dimanche 9 avril 2023

Thriller - « Les oubliés de Marralee », mystères dans les vignes australiennes

Le policier australien imaginé par Jane Harper, Aaron Falk, enquête officieusement un an après la disparition d’une jeune mère en pleine fête du vin de la petite ville de Marralee.

Remarquablement construit en incessants allers-retours entre le jour du drame et son premier anniversaire, ce polar de Jane Harper est totalement addictif. Dès le prologue, de quelques pages, le décor est planté et le suspense intense.

Le premier jour de la fête du vin de Marralee, des centaines de visiteurs viennent déguster les produits locaux. Le soir, alors que les portes se ferment, on découvre dans un landau un nouveau-né. La mère, Kim, a disparu. Selon toute vraisemblance, dépressive, elle serait allée se suicider dans le lac artificiel à proximité, une grande retenue d’eau destinée à l’irrigation des vignobles. Mais jamais son corps n’a été retrouvé.

Un an plus tard, Aaron Falk, policier fédéral à Melbourne, arrive à Marralee. Invité au baptême du fils de Greg Raco, un ancien collègue, en tant que parrain. Falk était déjà là l’année précédente. Mais le baptême avait été annulé car Kim, la disparue, était l’ancienne femme de Charlie, frère de Greg. C’est donc dans une histoire familiale complexe que Falk va se trouver mêlé. Ses réflexes professionnels vont prendre le dessus et sans le vouloir, il va tenter de trouver des réponses à ce mystère.

Un autre mort, des années auparavant 

En arpentant les allées de la fête, il se remémore tout ce qu’il a vu un an auparavant. Tentant de se souvenir de ce détail qui pourrait enfin de lever le mystère. Car Zara, la première fille de Kim, devenue adolescente, veut relancer l’enquête. Elle culpabilise car le jour de la disparition elle s’est disputée avec sa mère. La dernière fois qu’elle lui a parlé c’est au téléphone. Une conversation tendue et abrégée. « Falk aurait mis sa main à couper qu’elle revivait souvent cette conversation. La fin au moins. Quand elle s’était penchée en avant, main tendue vers l’écran. L’unique tape du bout de l’index, le frôlement de la chair contre le verre pour couper les derniers mots qu’elle entendrait jamais de la bouche de sa mère. Zara donnait l’impression de ressentir ce geste jusque dans son sommeil. » Falk va reprendre la chronologie de la soirée, tenter de trouver de nouveaux témoins, interroger tous ceux qui étaient présents ce soir-là.

Contre l’avis du shérif local, il discute avec le mari, Rohan, une amie de Kim, médecin, et Gemma, la responsable de la fête. Gemma qu’il a déjà rencontré à Melbourne quelques mois auparavant. Elle aussi a perdu un proche près de la retenue d’eau : son mari a été renversé cinq années auparavant par un chauffard qui n’a jamais été identifié. À la différence que son corps a été retrouvé contrairement à celui de Kim.

Deux morts presque au même endroit, par ailleurs lieu de fête des jeunes du village, notamment durant la fête du vin : autant de mystères qui vont donner du fil à retordre à l’enquêteur imaginé par Jane Harper. Cette dernière, en apportant au fil des chapitres des précisions et témoignages transforme le roman en toile impressionniste qui prend tournure au gré des coups de pinceau et au fil des pages.

« Les oubliés de Marralee » de Jane Harper, Calmann Lévy, 22,90 € 

Cinéma - Retour brillant pour “Les trois mousquetaires”


D’Artagnan est au centre du premier volet de la nouvelle adaptation des Trois Mousquetaires au cinéma. Un retour gagnant des héros d’Alexandre Dumas dans ce film de Martin Bourboulon avec François Civil dans le rôle titre.

Forcément, pas beaucoup de surprise au niveau du scénario du film de Martin Bourboulon. L’immense majorité des Français connaît au moins les bases de l’intrigue des Trois Mousquetaires, chef-d’œuvre d’Alexandre Dumas, déjà adapté au cinéma, à la télévision ou en bande dessinée une bonne centaine de fois. Compliqué donc d’apporter du nouveau dans cette histoire d’amitié virile et de combats incessants.

Mais c’est aussi le meilleur atout car ce récit est d’une force et d’une puissance à l’épreuve du temps. Rapidement on se laisse prendre par les aventures du jeune d’Artagnan, on tremble avec la reine de France, on rit avec Porthos. Car ce film, la première partie d’un diptyque (rendez-vous le 13 décembre pour la fin de l’aventure), est brillant.


