vendredi 18 octobre 2013

BD - Peur parisienne chez Delcourt


Alors que prolifèrent depuis quelques temps les BD régionalistes, Delcourt lance une collection consacrée aux maléfices parisiens. Et en découvrant ce premier épisode écrit par Pécau et dessiné par Dim D. on se dit « Mais pourquoi on n'y a pas pensé avant ? » Car Paris, capitale de légende, regorge de contes et histoires fantastiques, d'autant plus faciles à mettre en scène que les lieux sont souvent conservés en l'état. Le décor est prestigieux, reste à trouver des personnages un peu accrocheurs et des intrigues basées sur des histoires encore en vogue. 
Challenge relevé avec brio par les deux auteurs. Un vieux flic très influent est à la tête du BAP, Bureau des affaires publiques. Il a sous sa responsabilité un commissaire, sceptique et bougon mais efficace. Pour cette enquête, ils embauchent Victor, jeune spécialiste en sciences occultes et escroc à la petite semaine. Ils vont tenter de mettre fin à la malédiction de la tour Saint-Jacques en pleine rénovation. 56 pages denses et passionnantes, qui distillent entre les scènes d'actions quelques infos sur le passé de la capitale de façon encore plus ludique que les monologues de Lorant Deutsch.

« Paris maléfices » (tome 1), Delcourt, 14,30 €

jeudi 17 octobre 2013

NET ET SANS BAVURE - Le baromètre du mauvais sommeil des Français

La nuit dernière, réveil en sursaut. Comme souvent ces derniers jours, un cauchemar récurrent me tire des bras de Morphée (cliché à deux balles pour chroniqueur fatigué). Le sombre rêve tient en deux mots : "pas d'idée !" Pas la moindre idée de sujet pour la chronique de demain. Alors comme d'habitude, je me lève... et me précipite sur le PC, me connecte à Internet, surfe frénétiquement... rien.
Ma mission de divertissement public au quotidien me semble compromise quand j'ouvre le dossier spam de ma "boîtamail". Bingo ! Une agence de communication m'envoie "le baromètre sommeil des Français". Voilà comment un cauchemar vous offre une idée sur un plateau !
Le site spécialisé MySommeil propose aux internautes de déterminer leur qualité de sommeil. Après compilation de quelques milliers de tests, le verdict vient de tomber. Pour le 3e trimestre 2013, l'indice des participants est de 35 soit un "assez mauvais sommeil". Pas tout à fait réveillé, je réponds aux questions et découvre sans surprise que j'ai un sommeil "moyen", indice 40. La 3e question me demande si je suis gêné par des réveils durant mon sommeil. Je réponds trois fois oui. En plus du cauchemar, je dois rajouter les dix fois où ma femme me secoue en pleine nuit car je ronfle. Je me plains d'un mauvais sommeil avec mon petit 40 mais je devrais m'en réjouir. Elle, sur une échelle de 0 (très mauvais sommeil) à 100 (excellent sommeil) doit atteindre le - 1 000 à cause de moi.

Chronique "Net et sans bavure" parue ce jeudi matin en dernière page de l'Indépendant. 

NET ET SANS BAVURE - Galères de vacances dans les pires commentaires reçus par un voyagiste

Il est loin le temps des vacances. Repos, farniente... Vous envisagez peut-être de profiter des congés scolaires, la semaine prochaine, pour passer quelques jours sous le soleil des tropiques. Avant de prendre votre billet, allez quand même fureter sur le net à la recherche d'avis. Parfois édifiants.
Méfiez-vous des commentaires trop dithyrambiques, souvent faux et achetés. A l'opposé, faut-il vraiment se fier à ceux de vacanciers décidément idiots ?
Le Huffington Post américain les a compilés dans un article sur les réclamations les plus bizarres des clients de Thomas Cook Voyage. L'Espagne est une belle destination touristique. Son seul défaut : il y a trop d'Espagnols. Pour l'une, « le réceptionniste parlait espagnol, la nourriture était espagnole. Personne ne nous a dit qu'il y aurait autant d'étrangers. » « Nous avons eu des problèmes avec les chauffeurs de taxi car ils étaient tous Espagnols ».
Une maman, de retour d'un séjour dans les mers chaudes proteste : « Personne ne nous a dit qu'il y aurait des poissons dans l'eau. Les enfants avaient peur. »
Ce touriste n'a pas apprécié la nourriture proposée : « Presque tous les restaurants servent des plats au curry. Je n'aime pas la nourriture épicée. » Alors, fallait pas aller à Gao en Inde...
La dernière montre le penchant des Américains pour les procès. « Mon fiancé et moi avons demandé des lits jumeaux à la réservation. Or nous avons eu un lit kingsize. Aujourd'hui nous vous demandons le remboursement du séjour car vous êtes co-responsable de ma grossesse. »

Chronique parue ce mercredi en dernière page de l'Indépendant.

