Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Par Michel et Fabienne Litout
jeudi 2 avril 2020
#SérieTélé - Marguerites fanées sur Netflix
L’Espagne occupe une place de choix dans le monde des séries télé en Europe. La Casa de Papel a braqué les projecteurs sur une industrie pleine de bonnes surprises. Mais il n’y a pas que de l’exceptionnel de l’autre côté des Pyrénées. Parfois, c’est un peu moyen comme ce « Goût des marguerites » peu relevé dans le catalogue Netflix.
Une série policière provinciale comme la télé européenne aime à en produire comme des petits pains. Cette fois c’est en Galice que l’action nous conduit. Région verte mais peu télégénique. Une petite ville, considérée à juste titre par nombre de ses habitants comme un bled paumé. Mais tranquille. Quand Rosa, inspectrice à la brigade criminelle de la Guardia Civile arrive sur place, les policiers installés sont surpris et sur leurs gardes. Elle enquête sur la disparition de Marta, une jeune marginale. Elle travaille à la station-service, deale un peu et par moments se prostitue. Elle a disparu en plein après-midi. Rosa (María Mera), débutante, mène là sa première affaire. Ses collègues l’aident mollement, les connaissances de Marta encore moins. Comme s’ils avaient tous quelque chose à cacher. Et effectivement, ces citoyens exemplaires au-dessus de tout soupçon ont bien des cadavres dans leurs greniers. La série en 6 épisodes de 70 minutes, est d’une lenteur trop souvent exaspérante. Par chance, quelques rebondissements inattendus relancent l’intérêt en cours d’intrigue. On notera qu’en Galice, les femmes sont souvent considérées comme des moins que rien. La policière est moquée par ses collègues, les autres femmes sont soit femmes au foyer très jalouses, soit prostituées dociles. A ce niveau, l’Espagne a effectivement beaucoup à apprendre.
mercredi 1 avril 2020
#SérieTélé - Laissez-vous entraîner sur les falaises de « Broadchurch »
Elles ne sont pas légion les séries qui marquent le genre. Quelques Américaines (comme Lost ou True Detective) et chez les Anglais, Broadchurch, proposée sur Amazon Prime (mais que la première saison). Pourtant à la base, la série a tout du téléfilm régionaliste à la France 3. Le cadre : une petite station touristique du Dorset. L’intrigue : un enfant est retrouvé mort sur la plage, étranglé. Les enquêteurs : une mère de famille tout le temps joviale, originaire de la ville et son nouveau chef en provenance de Londres, mis au placard, dépressif, taciturne et toujours de mauvais poil. Bizarrement, le tout fait une série d’exception qui va vous hanter longuement. Essentiellement la saison 1, qui a une force émotionnelle déterminante.
Ce qui fonctionne le plus dans Broadchurch, c’est la valse des suspects. Chaque habitant de la petite ville (journaliste, commerçant, père de l’enfant, pasteur, vendeur de journaux…) est à un moment sur la liste des suspects. Et le spectateur se perd en conjectures, incapable comme dans les meilleurs Agatha Christie de savoir qui est le meurtrier.
L’autre raison de regarder Broadchurch avec gourmandise consiste à comparer les prestations des deux acteurs principaux. David Tennant (ancien Dr Who) et Olivia Colman (la reine dans The Crown) forment un duo de policiers comme rarement on en a vu. L’une naïve mais déterminée, toujours dans l’empathie et la gentillesse ; l’autre déterminé, capable de tout jouer sur une intuition, méprisant pour ses hommes, détestant l’endroit.
Broadchurch est un petit chef-d’œuvre qu’il faut regarder une seconde fois quand on connaît le nom du coupable pour tenter de retrouver les indices placés par les scénaristes.
