Les Beka et Munuera continuent leur excellente collaboration avec cette nouvelle série de science-fiction pour adolescents. Ils ont imaginé un monde où les robots seraient devenus les esclaves des humains.
Pour comprendre les ressorts de cet univers, on découvre la relation fusionnelle entre jeune Iséa et sa nounou de fer, Debry. Cette dernière, très attentionnée, joue le rôle de maman.
La véritable génitrice d’Iséa, jalouse, décide de se débarrasser de Débry. Iséa va fuguer pour tenter de retrouver Debry qui aurait trouvé refuge dans une ville fantasmagorique où humains et robots vivent libres et égaux. Une très belle histoire d’amour et de sacrifice avec en fond la trame de Cyrano de Bergerac.
Au XIXe siècle, l’Inde, vaste sous-continent aux multiples divinités, est en train de tomber sous la coupe des colons anglais. Ces derniers, pour asseoir leur domination, interdisent de vénérer ces Dieux et Déesses ancestraux. Alors, la résistance s’organise, car c’est la survie du pays qui est en jeu.
Arjuna, jeune mercenaire locale, préfère aider l’occupant. Elle monnaye sa dextérité à l’épée pour tuer les dernières divinités indiennes comme Kali ou Hanuman, le Dieu-Singe. Au même moment, la fille du gouverneur, blonde délurée aimant se dévergonder dans les bas-fonds de Bombay, se retrouve enceinte. Elle porterait en elle la nouvelle forme humaine de Ravana, le dieu qui veut répandre la destruction sur terre. Résultat les autres dieux et les Anglais la pourchassent.
Elle a la chance d’être protégée par Arjuna (grassement payée par le père de la jeune femme) et un pirate sans foi ni loi.
Beaucoup d’aventures, de combats et de décors merveilleux, dans ce roman graphique grand format, écrit par Mathieu Mariolle, dessiné par Laurence Baldetti et mis en couleur par Nicolas Vial.
L’escale du Camion qui livre à Collioure est devenue un incontournable de l’été sur la côte Vermeille. L’opération du Livre de poche sera, une nouvelle fois, présente sur le port, les 2 et 3 août. Trois auteurs sont sur place pour rencontrer les lecteurs, habituels ou occasionnels.
Des séances de dédicaces qui devraient connaître un beau succès, car ce sont Bernard Werber (Les Fourmis ; dernière nouveauté en poche, La planète des chats), Charline Malaval (Le chant du perroquet chez Préludes, au Livre de Poche, le 7 septembre prochain) et Marie-Charlotte François, autrice de littérature adolescente,au Livre de Poche jeunesse.
C’est cette dernière, qui réside en Ariège, qui a la nouveauté la plus récente. Le second tome de sa romance More Than Friends est sorti le 6 juillet dernier. Les plus jeunes se passionneront pour les amours compliqués de Jade, la narratrice, avec Cameron, un mannequin.
Et avant l’arrivée du camion, le lundi 1er août, à 17 h 30 au cinéma Le Mondial, Bernard Werber donnera une conférence masterclass. Entrée gratuite mais il faut réserver sur eventbrite.fr !
Le camion qui livre à Collioure les 2 et 3 août, sur le port, dédicaces des auteurs de 15 h à 18 h.
Imaginé et écrit en pleine période du confinement, L’homme du Grand Hôtel de Valentin Musso est aussi angoissant que de se retrouver cloîtré durant de longues semaines dans un F2 sans balcon. Un roman double. On découvre dans le premier chapitre, le réveil, dans une luxueuse chambre du Grand Hôtel de Cape Cod sur la côte Est des USA, d’un homme aussi désorienté que le lecteur. Il n’a aucun souvenir, ne sait plus qui il est, ce qu’il fait là…
Au fil des pages il apprend qu’il est un célèbre écrivain venu terminer son nouveau roman en toute tranquillité. Changement de lieu pour la suite. A Boston, un jeune homme s’échine à devenir écrivain. Il tape ses histoires bancales sur une vieille machine à écrire. Sans succès. Jusqu’à sa rencontre avec une belle comédienne. Ces deux vies composent les différents chapitres de ce roman psychologique qui en apprend beaucoup, au lecteur, sur la vie des écrivains, célèbres ou inconnus.
A la fin, les récits se rejoignent et on comprend enfin le lien entre l’auteur de best-seller et le raté de Boston. Une intrigue brillante parfaitement amenée jusqu’à sa conclusion.
« L’homme du Grand Hôtel » de Valentin Musso, Seuil, 19,90 €
Un dernier regard et puis plus rien. Dans la voiture de location, sur cette route pittoresque de Marie-Galante, en Guadeloupe, Emmelene Landon a le temps de lancer un dernier regard à Paul, l’amour de sa vie avant le choc. Un accident qui la laisse gravement blessée. Paul, lui, est mort sur le coup. Après ce dernier regard entre deux amoureux depuis plus de 20 ans.
C’était début 2018. Dans Debout, Emmelene Landon raconte comment elle s’est reconstruite, comment elle essaie de « survivre à la dérive ». Avec la présence de Paul à ses côtés, car elle doit « garder à l’esprit le cœur ouvert, ce qu’il reste à vivre. Insupportable néant. »
Un texte puissant, structuré en trois parties. La première, la plus dure, celle de l’accident, du retour sur Paris, pour solder le passé matériel, où elle tente de supporter le quotidien. Par chance, sa fille est enceinte, une petite fille viendra redonner le sourire à l’autrice. La seconde, la plus dépaysante, sur son voyage à bord du D’Entrecasteaux, bâtiment de la Marine nationale basé en Nouvelle-Calédonie.
Enfin, elle découvre la voile avec un ami écrivain. Un final revigorant pour un texte plein d’espoir malgré la solitude abrupte qui lui est tombée dessus à Marie-Galante.
Ana, étudiante, souffre de crises d’éco-anxiété. Une maladie très récente. La jeune fille panique quand elle constate que l’Humanité court à sa perte en maltraitant la planète. Ainsi, en pleine séance chez sa psy, elle constate que la praticienne, qui pourtant lui est d’une grande aide, utilise une cafetière à dosette en aluminium. Cela suffit pour mettre Ana en rage. Depuis son plus jeune âge, elle s’est créé un ami imaginaire.