NET ET SANS BAVURE - Stajière* aux manettes

Se moquer des erreurs des autres n'est guère charitable alors qu'on en commet soi-même. A l'Indépendant on en laisse passer quelques-unes. Enaurmes* parfois. Et elles restent, car imprimées. Vous retrouvez les plus savoureuses dans notre dossier Bol d'Air de fin d'année, un must.
Dans le Canard Enchaîné, les coquilles sont collectées dans la célèbre rubrique « Rue des petites perles ». Anxieux, je la parcours chaque semaine en espérant ne pas m'y retrouver épinglé...
Les chaînes d'info en continu proposent aussi du texte à lire. Des télex éphémères, au bas de l'écran, souvent composés à la hâte. La légende veut qu'à iTélé c'est un stagiaire qui s'y colle. Résultats : quelques aberrations à se rouler par terre. Souvent corrigées dans la minute, elles sont très fugaces. Pour s'en délecter il s'agit d'ouvrir l'œil. Aujourd'hui -gloire à internet- vous les retrouvez durablement sur un blog intitulé simplement « Le stagiaire d'iTélé », dans des captures écran des meilleures approximations de ces derniers mois. Petit florilège pour la postérité : « Accident de train à Jean-Jacques* de Compostelle », « 100 détenus en grève de la fin* », « De notre correspondante à Londres (Etats-Unis*) » . Enfin savourez cette dernière, digne d'une réplique de Bérurier dans les enquêtes de San-Antonio : « C'est tellement facile de trouver un bouquet missaire*. »
* Il fallait lire, dans l'ordre : stagiaire, énormes, Saint-Jacques, faim, Grande-Bretagne, bouc-émissaire.

Chronique "Net et sans bavure" parue ce mardi en dernière page de l'Indépendant. 

BD - Racines introuvables pour Jung dans "Couleur de peau : miel"


Retour au pays natal pour Jung. Jeune orphelin de Corée du Sud, il a été adopté par une famille belge. C'était il y a 40 ans. Dans la troisième et dernière partie de cette autobiographie dessinée, il revient enfin en Corée. Le premier tome, en remportant un formidable succès critique et populaire, a ouvert de nouvelles perspectives pour le dessinateur. Il a développé, en parallèle aux albums, un documentaire sur sa quête d'identité. Ce retour en Corée du Sud est en grande partie lié à la réalisation du film. Jung avoue ne pas se sentir véritablement prêt. Mais production oblige, il s'embarque pour l'Asie et sur place une équipe l'attend, filme ses premiers pas, ses rencontres, son émotion, ses déceptions. Quelques chapitres sont essentiellement consacrés au « making of » du documentaire. D'autres racontent les doutes, la solitude dans un hôtel, cette perte de racines. Une nouvelle fois l'émotion est au rendez-vous. Jung a cependant décidé de refermer la page et c'est la dernière fois que vous pourrez assister aux dialogues entre Jung, gamin de 5 ans, et Jung, dessinateur de BD adulte en plein doute.

« Couleur de peau : miel » (tome 3), Soleil Quadrants, 17,95 €

lundi 14 octobre 2013

NET ET SANS BAVURE - La prison pour un simple bisou

Trois adolescents marocains
viennent de passer trois jours en prison. Leur crime : le garçon et la fille se sont embrassés sur la bouche devant leur collège et un ami, auteur de la photo, l'a publiée sur leur profil Facebook. Un simple baiser d'amoureux. Comme il s'en donne des millions chaque jour dans le monde entre jeunes de 14 et 15 ans. Un bisou, pas plus. Au Maroc c'est direct la prison et un procès pour « atteinte à la pudeur ». Si le Maroc a la réputation d'être très tolérant, il reste une chape religieuse difficile à briser. Il est interdit de s'embrasser en public dans un pays islamique. Samedi, après un appel relayé Facebook, quelques personnes ont organisé un « kiss-in » à Rabat en soutien aux jeunes accusés. Des couples se sont embrassés devant le Parlement. Mais pas longtemps car des contre-manifestants leur ont jeté des chaises trouvées sur une terrasse...

