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mercredi 12 février 2025

Une autobiographie - Le pape François

Le 15 janvier dernier, l’autobiographie du pape François a été mise en vente en France. Mais pas que. Le catholicisme étant une religion planétaire, ce texte du souverain pontife en exercice (écrit en collaboration avec Carlo Musso), a bénéficié d’une sortie mondiale dans 100 pays. 

Une autobiographie événement donc qui raconte les racines de sa famille (des émigrés italiens tentant leur chance en Argentine) jusqu’à sa nomination au sommet de l’Église. Il revient sur sa jeunesse, ses engagements, le tout illustré de très nombreuses photos personnelles. 

Un texte que le pape François ne voulait dévoiler qu’après sa mort, mais face aux défis du moment, il a préféré le publier en ce début d’année 2025.
« Espère », Pape François, Albin Michel, 400 pages, 22,90 €

samedi 6 janvier 2024

Roman français - « Ceci est mon corps », la religion et le physique

 Hervé devient Hélène. Et rencontre Dieu. Elle désire vivre dans un monastère. mais comment sera-t-elle accueillie par les moniales quand elles connaîtront son secret ?

 

Alors que les débats sur le genre font rage dans la société, Claire Huynen, romancière belge installée à Paris, aborde cette problématique explosive par le volet religieux. Un roman court, érudit et souvent touché par la grâce. Hélène a commencé par une retraite spirituelle dans une abbaye. Une formule pour les visiteurs à la recherche de silence et de réflexion. Quelques jours au calme, dans une cellule sans confort. Mais sans contact avec les quelques moniales qui vivent encore dans cet immense bâtiment.
Puis Hélène est revenue. « La communauté s’était rétrécie au fil des ans et de la raréfaction des vocations. Elle était maintenant resserrée autour de quatorze sœurs qui essayaient de maintenir l’abbaye démesurée, conçue au XIXe siècle pour cent vingt moniales. Elles paraissaient de minuscules insectes solitaires occupant une termitière désertée. » Hélène va apprendre l’enluminure, respecter les règles (silence, obéissance…) et un jour demander à devenir novice.
Il faut avant passer par un vote. Et surtout apprendre qu’Hélène, avant une lourde opération, était Hervé, un homme.
Pour certaines c’est une hérésie, un homme dans un couvent ! D’autres voient cette modification du corps comme une modification de l’âme : « Il est entendu que l’Homme peut modifier son âme, la faire évoluer par le libre arbitre que Dieu lui a donné. Pourquoi alors ne pourrait-il faire évoluer son corps ? » Un débat, une controverse, discutée par des femmes retirées du monde.

On en apprend beaucoup sur les discussions en cours au sein de l’Église mais aussi sur des précédents, comme « Eugène-Eugénie, une(e) saint(e) légendaire. On sait peu de choses sur ce personnage. Certains disent que, fille de gouverneur, Eugénie se serrait travestie pour rejoindre une communauté de moines, en prenant le nom d’Eugène. » Elle apparaîtrait sur un des chapiteaux de la basilique de Vézelay « en habit de moine découvrant ses seins. »

« Ceci est mon corps » de Claire Huynen, Arléa, 150 pages, 18 €
 

lundi 13 février 2023

BD - Religion décalée

Écrit par un Toulousain au drôle de pseudonyme, Ami Inintéressant, et dessiné par Rémi Lascault, le recueil de gags intitulé Genèse et Prozac entend, ni plus ni moins, relire la Bible et le Nouveau Testament, mais sous un angle moins sacré et plus comique. Se moquer de la religion, il faut oser en ces temps de fatwa et autre blasphème si faciles à lancer contre les mécréants rieurs. 

Il y a pourtant matière à se gondoler dans ces maximes si on les interprète à la manière des auteurs. Quand en Égypte, « toutes les eaux du fleuve furent changées en sang », les habitants découvrent que, finalement, c’est du vin. Et Jésus de s’excuser auprès de son père : « Désolé, l’habitude ».

Le même Jésus, bien embêté quand il veut prendre un bain. Comment se laver si l’on reste toujours au-dessus de l’eau ? Il y a même une version manga de la multiplication des pains par Jésus.

