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dimanche 20 avril 2025

BD - Les futurs angoissants de Koren Shadmi


L'évolution actuelle de la société vous inquiète ? Il risque pourtant y avoir pire. Comme dans les romans graphiques de Koren Shadmi parus récemment chez Marabulles. Un titre déjà connu, "Le voyageur" et un plus récent, "La passe visage". Des thématiques inquiétantes et assez angoissantes sur la fin du monde ou la prépondérance de la technologie dans nos existences d'humains si imparfaits. 


Dans "Le voyageur" on suit le périple d'un homme dans l'Amérique du futur. Il fait de l'auto-stop, semble chercher quelque chose, un but, une finalité. Il se lie avec plusieurs conducteurs. Se désespère de leur peu d'intelligence. Parfois il fait des mauvaises rencontres. Y laisse la vie. Enfin reste simplement mort quelques minutes. Car ce voyageur est immortel. Le but du voyage risque de nous faire cauchemarder...

L'autre album de Koren Shadmi disponible dans les librairies est très récent. "La passe visage" est une jeune comédienne. Rose court les cachets. Sans grand succès.

Alors elle accepte des boulots alimentaires. Elle se glisse dans différentes personnalités à la demande de clients qui veulent des véritables rencontres. De l'improvisation facilitée par son aspect physique. Car Rose a subi une intervention médicale qui lui permet de modifier les traits de son visage. A partir d'une simple photo, elle peut devenir sa cible. Épouse partie, fille morte trop jeune, mère irremplaçable : elle dîne avec ses clients, voire passe une soirée avec eux. Mais ce petit jeu de caméléon a l'inconvénient de chambouler la psyché de Rose qui ne sait plus trop qui elle est. A-t-elle même une propre personnalité ? 

Une réflexion fine et intelligente sur notre côté unique par un auteur à découvrir. Le tout dessiné dans un style très ligne claire, avec décors futuristes, ville dantesque et solitude imposée.   

"Le voyageur", "La passe visage", Koren Shadmi, Marabulles, 176 et 192 pages, 25 € chaque volume

mercredi 26 février 2025

BD – Journaliste infiltré et chocolat

 

Après le concept de reportage dessiné (un reportage sous forme de bande dessinée), place à la BD... sur un reportage. Pour inaugurer la formule, Antoine Dreyfus, journaliste indépendant raconte comment il a tenté d'obtenir une interview de Kim Jong Un, président à vie de la Corée du Nord. Il s'est fait passer pour un industriel désirant investir dans le domaine du chocolat. Un album assez rocambolesque tant ce pays, paradis des paranoïaques, empêche quiconque d'avoir une attitude saine et véridique.

Il est beaucoup question de visa au début du récit dessiné par Fanny Briant. Antoine a raté une interview exclusive car il a oublié de demander ce fameux visa, essentiel quand on a la prétention d'aller dans une dictature (la Syrie en l'occurrence). Pour se rattraper auprès de ses chefs (il travaille à l'époque pour un grand hebdomadaire français), il tente de décrocher une entrevue avec un autre dictateur, Kim Jong Un, président de la très fermée Corée du Nord. Cette fois il demande bien un visa. Immédiatement refusé : pas un seul journaliste occidental ne peut franchir la frontière ! 

Il a alors l'idée de se faire passer pour un investisseur et d'infiltrer un voyage d'affaires. Il devient donc spécialiste de la fabrication du chocolat, expert en tablettes après un stage intensif dans l'entreprise Cémoi. Pour rejoindre PyongYang, il passe par l'intermédiaire du Catalan Alejandro Cao de Benos, seul Européen dans les petits papiers du dictateur.

Avec une collègue qui connaît un peu le pays, Antoine va raconter cette semaine passée dans une ville déserte, à rencontrer des hommes froids et suspicieux, incapables de s'engager, sans croiser la population, surveillés en permanence, avec la crainte perpétuelle de se faire démasquer. Si vous n'avez qu'une notion vague de la paranoïa, lisez cette BD, vous comprendrez mieux. L'expérience ultime étant de se rendre en Corée du Nord. Mais là, c'est à vos risques et périls. Antoine Dreyfus en est le vivant témoignage.