BD - Calamity Jane et Julie Doohan, deux Américaines déterminées
Pas facile d’être une femme dans l’Amérique d’aujourd’hui. Mais que dire de leurs ancêtres, au temps de la conquête de l’Ouest ou de la prohibition ? Deux albums nous en apprennent un peu plus sur les méthodes de survie de ces femmes et héroïnes déterminées.
Martha Cannary a 16 ans quand elle découvre la rudesse des hommes. Femme de ménage dans une maison close où les ouvriers qui construisent la ligne de chemin de fer qui va traverser le pays d’Est en Ouest viennent dépenser leur paye, elle est sous la protection de Buck Calahan, le videur de l’établissement.
Mais Martha est trop belle et certains clients vont avoir des vues sur elle. Voilà comment Martha va se durcir, se transformer pour devenir celle que tout le monde redoute, la fameuse Calamity Jane. La première partie de la vie de cette légende de l’Ouest est racontée par Thierry Gloris et dessinée par Jacques Lamontagne. Le dessinateur canadien excelle dans ces scènes de western où il est pourtant difficile de sortir du lot. Lui, par son réalisme absolu, se hisse immédiatement au niveau des plus grands, de Giraud à Meyer.
Julie Doohan aussi a du caractère à revendre. Toujours aux USA, mais au temps de la prohibition, cette étudiante en chimie va devoir réviser ses plans. Son père, fermier irlandais, vient de se faire assassiner.
Il est vrai qu’il fournissait à la région un excellent alcool tiré de ses récoltes. Alcool qui faisait concurrence à la mafia italienne. Une guerre de gang qui va s’amplifier quand Julie décide de reprendre la production de son regretté père. Cailleteau signe ce scénario qui met en valeur une femme forte et déterminée. Au dessin, Luc Brahy semble avoir simplifié son trait, comme pour se rapprocher du style de Vatine, le complice de longue date de… Cailleteau.
« Wild West » (tome 1) n Dupuis, 14,50 €
« Julie Doohan » (tome 1), Delcourt, 14,50 €
Martha Cannary a 16 ans quand elle découvre la rudesse des hommes. Femme de ménage dans une maison close où les ouvriers qui construisent la ligne de chemin de fer qui va traverser le pays d’Est en Ouest viennent dépenser leur paye, elle est sous la protection de Buck Calahan, le videur de l’établissement.
Mais Martha est trop belle et certains clients vont avoir des vues sur elle. Voilà comment Martha va se durcir, se transformer pour devenir celle que tout le monde redoute, la fameuse Calamity Jane. La première partie de la vie de cette légende de l’Ouest est racontée par Thierry Gloris et dessinée par Jacques Lamontagne. Le dessinateur canadien excelle dans ces scènes de western où il est pourtant difficile de sortir du lot. Lui, par son réalisme absolu, se hisse immédiatement au niveau des plus grands, de Giraud à Meyer.
Julie Doohan aussi a du caractère à revendre. Toujours aux USA, mais au temps de la prohibition, cette étudiante en chimie va devoir réviser ses plans. Son père, fermier irlandais, vient de se faire assassiner.
Il est vrai qu’il fournissait à la région un excellent alcool tiré de ses récoltes. Alcool qui faisait concurrence à la mafia italienne. Une guerre de gang qui va s’amplifier quand Julie décide de reprendre la production de son regretté père. Cailleteau signe ce scénario qui met en valeur une femme forte et déterminée. Au dessin, Luc Brahy semble avoir simplifié son trait, comme pour se rapprocher du style de Vatine, le complice de longue date de… Cailleteau.
