lundi 20 novembre 2006

BD - Sarko, un drôle de coco...

Ils s'y sont mis à trois pour proposer sur plus de 150 pages, "La face karchée de Sarkozy", une bande dessinée sans concession sur le phénomène Sarkozy. Phénomène car après avoir lu cette BD tirée d'une enquête de Philippe Cohen, scénarisée par Richard Malka et mise en images par Riss, on se demande si cet homme politique a ne serait-ce qu'un atome d'humain. Cela pourrait ressembler à une success-story, le parcours d'un jeune Français plein d'ambition pour son pays. Cela ressemble au final à l'ascension d'un assoiffé du pouvoir, voulant toujours aller plus haut pour se venger de brimades subies durant sa jeunesse avec une phrase en leitmotiv "Je vais tous les niquer !". 

Il commence par le maire de Neuilly, puis Pasqua, il tente Chirac avec Balladur, il échoue mais revient dans la course, s'attaque à De Villepin avant de repartir à l'assaut de Chirac. La BD dresse le portrait au vitriol d'un homme politique prêt à tout pour accéder au pouvoir suprême, comme le sale gamin qui fait des pieds et des mains pour avoir le plus beau jouet de la devanture. 


Une BD-enquête loin de la "légende Sarkozy" serinée par ses fidèles. (Vents d'Ouest et Fayard, 15 €)

dimanche 19 novembre 2006

BD - De Zener au Concile de pierre


« Le Concile de pierre », roman de Jean-Christophe Grangé va prochainement sortir sur les écrans dans une adaptation signée Guillaume Nicloux. « La malédiction de Zener », dont le second tome, toujours dessiné par Adamov vient d'être publié, est un peu une pré-séquelle du roman. 

A la fin des années 70, une jeune Française, Sybille, aux pouvoirs psychiques très développée tombe sous le charme de Bruner, communiste qui l'entraîne en Union Soviétique. Elle devient une bête de foire, à la disposition de scientifiques chargés de développer ses pouvoirs afin d'en faire une arme. La guerre froide fait rage. C'est en voulant s'enfuir de ce cauchemar que Sybille rencontre Vassiliev, un chimiste chargé de conserver en l'état la momie de Lénine. Il va tenter d'utiliser Sybille pour régénérer le corps en décomposition du héros de la Révolution russe.

 Action, fuite, rencontres cauchemardesques, ces 44 pages ne sont qu'un intermède palpitant avant l'arrivée de la jeune fille au Concile de pierre, perdu dans les steppes de Mongolie, lieu magique et véritable théâtre de l'histoire. (Albin Michel, 12,50 €, repris chez Drugstore)

samedi 11 novembre 2006

BD - 30 héros de toujours répertoriés par Omnibus


Claude Moliterni est un spécialiste mondialement reconnu de la bande dessinée. Il a signé un dictionnaire faisant référence et a usé de toute sa connaissance pour sélectionner 30 chefs-d'oeuvre de la BD de 1830 à 1930. Des personnages qui au fil des décennies sont totalement entrées dans le langage populaire, des Pieds Nickelés à Mickey en passant par Popeye ou Zig et Puce. Des héros de papier mais surtout leurs créateurs, souvent précurseurs des modes, voire inventeurs d'une méthode de narration comme Winsor McCay. 

On trouvera dans chaque chapitre une longue biographie des divers auteurs suivi de plusieurs exemples de leurs créations. On relira donc avec plaisir des gags du savant Cosinus, des aventures des Pieds Nickelés du temps de Forton et les exploits de Zig et Puce au XXIe siècle sous la plume d'Alain Saint-Ogan, l'exemple d'un petit jeune pas repris dans ce gros volume de 288 pages : un certain George Rémi signant ses planches Hergé... (Omnibus, 31 €)

vendredi 10 novembre 2006

BD - Imaginons si la guerre...

La collection 32 de Futuropolis a vécu. Le concept d’épisodes de 32 pages rapprochés dans le temps, en format souple à très petit prix n’a pas convaincu le public. Les derniers titres viennent de sortir et parmi eux le troisième épisode de "Guerres civiles". Jean-David Morvan et Sylvain Ricard au scénario, Christophe Gaultier eu dessin, ils se mettaient en scène dans un futur proche. Comment réagirions-nous si une guerre civile éclatait en France ? 

Dans ce chapitre tragique, Morvan et Ricard, impuissants, assistent à la mort d’un ami à l’hôpital. Et plus tard, l’irréparable est commis : Morvan est obligé de tuer pour se défendre. La suite en 2007, mais dans une présentation plus classique. 


Les éditeurs vont sans doute revenir à l'album cartonné, avec des paginations de 64 ou 96 pages. Ainsi, les trois premiers épisodes de ces « Guerres civiles » vont être réunis en une première intégrale. Mais pour lire la suite, il faudra attendre beaucoup plus longtemps.

