jeudi 15 août 2024

Cinéma - La vie imaginaire de “Mon parfait inconnu”

Introvertie, une jeune fille recueille un amnésique et s’invente une vie de couple. Film norvégien sur la mémoire, « Mon parfait inconnu » propose une belle réflexion sur la solitude.


Simple femme de ménage dans les vastes locaux du port d’Oslo, Ebba (Camilla Godø Kroh) n’est pas satisfaite de sa vie. Elle souffre de sa solitude affective. Pas de petit ami, malgré ses 17 ans, à cause d’une timidité maladive et d’un manque criant de confiance en soi dès qu’elle se retrouve en société. Le début du film de la cinéaste norvégienne Johanna Pyykkö prend le temps de plonger le spectateur dans cette vie morne.

Ebba voudrait faire mieux, s’imagine en train de discuter spirituellement avec ces étudiants en vacances autour d’une piscine. Mais cela ne dépasse jamais les limites de son imagination. Seule embellie dans sa vie, les propriétaires du sous-sol qu’elle loue, lui demandent de surveiller la villa durant leurs vacances au soleil.

Elle a presque l’impression d’habiter une demeure de riche, d’être cette jeune femme brillante et intelligente à qui tout réussit. Un assez long préambule pour comprendre pourquoi elle agit si étrangement quand elle découvre, une nuit en revenant du boulot, un homme blessé à la tête.

Au lieu d’appeler les secours, Ebba le ramène chez elle. Exactement dans la villa, pas dans son sous-sol sombre et riquiqui. Et quand il reprend ses esprits, constatant qu’il ne se souvient plus de qui il est, elle prétend être sa petite amie et vivre temporairement dans la villa de son oncle, architecte.

Du jour au lendemain, profitant de l’amnésie de ce Bulgare (elle a retrouvé ses papiers d’identité et les a cachés de même que son téléphone portable), elle réécrit sa vie en le rebaptisant Julian. Perdu, hagard, l’homme doute tout en profitant de cette convalescence. Un peu dans une histoire de la Belle et la Bête inversée, on assiste au prudent rapprochement entre Ebba la manipulatrice et Julian, l’innocent. Elle semble heureuse en sa présence. Lui, se laisse porter par cette jeune fille active et déterminée, sa petite amie donc, même si quelques flashes mémoriels instillent le doute.

Le film entre alors dans une construction de plus en plus proche du thriller. Julian tente de retrouver sa mémoire, sa vie d’avant. Ebba, discrètement, cherche elle aussi à comprendre qui il est véritablement. La confrontation avec la réalité va la replonger dans ce doute qui mine sa vie.
Mon parfait inconnu est un film multiple. Tout en étant complètement ancré dans la réalité norvégienne actuelle, il donne parfois l’impression d’être une expérience de réalité virtuelle dans le multivers. Et méfiance, s’imaginer une nouvelle vie n‘est pas sans risque quand on ne maîtrise pas tous les acteurs.


Film de Johanna Pyykkö avec Camilla Godø Krohn, Radoslav Vladimirov, Maya Amina Moustache Thuv

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