« Wild West » (tome 1) n Dupuis, 14,50 €
« Julie Doohan » (tome 1), Delcourt, 14,50 €
lundi 30 mars 2020
Série Télé - Chambre avec vue sur Amazon Prime
Datant de 2006, The lost Room est une mini-série fantastico policière assez innovante pour l’époque. Diffusée en trois parties aux USA, la version française se retrouve découpée en 6 épisodes de 45 minutes. Cela ne nuit pas au rythme de l’ensemble car The Lost Room est visible d’un bloc sur Amazon Prime. Imaginée par Christopher Leone et Laura Harkcom, cette histoire dense débute comme un banal polar. Joe Miller (Peter Krause) est un flic de la criminelle. Il se rend dans une boutique de prêteur sur gages. Le gérant a été retrouvé carbonisé. Il a tenté de vendre une mystérieuse clé à un client acariâtre. Une clé qui va finalement tomber en possession de Joe qui va découvrir qu’elle est magique. Elle permet de transformer n’importe quelle porte en entrée sur une chambre d’un motel perdu dans le désert. Et quand on en ressort, on se retrouve où on le désire. Au bord d’une plage, dans un stade ou au commissariat. Le héros, très cartésien, doute des pouvoirs de la clé jusqu’à ce que sa fille disparaisse dans la chambre. Il va alors tout faire pour la retrouver dans ces méandres du temps et de l’espace.
Fiction unitaire, The Lost Room bénéficie d’une distribution très relevée. Peter Krause sortait de 5 saisons de Six feet under et Julia Margulies d’une longue période dans Urgences. Mais le plus intéressant reste l’interprète d’Anna, la petite fille du héros. Difficile de reconnaître au premier abord Elle Fanning. Encore fillette, elle avait pourtant des années de métier derrière elle. Et elle ne s’est pas contentée de petits rôles dans les séries puisqu’elle est devenue depuis une star du cinéma américain, notamment grâce à Maléfique et dans un tout autre genre The Neon Demon.
Exercice de rattrapage filmique en temps de confinement
Déjà plus de deux semaines sans cinéma. Deux semaines que les salles obscures sont désertes. Plus la moindre nouveauté. Normalement, si le fichu virus n’avait pas déferlé sur l’Europe, ce week-end on aurait pu aller voir « La Daronne », film de Jean-Paul Salomé avec Isabelle Huppert. J’ai eu la chance de le voir avant sa non-sortie en prévision d’une rencontre avec le réalisateur et l’interprète principale. Rencontre qui a été annulée de même que la sortie du film, bien avant la décision de confinement général. Espérons que cette excellente adaptation du roman d’Hannelore Cayre paru chez Métailié trouvera son public malgré une sortie décalée et toujours très hypothétique.Pas de film cette semaine, mais ce n’était pas le cas les précédentes années. Et dans le lot, il y a certainement des œuvres que vous avez ratées au moment de leur sortie. Alors petit exercice de rattrapage dans le temps avec les films présentés en tête de la page cinéma de l’Indépendant.
En 2019, fin mars, sortait Le dernier amour de Benoît Jacquot. L’histoire de Casanova (Vincent Lindon) qui pour une fois n’arrivait pas à conclure la Charpillon (Stacy Martin) se refusant à lui. Vous pouvez louer le film pour 4,99 € sur UniversCiné ou CanalVOD.
En 2018, La prière de Cédric Khan permettait à un jeune acteur d’exploser en ce mois de mars. Anthony Bajon, avant même la sortie du film sur cette rédemption d’un petit loubard dans une communauté religieuse, venait de remporter l’ours d’argent de la meilleure interprétation masculine à la Berlinade. (location en streaming pour 3,99 € sur UniversCiné).
2017 : mars est placé sous le signe de la naissance et des Catherine avec Sage-femme de Martin Provost. Catherine Deneuve et Catherine Frot sont en dettes dans cette belle histoire de maternité, de famille et de femmes. (location pour 3,99 € sur UniversCiné)
Qui est Rosalie Blum ? Cette interrogation, le critique ciné de l’époque se la pose en mars 2016. Ce film de Julien Rappeneau, poétique et hilarant, met en vedette Noémie Lvovsky et aussi Sara Giraudeau et Alice Isaaz. (2,99 sur UniversCiné)
Mars 2015, Anaïs Demoustier tape dans l’œil du critique cinéma de l’Indépendant qui lui consacre un petit portrait intitulé « Une frimousse craquante ». La belle est au centre d’une histoire d’amour compliquée racontée dans A trois on y va de Jérôme Bonell. (Retrouvez la belle Anaïs en streaming sur MyTF1VOD pour 3,99 €).