Enfin, dans Genèse et Prozac vous aurez la suite de « Prenez, ceci est mon corps (pain), prenez, ceci est mon sang (vin) » : « Ceci est mon pancréas (une aubergine), ma vésicule biliaire (un pilon de poulet) et mes muscles intercostaux (un chapelet de saucisses). »

« Genèse et Prozac », éditions Delcourt, 13,50 €

jeudi 13 octobre 2022

Cinéma - Pouvoir et religion au Caire

Première rencontre entre le jeune Adam (Tawfeek Barhom) et l’intrigant colonel Ibrahim (Fares Fares). Atmo

Un thriller politique au cœur d’une université musulmane. Telle est la formule magique qui a permis à Tarik Saleh de décrocher le prix du scénario au dernier festival de Cannes. Ce film, s’il se déroule en Égypte et porte le nom sans équivoque de La conspiration du Caire, est en réalité une coproduction franco suédoise tournée en Turquie. Le réalisateur, avant même qu’il ne débute le tournage de son précédent film, Le Caire confidentiel, a reçu la visite des services de sécurité égyptiens. Avec l’ordre de quitter immédiatement le pays et de ne plus y remettre les pieds au risque d’y être emprisonné. C’est donc un cinéaste en exil, un de plus, qui réalise ce thriller édifiant sur les pratiques d’un pays où la corruption est omniprésente.

Loin de la capitale grouillante d’agitation, dans un petit village en bord de mer, Adam (Tawfeek Barhom) aide son père à ramener tous les jours quelques poissons pour assurer leur subsistance. Adam, très religieux, avec l’appui de l’imam du village, a déposé une demande pour intégrer l’université Al-Azhar. Cette institution religieuse a toujours su rester indépendante du pouvoir. Du temps de Sadate, des Anglais auparavant et même aujourd’hui du général al-Sissi. Adam découvre un monde nouveau. Les étudiants sont placés sous la responsabilité de cheiks qui délivrent parfois des enseignements très différents. Si dans l’ensemble la ligne est très modérée, certains sont des défenseurs des Frères musulmans, considérés comme terroristes par le pouvoir en place.  Quelques jours après son arrivée, le grand cheikh meurt. Commence le processus de succession. Qui va l’emporter ? Dans l’université la compétition fait rage. En coulisse aussi. Les services de sécurité ont des espions dans la place pour savoir ce qui se trame et tenter d’influencer le vote. Adam va se retrouver au centre de cette partie d’échecs qui fera beaucoup de victimes. 

Le film, entre fable religieuse et dénonciation de la manipulation des pouvoirs occultes, permet au public occidental de mieux comprendre le fonctionnement de cette institution musulmane, la plus renommée et respectée du monde sunnite. Loin de l’obscurantisme caricatural, Al-Azhar fait figure de phare intellectuel et culturel dans un pays bouillonnant. Par contre la description des pratiques de la police secrète de l’État égyptien est beaucoup plus sombre. Manipulation, chantage, arrestations arbitraires, torture : tout est bon pour maintenir le pouvoir en place. Dans ce rôle, le général Ibrahim, vieux de la vieille, est le plus grand, le meilleur. Interprété par Fares Fares, acteur fétiche de Tarik Saleh, il signe une performance qui aurait pu lui permettre de prétendre à un prix d’interprétation au festival.

Film de Tarik Saleh avec Tawfeek Barhom, Fares Fares, Mohammad Bakri



mercredi 21 mars 2018

Cinéma : La prière plus forte que la drogue

LE FILM DE LA SEMAINE. Cédric Kahn raconte le parcours d’un toxicomane sauvé par la religion



Anthony Bajon, jeune acteur débutant, porte le personnage de Thomas, toxicomane en plein dé- crochage aux drogues dures. Une performance hors normes, physique et intérieure, récompensée justement par le prix d’interpré- tation masculine à la dernière Berlinade. Thomas est quasiment de tous les plans de ce film de Cédric Kahn. On ne sait pas d’où il vient, quel est son parcours. On se doute que cela n’a pas dû être rose tous les jours à voir la balafre qui orne sa pommette gauche. Dans une voiture, il regarde le paysage magnifique de la montagne à l’automne. Petites routes puis chemins de pierre et arrivée enfin à la communauté. Une ferme qui abrite en son sein une vingtaines d’anciens toxicomanes ou alcooliques, comme Thomas. Que des hommes. Ils cultivent un jardin, aident les paysans du coin et surtout prient. Ils prient Dieu ensemble, comme pour éloigner toute tentation ou pensée négative.

