui proposent une valorisation de la série. L'intégrale est disponible en 14 volumes et les différents titres sont traduits en diverses langues (yiddish, arabe maghrébin, corse ou latin).
Le film qui sort ce mercredi est tiré en partie des 18 histoires contenues dans « Les vacances du Petit Nicolas ». Un recueil remis en vente avec un bonus, une histoire inédite. « La veillée d'adieu », écrite en 1961, n'a jamais été publiée. Le texte a été retrouvé dans les affaires de René Goscinny, sous la forme d'un tapuscrit. Sempé a repris ses pinceaux et s'est replongé avec délice dans l'univers si poétique du Petit Nicolas.
« Les vacances du Petit Nicolas », IMAV éditions, 180 pages, 10,90 euros.