Un protée, appelé aussi olm, salamandre des grottes. Cette bestiole blanchâtre, vit avec elle dans sa chambre en cité universitaire. C’est presque son seul interlocuteur. Il prend une forme humanoïde, interagit avec elle mais reste invisible du reste du monde. Ana est-elle folle ? Assurément pas quand on comprend pourquoi elle a dû inventer cet ami qui lui aussi est d’un grand secours dans son quotidien.
Écrit par Pog, dessiné par Séverine Lefebvre, L’ami colocataire, roman graphique composé de courts chapitres, va crescendo dans le bizarre. Pour finalement donner la possibilité à Ana de vivre plus en harmonie dans ce monde qu’elle redoute.
Jusqu’à pouvoir vivre sans son colocataire imaginaire. Cet album inclassable est une superbe leçon de vie.
Quand Lewis Trondheim décide d’écrire une histoire de super-héros, on est sûr qu’il va totalement chambouler le genre. Avec Stan et Vince au dessin, il a donc lancé un groupe de jeune Français sur les routes du Nevada aux trousses d’extraterrestres belliqueux. Parue en trois tomes entre 2017 et 2021, Density revient cet été sous forme d’une intégrale de plus de 300 pages.
A la base, Chloé, sa sœur et une amie décident d’offrir à leur frère Gilles un voyage à une convention de fans de SF. Gilles est persuadé que des aliens existent et visitent la Terre. Un geek comique. Mais une fois dans le désert, il est véritablement abordé par un monstre qui veut lui insuffler une dose de Fluctua-densité qui lui permettra d’avoir des pouvoirs spéciaux pour lutter contre les Douss, méchants envahisseurs. Mais Gilles panique et se cache derrière Chloé qui est frappée par le rayon.
Elle se retrouve dotée de pouvoirs exceptionnels, parfaits pour sauver l’Humanité. À l’arrivée, la caricature est légère, l’aventure majeure et l’action omniprésente. Une excellente BD, digne des meilleurs comics US et qui met en valeur le courage des femmes.
Si, pour beaucoup, les États-Unis sont le royaume du capitalisme, il ne faut pas oublier que ce jeune pays a connu son lot de révoltes ouvrières. Dans Des jours meilleurs, Jess Walter raconte les événements qui ont agité, entre 1909 et 1910, la ville de Spokane, dans l’état de Washington. Des milliers de vagabonds y tentent de survivre en travaillant pour les mines ou pour les exploitants forestiers.
Parmi eux, les frères Dolan. Gig, l’aîné et Rye, le cadet. Le premier a une conscience de classe et milite à un syndicat ouvertement communiste. Le second espère juste vivre sereinement dans une petite maison, avec un travail pérenne. Une manifestation de rue va dégénérer. Gig sera emprisonné, Rye également. Il découvrira les méthodes de la police et des milices privées. Battu, torturé, il prendra fait et cause pour les ouvriers, son camp. Mais il en paiera le prix fort.
Ce roman historique, subtil mélange entre fiction (les frères Dolan) et réalité (les révoltes sociales) est, avant tout, le témoignage de la formidable force de cette solidarité, si forte parmi les plus pauvres et les plus démunis.
« Des jours meilleurs » de Jess Walter, Éditions La Croisée, 23 €
Souvent, un roman se juge à sa première phrase. Un film peut aussi être résumé par le premier plan proposé au spectateur. Dans Sundown, ce sont des poissons qui agonisent sur le pont d’un hors-bord luxueux au large d’une plage d’Acapulco. C’est glaçant et donne le ton du reste de l’œuvre.
Cinéaste de l’intime et de l’intériorité, Michel Franco propose une nouvelle variation de ses thèmes de prédilection dans ce film ayant Tim Roth en tête d’affiche. Dans un hôtel de luxe d’Acapulco, une famille anglaise profite du service 5 étoiles, du soleil et de la mer. Alice (Charlotte Gainsbourg), la PDG de l’entreprise familiale, est accompagnée de ses deux enfants (des jeunes adultes) et de son frère, Neil (Tim Roth). Ce dernier est comme absent, étranger à cette ambiance de farniente. Quand Alice décide de rentrer en urgence à Londres pour se porter au chevet de sa mère, gravement malade, Neil prétexte avoir oublié son passeport pour ne pas prendre le vol. Il retourne à Acapulco, s’installe dans un modeste hôtel et profite de la plage, silencieux, mutique, perdu dans ses pensées.
Énigmatique dans sa première partie, le film va virer au drame par la suite. Neil sera impliqué dans un fait divers dramatique et devra choisir entre sa famille, une femme qu’il aime et ce destin qu’il a décidé d’assumer quoi qu’il arrive. Tim Roth est parfait dans ce rôle d’un homme qui doute face à la dernière certitude de son existence : sa mort.
"Sundown", film franco mexicain de Michel Franco avec Tim Roth, Charlotte Gainsbourg, Iazua Larios
Des dragons et des momies égyptiennes : tel est le cocktail détonnant de cette nouvelle série de Ceyles et Pinard. Intitulée Ouroboros, elle débute par l’histoire de la naissance de quatre dragons du ventre fécond d’une femelle. Des siècles plus tard, les hommes tuent la mère provoquant la colère des enfants.
Dans ce présent très différent du nôtre, les biens les plus précieux sont des reliques en provenance de ces bêtes fabuleuses. L’une d’elles, l’amulette de Saladin, est conservée par un ordre de Bédouins dans le désert. Aman, un aventurier intrépide, un peu sorcier sur les bords, la dérobe. Il se réfugie dans les souterrains d’anciennes pyramides et va réveiller des momies pour se défendre. L’amulette, essentielle pour Aman, lui permettra de guérir Xiao, un enfant, dernier fils de la Reine des Dragons, le seul qui aurait le pouvoir de la faire disparaître.
Cet album marque surtout par son découpage. Chaque planche est un canevas d’images qui s’imbriquent les unes dans les autres donnant une lecture et une mise en page virtuose et rarement vues ailleurs si ce n’est dans certains albums de Rork signés Andréas.
De toutes les versions du futur proposées par des scénaristes maniant l’apocalypse, celle proposée par Sylvain Runberg et Anna Saveg dans Patriarchy semble, malheureusement, très plausible. Dans un futur proche, donc, une femme est élue présidente des USA.