Le principe des premiers jours est simple. Jamais Thomas ne sera laissé seul. Son « ange gardien » Pierre (Damien Chapelle) l’accompagne partout. Plus qu’une surveillance, c’est une aide permanente qu’il lui offre. Une écoute aussi. Et surtout pas de jugement, principe de base de la communauté. Comme le rappelle, le chef Marco (Alex Brendemühl), ils sont tous passés par là avant lui. Ils ont connu la descente aux enfers, puis les crises de manque. Tous n’ont pas réussi à s’en sortir. Ils ont quitté la communauté. Mais tant que Thomas sera là, il devra se soumettre à ces règles.

 Fuite et retour
L’état d’hébétude du fougueux jeune homme ne lui permet pas de juger au début. Mais rapidement il reprend ses esprits. Son libre arbitre aussi. Car dans une scène violente et destructrice, il rejette ces hommes résignés, devenus membres d’une secte. Rage violente et fuite. En pleine nuit, il quitte la ferme, marche de longues heures dans le froid pour atteindre enfin un village. Mais sans argent ni point de chute, il va se réfugier dans la ferme où il a travaillé récemment. Il y a rencontré Louise, une jeune étudiante. Elle l’accueille, le raisonne et il retourne à la communauté. Pour se donner une seconde chance. De s’en sortir. De revoir Louise aussi.

En plaçant l’amour au même niveau que la prière, Cédric Kahn permet à son film de briser cet enfermement réducteur. Il n’y a pas que la religion pour sortir de l’enfer de la drogue. Thomas décroche, se sent même comme investi d’une mission pour servir Dieu. Une conversion superbement interprétée par Anthony Bajon. Performance d’autant plus réussie que l’on sent, en permanence, que tout reste fragile, comme joué. Le film aurait pu être primaire, c’est finalement une réflexion pleine de bienveillance et de doute.

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Paroles du réalisateur : "C’est l’histoire d’un type qui dit « Sauvez-moi ! »



Cédric Kahn s’explique sur le scénario, le tournage et le casting de « La Prière ». « A la base on avait un scénario classique. On racontait l’avant, d’où venait le gars. Finalement ça ne fonctionnait pas du tout. L’histoire n’a marché qu’à partir du moment où on a mis la thérapie et la prière au centre du récit. Le film commence au moment où il arrive et s’achève quand il part. Comme dans un western quand le type frappe à la porte du ranch et dit ‘Sauvez-moi !’. Bizarrement, tous les détails qu’on racontait sur le personnage principal affaiblissaient l’histoire ».
 « On n’a pas fait de casting spécifique pour le personnage d’Anthony. On a cherché le groupe en se disant que le protagoniste arriverait parmi eux. On leur faisait faire deux tests : une prière et un témoignage. En fait ceux qui priaient bien, ce n’était pas les croyants mais les bons acteurs. Pour le rôle principal, je cherchais un garçon avec beaucoup de présence, d’intensité, de violence, mais aussi une forme de candeur, un lien fort à l’enfance. »
« Je voulais de la montagne, du paysage, un sentiment d’isolement, mais aussi d’espace, d’éternité. On a cherché dans les Pyrénées, dans les Alpes. Et on est arrivé dans le Trièves, en Isère, un plateau large entouré de montagnes à 360°. Un lieu magique, préservé, mélange de beauté et de rudesse. L’endroit idéal pour raconter cette histoire. Ce paysage est devenu un personnage du film à part entière. »

 ➤ « La prière », comédie dramatique de Cédric Kahn (France, 1 h 47) avec Anthony Bajon, Damien Chapelle, etc.

mercredi 25 janvier 2017

Cinéma : Les Puissants passent à confesse

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Petit film italien, « Les Confessions » de Roberto Ando aborde la problématique du pouvoir des Puissants sur le devenir des peuples. Comment quelques économistes à la tête des ministères des 8 plus grandes puissances mondiales peuvent, dans le calme feutré d’un palace, jeter à la rue toute la population d’un pays ? Sans le dire ouvertement, ce faux thriller fait référence à la Grèce qui, un temps, a failli être éjectée de la zone euro, comme mise au ban des nations pour une faute originelle inacceptable dans ce monde de la finance : voter pour des hommes voulant faire de la politique autrement, contre les influences de l’argent, du capitalisme et de la spéculation.