Distribution plus que crédible, décors somptueux, reconstitution de l’époque fidèle et surtout combats à l’épée qui n’ont rien à voir avec les jolies chorégraphies du temps de Jean Marais ou Gérard Philipe. Chaque affrontement des Mousquetaires contre les gardes du Cardinal est proposé en plan séquence. La caméra à l’épaule, le réalisateur propose quelques tours de force plongeant le spectateur au cœur même de la mêlée.

La bonne surprise du film est aussi dans son interprétation. En mixant jeunes comédiens prometteurs et stars plus connues, Martin Bourboulon a vu juste.

Trois femmes remarquables

François Civil a cette innocence et insouciance typique du jeune d’Artagnan arrivant tout sourire de sa Gascogne natale. Charmeur avec les dames, ne se laissant pas marcher sur les pieds par les Parisiens arrogants, il trouve sa place entre bon camarade et chef de bande. Vincent Cassel et Romain Duris (Athos et Aramis), apportent sagesse et profondeur avec des personnages plus complexes.

Pio Marmaï, en endossant les rondeurs de Porthos, devient tonitruant et jovial. Jouisseur aussi. Le prototype du bon vivant toujours prompt à profiter d’un plaisir immédiat. Louis Garrel, en roi Louis XIII, est à la limite de la caricature. Mais cela apporte encore plus de crédibilité à son personnage légèrement mégalomane.

Enfin côté héroïne, c’est le sans-faute. Eva Green est la très mystérieuse et vénéneuse Milady, Vicky Krieps prête sa fragilité à la reine partagée entre deux amours et surtout Lyna Khoudri surprend dans son rôle de Constance, jeune beauté courtisée par un d’Artagnan sous le charme. Le public aussi.

Film français de Martin Bourboulon avec François Civil, Vincent Cassel, Romain Duris, Pio Marmaï, Eva Green, Louis Garrel, Vicky Krieps, Lyna Khoudri.
 

samedi 8 avril 2023

Billet - Éloge de la procrastination

J’ai peut-être déjà parlé de la procrastination dans cette rubrique. Souvent je me suis dit qu’il fallait que j’archive et note tous les sujets abordés depuis plus de dix ans dans ces colonnes. Mais justement, ma procrastination m’a toujours fait repousser cette tâche ingrate. Devenu titanesque depuis.

Donc, mille excuses à ceux qui ont plus de mémoire que moi. Si je parle de nouveau de cette manie de remettre au lendemain ce que l’on aurait dû faire le jour même (voire il y a quelques années dans mon cas…) c’est que ce samedi 25 mars est la journée mondiale de la procrastination. Pas le 26, le 25 !

Une société qui propose de s’occuper de mes tâches administratives, me le rappelle en me glissant au passage « sept astuces majeures pour éviter de tout remettre au lendemain ». Vaillant à la tâche pour une fois, je les parcours et y découvre en réalité quelques raisons supplémentaires pour procrastiner de plus belle. Exemples. « Commencez par les tâches les plus faciles » : faire le minimum dans mon cas et reporter les gros chantiers.

« Évitez les distractions » : tiens, ça me fait me souvenir que je viens de m’abonner au Pass Warner et que je dois rattraper quelques séries d’anthologie comme The Leftlovers, The Wire ou True Blood.

« Trouver un partenaire de responsabilité » : l’évidence même. Cela fait des années que je ne m’occupe plus des papiers de la banque, impôts, assurances et autres administrations rébarbatives. En l’occurrence, mon partenaire de responsabilité répond aussi au nom d’« épouse ayant les pieds sur terre ».

Enfin, « lorsque vous avez terminé une tâche importante, accordez-vous une récompense » : Chouette, je viens de terminer le billet, je suis en week-end. Sacrée récompense !

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le samedi 25 mars 2023

vendredi 7 avril 2023

Biographie - Dominique Bona dans les pas de Joseph Kessel et Maurice Druon, « Les Partisans »

 Auteurs du Chant des Partisans, l’hymne des Résistants, Joseph Kessel et Maurice Druon sont au centre de cette biographie parue chez Gallimard et signée Dominique Bona.

S’ils ne sont que deux dans le titre et la photo illustrant la couverture du nouveau livre de Dominique Bona, c’est en réalité l’épopée d’un trio qui est racontée dans cette somme de plus de 520 pages. Car en plus de Joseph Kessel et de son neveu Maurice Druon, l’académicienne met la lumière sur le rôle de Germaine Sablon, chanteuse, maîtresse de Kessel, combattante de la France Libre et première interprète de cette chanson devenue symbole national.