Mars 2014 voit le succès d’un beau documentaire sur l’école. Mais n’importe laquelle. La cour de Babel de Julie Bertuccelli raconte une année scolaire dans une classe d’accueil destinée à recevoir les enfants étrangers qui ne maîtrisent pas le français. Pour 2,99 € vous pouvez réviser ce long-métrage sur UniversCiné.
Enfin en pleine fête de Pâques 2013, Guillaume Nicloux lance son film La Religieuse. Il y raconte la détermination d’une jeune femme à quitter les ordres où l’ont placé de force ses parents. Un film à revoir sur Arte Boutique pour 3,99 €. Ce retour dans le passé ne nous donne pas l’occasion de découvrir des nouveautés, mais au moins assouvi notre envie de films.
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Retour sur trois sorties de 1990, 1980 et 1970
Les films sortis depuis plus de 30 ans sont également disponibles sur les service de VOD.
En mars 1990, Depardieu dans Cyrano de Bergerac de Jean-Paul Rappeneau faisait sienne la célèbre réplique, « C’est un roc ! … c’est un pic ! … c’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ? … C’est une péninsule ! ». (2,99 € sur LaCinetek)
En mars 1980, un autre grand du cinéma est à l’affiche : Belmondo dans Le Guignolo de Georges Lautner. (2,99 € sur Orange ou CanalVOD)
Enfin en 1970 (avril exactement) sortait un film de Bernard Toublanc-Michel intitulé Le Petit Bougnat. Rien d’exceptionnel question scénario mais une adolescente de 14 ans pour la première fois à l’affiche crève l’écran. Elle fera une belle carrière sous le nom d’Isabelle Adjani... (2,99 € sur Orange ou CanalVOD).
BD. Une province pas si calme, du "14 juillet" aux "Ganglion & fils"
Que cela soit au pied des Alpes du Sud comme en Bretagne, parfois la vie se met à s’agiter plus qu’à la capitale. Un gendarme et des croque-morts vont s’en rendre compte dans ces deux BD récemment parues et disponibles en version numériques.
Infatigable dessinateur, capable de signer des œuvres de plus de 230 pages comme ce Quatorze juillet scénarisé par Martin Quenehen, Bastien Vives rajoute une corde à son arc : le polar provincial. Déjà remarqué pour ses critiques sociales, ses BD érotiques ou d’aventures, il se frotte cette fois à la gendarmerie nationale.
Dans cette petite ville de province au pied des Alpes, Jimmy, jeune gendarme, est aux aguets. Il voit des terroristes un peu partout. En rencontrant Vincent, artiste peintre qui se retire pour l’été dans cette province si calme, il entre dans le vif du sujet. Vincent vient de perdre sa femme dans un attentat. Il cuve sa déprime en compagnie de sa fille Lisa. Jimmy, intrigué, va surveiller les deux vacanciers et se retrouvé plongé jusqu’au cou dans une véritable affaire de terrorisme… Une vision assez sombre de la réalité, où le mal n’est pas toujours là où on le croit.
Après l’air pur des Alpes, place à l’air iodé de la Bretagne. A Plouzanec, M. Ganglion déprime. Patron d’une petite entreprise de pompes funèbres, les morts se font rares. Il est sur le point de déposer le bilan et de licencier ses deux employés, Georges et Malo, si un local ne se dévoue pas à casser sa pipe. Ce qui finalement arrive.