En Allemagne, dans ce manoir isolé de tout et de tous, ce sont des hommes et des femmes sans cœur qui mettent les dernières touches à leur pacte pour remettre un peu d’ordre dans leur monde. Sous la houlette de Daniel Roché (Daniel Auteuil), directeur du Fond monétaire international, ils sont presque parvenus à un accord. Deux représentants rechignent encore : l’Italie et le Canada. Pour la première fois, en plus des négociations secrètes, Roché a désiré inviter à ce conclave des représentants de la société civile. Une romancière pour enfant mondialement célèbre, un chanteur de folk tout aussi connu dans le monde entier et... un prêtre italien ayant fait vœu de silence.
Le moine Roberto Salus (Toni Servillo) semble totalement incongru dans cet univers de luxe et de plaisirs. Lors du repas d’arrivée, il refuse les plats car il ne mange pas le soir. Ne dit pas un mot, évidemment, et à la fin des agapes, quand les ministres sirotent un digestif que l’on imagine fort et raffiné, il débarrasse la table, mettant dans l’embarras l’armée de serviteurs déboussolés par cette entorse au protocole. Salus, doux rêveur ou conscience éveillée ? Le spectateur se pose la question au début du film. À la fin aussi tant la mécanique de Roberto Ando est bien huilée.
■ Secret de la confession
Si Roché a invité Salus, c’est pour se confesser. L’homme considéré comme le plus puissant de la planète a-t-il quelque chose à se faire pardonner ? Mystère dans un premier temps. D’autant que le lendemain, Roché est retrouvé mort dans sa chambre, étouffé dans un sac plastique appartenant à Salus. Suicide ? Le moine est mis en examen. Début de l’enquête policière. Et des soupçons multiples et variés. Le refus de répondre aux questions du religieux, sous couvert de secret de la confession, complique sérieusement la donne. La ministre canadienne (Marie-Josée Croze) avait-elle une liaison avec Roché ? La romancière (Connie Nielsen), insomniaque, en sait-elle plus qu’elle ne le prétend ?
Le suspense n’est en réalité qu’un prétexte pour faire réfléchir sur la marche du monde. Et de l’importance de la spiritualité dans cette société ayant élevé l’argent au rang de Dieu planétaire. Le tout magnifié par des images léchées, au cadrage soigné et lumière très travaillée. Sans compter la qualité de tous les acteurs, Toni Servillo en tête. 

jeudi 6 octobre 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Vade retro satanas !

épilepsie, surnaturel, religion, croyancePetit rappel pour les lecteurs qui ne suivent pas : nous sommes le jeudi 6 octobre 2016. Pas 1016 mais bien 2016. Au XXIe siècle. Ce préambule car un sondage réalisé pour la Fondation française pour la recherche sur l'épilepsie (FFRE) et rendu public en début de semaine révèle que 9 % des Français sont persuadés que l'épilepsie est d'origine… surnaturelle. Sachant que nous sommes 66 millions d'habitants, cela fait quand même près de 6 millions de mes compatriotes qui pensent que les 600 000 épileptiques que compte le pays sont possédés par le démon. 6 millions de personnes en retard d'un millénaire. Par chance, ils ne sont pas à la tête du clergé puisque cela se transformerait en bûchers, seule solution trouvée à l'époque pour "soulager" les prétendus possédés.
En pleine semaine des prix Nobel, ce sondage nous apprend que certaines croyances sont encore fortement ancrées dans l'imaginaire collectif. Je crains qu'il n'y ait pas que l'épilepsie comme maladie mal connue. Le sida, virus longtemps énigmatique, a été présenté, alternativement, comme créé par Dieu pour éliminer les déviants (la communauté homosexuelle) ou le Diable (pressé de retrouver ses disciples). À moins que cela ne soit la CIA, le KGB ou le Mossad. Quand on ne comprend pas, toutes les inventions même les plus délirantes sont bonnes à prendre.
À toutes fins utiles, précisons que les "bipolaires" ne sont pas des aimants humains alternant positif et négatif et qu'un "dépressif" n'est pas tributaire de la météo, des dépressions et autres anticyclones.

mardi 22 décembre 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES : Religion al dente