La Turquie aussi a la réputation d'être plus tolérante. Mais il ne faut pas aller trop loin dans le décolleté plongeant. La présentatrice d'une émission de variétés l'a appris à ses dépens. Sa robe noire, échancrée sur le devant, laissait deviner la courbe des seins. Un membre influent du parti au pouvoir a trouvé son attitude extrême car, en plus de dévoiler un brin de peau, elle dansait et souriait. Pas de prison pour Gözde Kansu, mais la porte. Sur le champ. Virée avec pertes et fracas par sa direction. Noëlle Noblecourt, une des premières speakerines françaises, licenciée en 1964 pour avoir dévoilé ses genoux, doit bien rigoler... 

Chronique "Net et sans bavure" parue en dernière page ce lundi en dernière page de l'Indépendant.

dimanche 13 octobre 2013

Roman - "Faber", mauvais camarade de Tristan Garcia


Enfant surdoué, Faber tourne mal. Trop conscient du monde aliénant, il ne peut qu'envisager de le détruire. Au risque d'entraîner ses amis dans sa chute.
Les romanciers français aiment l'autofiction. Se mettre en scène, raconter ses petits malheurs. Facile et sans ambition. Tristan Garcia n'échappe pas à la règle. Mais contrairement à ses petits camarades, il avance masqué et n'abat ses cartes que dans les dernières pages. Il ne fait plus œuvre d'autofiction mais d'autodélation imaginaire. C'est autrement plus subtil que de coucher sur papier... ses coucheries.
Présenté comme la radiographie de la jeunesse française des années 90, ce roman est avant tout une histoire d'amitiés. A pluriel car dans le cas du trio Faber, Madeleine et Basile, les amitiés se croisent, évoluent et parfois s'annulent. Faber est le personnage central, le soleil autour duquel tourne ses deux amis, au risque de s'y brûler les ailes. Faber, génie surdoué, véritable dieu pour Madeleine, a disparu depuis une dizaine d'années. La jeune femme, mariée, mère de famille, pharmacienne insipide, reçoit une lettre postée en Ariège. Un appel au secours de Faber, Mehdi de son prénom.
Elle prend sa petite voiture et descend vers ces Pyrénées sauvages, refuge ultime des contestataires du système. Elle retrouve Faber, crasseux, puant, méconnaissable, zonant dans une cabane à ânes en ruines. « Il était maigre de tout ce qui dans un corps devait manifester la santé. Gros et boursouflé partout où l'organisme réclame d'être vif et tendu. Paupières plissées mais joues creuses. Ventre arrondi mais thorax rentré. Côtes apparentes et début de goitre. Il était laid. Pourtant, dès qu'il s'est mis en mouvement, je l'ai reconnu. » Faber était un adolescent surdoué. Abandonné par sa mère naturelle, il est adopté par un couple d'artistes. Des parents par procuration morts dans un accident.

A trois contre le monde entier
Placé dans une famille plus modeste, son intelligence supérieure le met rapidement au-dessus de tous ses camarades. Il comprend tout. Et avant tout le monde. Dans la cour de récréation, il va prendre sous sa protection Basile, binoclard timide tête de Turc des « grands » et Madeleine, surnommée Maddie, garçon manqué amoureuse éperdue de ce nouveau si gentil, beau, compréhensif... A trois ils vont vivre une enfance de complicité, de ces moments de grâce dont on n'a conscience qu'à leur disparition. L'adolescence va changer Faber. Il devient leader, révolutionnaire, de ceux qui pourraient franchir le pas de la radicalité. Le trio va se perdre de vue.
Le roman de Tristan Garcia débute par les retrouvailles entre Faber, clochard céleste amnésique, Maddie, mère hésitante et Basile, professeur dans le lycée qui a vu les exploits du Faber leader syndicaliste. Après le récit de l'enfance, retour au présent et au côté dramatique du roman. Entre nostalgie et vengeance. Nostalgie dans le regard de Basile, professeur obsédé par son enfance : « J'ai contemplé la classe de seconde 6 devant moi, j'ai cligné des yeux et je nous ai vus, nous. Sur le fond de mon œil notre enfance était là, inchangée. J'ai rouvert les yeux; j'ai aperçu d'autres enfants. Mais je ne pouvais pas les regarder, tels qu'ils étaient, sans que notre jeunesse se surimprime à la leur. » Basile le plus fragile des trois, le plus durablement marqué par Faber.
Le roman, par moment, a des airs de récit fantastique. Le lecteur est happé par le personnage quasi mythique de Faber. A moins qu'il ne soit pas un « être papier. Il existe, il a existé. »
Michel LITOUT