Une conservatrice qui lance son pays dans une guerre nucléaire avec la Chine. Rapidement toute la civilisation s’écroule. Surtout, les hommes rejettent toutes les femmes qui seraient la cause de tous leurs malheurs. Dans un monde où la violence est la seule loi qui compte, les hommes règnent en maîtres absolus. Les femmes sont de simples esclaves.
Il existe pourtant des communautés qui résistent. Les Valkyries du camp retranché Thing sont les plus redoutables. Mais pour assurer leur survie, elles tuent tout nouveau-né mâle. Dessinée par Belen Ortega, illustratrice espagnole, ce comic hyper violent est surtout l’occasion de faire passer quelques messages sur l’égalité hommes/femmes dans la société. Actuelle ou à venir.
Redoutables et enragées, ces femmes savent se défendre et valent largement les hommes quand il est question de cruauté et de justice expéditive.
Tous les scientifiques, un peu réalistes et pragmatiques, l’annoncent, à plus ou moins brève échéance : l’extinction de la race humaine. Une certitude et plusieurs inconnues : quand et pourquoi ? Alors, le mieux est de se préparer à l’avance. C’est ce qui motive un conglomérat d’entreprises en imaginant Les Jeux de l’extinction.
Dans ce roman, signé A. G. Riddle, l’effondrement de la société est brutal. On le vit indirectement avec des journées cauchemardesques pour Owen et Maya. Le premier est pompier. Il part sur un incendie, mais dans le brasier, des robots chargés normalement d’éteindre le feu l’attaquent. Maya, scientifique, se découvre infectée par un virus qui lui détruit la mémoire.
Owen et Maya se réveillent bien plus tard. Ils ont été sélectionnés (sauvés), pour participer aux Jeux de l’extinction. Sur leur planète dévastée et sans ressources, ils font partie d’une cohorte. Leur mission : redonner espoir à l’Humanité.
Un récit de SF plein de surprises, qui a déjà été acheté pour être adapté en série télé et qui donne à réfléchir. Sur les intelligences artificielles, mais surtout, le libre arbitre et la solidarité.
« Les jeux de l’extinction » d’A. G. Riddle, Bragelonne, 18,90 €
Chassé-croisé à Céret n’est pas une nouveauté, mais mérite toujours d’être découvert, quatre années après sa sortie. Deux sœurs, Julie Roussel Cros et Laetitia Roussel, ont écrit ce court roman policier historique. Nous sommes en 1673, un jeune policier parisien débarque dans la sous-préfecture catalane pour tenter de découvrir les dessous d’une affaire d’empoisonnements.
Matthieu Barbet, qui connaît bien la région pour être originaire de Perpignan, tout en enquêtant, nous fait découvrir les environs. Une balade historique, de Pollestres et son fameux vin au Perthus et ses fortifications, sans oublier, bien évidemment, Céret et sa chaîne industrieuse du tissage. L’intrigue policière n’est qu’un prétexte pour décrire la vie des Cérétans de l’époque, de la foire au marché, en passant par les cuisines des riches notables, complotant (déjà !), pour que la Catalogne retrouve son indépendance récemment perdue.
Pour vous procurer ce livre, édité aussi en anglais et en catalan, il vous suffit de contacter les auteurs par mail : juliecros7@gmail.com ou tout simplement de vous rendre, le samedi matin au marché… de Céret.
« Chassé-croisé dans Céret » de Julie Roussel Cros et Laetitia Roussel, Éditions du Simiot, 10 €
Habitué de l’humour très noir, trash et gore, Jonathan Munoz cache, pourtant, derrière ses histoires terribles (Annick Tamaire, Godman) un petit cœur sensible et romantique. Il réussit le tour de force de mettre les deux facettes, totalement opposées, de sa personnalité dans un seul et unique album. L’inconnue du bar raconte l’amour platonique d’un serveur de bar, Joshua, pour une jeune femme, Dara, qui dessine ses BD en terrasse.
L’album alterne les tentatives de drague de Joshua avec les histoires courtes de Dara. Ces dernières sont du pur Jonathan Munoz avec la fille d’un pirate abandonnée sur une île déserte et qui, devenue adulte et institutrice, tyrannise ses élèves. Ce petit garçon, si gentil, si dépendant de sa maman, qui va virer leader fasciste ou ce méchant cow-boy découvrant qu’il ne peut plus tuer. Alors, il se met à donner des bisous, provoquant une véritable hécatombe.
Quant à l’histoire d’amour entre le serveur et la dessinatrice, elle va connaître une fin assez étonnante.
Sans rien en dévoiler, sachez qu’elle est en totale opposition avec l’esprit des récits courts de Dara.
Lancée en 1982, alors que le genre de l’heroic fantasy n’était pas à la mode, La Quête de l’Oiseau du temps, de Le Tendre et Loisel, a connu un formidable engouement. 40 années plus tard, un nouvel album de la série paraît, le 11e seulement. Folle graine est le 7e épisode du cycle dit « Avant la quête ».
On y retrouve Bragon, le ténébreux chevalier, mais pas Pelisse. Bragon amoureux fou de Mara, tentant d’empêcher la secte de l’Ordre du Signe de prendre le pouvoir en s’emparant de la Conque de Ramor. Dans cet album, dessiné par Etien, Bragon et Mara bravent une entité des ombres pour dérober une graine mystérieuse qui aurait le pouvoir « d’affaiblir la menace du retour du dieu Ramor. »
68 pages de toute beauté, avec les personnages habituels de ce cycle (l’impétueux Bulrog, la belle et redoutable Kryll) et quelques nouveaux venus, dont le prince Bodias qui rêve de séduire Mara. La BD se termine par un coup de théâtre qui annonce parfaitement le dernier épisode de la saga et permet déjà de faire lien avec la série principale.
« La quête de l’Oiseau du temps - Folle graine », Dargaud, 15 €
Troisième et dernier volet de la saga des Hommes de Paille signée Michael Marhsalle et parue au début des années 2000, les éditions Bragelonne proposent une version poche d’un thriller qui va glacer le sang des lecteurs, même les plus habitués à ce genre de littérature.