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André Malraux ne croyait pas si bien dire quand il soutenait que "Le XXIe siècle sera religieux, ou ne sera pas." Les religions occupent le devant de la scène, meilleur prétexte trouvé par les uns et les autres pour s'entre-tuer.
Il existe pourtant une frange de la population qui fait tout pour détourner le peuple de ces croyances. Par exemple les inventeurs du "pastafarisme". Pour bien démontrer le ridicule des cultes, ces Américains créent une religion de toutes pièces. Il y a dix ans environ, ils décrètent que l'univers est la création d'un monstre volant en spaghettis, que les adeptes doivent porter une passoire sur la tête et aduler les pirates. Farfelu mais pas plus idiot que la croix, le voile ou la soutane... Dernier point, chaque prière des "pastafariens" doit être conclue par l'expression "R'amen", autre nom des nouilles chez les Japonais.
Pour devenir une véritable religion, quelques apôtres portent la bonne parole partout dans le monde. La Pologne l'a reconnue en 2014 et récemment, l'état néo-zélandais lui a donné l'autorisation de célébrer des mariages. Car les "pastafariens" aiment se marier, "parfois plusieurs fois" selon la responsable de l'église.
Et qui sait, dans 200 ans le "pastafarisme" sera peut-être devenu la religion dominante, après une première guerre sanglante entre les orthodoxes (pâtes cuites al dente) et les réformateurs (pâtes crues). Du moins si elle surmonte le schisme déclenché par les fervents du "sans gluten." Car pour eux, le gluten, c'est l'incarnation du diable.

samedi 15 février 2014

Cinéma - Période noire, images grises dans "Ida"

Avec le portrait d'Ida, le réalisateur Pawel Pawlikowski revient sur la Pologne des années 60.

En noir en blanc, personnages souvent immobiles dans un cadre épuré, campagne hivernale et boueuse ou forêts impénétrables : Ida a tout du film graphique à forte teneur artistique. Pourtant son réalisateur a débuté en tournant nombres de documentaires pour la BBC. En s'attaquant à la fiction, il change de registre, conservant cette science du cadrage et de la mise en abîme de ses sujets. Ida se déroule en Pologne durant les années 60. Le pays, après la guerre avec l'Allemagne, la domination soviétique et les purges staliniennes sanglantes, arrive à vivre presque normalement. 
D'autant que le régime, malgré sa sévérité, a toujours préservé les institutions religieuses. Dans un couvent, Ida (Agata Trzebuchowska), jolie novice au sourire rare mais lumineux, va prononcer ses vœux dans quelques jours. Avant ce renoncement, elle part à la rencontre de son unique famille, une tante qu'elle n'a jamais vue. Orpheline, elle a été élevée chez ces sœurs qu'elle désire ardemment rejoindre. Valise à la main, elle débarque un matin chez Wanda (Agata Kulesza), fervente communiste qui a mis sa vie au service du régime. Juge, elle n'a plus trop de pouvoir mais bénéficie d'une appréciable liberté de mouvement. 
Wanda et Ida partent à la recherche de la tombe des parents d'Ida. Une quasi enquête policière car ils étaient juifs. Une révélation pour la jeune fille, qui n'ébranle pas sa foi chrétienne. Pas plus que le sort réservé à ses parents, durant la guerre, par ces « bons catholiques » si vite pardonnés après une confession, deux pater et un « Je vous salue Marie »... 
La force du film réside dans la reconstitution fidèle de cette période. Comme si le périple des deux femmes que tout oppose, était filmé comme un documentaire. Avec sincérité, sans concessions. On est plongé dans un autre monde, partagé entre grands idéaux contraires. Le noir et blanc renforce le côté gris et terne des regrets. Agata Trzebuchowska apporte fraîcheur et spiritualité au rôle d'Ida, qui mettra longtemps avant de choisir la vie qu'elle se réserve.

samedi 8 février 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - Le sang d'un saint