Guerres civiles, Futuropolis, 4,90 euros

jeudi 9 novembre 2006

BD - Un barbare et son monde


Krän, en quelques années, est parvenu à s'imposer en tête des hit-barbares. Toujours armé de sa hache, flanqué de son garou, petite boule de poil se transformant en monstre de 12 mètres de haut (canines acérées de 1 mètres...) et de Kunu, gnome puant et lubrique, lâche de surcroît, donc source de gags inépuisable. 

Et des gags, ce premier album de Krän Univers, en regorge. Hérenguel, le créateur de cette série hilarante, creuse la veine en imaginant des scènes cocasses indépendantes les unes des autres. Exit la grande aventure, place au format court. On retrouve au fil de ces 46 planches les seconds rôles classiques que sont les zombies, les Huns, les damoiselles peu farouches à fortes poitrines et des trolls. 

C'est parfois vulgaire, toujours macho, jamais très fin et pourtant, on se délecte des réflexions à deux balles de cette grosse brute. Certainement un vieux, très vieux souvenir de nos ancêtres, quand les différends se réglaient à grands coups de torgnoles. Une régression qui ne peut pas faire de mal si cela ne dure que quelques minutes.

Krän Univers, Vents d'Ouest, 9,40 €

mercredi 8 novembre 2006

BD - La question que doit se poser tout fan de bande dessinée


«Pour partager mes rêves et mes émotions", "Parce que j’ai grandi avec", "Pour sa capacité à surprendre", "Parce que c’est difficile…"
: voilà quelques-unes des réponses apportées par des auteurs à la question qui donne son titre à l’album "Pourquoi aimez-vous la bande dessinée ?". Publié dans le cadre des 20 ans des éditions Delcourt, ce recueil offre à certains auteurs la possibilité de développer plus originalement cette passion qui pour beaucoup est devenue un métier. 

Plus de 60 réponses, autant de bonnes raisons pour franchir le cap, de lecteur, devenir auteur. Un constance cependant dans plusieurs réponses : le fait que la bande dessinée a bercé leur jeunesse. Pour beaucoup, leur imaginaire a été modelé au fil des semaines en dévorant les Spirou, Tintin et autres Pif Gadget. Et souvent, l'évolution naturelle les a conduit vers une BD plus adulte, plus expérimentale. 

Bref, ils ont appris la vie en parcourant ces pages. Le talent aidant, ils ont plongé dans ce monde une fois devenus adultes. Les bénéfices de cet ouvrage seront entièrement reversés à la Croix-Rouge au profit de la lutte contre l’illettrisme.

"Pourquoi aimez-vous la bande dessinée ?", Delcourt, 12,90 euros

mardi 7 novembre 2006

BD - Le bourreau voit la vie en rouge


Giovan Battista Mori, surnommé le Maître rouge, est menuisier. Un très bon artisan, mais ce n’est pas en raison de ses qualités professionnelles qu’il est redouté de tous à Rome. Mori est surtout le bourreau, impitoyable manieur de hache qui ne recule pas devant la tâche. Avant d’exécuter une sentence, cet homme à la forte stature toujours revêtu d’une cape rouge, cherche à comprendre pourquoi il doit tuer de sang froid un meurtrier. Il se transforme alors en détective amateur. 

Créé par Artibani et Milazzo, cette série italienne intègre la collection dédales de polars historiques. Les deux premiers tomes, formant une seule enquête, paraissent simultanément. Une jeune fille est enlevée. Les brigands demandent une rançon. Mais dès le lendemain, son beau-père est assassiné. Le coupable affirme que c'est un acte politique révolutionnaire. Mori veut en savoir un peu plus. Il se doute que les motifs sont autres, plus complexes et secrets.

Le maître rouge, Les Humanoïdes Associés, 10,40 euros.

lundi 6 novembre 2006

BD - La véritable histoire du soldat inconnu

La résurrection des éditions Futuropolis permet la réédition de ce court récit de Tardi, suivi de "La bascule à Charlot", réquisitoire contre la peine de mort. Noir et blanc expressif, scénario cauchemardesque, ces deux histoires sont fondatrices dans l’œuvre de Tardi, et représentent parfaitement ce que faisait Futuropolis, maison d'édition créée par Etienne Robial dans les années 70, prolongé en 2005 par Gallimard qui a décidé de relancer cette prestigieuse marque avec Blutch, De Crécy ou David B. pour ce qui est des nouveautés. 

Le soldat inconnu, d'après Tardi, est un écrivain de romans populaires. On le suit dans un cauchemar le mettant en présence de tous ses personnages négatifs donnant tant de saveurs à ses récits d'aventure. Tardi dans la préface parle "d'erreur de jeunesse", relevant des "maladresses de dessin". Mais il reconnaît qu'"il y a là, en désordre, à peu près tous les sujets que je reprendrai pas la suite dans la Blanc-Sec et ailleurs : savants fous, délires à la Jules Verne, dinosaures et 14-18". (Futuropolis, 14,50 €)

dimanche 5 novembre 2006

Roman - Chasseur de chair fraîche

Avec cette plongée vertigineuse dans le capitalisme sauvage des chasseurs de têtes, Clémence Boulouque raconte dans "Chasse à courre" comment un homme se déshumanise.