Originaire des Pyrénées-Orientales, Dominique Bona n’en oublie pas son pays catalan et y trouve le début très épique de cette triple biographie. Fin décembre 1942, ils sont trois à se rendre à Perpignan pour rencontrer un passeur. Un certain José, Catalan du cru chargé de conduire en Espagne ces Français désireux de rejoindre le général De Gaulle à Londres. De nuit, dans le froid, ils vont passer le col au niveau du Perthus, parvenant à éviter les patrouilles allemandes.

Un long et dur périple très inhabituel pour ces trois habitués au confort et au luxe. Joseph Kessel est un journaliste et écrivain reconnu. Il a longtemps pu continuer à travailler dans la France occupée par l’armée allemande malgré ses origines juives. Mais le durcissement du régime de Vichy l’oblige à faire un choix. Il décide de quitter ce pays qu’il a déjà servi lors de la première guerre mondiale. Direction Londres. Il emmène Maurice Druon, son neveu, fils caché de son défunt petit frère. Pour compléter l’attelage, Germaine Sablon. Une des nombreuses maîtresses de Kessel, chanteuse et comédienne célèbre, au franc-parler redoutable. Une fois à Londres, ils se mettent au service de la France Libre.

« Un feuillet dans l’Histoire » 

C’est dans ce cadre que Kessel et Druon, en une journée (le 30 mai, jour de la sainte Jeanne d’Arc), écrivent le texte du Chant des Partisans. « Il faut à la Résistance un symbole fort et un repère unificateur. Les maquis de France en ont besoin. […] Kessel a le don de parler à tous, sa prose est simple et vivante. » Il sera aidé par Maurice Druon pour la mise en vers, la musique sera tirée d’une chanson russe et c’est Germaine Sablon qui l’enregistrera la première, le 31 mai aux studios d’Ealing. Les deux écrivains, l’oncle et le neveu, ont conscience de l’importance de cette chanson, « C’est peut-être tout ce qui restera de nous » dira Kessel à Druon. Lequel réplique, plus solennel, « Nous venons de glisser un feuillet dans l’Histoire. »

Si la création du Chant des Partisans est au centre de cette biographie, Dominique Bona n’occulte pas le reste de la carrière du trio. On redécouvre un grand écrivain en la personne de Joseph Kessel, homme fougueux, habitué aux esclandres, capable de menacer de jeter sa maîtresse par la fenêtre, gaulliste convaincu.

Maurice Druon, après un Goncourt à 30 ans, est devenu célèbre avec sa saga des Rois maudits. Devenu ministre des Affaires culturelles, il a par la suite marqué l’Académie française, même « s’il échoue à faire élire le chanteur Charles Trenet. »

Mais la plus belle découverte de ces Partisans reste le parcours de Germaine Sablon. Une femme forte, capable de résister à De Gaulle, libre et indépendante, follement amoureuse de Kessel et de son pays.

« Les partisans, Kessel et Druon une histoire de famille » de Dominique Bona, Gallimard, 24 €

jeudi 6 avril 2023

DVD et blu-ray - « Le torrent », film sur un enchaînement de mensonges

Persuadé qu’on va l’accuser du meurtre de sa femme, un mari s’enferre dans le mensonge entraînant sa fille dans une spirale infernale.

Si l’écriture cinématographique d’Anne le Ny pour ce film penche vers le thriller et le polar, c’est en réalité un drame familial qui est proposé aux spectateurs. Un peu comme un roman de Simenon, avec enchaînement de mensonges et situation de plus en plus inextricable. Une étude sociale des rapports familiaux plus qu’une enquête policière sur un possible féminicide.

Le torrent se déroule dans les Vosges. Des montagnes sombres et oppressantes. La jeune Lison (Capucine Valmary) vient de réussir son permis de conduire. Elle fait sa valise et va rejoindre son père Alexandre (José Garcia) qui vit avec sa nouvelle épouse Juliette (Ophélia Kolb) dans un luxueux chalet de montagne. Mais dans cette famille un peu éclatée, la communication passe mal. Lison se retrouve transformée en nounou pour son jeune demi-frère pendant que le père et sa jeune femme vont au théâtre. Lison en profite pour fouiner et découvre sur une clé USB les preuves de l’infidélité de Juliette.