Les voies du Seigneur sont impénétrables. Celles des voleurs aussi. Il y a quelques jours, émoi chez les paroissiens de la petite chapelle de San Piero della lenca dans les Abruzzes. L'édifice, isolé, est retrouvé vide. Des malotrus ont dérobé une croix et un ostensoir.
Un larcin qui n'aurait pas mobilisé nombre de carabiniers s'il n'y avait pas également eu dans le butin un reliquaire de la plus haute importance. Les mécréants, ignorants de surcroît, jettent à la poubelle ce qu'ils prennent pour un bête chiffon. En fait, ce bout de tissu sale est imbibé du sang de Jean-Paul II. Rapidement les voleurs incultes sont retrouvés et la relique, bien qu'abîmée, remise en état. Aucune précision n'a filtré sur les dégâts occasionnés. Le pire de tout aurait été que les voleurs lavent le tissu. Avec un de ces produits spécialisé pour enlever les taches tenaces.  
Questions : le sang d'un saint (d'un futur saint exactement, la cérémonie de canonisation n'a lieu que le 27 avril 2014, dimanche de la divine Miséricorde) résiste-t-il à ces produits ? Si oui, peut-on parler d'un nouveau miracle ? Si non, faut-il accorder plus d'importance à un détachant liquide qu'à un saint ? Dans notre société consumériste, va-t-on voir apparaître une nouvelle lessive en concurrence directe avec le Saint-Marc ? La mère Denis est-elle la réincarnation de la Sainte Vierge et Mr Propre celle de Jésus ?
 Mais surtout, et cela mettra un point final à ces interrogations métaphysiques : quel est le sagouin qui a récupéré ce linge imbibé de sang et l'a conservé tel quel sans prendre la peine de le laver ?

samedi 18 janvier 2014

DE CHOSES ET D'AUTRES - Monseigneur se fait rare

Le pape François ravale la façade d'une église en pleine décrépitude. Il multiplie les petites révolutions. La dernière en date va faire grincer bien des dents dans la hiérarchie catholique. Non, il ne recommande pas l'utilisation du préservatif pour enrayer l'épidémie de sida en Afrique. Il ne revient pas encore sur le célibat des prêtres. Pas la moindre avancée dans le dossier de la pédophilie.
François, après avoir suscité de grands espoirs chez les progressistes, s'attaque à la marge. Une dépêche de l'Agence France Presse annonce que "le titre de "monseigneur" sera désormais moins couramment accordé au sein de l'Église catholique, conformément au désir du pape de lutter contre une Église mondaine et le carriérisme". Désormais il y aura moins de "Monseigneur" claironné par des ouailles dévotes sur le ton d'un Yves Montand flattant Louis De Funès atteint de "La folie des grandeurs" d'un "Monseigneur est le plus grand, monseigneur est beau".
L'AFP de préciser qu'il s'agit "d'un premier pas, de la part d'un pape qui entend réformer l'Église prudemment mais de manière déterminée." Je ne sais pas s'il a la détermination. Pour la prudence, pas de doute ! Dans le genre révolution de palais, on fait difficilement mieux.
La crise des vocations en Europe ne risque pas d'être résorbée de cette façon. Les ambitieux ne pourront même plus rêver de gravir les échelons quatre à quatre par manque de concurrents. Car l'église ressemble de plus en plus à une armée mexicaine : beaucoup de généraux (Monseigneur) et de moins en moins de soldats (curés)...

Chronique "De choses et d'autres" parue ce vendredi en dernière page de l'Indépendant. 

dimanche 11 août 2013

BD - Compostelle, chemin mystique


La bande dessinée historique est de nouveau à la mode. Lancée dans les années 80 par les éditions Glénat avec le magazine Vécu comme vecteur, elle a petit à petit disparue des rayonnages des libraires. Mais le formidable potentiel ne pouvait que de nouveau inspirer les scénaristes. Et la BD historique a retrouvé des lettres de noblesse grâce à son sérieux et son travail de vulgarisation. Nouvel exemple avec « Campus Stellae » qui, en quatre tomes, permet de découvrir les quatre plus connus des chemins de Compostelle traversant la France. Le premier chemin, du Puy à Moissac, passe par l'Aveyron. 
Une bonne partie de l'intrigue se déroule, au XIIIe siècle, entre Aubrac, Espalion et Conques. Pierre-Roland Saint-Dizier a imaginé la quête d'un trésor ramené d'une croisade. Pour le trouver, il faut déchiffrer des énigmes écrites dans des coquilles de pèlerins. Les réponses sont à deviner sur des monuments religieux comme le célèbre tympan de Conques. Alternant habilement intrigue et découverte architecturale, cette série séduira le plus grand nombre. Au dessin on retrouve Andréa Mutti, grand professionnel italien dont c'est la première incursion dans la BD historique. Il s'en tire à merveille.