« PyongYang parano », Marabulles, 128 pages, 23,95 €

lundi 9 octobre 2023

BD - L'Afrique progressiste (presque) exemplaire de Thomas Sankara


Si l’extrême gauche est encore loin du pouvoir en France, cela n’a pas été le cas en Haute Volta quand le jeune capitaine Thomas Sankara a pris le pouvoir en 1983. Un militaire radicalement différent comparé aux dizaines de putschistes qui régulièrement se bombardent président dans les anciennes colonies françaises ou britanniques.

Le parcours de cet homme, un « rebelle visionnaire » toujours vénéré par une partie de l’Afrique et de nombreux partis progressistes ailleurs dans le monde, est raconté par Pierre Lepidi, journaliste au Monde et Françoise-Marie Santucci, elle aussi journaliste passée par Elle et Libération.

Pour illustrer ce roman graphique, ils ont fait appel à Pat Masioni, dessinateur congolais, seul illustrateur africain qui a signé des comics américains. Thomas Sankara, il en reste une trace immense à Ivry, en région parisienne, une fresque géante qui popularise le visage éternellement juvénile de cet homme humble, mort tragiquement après la trahison de son meilleur ami, Blaise Compaoré.

Le lecteur découvre le parcours de Sankara avec les yeux de Léa, écolière métisse et contemporaine d’une Française et d’un Burkinabé. En préparant un exposé sur la politique très en avance mise en place par Sankara une fois au pouvoir, elle apprend que le capitaine était féministe avant la vague #MeToo, écologiste avant les Verts (il a lancé un vaste plan de reforestation du pays) et militait pour l’annulation de la dette, boulet accroché aux jeunes démocraties africaines par les anciens colons.

Un idéaliste qui se déplaçait à bicyclette, fier d’être moins payé en tant que président que sa femme, simple fonctionnaire. Une rigidité fatale : la classe moyenne n’a pas supporté de perdre ses petits privilèges.

Une biographie exemplaire car elle n’occulte pas le côté pervers de la révolution burkinabé, ce manque de nuance dans les réformes qui a provoqué la perte de ce visionnaire dont la pensée mériterait d’être plus étudiée, en Afrique comme dans les pays colonisateurs.

 « Thomas Sankara, rebelle visionnaire », Marabulles, 140 pages, 23,95 €

vendredi 29 juillet 2022

BD - Secours imaginaire


Ana, étudiante, souffre de crises d’éco-anxiété. Une maladie très récente. La jeune fille panique quand elle constate que l’Humanité court à sa perte en maltraitant la planète. Ainsi, en pleine séance chez sa psy, elle constate que la praticienne, qui pourtant lui est d’une grande aide, utilise une cafetière à dosette en aluminium. Cela suffit pour mettre Ana en rage. Depuis son plus jeune âge, elle s’est créé un ami imaginaire.

Un protée, appelé aussi olm, salamandre des grottes. Cette bestiole blanchâtre, vit avec elle dans sa chambre en cité universitaire. C’est presque son seul interlocuteur. Il prend une forme humanoïde, interagit avec elle mais reste invisible du reste du monde. Ana est-elle folle ? Assurément pas quand on comprend pourquoi elle a dû inventer cet ami qui lui aussi est d’un grand secours dans son quotidien.

Écrit par Pog, dessiné par Séverine Lefebvre, L’ami colocataire, roman graphique composé de courts chapitres, va crescendo dans le bizarre. Pour finalement donner la possibilité à Ana de vivre plus en harmonie dans ce monde qu’elle redoute.

Jusqu’à pouvoir vivre sans son colocataire imaginaire. Cet album inclassable est une superbe leçon de vie.

« L’ami colocataire », Marabulles, 20,95 €

vendredi 11 février 2022

BD - Fred Neidhardt a des réminiscences d'Alger


Roman graphique historique avec expérience personnelle et bouts de vie familiale dans un style d’autofiction, ce Alger-retour de Fred Neidhardt devrait parler à tous les pieds-noirs installés dans la région, encore plus leurs descendants qui n’ont qu’une idée très partielle de cette Algérie quittée dans la précipitation.  « La valise ou le cercueil ! » répète régulièrement Jean-Pierre, le père de Daniel le narrateur. Jean-Pierre était encore adolescent quand il a embarqué sur le paquebot Ville de Marseille avec toute sa famille. Ils se sont reconstruits, plein d’aigreur, du côté de Montpellier

En 2014, Daniel a décidé de voir par lui-même ce qu’est devenue cette ville d’Alger racontée par son père et uniquement vue à travers des clichés en noir et blanc ramenés dans cette fameuse valise. C’est donc simplement avec un sac à dos et quelques adresses, qu’il va plonger dans la réalité algérienne de ces dernières années. Il aurait voulu faire le voyage avec son père, mais ce dernier refuse catégoriquement de remettre les pieds dans ce pays. 