Des photos qui déclenchent une dispute, Juliette quitte la maison et un enchaînement malheureux fait qu’elle se tue accidentellement en tombant dans un ravin. Alexandre panique. Il est persuadé que les gendarmes vont l’accuser de meurtre. Il décide de mettre sa fille dans la confidence et met au point un scénario pour faire croire à un bête accident. Mais c’est sans compter avec la sagacité de l’enquêtrice en chef et les doutes du père de la victime (André Dussolier).

Si le scénario manque un peu de peps, de rebondissements et de surprise, le film vaut surtout par sa grande finesse dans la description des rapports ambigus dans une famille recomposée. Comment une fille va tout faire pour protéger son père.

Regrettons que cette réalisation sorte en vidéo chez M6 dans une version minimaliste. Juste le film, pas le moindre bonus pour aller plus loin. Dommage.

mercredi 5 avril 2023

Roman d’espionnage - « Alias Emma », presque James Bond


Le roman d’espionnage n’est pas mort. Au contraire, en Angleterre il revit avec le premier roman d’Ava Glass. Il a pour héroïne une espionne, signe des temps. Alias Emma raconte les débuts dans le MI6 britannique d’Emma Makepeace. Une jeune femme attendue au tournant car elle est la fille d’un grand agent. Un peu l’enfant de James Bond…

Sa mission se déroule à 100 à l’heure dans Londres, avec une ribambelle d’agents russes à ses trousses. Elle doit mettre à l’abri un médecin d’origine russe, fils d’une brillante chercheuse passée à l’Ouest. C’est rythmé, contemporain et comme dans un James Bond, le final se déroule à Paris dans un palace.

« Alias Emma » d’Ava Glass, Equinox Les Arènes, 22 €

mardi 4 avril 2023

BD - Beauté de la frontière

Parmi les nombreux romans graphiques parus en début d’année, Toute la beauté du monde de Thomas Azuélos sort du lot par son côté épuré du dessin et l’histoire, universelle, de la lutte entre la beauté et la guerre. 180 pages d’une rare intensité qui se déroulent entièrement à Cerbère dans les Pyrénées-Orientales, ville frontière si inspirante.

Peu de temps après la Retirada, alors que le trafic ferroviaire est toujours au point mort, la ville tente de survivre au chaos. Les « orangères », ces femmes dont le métier est de transborder les oranges, espèrent que le travail va revenir.

En attendant, elles doivent se contenter de vider des wagons remplis de fruits pourris. Parmi ces ouvrières, Montse. Belle, impertinente, libre et engagée, elle aide secrètement quelques Républicains réfugiés en France et persuadés que la défaite n’est pas définitive. Montse, la muse platonique de José de Villalobos, peintre officiel du Grand Hôtel.

Cet établissement de luxe, déserté depuis quelques années, est directement inspiré de l’Hôtel du Belvédère, paquebot immobile de la ville de Cerbère. L’auteur dessine ses balcons, façades et autres grandes salles de restauration ou de cinéma comme il est toujours actuellement : grandiose mais désert.

On croise aussi dans ce récit un exilé Catalan, excellent cuisinier et pêcheur occasionnel, un trio d’anarchistes et des espions russes. Ces derniers sont à la recherche de Walter Bermann, philosophe en fuite. Il a écrit un livre que Staline convoite. Le leader communiste est persuadé que ce texte lui permettra d’asseoir son pouvoir partout dans le monde. On reconnaît facilement Walter Benjamin dans le portrait de ce philosophe très amoindri par la maladie.

En croisant fiction et réalité historique, dans des lieux imaginaires ou existants, Thomas Azuélos parvient à convoquer dans les mêmes pages grande et petite histoire, récits amoureux et guerrier. Avec en permanence la volonté de montrer comment la beauté dans toutes ses formes (peinture, architecture, cuisine…) peut embellir la vie, la rendre supportable malgré son cortège de folie et de mort.
« Toute la beauté du monde » de Thomas Azuélos, Futuropolis, 25 €

lundi 3 avril 2023

BD - La Junk Food, manger pour se détruire

Phénomène rarement pris en compte dans les statistiques de santé, 5 à 10 % de la population pourrait être atteinte d’addiction à la nourriture. Une maladie nommée Junk Food qui toucherait 25 % des personnes obèses. Dans l’image populaire, les drogues se limiteraient au cannabis, cocaïne et autres produits de synthèse. On oublie parfois l’alcool ou le tabac. Toujours la nourriture. Pourtant les phénomènes de dépendance et de manque en cas de sevrage sont exactement les mêmes.