On retrouve Ward Hopkins et sa compagne, Nina, cachés dans un bungalow dans la forêt. Ils fuient les Hommes de Paille, sorte de conspiration de tueurs en série. A leur tête, Paul, le propre frère de Ward. Le cauchemar reprend quand des cadavres sont découverts dans une petite ville.
Nina, qui fait partie de l’élite du FBI, reprend du service et Ward discrètement la couvre. Il craint tout le monde : « Le problème avec la paranoïa, c’est qu’on ne sait plus s’arrêter. Dès que l’on se met à douter des principes élémentaires qui régissent les rapports humains, tout devient envisageable. » En l’occurrence le pire dans un final qui dépasse largement la folie du 11 septembre.
« Le sang des anges » de Michael Marshall, Bragelonne Terreur, 7,90 €
Coup double pour Jean-Christophe Portes. Après avoir remporté le prix du roman d’aventures des éditions du Masque en 2020 pour Minuit dans le jardin du manoir, il devient le lauréat du prix du Masque de l’année pour la suite des aventures de l’ancien notaire Denis Florin.
Le mystère du masque sacré est en réalité la seconde enquête de ce sympathique héros, peu préparé à une vie d’aventures lui qui a longtemps été un simple notaire en Normandie puis un spécialiste des plantes médicinales. Surtout, il est le petit-fils d’une espionne en chef pour la république française. Il va cette fois devoir aller jusqu’en Afrique pour démêler une sombre affaire de masque sacré qui donnerait un pouvoir absolu au sorcier qui le possède.
C’est très mouvementé, tout à fait plausible, avec l’ajout de quelques personnages (une gendarmette psychorigide qu’on espère revoir) et la suite des amours compliquées entre Denis et la belle Nadjet, journaliste reconvertie en influenceuse, couverture idéale pour ses missions secrètes aux quatre coins de la planète.
« Le mystère du masque sacré » de Jean-Christophe Portes, Le Masque, 8,50 €
Il faut l’admettre, ce bouquin de la collection Quarto de chez Gallimard n’est pas idéal pour une lecture sur le sable en bord de mer. Plus de 1 000 pages et un bon kilo à tenir en bout de bras. De même, ce ne sera pas une lecture estivale car difficile de le terminer avant la fin du mois d’août.
Mais on peut y piocher quelques-uns des textes qui ont forgé, dès le Moyen Âge, la légende arthurienne. Dirigé par Martin Aurell et Michel Pastoureau (qui en signent une préface très instructive), cette compilation reprend notamment La quête du Saint Graal, écrite dans les années 1220 - 1225, « reprend le canevas fort classique du voyage d’aventures : présentation des héros et leur départ, épreuves subies durant leur itinéraire, objectif atteint et récompense finale. »
On apprend surtout que les légendes celtes deviennent une occasion pour que « la prédication cléricale gagne du terrain ».
Reste que les aventures d’Arthur et de ses chevaliers de la Table ronde sont un peu à l’origine du roman. La première fiction plus vraie que nature qui a fait rêver des dizaines de générations. Et ce n’est pas terminé !
« Les Chevaliers de la Table ronde, romans arthuriens », Gallimard Quarto, 1 080 pages, 158 documents en couleur, 34 €
Les duos improbables, tels la carpe et le lapin, ont encore de beaux jours devant eux. Nouvel exemple avec les deux héros de ce gros album signé Éric Stalner. Le premier est commissaire de police, bourru et taciturne, la seconde, riche orpheline qui profite pleinement des années folles. Ils ont pourtant un point commun : le nom de famille du flic et le prénom de la belle, Bertille.
Ils se rencontrent lorsque le premier vient d’arrêter un petit malfrat, la seconde rentre d’une nuit de fête chez une amie. Ils assistent éberlués à l’arrivée sur terre d’une boule rouge écarlate qui termine sa course folle dans une forêt. Expérience des Bolcheviques, débarquement des Martiens ? L’étrange boule rouge fascine Bertille & Bertille. Alors que le premier doit tenter de la faire disparaître à la demande du Préfet de police, la seconde ne peut cacher son admiration face à sa perfection. Problème : la boule grandit.
A un tel rythme que dans un mois, la France ne sera plus qu’un souvenir… Cette BD en noir et blanc (à part la boule) étonne par son intrigue entre politique, conspiration et fantastique. Mais le mieux reste les deux Bertille et leur étrange relation.
Le 3 août, dans deux semaines, sort au cinéma Bullet Train, film à grand spectacle avec Brad Pitt en vedette. Une production Sony adaptée du roman du même nom de l’écrivain japonais Kotaro Isaka et récemment publié en France aux Presses de la Cité.
Dans le Shinkansen, train à grande vitesse japonais, plusieurs tueurs vont se livrer au jeu du chat et de la souris avec une valise remplie de billets. Dans ce polar aux dialogues percutants et aux personnages complexes, c’est Kimura qui fait le premier son entrée en scène. Retiré des affaires, il arrive à bord du train ivre et armé. Il a l’intention de tuer un collégien qui a poussé son petit garçon du haut d’un immeuble. Il va croiser la route de Mandarine et Citron. Des experts des opérations spéciales. Ils viennent de libérer un adolescent et le ramènent à son père ainsi que la valise bourrée de l’argent de la rançon.
Une valise qui est l’objectif du dernier malfrat (Brad Pitt dans le film), Coccinelle. Il doit la voler. Mais comme il est toujours très malchanceux, les choses ne vont pas se dérouler comme prévu. Le huis clos dans le train est magistralement mené par un romancier à l’imagination débordante.
« Bullet Train » de Kotaro Isaka, Presses de la Cité, 22 €
Pour beaucoup de spécialiste c’est le meilleur dessinateur animalier du moment. Federico Bertolucci, dessinateur italien, délaisse pourtant un peu son univers privilégié pour s’attaquer à une histoire fantastique. Remarqué dans les albums Love (sur des scénarios de Brrémaud), racontant les déboires sans la moindre parole d’un chien, d’un lion ou de dinosaures, il s’attaque cette fois à la légende de Perceval.
Exactement la légende oubliée. Perceval n’est encore qu’un gamin vivant avec sa mère dans la forêt. Il chasse et s’invente des exploits en compagnie de son hermine apprivoisée. Alors que les Saxons débarquent et vont attaquer le roi Arthur. Perceval, qui ne se doute pas qu’il sera un grand chevalier de la Table ronde fonce pour prévenir le monarque. Mais croise sur sa route une petite fée mal en point.