Mais la poisse poursuit Ganglion et le chemin jusqu’au cimetière va être très compliqué. Adaptée par Le Bihan et Pog du roman de Joël Egloff, déjà porté à l’écran sous le titre de Grand Froid, cette histoire joue à fond sur l’humour noir. Cet humour que les croque-morts pratiquent quotidiennement et permet de faire sans trop de dégâts un des métiers les plus compliqués qu’il soit.
« Quatorze juillet », Casterman, 22 €
« Ganglion et fils », Fluide Glacial, 16,90 €
Infatigable dessinateur, capable de signer des œuvres de plus de 230 pages comme ce Quatorze juillet scénarisé par Martin Quenehen, Bastien Vives rajoute une corde à son arc : le polar provincial. Déjà remarqué pour ses critiques sociales, ses BD érotiques ou d’aventures, il se frotte cette fois à la gendarmerie nationale.
Dans cette petite ville de province au pied des Alpes, Jimmy, jeune gendarme, est aux aguets. Il voit des terroristes un peu partout. En rencontrant Vincent, artiste peintre qui se retire pour l’été dans cette province si calme, il entre dans le vif du sujet. Vincent vient de perdre sa femme dans un attentat. Il cuve sa déprime en compagnie de sa fille Lisa. Jimmy, intrigué, va surveiller les deux vacanciers et se retrouvé plongé jusqu’au cou dans une véritable affaire de terrorisme… Une vision assez sombre de la réalité, où le mal n’est pas toujours là où on le croit.
Après l’air pur des Alpes, place à l’air iodé de la Bretagne. A Plouzanec, M. Ganglion déprime. Patron d’une petite entreprise de pompes funèbres, les morts se font rares. Il est sur le point de déposer le bilan et de licencier ses deux employés, Georges et Malo, si un local ne se dévoue pas à casser sa pipe. Ce qui finalement arrive.
Mais la poisse poursuit Ganglion et le chemin jusqu’au cimetière va être très compliqué. Adaptée par Le Bihan et Pog du roman de Joël Egloff, déjà porté à l’écran sous le titre de Grand Froid, cette histoire joue à fond sur l’humour noir. Cet humour que les croque-morts pratiquent quotidiennement et permet de faire sans trop de dégâts un des métiers les plus compliqués qu’il soit.
« Quatorze juillet », Casterman, 22 €
« Ganglion et fils », Fluide Glacial, 16,90 €
dimanche 29 mars 2020
Série Télé - « Freud » sur Netflix, terrifiant voyage dans l’inconscient
Confiné dans notre logement, en regardant « Freud », nouvelle mini-série de Netflix, on risque de se retrouver confiné dans notre subconscient. Et là, c’est une autre affaire. Car si l’enfermement dû au Covid19 prendra forcément fin, pas évident de sortir des méandres de notre esprit. Mais n’ayez pas peur, cette série allemande réalisée par l’Autrichien Marvin Kren avec Robert Finster dans le rôle-titre est avant tout un thriller ésotérique palpitant.
Dans la Vienne de la fin du XIXe siècle, Sigmund Freud est un jeune médecin tentant de révolutionner son art. Mais il s’oppose à ses collègues qui le traitent de « charlatan juif ». Freud, sans le sou, fêtard, accro à la cocaïne et qui va se retrouver mêlé à une enquête menée par l’inspecteur Alfred Kiss (Georg Friedrich). Le policier tente de démasquer un tueur en série qui mutile et tue des jeunes femmes. L’aide de Freud, pour pénétrer dans l’esprit du monstre, va être déterminante. La série, à l’esthétique très soignée, est placée aussi sous le signe du fantastique avec l’intervention d’une médium, Fleur Salomé (Ella Rumpf) et des séances d’hypnose menées par le futur maître de la psychanalyse. On en apprend aussi beaucoup sur les mœurs de l’époque, la folie de certains militaires, les combats au sabre en aveugle ou les duels au petit matin. Une réussite indéniable, prouvant que même les sujets a priori les plus rébarbatifs peuvent se transformer en histoire passionnante si l’on s’accommode un peu avec la réalité.