Deux jeunes auteurs, sensibles à ce problème, ont longuement enquêté, recueillant des témoignages de malades en voie de guérison et synthétisant le tout dans cette BD qui se lit facilement malgré la gravité du sujet. Émilie Gleason rend les choses plus simples avec son dessin très caricatural, moderne et psychédélique. Au scénario, Arthur Croque met en avant ses qualités journalistiques pour donner la parole et vulgariser.


Le fil rouge de l’histoire est la rencontre entre Zazou, jeune femme qui souffre d’anorexie boulimie et de Bambi, jolie motarde qui a résolu ce même problème en assistant à des réunions de Food Addicts, l’équivalent « bouffe » des alcooliques anonymes.

C’est en écoutant les autres puis en se confiant à des gens bienveillants que Zazou va prendre conscience de la difficulté d’arrêter ces comportements suicidaires. Car en plus d’isoler socialement (on refuse de manger en public, on reste cloîtré chez soi à s’empiffrer se coupant du monde réel), cette maladie est très dangereuse pour la santé, physique et mentale.

Parmi les composants qui rendent dépendants, le sucre et le gras. On apprend ainsi que les produits les plus addictifs sont, dans l’ordre, le chocolat, la crème glacée, les frites et la pizza. Un livre témoignage à recommander pour toute personne qui pense souffrir d’un TCA, trouble des conduites alimentaires.
« Junk Food » d’Émilie Gleason et Arthur Croque, Casterman, 21 €

dimanche 2 avril 2023

BD - Le Ferry entre le Nord et l’Angleterre

Autre histoire de rock (voir entrée précédente) dans Le Ferry. Encore des rêves de lycéens. Mais loin du Japon, plus près de l’Angleterre, terre promise de ces petits Français qui ne jurent que par le punk. Fin des années 70, l’apparition des Sex Pistols et des Clash transforme la vie de quatre potes de lycée. Voilà la musique qu’ils aiment, celle qu’ils ambitionnent de jouer devant des foules en délire. Un petit groupe, de grandes ambitions et puis le réel reprend le dessus. La routine, le quotidien, la vie sociale balaient le futur radieux.

Le scénario de Xavier Bétaucourt est habilement construit entre souvenirs et réunion du présent entre nostalgie et espoir. Des quatre membres du groupe, ils ne sont que trois à se retrouver à l’hôpital au chevet de Rose. Ils tentent de comprendre pourquoi Max, le bassiste n’est pas présent. Max parti quelques mois plus tôt pour l’Angleterre, bien décidé à vivre de sa musique malgré les abandons de ses amis. Max, le père de la petite fille de Rose qui vient de naître.

Une discussion animée entre soins (Rose a accouché par Césarienne), tétée et dégustation de cacahuètes avec du rock en fond sonore. Certains cherchent des excuses à Max, d’autres ne comprennent pas cette fuite. Et de refaire l’histoire en 100 pages dessinées par Thierry Bouüaert au dessin faussement sale mais très recherché, déjà vu dans Fluide Glacial et auteur complet du Style Catherine chez Bamboo.

Une superbe histoire d’amitiés au final, doublée d’une romance à la fin plus positive que les tubes punk de l’époque.
« Le ferry » de Xavier Bétaucourt et Thierry Bouüaert, Delcourt Mirages, 17,50 €

samedi 1 avril 2023

BD - Terukan Boys : du rock au braquage

Ils sont trois, ont trente ans et beaucoup de regret. Satoshi, Ryôhei et Kôta sont amis depuis le collège. Au lycée ils ont formé les Terukan Boys, un groupe de rock éphémère. Une fois devenus adultes, ils ont abandonné leurs rêves. L’un, devenu rapidement papa, a repris l’atelier de mécanique de son père, un autre est devenu gratte-papier dans une société d’assurances. Il n’y a que Kôta qui tente toujours de percer. Mais sans grand succès.

Comme chaque année ils se retrouvent pour une soirée festive et arrosée et font le point de leur existence. Ce n’est pas toujours très gai, chacun regrettant le temps insouciant où tout ce qui comptait c’était de répéter les morceaux qu’ils joueraient sur les scènes indépendantes de leur petite ville. Mais pour une fois, les Terukan Boys pensent enfin faire fortune. Pas en chantant, mais en braquant un ancien élève victime d’un chantage.

Cette histoire complète de 200 pages, a des airs de film de Tarantino. Avec des morceaux de Spielberg pour les retours en arrière, quand ils étaient lycéens. Imaginé par un trio d’amis qui signe Yû Nakahara, ce manga est avant tout une belle histoire d’espérance, de rédemption et de renaissance.
« Terukan boys » de Yû Nakahara, Doki Doki Bamboo, 7,50 €