Superbement dessinée, cette histoire prévue en quatre tomes, a tout pour devenir une référence dans le genre du fantastique teinté d’historique. On va suivre l’apprentissage de Perceval et les aléas de la vie du petit peuple de la forêt.
« La légende oubliée de Perceval » (tome 1), Vents d’Ouest, 14,50 €
Après un florilège des films des frères Dardenne, le festival Ciné-rencontres de Prades propose un focus sur les œuvres de Mia Hansen-Love. La réalisatrice, présente dans la capitale du Conflent, apprécie que tous ses films, huit au total, soient programmés, dont "Un beau matin" en avant-première, sa dernière réalisation, présentée au festival de Cannes et qui ne sort qu'en octobre prochain. Rencontre.
Pourquoi avoir accepté de venir à Prades présenter votre travail aux cinéphiles de la région ?
On m'avait déjà sollicité l'an dernier, mais je n'ai pas pu répondre positivement car je n'étais pas libre. J'ai été très sensible au fait qu'on me réinvite l'année d'après. Je suis toujours touchée quand il y a une certaine fidélité ou patience. J'ai eu un bon contact avec le président Jean-Pierre Abizanda et de la façon dont il parlait de son festival.
Connaissiez-vous la région ?
Pas du tout. Je ne suis pas du Sud. J'ai passé tous mes étés d'enfance dans la maison familiale de Haute-Loire. Pour mon travail, j'ai beaucoup voyagé dans le monde mais je connais très mal la France. Aujourd'hui, je suis très contente de découvrir la France. Il y a deux semaines j'étais au festival de La Rochelle, c'est une ville magnifique. Depuis mon arrivée à Prades, j'ai visité Saint-Michel de Cuixa et j'aimerais aller à Serrabone. Je suis particulièrement sensible à ces lieux spirituels quand ils sont dans un cadre comme ceux-là c’est-à-dire au milieu de la nature.
Appréciez-vous que le festival programme l'ensemble de vos films ?
C'est déjà arrivé et pas mal de fois, mais c'est la première fois en France. Donc je suis très heureuse et j'y accorde beaucoup d'importance d'autant plus que dès mon premier film, d'une certaine façon, j'ai pensé en termes d'œuvre. Cela peut paraître prétentieux, j'espère que ça ne l'est pas. J'ai toujours été intéressée à la cohérence de ce que je faisais. J'ai toujours eu envie que le sens de mon travail ne vienne pas seulement des films pris séparément mais de la façon dont ils se répondraient. Je voulais que mes films aient un dialogue entre eux, un lien organique. Donc, je trouve que j'ai beaucoup de chance que les huit films soient montrés ensemble et pas séparément.
Samedi soir, en clôture du festival, vous présenterez votre dernière réalisation, "Un beau matin". Que représente ce film dans votre parcours ?
Après avoir réalisé Bergman Island qui se déroulait beaucoup dans la nature en Suède, un film romanesque dans des espaces ouverts et qui échappait à une certaine forme de réalisme, quand j'ai commencé à écrire Un beau matin j'ai eu le sentiment de revenir à la maison après m'être échappée en Suède. Je suis revenu à la maison dans le sens que c'est un film autobiographique. Il est question de la relation entre un père et sa fille. Un père malade ayant une maladie neurodégénérative. Au-delà de ça, c'est un film tourné à Paris dans des décors très proches de moi, de mon quotidien, qui me ramène peut-être au réel auquel j'ai voulu échapper en Suède. Là, au contraire, j'ai voulu m'y confronter.
Quels sont vos projets après le festival ?
Je vais accompagner la sortie d'Un beau matin. Avant sa sortie mercredi 5 octobre en France, je serai aux USA, notamment à Los Angeles puis en compétition au festival de Toronto au Canada. Ensuite, je vais continuer à écrire un projet de mini-série assez atypique en six épisodes sur la vie d'Annemarie Schwarzenbach, une journaliste, voyageuse, écrivaine, suisse allemande, morte en 1942. Son parcours, son histoire, son œuvre, me hantent depuis très longtemps. J'ai pris conscience il y a quelques années que cela ne correspondait pas au format d'un film en termes de durée, ce qui m'a conduit à le transformer en série de six épisodes. Je commence à travailler dessus, mais c'est vraiment un projet de longue haleine avec beaucoup de recherches historiques. Je commence juste à écrire le premier épisode, donc je ne suis pas près de revenir au cinéma.
Dans le Japon moderne, aimer devient une véritable aventure. Une épreuve aussi. Pour soi, l’image que l’on donne, ce que l’on désire obtenir, que l’on est prêt à donner. Tempura d’Akiko Ohku est un film profond sur la solitude, l’amour de soi, de l’autre aussi. Une fable qui devrait aussi parler aux Occidentaux que nous sommes même si l’héroïne, Mitsuko (interprétée par la comédienne nommée Non), est l’archétype de la Japonaise contemporaine.
La jeune femme ne l’est plus tout à fait selon les codes rigides de cette société. Elle a plus de 30 ans et est toujours célibataire. Employée discrète, elle apprécie de cuisiner. Mais personne ne profite de ses tempuras, succulents beignets. Le début du film permet au spectateur de découvrir le quotidien de cette habitante de Tokyo.
Premier étonnement, elle vit seule mais parle sans arrêt à un personnage imaginaire qui vit dans sa tête : A. Son double, plus aventureux, qui parfois lui donne de très mauvais conseils comme sortir avec son dentiste. Mais A est surtout une création pour lui permettre de supporter les épreuves psychologiques compliquées comme prendre l’avion ou inviter un collègue à venir manger chez elle. Mitsuko serait-elle en train de tomber amoureuse de Tada (Kento Hayashi), un commercial de son entreprise, plus jeune qu’elle. Qu’est-ce qui est le pire ? Être célibataire à plus de 30 ans ou vivre avec un homme plus jeune que soi ? En réalité, ces questionnements de Mitsuko, s’ils étaient avant au centre des us et coutumes japonais, sont désormais sans importance. Aujourd’hui, elle doit avant tout s’affirmer et vivre simplement, à l’écoute de ses sentiments, sans la béquille d’A.