« Campus Stellae » (tome 1), Glénat, 13,90 €


mardi 7 août 2012

Billet - Raie-incarnation

Le piètre investissement dans les actions Facebook dont j'ai été victime dernièrement m'a fait accomplir un retour sur mon moi intérieur. Pourquoi gâcher sa vie sur de sordides considérations matérielles ? Le virtuel, n'est-il pas tout simplement le signe tangible de l'âme ? Totalement inculte côté religion, j'ai cherché des réponses sur internet. Le
bouddhisme et son principe de réincarnation de l'âme dans le corps des animaux m'ont interpellé. Trop cool de revenir sur terre avec une apparence totalement différente. Encore faut-il soigner son karma pour pouvoir choisir la bonne race et et surtout l'endroit adéquat.

Je me verrais bien en poisson, en silure par exemple. Au Japon je suis vénéré tel un dieu. Penser à éviter le canal de la Robine où on massacre le « monstre tueur de canetons ».

Ou en chat. Ça doit être bien une vie de chat. A moins de tomber chez un geek qui va vous photographier sous toutes les coutures et vous exhiber sur le net accoutré en pom pom girl.

Reste la vache. La vache est sacrée en Inde. Tout lui est permis et personne ne lui fait le moindre mal. Mais avec ma veine je risque de me retrouver à pâturer paisiblement dans les Albères. Un arrêté préfectoral plus tard, mon âme sera à la recherche d'un autre corps, l'actuel ayant été abattu pour cause de divagation. Finalement je vais opter pour le volatile. Le goéland ou le pigeon. Je pourrai enfin me... « lâcher » impunément sur mes compatriotes.

Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET (MÊME L'ÉTÉ)" parue lundi en dernière page de l'Indépendant

lundi 30 juillet 2012

BD - Croisade et folie religieuse dans "Furioso" de Chiavini



Roman graphique de plus de 130 pages, « Furioso » de Lorenzo Chiavini est une intelligente réflexion sur la folie des hommes quand la religion prend le pouvoir. Au temps des premières croisades, les Chrétiens tentent de reprendre le dessus sur les Musulmans. Un évêque sénile en bénissant la foule avec la sainte lance ayant blessé le Christ, la fait tomber. Elle se plante dans le thorax de Berto, un modeste chasseur de rats. Immédiatement la foule l'acclame, persuadée que la lance vient de désigner le nouveau Sauveur. Chez les Musulmans, tout est mis en œuvre pour retrouver Ferragus. 
Ce général, vaillant au combat, a déserté. Il vivrait nu dans la forêt, mangeant de la viande crue avec une meute de loups. Berto d'un côté, Ferragus de l'autre. Deux symboles pour vaincre. Mais ces deux hommes tentent de se dérober à leur destin. En vain car des femmes vont influer sur le cours de l'histoire.

« Furioso », Futuropolis, 20 €

lundi 9 novembre 2009

BD - Robert Crumb et l'origine du monde


Robert Crumb, souvent considéré comme le pape de la BD underground américaine, prend ses lecteurs à contre-pied en proposant une ambitieuse adaptation graphique de la Genèse. Mais il ne s'agit en aucun cas d'un virage mystique de cet auteur américain, chantre de la nature installé depuis une dizaine d'années en France, dans un petit village des Cévennes. Surtout connu pour ses personnages féminins plantureux et dominateurs, il a simplement voulu proposer une adaptation d'un « texte puissant avec plusieurs strates de sens qui plongent profondément dans notre conscience collective, notre conscience historique. » Et face à l'ampleur de la tâche, il a préféré se tenir au plus près de l'original, préférant laisser certains passages « dans leur état d'imprécision alambiquée plutôt que de trafiquer un texte aussi vénérable. »


Le résultat est d'une richesse étonnante. Graphique en premier lieu. Crumb n'a rien perdu de son trait, rond, où de multiples hachures donnent tout le relief de ses personnages. Dieu semble toujours courroucé, les hommes fautifs et piteux. Les femmes, et elles sont très nombreuses dans la Genèse leur rôle de procréatrice étant sans cesse mis en valeur, sont responsables du péché originel mais sont aussi les appuis fidèles de ces hommes et femmes dont les vies ont façonné notre monde.

En signant cette Genèse, Robert Crumb fait la grande bascule côté public. Car ceux qui ont aimé les élucubrations de Mr Natural, BD irrévérencieuse, libertaire et libertine, ne seront certainement pas sensibles à cette adaptation fidèle d'un texte ayant traversé les siècles, même si Crumb explique que la « Bible n'est pas la parole de Dieu mais la parole des hommes. »

« La Genèse » de Robert Crumb. Denoël Graphic. 220 pages. 29 euros