« Faber le destructeur », Tristan Garcia, Gallimard, 21,50 € (Egalement disponible au format poche chez Folio

samedi 12 octobre 2013

NET ET SANS BAVURE - Je roule en clito

L'anatomie féminine est encore un grand mystère pour nombre d'hommes. En dehors des appâts sexuels classiques que sont les seins et les fesses, leur ignorance crasse fait parfois peur. Pour preuve le très sérieux journal italien Corriere della sera a repris les chiffres d'un sondage où 86% des français pensaient qu'un clitoris était un modèle de
Toyota comme il y a des Yaris ou des Auris. Ce sondage, totalement bidon et imaginé par le Gorafi, a piégé des journalistes italiens. Il a surtout donné des idées à quelques femmes persuadées que la caricature n'est pas si éloignée de la réalité. Sauriez-vous dessiner un clitoris ? Pourquoi seuls les croquis de sexe masculin prolifèrent un peu partout ? Une discrimination sexiste parmi d'autres. La discussion animée entre plusieurs amies a débouché sur la création d'un blog fièrement intitulé « Vive le clito ! » Louna, la principale animatrice, graphiste dans le privé, a trouvé la parade : « J’en suis venue à l’idée d’en faire un sticker à placarder un peu partout, histoire de démocratiser ce bon vieux clito qui a lui aussi droit à son heure de gloire visuelle. » Vous pouvez donc acheter 20 autocollants pour 5 euros et les essaimer dans des lieux publics. Le clitoris est représenté en entier, avec prépuce, gland (ce n'est pas pour rien qu'il est surnommé le pénis féminin) mais aussi bulbes du vestibule et piliers. Dessiné, il a l'air sympa avec sa petite tête et ses longues jambes. Et pour bien se moquer de tous les hommes qui ne comprennent pas, le dessin est légendé : « Ceci n'est pas une voiture ». 

Chronique "Net et sans bavure" parue ce samedi en dernière page de l'Indépendant.

vendredi 11 octobre 2013

NET ET SANS BAVURE - Police belge fantôme

Incroyable histoire belge. Pas la blague de base avec l'accent caricatural, plutôt celle qui met en exergue le côté surréaliste de nos voisins du Nord. Comme Magritte a imaginé « Ceci n'est pas une pipe », une vidéo démontre que « Ceci n'est pas la police ».

Tout débute un dimanche à minuit. Un jeune entrepreneur, pour achever un travail urgent, doit se rendre dans le quartier populaire de Schaerbeek. Pas de chance, une voiture mal garée l'empêche d'entrer dans ses bureaux. Il téléphone à la police pour faire évacuer le véhicule. Pas de réponse. Il se rend donc au commissariat situé à quelques pâtés de maisons (un ami filme toute la scène). Il sonne à l'interphone d'urgence. Pas de réponse. La suite est hallucinante. Il constate que la porte est ouverte. Il entre. Dans le noir, il appelle. Toujours aucun écho. Il déambule alors dans le commissariat et tente une nouvelle fois de téléphoner avec son portable. Il entend une sonnerie dans une pièce, s'y rend et décroche. Voilà comment il parvient à répondre à son propre coup de fil... Il conclut sa démonstration d'un très ironique « Ça se passe comme ça à la police de Schaerbeek ». Diffusée sur plusieurs sites belges, la vidéo est vue plus de 100 000 fois. Les commentaires sont particulièrement... vaches. Il faudra attendre deux jours pour que la fameuse police réagisse. Le problème viendrait d'une serrure électrique déficiente. Et une enquête interne est en cours. Mais la priorité sera sans doute de retrouver les policiers fantômes...

Chronique "Net et sans bavure" parue ce vendredi en dernière page de l'Indépendant. 

BD - Planète hostile


Les
 amateurs de jeu vidéo connaissent déjà Lost Planet. C'est un jeu vidéo développé par Capcom dont le troisième opus est sorti en juin dernier. « First colony », l'album de BD écrit par Izu et dessiné par Dall'Oglio se situe 40 ans avant le jeu. La Terre, en mal de ressources énergétiques, envoie des centaines de vaisseaux pour prospecter. La planète EDN III semble regorger de T-eng, de la thermo-énergie. C'est en tentant de l'extraire au cœur d'une montagne, qu'un groupe de colons réveille Nushi, reine mère des Akrids. En résumé, plein de petits monstres et un autre, gros, très gros. Et en colère... 
Bref quand les pirates menés par le capitaine June, belle mais incapable du moindre sentiment, débarquent sur EDN III en catastrophe, ils ne sont pas au bout de leurs difficultés. Obligé de respecter la trame et le décor du jeu, le scénario manque parfois d'originalité. Mais les incroyables paysages et encore plus étonnants monstres permettent au dessinateur de nous plonger dans un monde totalement virtuel.

« Lost Planet », Glénat, 13,90 €