Un très beau film particulièrement sensible sur la solitude, assumée ou forcée, les mystères de l’amour et cette façon très délicate de débuter un bout de chemin à deux. Loin du coup de foudre et du paraître.
Rodrigo Sorogoyen aime la France. Le public français aime ses films. Après le succès de Que Dios nos perdone, il confirme avec El Reino sur les magouilles politiques de l’Espagne contemporaine. Il prend un tournant francophone avec Madre, le récit se déroulant sur la côte landaise. Il poursuit sur cette voie avec deux comédiens français en vedette de son nouveau film, As Bestas.
Denis Ménochet et Marina Foïs interprètent un couple s’installant dans un village de Galice. Ils vivent dans une ferme et retapent des maisons abandonnées afin de faire revenir des habitants dans cette région durement touchée par l’exode rural. Un beau projet qui ne plaît pas à tout le monde.
C’est là que le film de Sorogoyen devient universel. Deux frères, vivant depuis toujours sur ces terres, ne supportent pas cette arrivée de sang neuf. De sang étranger surtout. Car pour eux, les Français ne sont pas, et ne seront jamais, chez eux. C’est leur terre, leur pays, leur propriété. Un conflit qui arrive si souvent de nos jours, attisant les rancœurs, les frustrations, développant la violence. Le film va ainsi devenir de plus en plus oppressant, à mesure que l’affrontement semble inéluctable.
Sorogoyen se révèle toujours aussi doué avec notamment un plan séquence qui devrait être enseigné dans toutes les écoles de cinéma.
A quoi pensent les jeunes filles d’aujourd’hui, ces adolescentes, âgées entre 13 et 17 ans, le regard toujours rivé sur leur téléphone portable ? Vous aurez en partie les réponses à cette interrogation en lisant le premier roman de Léa Tourret, La fille de la piscine.
C’est l’été. Léna passe une grande partie de ses journées à la piscine municipale en compagnie de sa meilleure amie, Max. Léna raconte tout ce qu’elle voit, ce qu’elle pense, ses désirs et ses peurs. Dans une langue très actuelle, sans fioritures ni effet de style, l’autrice plonge dans la psyché de cette plus tout à fait gamine, mais pas encore femme. Léna qui est dans cette période de sa vie où l’on n’a pas confiance en soi, que notre corps nous révulse et que tous les garçons semblent laids, même si, étrangement, ils l’attirent. Deux garçons vont justement entrer dans la vie des deux copines. Yannis et Lounès.
Au petit jeu de la drague, Max a l’avantage. Léna se retrouve seule, désespérée, obligée de se choisir une nouvelle meilleure amie, Sabrina. Un roman à lire à la mer ou à la piscine, tout en observant d’un coin de l’œil ces jeunes, fidèles reflets de Léna et ses amies.
« La fille de la piscine » de Léa Tourret, Gallimard, 16 €
Le 14 juillet, les héros militaires de cette nouvelle série de Bartoll et Guzman ne défileront pas sur les Champs-Élysées. Normal, leur corps n’existe pas officiellement. La cellule dite des « Défenseurs », rattachée à la DGSE (le contre-espionnage français), agit dans l’ombre, uniquement sur ordre du président de la République.
Des missions très dangereuses d’élimination préventive de terroristes sur le point d’agir contre les intérêts de la France, Au nom de la République.
Cette première mission débute en Turquie. Un groupe de Défenseurs est sur le point de neutraliser une cargaison d’armes destinée à Daech. Ils tombent dans une embuscade et meurent tous. En conseil de Défense, décision est prise d’éliminer en priorité cette cellule qui semble vouloir frapper un grand coup médiatique. Le Renard, agent d’élite, est mis sur le coup. Il va sillonner l’Europe, notamment en Allemagne, pour pister les assassins de ses collègues et amis. Le final se déroule au Maroc. Bartoll, au scénario, apporte toute son expertise d’un milieu qu’il côtoie depuis des années.
« Au nom de la République » (tome I), Soleil, 15,50 €
Mais que seraient les grandes vacances des enfants sans leurs grands-parents ? Un long tunnel d’ennui, entre jeux vidéo et télé… Ces deux petits romans (à partir de 7 ans), mettent en vedette les « anciens », souvent plus farfelus que leur descendance.
Ainsi Mémé, selon sa petite-fille, serait un agent secret. Le texte d’Emmanuel Villin raconte comment elle va déjouer le plan machiavélique d’un savant fou qui risque d’obliger toute la population de Paris à se nourrir avec de la malbouffe. Une histoire très contemporaine illustrée par Frédéric Rébéna.
Dans le 3e tome de Papi est un super menteur de Grégory Nicolas (illustrations de Jeremy Parigi), ce papi très mythomane explique à ses deux petits-enfants, Marcel et Apolline (sans oublier le doudou de cette dernière, la pieuvre Dédette) ébahis, qu’il a participé à la prise de la Bastille en 1789. Un énorme mensonge mais qui permet aux jeunes lecteurs de découvrir de façon très ludique et comique ce pan essentiel de l’Histoire de la France.
« Bons baisers de Mémé », L’école des loisirs, 8 €
« Papi est un super menteur - La super prise de la Bastille », PKJ, 5,95 €
La couverture du premier tome de Miss Shaolin, écrite par Bottier et Kravtchenko et dessinée par Tozzi est un peu trompeuse. On pourrait penser que cette histoire se déroule dans la Chine médiévale. En réalité, c’est une histoire très classique ayant pour cadre un collège français contemporain. La jeune Bo a des origines chinoises par sa mère. Elle vit essentiellement chez son grand-père maternel, grand spécialiste des arts martiaux. Mais pas autant que des jeux vidéo…
Elle passe des heures à s’entraîner et sous ses airs timides se cache une redoutable combattante. Une petite bande de caïds l’apprend à ses dépens. Seule, elle les met tous au tapis en quelques secondes. Comme l’exploit est filmé par Martin, un geek, un peu amoureux de la jolie Bo, elle devient la star de l’établissement scolaire et hérite du titre de Miss Shaolin. Si la vie des jeunes est très bien retranscrite, dommage que la seconde moitié de l’album soit consacrée à un tournoi d’art martial avec accumulation des combats. Sympa à dessiner pour Tozzi, virtuose italienne, mais un peu répétitif pour les lecteurs.