BD. De l’absurde et de l’émotion
Pour cette sélection dominicale de BD à lire sur papier ou en numérique sur une des nombreuses plateformes permettant d’acheter instantanément un album, sans quitter sa maison et même son canapé, c’est le grand écart. D’un côté une série de gags absurdes dans un milieu ne se prêtant que très peu à une enquête policière (un service de comptabilité), de l’autre une bonne grosse dose d’émotion dans le 8e titre de la série Boule à Zéro de Zidrou et Ernst racontant la lutte d’une petite fille contre le cancer.
Paul, comptable de son état à la Cotoprep, est retrouvé mort à son bureau par ses collègues. Deux policiers se rendent dans l’entreprise pour enquêter.
La commissaire Linguine et son adjoint Pichard vont alors se heurter à un monde qu’ils ne soupçonnaient pas : la vie en entreprise, avec guerre des services (logistique contre marketing), vie propre de l’écosystème de la machine à café et action forte et symbolique des délégués du personnel.
Bref, dans ces 100 gags imaginés par James et dessinés par David de Thuin on se moque beaucoup du travail dans ces grosses boîtes, au détriment de la découverte de la vérité sur ce meurtre à la compta.
Depuis quelques jours le personnel soignant des hôpitaux est mis sur un piédestal qu’il n’aurait jamais dû quitter. Car ce n’est pas qu’en temps de pandémie que médecins, infirmières et aides-soignantes se dévouent corps et âme pour les malades. La preuve dans ce nouvel album de Boule à Zéro. Zita, la petite héroïne de la série, atteinte d’un cancer, vit depuis dix dans ce service avec d’autres malades de son âge. La première partie de l’album voit le départ de Moïse, son colocataire de chambre.
Orphelin, il vient d’être adopté, malgré sa leucémie. Un coup au moral pour Zita. La suite est pire encore. Elle croit voir un fantôme dans sa chambre. Un certain Dali, disparu depuis 10 ans. Mais qui est-il ? Les BD qui arrivent à vous émouvoir à ce point sont rares, alors préparez vos mouchoirs et dégustez.
« Meurtre à la compta », Delcourt - Pataquès, 9,95 €
« Boule à zéro » (tome 8), Bamboo, 10,90 €
Paul, comptable de son état à la Cotoprep, est retrouvé mort à son bureau par ses collègues. Deux policiers se rendent dans l’entreprise pour enquêter.
La commissaire Linguine et son adjoint Pichard vont alors se heurter à un monde qu’ils ne soupçonnaient pas : la vie en entreprise, avec guerre des services (logistique contre marketing), vie propre de l’écosystème de la machine à café et action forte et symbolique des délégués du personnel.Bref, dans ces 100 gags imaginés par James et dessinés par David de Thuin on se moque beaucoup du travail dans ces grosses boîtes, au détriment de la découverte de la vérité sur ce meurtre à la compta.
Depuis quelques jours le personnel soignant des hôpitaux est mis sur un piédestal qu’il n’aurait jamais dû quitter. Car ce n’est pas qu’en temps de pandémie que médecins, infirmières et aides-soignantes se dévouent corps et âme pour les malades. La preuve dans ce nouvel album de Boule à Zéro. Zita, la petite héroïne de la série, atteinte d’un cancer, vit depuis dix dans ce service avec d’autres malades de son âge. La première partie de l’album voit le départ de Moïse, son colocataire de chambre.
Orphelin, il vient d’être adopté, malgré sa leucémie. Un coup au moral pour Zita. La suite est pire encore. Elle croit voir un fantôme dans sa chambre. Un certain Dali, disparu depuis 10 ans. Mais qui est-il ? Les BD qui arrivent à vous émouvoir à ce point sont rares, alors préparez vos mouchoirs et dégustez.