 Frédéric Marquez est ambitieux. Sûr de lui et toujours gagnant. Après des études brillantes en France et aux USA, il intègre une banque et progresse rapidement dans la hiérarchie faisant ses classes à Londres. C'est là qu'il est contacté pour la première fois par Sonia, une chasseuse de têtes. Un premier contact froid, Frédéric ne désirant pas changer d'emploi dans l'immédiat. 

Mais l'impensable arrive et il tombe sous le charme de cette femme audacieuse et active. Il l'invitera à dîner et en même temps qu'il la découvre, il en apprend beaucoup plus sur ce travail de l'ombre. Sonia lui explique que le "problème de ce métier, c'est l'argent et le pouvoir. Beaucoup viennent à la chasse pour de mauvaises raisons, vous mettez en place des dirigeants ou des cadres importants, certains vous demandent de les conseiller pour des décisions à prendre, s'en remettent à vous, ou presque, pour se faire aiguiller, des confiances se nouent, aux allures de dépendance... Vous savez ce qui se passe dans de nombreuses entreprises, vous avez le pouvoir de l'ombre. Et puis, si vous êtes futé, en travaillant nettement moins, vous gagnez presque autant qu'un banquier". Pour la séduire, ou mieux la connaître, Frédéric va intégrer un cabinet de recrutement et devenir en peu de temps un des éléments les plus performants. Il travaille beaucoup et dans ce milieu c'est peu de le dire quand vos collègues vous demandent si vous prenez votre demi-journée lorsque vous partez vers 20 heures... 

Chasseur de têtes sans scrupule, Frédéric ne parvient cependant pas à entraîner dans sa vie Sonia qui reste fidèle à son compagnon. Ils sont amis, partent souvent en chasse à l'étranger ensemble, mais passé les premiers moments magiques, quelque chose se dérègle dans leur relation et Frédéric Marquez de noter "C'est à cette période-là que j'ai commencé à la perdre. De plus en plus souvent, quand je la blessais, je sentais un fourmillement de bonheur me monter dans le corps". Lentement mais sûrement, le héros est en train de changer. Il n'en a pas conscience, mais c'est évident. Il se déshumanise en orientant sa carrière vers la grande manipulation. Il se persuade de plus en plus qu'il est le champion à ce petit jeu jusqu'à l'apparition de Richard Pétrel, considéré par Frédéric comme un "candidat sans consistance". Sa description est abominable : "Tout ce qu'il revêtait semblait de piètre qualité. Son imperméable était un peu froissé. Son écharpe lui mangeait le cou. (...) Avec ses toussotements, sa façon de s'éclaircir sa gorge comme s'il allait parler même lorsqu'il ne disait rien, il m'a insupporté dans les premières minutes de l'entretien." Richard Pétrel, la quarantaine tranquille, brillant sans être exceptionnel, avec une vie de famille rationnelle et équilibrée. C'est cette image qui va avoir de graves conséquences pour Frédéric, précipitant son passage dans le côté obscur du métier, là où on commence véritablement à considérer les candidat comme du simple gibier. 

Clémence Boulouque parvient même dans son écriture, de plus en plus synthétique au fil des pages à nous faire prendre conscience des transformations de Frédéric. Il croit manipuler les acteurs du système mais n'est-il pas lui aussi une simple marionnette obéissant à ces fils invisibles tirés par d'autres ?


"Chasse à courre", Clémence Boulouque, Gallimard, 16,50 euros (également en poche chez Folio)

BD - Alix, la renaissance

Ce 25e album d'Alix, "C'était à Khorsabad", est à lire en parallèle avec le premier tome, paru il y a maintenant plus d'un demi-siècle. Le jeune héros, imaginé par Jacques Martin, qui est toujours le scénariste de cette série entrée il y a longtemps au Panthéon de la BD, revient dans l'antique cité de Khorsabad à la recherche de ses parents, notamment de sa sœur. Il est en mission pour César. Le roi de la région veut offrir à l'empereur romain un vase en or. Alix sera chargé de convoyer le cadeau. Mais avant de repartir vers Rome, il tient à revoir Khorsabad. Mauvaise idée, la cité est sous la férule d'un Grec, Andrinoüs, dictateur aux visées expansionnistes. 

Quand Alix et Enak arrivent dans la ville en pleine reconstruction ils découvrent que derrière cette noire barbe se cache Arbacès, un « méchant » récurrent de l'univers d'Alix. Cet album voit l'arrivée de deux nouveaux dessinateurs, Cédric Hervan et Christophe Simon. Et force est de constater que cette aventure retrouve un souffle et une qualité graphique qui faisait défaut depuis quelques années. 

Rien que la couverture, remarquablement composée, devrait donner un signe aux nostalgiques de la grande époque, quand Jacques Martin, en plus d'écrire, dessinait les aventures de son héros vedette. (Casterman, 9,50 €)