Ce premier roman de Clémentine Autain laisse perplexe. La députée de gauche raconte de l’intérieur la vie de l’Assemblée nationale. Mais bizarrement, les trois femmes qu’elle met en scène sont toutes sous le charme d’un député de droite, mâle alpha de la politique française, macho assumé et grand prédateur de petite culotte.
Si quelques passages du livre racontent comment certaines femmes se mobilisent pour faire changer le regard des hommes sur les femmes dans ce milieu très rétrograde, les trois héroïnes ressemblent plus à des caricatures de femmes enamourées comme on en croisait tant et tant dans les vieux romans à l’eau de rose.
Lila, brillante économiste, femme élevant seule son fils, devient une bête groupie dès qu’elle croise la route du député Antoine Polin. De même, Jeanne, assistante parlementaire d’un élu de gauche, se donne sans réserve de 5 à 7 à ce même Polin. Qui par ailleurs a une femme depuis 25 ans, Estelle, cocue mais si heureuse avec son homme de pouvoir qu’elle voit conquérir l’Élysée.
Parfois, Assemblées ressemble à du Marlène Schiappa…
« Assemblées » de Clémentine Autain, Grasset, 20 €
Sympathique nouvelle collection aux éditions du Cherche-Midi. Baptisée Borderline, elle a pour but de publier ou remettre au goût du jour des textes qui « s’adressent à tous les lecteurs avides de vigueur, de bonne santé et d’insolence. » Une nouveauté pour inaugurer cette bouffée d’air pur dans une littérature trop souvent corsetée par un politiquement correct qui empêche de dire clairement les choses, Banlieue noire de Rémi Pépin. Une plongée salutaire dans les années 80.
Exactement l’action débute le soir du 10 mai 1981. Alors qu’une partie de la France fait la fête dans les rues de Paris et la proche banlieue, trois amis semblent insensibles à cet espoir de jours meilleurs. Il est vrai que Riton, Momo et Jean-Claude savent que ce ne sont pas quelques ministres de gauche qui vont changer leur quotidien de loubards de banlieue. Ce dimanche soir, ils ont un autre projet, plus excitant : se bourrer la gueule, fumer quelques joints et aller récupérer la voiture de leurs rêves, une traction avant, l’auto des gangsters par excellence. Les trois potes, une fois au volant, vont voir leur destin méchamment contrarié. En plus de planter la caisse, ils trucident un inconnu, compagnon de beuverie, embarqué dans leur virée. Paniqués, ils décident de l’enterrer dans un terrain vague. Les ennuis vont commencer… Beaucoup de tendresse en fait dans ce texte quand l’auteur parle des trois losers, amis d’enfance qui zonent depuis trop longtemps dans cette banlieue sinistre. Ils aiment se retrouver et faire des conneries car « ensemble ils étaient forts, solidaires, insolents, arrogants. Seuls, ils redevenaient ce que le monde entier, flics, profs, parents ou patrons, s’appliquait à leur répéter chaque jour depuis leur plus tendre enfance : des pas grand-chose, des rien du tout. Voire des moins que rien du tout. »
« Banlieue noire » de Rémi Pépin, Borderline, 15 €
Invité vedette du 63e festival Ciné-Rencontres de Prades du 15 au 23 juillet, Jean-Pierre Dardenne, cinéaste belge qui a remporté deux Palmes d'or à Cannes avec son frère Luc, rencontrera le public le samedi 16 juillet alors que neuf de ses films sont programmés au cinéma Le Lido. Dans une longue interview publiée dans l'Indépendant, il revient sur sa carrière, sa façon de filmer le quotidien et la situation du cinéma après la crise sanitaire.
L'Indépendant : Après Cannes, vous voilà au festival de Prades. Quelle ambiance préférez-vous ?
Jean-Pierre Dardenne : On ne peut pas comparer. À Cannes on est dans un autre monde, c'est une grosse turbine qui fait tourner le cinéma, une vitrine mondiale durant 15 jours. À Prades c'est un festival qui est tourné vers la rencontre entre un public, des cinéastes, jeunes et moins jeunes, des premiers films. Il y a ici un esprit de proximité qu'il n'y a pas à Cannes. L'existence d'un festival comme celui de Prades est le signe de la vitalité du cinéma en France. Ce pays est une exception et un exemple, le poisson pilote du cinéma en Europe.
Tous vos films ont été tournés en Belgique près de Liège, pourquoi cet attachement à votre région d'origine ?
Nous avons été comme appelés par cette ville de Serain qu'on a connu si vivante. Nous avons voulu, en réalisant des documentaires puis des fictions, garder une partie de la mémoire de cette région, à travers la rencontre avec des personnes. Cette ville nous a vus devenir adulte, on y a découvert la vie. Toutes nos œuvres permettent de faire vivre cette ville. Il y a un peu de notre histoire en creux dans ces films. Nous essayons de faire un cinéma qui regarde le monde dans les yeux.
Rosetta par exemple était quelqu'un de nouveau dans notre monde post-industriel. Lorna aussi. Elle était prête à tout pour avoir sa place au soleil. Nous tentons de raconter des histoires avec des personnages, pas seulement de dresser des constats. Raconter comment ils essaient de sortir de leur solitude, de rencontrer quelqu'un d'autre.
Vous avez révélé plusieurs comédiens comme Emilie Dequenne, Jérémie Rénier ou Olivier Gourmet. Comment choisissez-vous les interprètes de vos films ?
Nos personnages sont souvent des hommes ou femmes jeunes. Il n'y a pas de comédiens confirmés de cet âge. C'est à nous de trouver celui ou celle qui pourra porter le personnage. Le reste c'est beaucoup de travail. On répète le film durant 4 à 5 semaines avant le tournage. Cela permet de maîtriser la chronologie du film, d'affiner les décors. C'est lors de ces répétitions qu'on trouve la forme du film. C'est une base pour le tournage.
Pour les comédiens, cela permet de laisser tomber les défenses. Pour nous aussi. Des répétitions très physiques. Les déplacements sont étudiés, les gestes permettent de donner la vie. Le rythme d'une scène dépend essentiellement des gestes. Il paraît qu'on ne devient cinéaste que quand on trouve sa méthode de travail. Nous, comme les vaches, on a besoin de beaucoup ruminer. Voilà pourquoi on met plus de deux ans pour faire un film.