« Meurtre à la compta », Delcourt - Pataquès, 9,95 €
« Boule à zéro » (tome 8), Bamboo, 10,90 €
Polar - Un très lointain héritage dans « Richesse oblige » signé Hannelore Cayre
Tous ceux qui ont aimé « La Daronne », son précédent roman policier vont adorer « Richesse oblige », nouveau livre signé Hannelore Cayre. On retrouve un peu de son esprit dans cette histoire de famille qui passe du XIXe au XXIe siècle au gré des chapitres. Un parallèle entre deux époques revendiqué par l’autrice. Le lien entre les deux récits, c’est le nom de famille des protagonistes : de Rigny. Première à entrer en scène, Blanche. Dernière d’une branche oubliée de la famille, elle vivote au palais de Justice de Paris, chargée de la reprographie des procès-verbaux d’audition de suspects ou de mis en examen. Un boulot peu exigeant, réservé aux grands handicapés. Car Blanche, à 16 ans, un soir de beuverie, a eu un accident de voiture. Ses trois meilleurs amis sont morts sur le coup. Elle, éjectée, a eu la colonne vertébrale brisée. Depuis elle marche avec des béquilles et des orthèses.
Bobo avant l’heure
L’autre héros du roman c’est son très lointain ancêtre, Auguste de Rigny. Ce fils de bourgeois, bobo avant l’heure, jouissant sans réserve de son statut de privilégié mais converti au socialisme, tremble car l’heure de conscription arrive. Il a une chance d’y échapper grâce au tirage au sort. Perdu. On est en 1870 et dans quelques semaines il a toutes les chances de rejoindre l’armée pour 9 années et surtout partir au front : les rumeurs de guerre avec la Prusse se faisant de plus en plus pressantes. Son père va alors tout faire pour épargner son plus jeune fils et cherche à acheter un pauvre bougre qui prendra sa place. Une pratique tout à fait légale que le père justifie à son fils gauchiste en ces termes : « le remplacement militaire est une bonne chose en ce qu’il contribue justement à rétablir cette justice sociale qui t’est chère. Il fait tomber l’argent des mains de ceux qui en possèdent dans celles, vides, de ceux qui n’en ont pas, pour au bout du compte donner à l’armée un bon soldat au lieu d’un mauvais. » La partie historique du roman raconte comment Auguste tente d’échapper à l’uniforme alors que la Commune vient lui faire rêver du Grand soir.
Interdit d’être pauvre
Pour Blanche, le social, ce n’est pas son truc. Handicapée, maman d’une petite fille, vivant à la colle avec une autre handicapée, tout est bon pour s’en sortir. Même quelques trafics de listes de contacts de consommateurs de drogues diverses et variées (volés dans les dossiers qui lui passent entre les mains) que l’on peut revendre un bon prix à des dealers en mal de clientèle. Mais Blanche va voir plus grand en découvrant qu’elle fait partie des rares héritières de la fortune des de Rigny. Comment faire pour que la plus éloignée des branches de cet arbre généalogique devienne la dernière en course pour hériter des millions sur les comptes en banque, des propriétés immobilières et du yacht de 35 mètres ? Quelques coups de pouce au destin devraient permettre à Blanche d’être digne de la maxime de la famille : « Un de Rigny peut faire de sa vie ce qu’il veut, mais il lui est interdit d’être pauvre ! »
Beaucoup d’humour noir et de conscience de classe dans ce roman policier où la frontière entre bien et mal est plus que fluctuante.
« Richesse oblige » de Hannelore Cayre, éditions Métailié, 18 €
samedi 28 mars 2020
BD - Deux grands classiques adaptés
Loin de s’opposer à la littérature, la bande dessinée peut se révéler un excellent complément. Notamment en offrant des adaptations de grands classiques, sorte d’escabeau pour accéder à des textes parfois un peu difficiles.