Dessin plus réaliste

Sans guide, il tente de retrouver l’adresse de l’appartement familial et quand il est sûr de l’avoir localisé, va frapper à la porte. Mahmoud, un professeur de français à la retraite ouvre et va lui offrir thé et hospitalité. Entre le jeune fils de rapatrié et le vieil Algérien qui a récupéré l’appartement quelques semaines après le départ des Européens, une jolie complicité va s’instaurer. Cela permet à Daniel/Fred de raconter avec nuances les différentes composantes de l’Algérie actuelle. Il va croiser des jeunes qui tentent de s’émanciper, des fidèles du régime qui continuent à honorer les martyrs de l’Indépendance et puis d’autres, qui fantasment la France ou sont de plus en plus religieux. Sans savoir exactement ce qu’il cherche, Daniel va en partie retrouver ses racines et même réussir à convaincre son père à faire lui aussi ce retour vers Alger. 


Après avoir raconté l’arrivée de Pieds-Noirs en France (Les Pieds-Noirs à la mer, réédité avec une préface de Joann Sfar), Fred Neidhardt poursuit sa quête pour comprendre d’où il vient. Plus connu pour ses séries comiques, cet habitant de Montpellier a changé de style pour cet album. Un trait plus réaliste permet au lecteur d’avoir l’impression d’être dans cette ville, si vivante de nos jours, si marquée par un passé de mort et de violence. Une évolution graphique qui permet de plus d’insérer dans les planches des croquis de bâtiments visiblement faits sur place dans un carnet qui revêt une grande importance dans la trame du récit.  

« Alger-retour » de Fred Neidhardt, Mara-Bulles, 16,90 €

lundi 20 juillet 2020

BD - Le guide des vacances ratées

Si vous êtes en vacances dans la région avec des amis et que le séjour ne se déroule pas exactement comme vous l’aviez rêvé, précipitez-vous sur ce petit livre de dessins humoristiques signé Astrid Cornet. Non seulement vous allez rire, mais en plus cela vous permettra de relativiser car les situations décrites par la dessinatrice sont certainement plus gratinées que les quelques petites contrariétés de votre quotidien. 

On apprend ainsi que dans une bande, il y a toujours un ami radin qui pinaille sur le moindre centime, une instagrammeuse qui passe son temps à faire des grimaces sur les selfies qu’elle poste au rythme d’un toutes les heures ou, la pire, la « fouteuse de merde », toujours à l’affût pour faire exploser le couples, culpabiliser les introvertis et enfoncer les dépressifs. 

Avec elles, les vacances sont obligatoirement ratées. Astrid Cornet vous aura prévenu.


« Vacances entre amis », Marabulles, 10 €

samedi 6 juin 2020

Humour – La vraie vie selon Louison

Durant deux mois, bloqués entre les quatre murs de son domicile, l’évasion sur les réseaux sociaux a parfois sauvé quelques âmes perdues. Louison, dessinatrice de presse notamment dans la revue Gazia, avant le confinement, a sorti ce petit livre hilarant pour dénoncer nos travers numériques. 

Elle a imaginé comment des clichés frisant la perfection, notamment sur Instagram, se transformaient en bouse risible pour l’abonnée de base. Quand une certaine @fam-fatal publie des photos de ses talons aiguilles à semelles rouges, Louison dans la vraie vie dessine des pieds quelconques dans de pratiques mais peu seyantes sandales ouvertes allemandes. 

On apprécie particulièrement les passages avec un nouveau-né, la réalité étant toujours très éloignée des scènes si mignonnes que l’on prétend vivre entre couches, biberons, pleurs et vomis… 

"Pile ou Fake", Louison, Marabulles