Espérez-vous remporter une 3e palme à Cannes ?
Je ne peux m'empêcher de penser qu'une 3e palme serait aussi le symbole que le festival de Cannes tourne sur lui-même. Qu'il ne se renouvelle plus. Mais on a quand même l'esprit de compétition. Avoir plus de reconnaissance ne peut qu'être bénéfique. Être sélectionné c'est bien, avoir un prix c'est encore mieux.
Samedi vous serez face à votre public lors d'une rencontre. Vous appréciez ces moments ?
Je préfère ce genre de rencontre à la promotion d'un film qui va sortir. J'aime écouter les gens, avoir leur ressenti, c'est très intéressant à entendre. Car une rencontre avec une œuvre c'est une aventure individuelle.
Le cinéma est en pleine crise après le covid et l'arrivée des plateformes de streaming. Restez-vous confiant pour l'avenir de cette forme d'expression artistique ?
Le cinéma est une formidable invention qui inscrit un mouvement dans le temps. Peut-être qu'il va évoluer vers une forme un peu différente. Mais depuis toujours les humains aiment se réunir pour écouter des histoires. Cela se faisait avant le cinéma et cela se fera sans doute encore à l'avenir. Ce qu'il faut surtout c'est préserver la sortie des films en salles. La chronologie des médias est sans doute à revoir tout en privilégiant la sortie en salles. Mais il ne faut pas sataniser les plateformes. Il faut discuter, instaurer un rapport de force et faire attention.
La quatrième aventure en solo du dieu viking offre un cocktail détonnant d’action et d’humour.
Si certains super-héros ont une personnalité qui se prête à l’introspection et au doute, ce n’est pas du tout le cas de Thor. Ce dieu viking, blond, musclé et un poil prétentieux, a une très haute opinion de lui. Il a des muscles et un corps d’athlète mais un mental de gamin de 5 ans et la jugeote d’une limace sous anxiolytiques. Chris Hemsworth dans le rôle titre semble beaucoup s’amuser à pousser les curseurs de l’autodérision. Résultat le film de Taika Waititi est composé à 50 % de scènes comiques, un bon quart de combats et d’action, un dernier quart de romance. Un déséquilibre savant donnant à Thor - Love and Thunder un attrait supplémentaire dans la galaxie Marvel.
Thor, légèrement déprimé, répond toujours présent quand il faut casser du méchant. Or, un grand méchant vient de faire son apparition dans l’univers des Dieux. Gorr (Christian Bale), armé d’une épée magique, décapite les divinités comme d’autres grillent les merguez au barbecue du camping. Gorr, pour provoquer le dieu viking, kidnappe tous les enfants du village d’Asgard. Pour tenter de les libérer, Thor va demander de l’aide au plus grand des dieux : Zeus. Ce passage du film est le plus hilarant. Car Zeus, interprété par un Russell Crowe très à l’aise dans la comédie, est un hédoniste bedonnant, en jupette, maniant son éclair comme une majorette son bâton. Un Zeus très égoïste, refusant de rater la prochaine orgie pour aller trivialement se battre.
La trahison de Mjöllnir
Thor recevra finalement un renfort de poids dans sa mission : son ancienne petite amie Jane Foster (Natalie Portman). Simple humaine, cette scientifique souffre d’un cancer. Après une chimio sans effet, elle se rend à Asgard et voit le marteau de Thor, Mjöllnir, se recomposer et obéir à la jeune femme. Quand Thor découvre Jade, protégée par un costume en tout point identique au sien, brandissant le marteau qui a fait toute sa gloire, il pique carrément une crise de jalousie. Mais qui n’est rien à côté de la scène colérique de la nouvelle arme du dieu viking... Telle une métaphore des Américains de base qui parfois aiment plus leur arme que leur conjoint...
Le film de deux heures redevient sérieux dès que Gorr intervient. Saluons au passage la très sérieuse composition de Christian Bale qui ajoute une corde supplémentaire à son arc de comédien virtuose.
Olivier Baroux, réalisateur de Menteur, a sans doute beaucoup menti dans son existence. C’est presque un exercice imposé dans le milieu du cinéma. Il faut embellir, donner du relief, saupoudrer d’anecdotes pas forcément exactes à 100 % pour réussir à se faire remarquer. Il avait donc beaucoup à dire sur ce péché capital, sans doute le plus pardonné par la société (avec l’adultère, mais pour d’autres raisons).
Adaptée d’un film québécois, cette comédie trépidante tourne autour de Jérôme (Tarek Boudali), cadre dans un chantier naval de la Côte d’Azur, menteur invétéré depuis l’âge de 9 ans. Ce beau gosse qui aurait tout pour réussir sans en rajouter, ne peut s’empêcher de travestir la réalité. En priorité pour excuser ses retards au boulot : dégât des eaux, pneu crevé… ses excuses s’accumulent au grand désespoir de sa famille, notamment de son frère Thibault (Artus).
Une mythomanie maladive qui est connue de tous, jamais acceptée par le principal intéressé. Quand, par une complexe opération religieuse qui débute par une vue aérienne splendide de l’abbaye de Saint-Martin du Canigou, site religieux des Pyrénées-Orientales, tous les mensonges d’Antoine deviennent réalité. Il se retrouve donc sélectionné pour aller dans l’espace, son appartement est submergé par une suite d’eau, il n’a plus de meubles (tous donnés à Emmaüs par charité) ou, plus grave, la femme de son frère est amoureuse de lui et le voisin est un serial-killer. Se greffe sur ce florilège de gags la négociation d’un contrat de maintenance de yacht de luxe avec des Russes peu accommodants et la rencontre avec Chloé (Pauline Clément), charmante interprète dont il tombe amoureux.
Tarek Boudali, pour la première fois sans sa bande, maîtrise parfaitement son sujet, aidé par deux jeunes comiques français en devenir : Artus, future star au potentiel sans cesse grandissant et Bertrand Usclat, créateur de la série courte Brute, parfait dans un petit rôle d’assistant dépassé par sa tache.
"Menteur", un film français d’Olivier Baroux avec Tarek Boudali, Artus, Pauline Clément.