On retrouve à l’adaptation de « L’arrache-cœur » de Boris Vian un scénariste expérimenté. Morvan (Sillage) n’a jamais caché sa passion des grands écrivains contemporains. Après Edgar Allan Poe, Mark Twain ou Alexandre Dumas, c’est à une montagne qu’il s’attaque. Car L’arrache-cœur de Boris Vian est un roman âpre, touffu, et compliqué. Il s’en tire au final parfaitement avec l’aide des dessins en noir et blanc et au pinceau de Maxine Péroz. On est d’entrée mis dans le bain, le psychiatre, arrivant dans une maison isolée, découvre une femme sur le point d’accoucher. Elle pointe un revolver en direction d’une porte close.
Derrière il y a Angel, le mari, le père. Cela fait deux mois qu’il est enfermé dans cette pièce car sa femme « hait son gros ventre et ne veut pas qu’on la voie dans cet état. » Et comment a-t-il fait pour tenir aussi longtemps cloîtré (la réponse nous intéresse particulièrement, nous qui sommes de millions actuellement à garder la chambre) : « J’attends que tout soit fini en pensant à des choses intimes. Et en dormant, je pense à ses fesses. » Le ton est donné. Cet Arrache-cœur est diablement charnel.
Autre genre avec « Pot-Bouille » de Zola adapté par Cédric Simon et dessiné par Éric Stalner. Le roman de la saga des Rougon-Macquart raconte l’ascension d’Octave Mouret, jeune provincial monté à Paris en plein réaménagement par Haussmann. On suit ses manigances pour prendre le pouvoir en séduisant les bonnes personnes.
Là aussi c’est un roman charnel que les auteurs offrent aux lecteurs après leur excellente adaptation de « La curée ». En fin d’album, Philippe Mellot replace l’intrique dans son contexte historique avec des articles illustrés de photos et de gravures d’époque
« L’arrache-cœur », Delcourt, 17,50 €
« Pot-Bouille », Les Arènes BD, 20 €
On retrouve à l’adaptation de « L’arrache-cœur » de Boris Vian un scénariste expérimenté. Morvan (Sillage) n’a jamais caché sa passion des grands écrivains contemporains. Après Edgar Allan Poe, Mark Twain ou Alexandre Dumas, c’est à une montagne qu’il s’attaque. Car L’arrache-cœur de Boris Vian est un roman âpre, touffu, et compliqué. Il s’en tire au final parfaitement avec l’aide des dessins en noir et blanc et au pinceau de Maxine Péroz. On est d’entrée mis dans le bain, le psychiatre, arrivant dans une maison isolée, découvre une femme sur le point d’accoucher. Elle pointe un revolver en direction d’une porte close.
Derrière il y a Angel, le mari, le père. Cela fait deux mois qu’il est enfermé dans cette pièce car sa femme « hait son gros ventre et ne veut pas qu’on la voie dans cet état. » Et comment a-t-il fait pour tenir aussi longtemps cloîtré (la réponse nous intéresse particulièrement, nous qui sommes de millions actuellement à garder la chambre) : « J’attends que tout soit fini en pensant à des choses intimes. Et en dormant, je pense à ses fesses. » Le ton est donné. Cet Arrache-cœur est diablement charnel.
Autre genre avec « Pot-Bouille » de Zola adapté par Cédric Simon et dessiné par Éric Stalner. Le roman de la saga des Rougon-Macquart raconte l’ascension d’Octave Mouret, jeune provincial monté à Paris en plein réaménagement par Haussmann. On suit ses manigances pour prendre le pouvoir en séduisant les bonnes personnes.
Là aussi c’est un roman charnel que les auteurs offrent aux lecteurs après leur excellente adaptation de « La curée ». En fin d’album, Philippe Mellot replace l’intrique dans son contexte historique avec des articles illustrés de photos et de gravures d’époque
« L’arrache-cœur », Delcourt, 17,50 €
« Pot-Bouille », Les Arènes BD, 20 €
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