Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Par Michel et Fabienne Litout
vendredi 26 octobre 2018
BD - Les risques de la réalité virtuelle avec "Bolchoi Arena"
Bienvenue dans la Bolchoi Arena. Cette plate-forme de réalité virtuelle a remplacé internet dans un futur proche. L’Homme, plutôt que de se lancer à la conquête de l’espace l’a synthétisé et transposé dans un gigantesque programme informatique. Chacun peut y accéder avec des lunettes implants. La conquête spatiale progresse, mais sous forme de jeu vidéo.
Cette idée a germé dans la tête de Boulet, dessinateur virtuose, passionné de nouvelle technologie et d’astronomie. Il est donc le scénariste de ce long roman graphique (160 pages) prévu en trois parties. Il a confié l’illustration à Aseyn, compagnon de blog.
Le lecteur découvre la Bolchoi Arena en compagnie de Marje et Dana, deux étudiantes. Le jour elles bossent dans des bibliothèques, la nuit elles endossent les tenues de leur avatar et se lancent dans la conquête de nouveaux territoires sur des mondes inconnus. On est forcément un peu décontenancé au début, mais une fois compris le passage de la réalité à la virtualité, l’album devient passionnant.
Car Marje, si elle découvre Bolchoi Arena, a tendance à en abuser. Au détriment de sa vraie vie, études et amours avec son petit ami. Entre manga et SF classique, cette nouvelle série bénéficie en plus d’une extension sur l’appli mobile Delcourt Soleil +.
«Bolchoi Arena » (tome 1), Delcourt, 19,99 €
jeudi 25 octobre 2018
Cinéma - « Quién te cantará » sans fausse note
L’une chante, l’autre ne s’en souvient pas. Lila (Najwa Nimri) est célèbre, Violeta (Eva Llorach) travaille dans un karaoké et se contente de l’imiter en fin de soirée. Deux femmes autour d’une légende de la chanson espagnole. Le film de Carlos Vermut utilise la ficelle usée de la fan face à son idole.
Mais il transforme cette relation, trop souvent binaire et simpliste, en véritable introspection des deux femmes qui, en se reconnaissant un peu l’une dans l’autre, vont se remettre radicalement en cause. Avant d’arriver à ce « duel », le spectateur est plongé dans le monde étrange de Lila.
Cette chanteuse, très célèbre, a cessé de se produire sur scène depuis dix ans. L’argent commençant à manquer, son agent, un comeback est programmé.
Deux femmes et une star
Mais à deux mois du premier concert à Madrid, Lila est retrouvée inconsciente sur la plage bordant sa belle maison. Quand elle se réveille à l’hôpital, elle est devenue amnésique. Pour lui rendre sa personnalité, sa meilleure amie embauche Violeta, sa plus grande fan, celle qui connaît toutes les chansons de Lila par cœur et le moindre détail de sa vie.
Cette rencontre va radicalement réorienter la vie des deux femmes à un tournant de leur existence. Le film, un peu long parfois, vaut surtout pour l’interprétation des deux comédiennes principales. Elles sont différentes mais doivent pourtant s’accaparer la personnalité de celle qui écrase tout sur son passage : la star. Lila car elle ne se souvient plus de sa vie d’avant. Violeta car de plus en plus elle se rêve à la place de sa chanteuse préférée.
Film noir, à l’ambiance trouble et malsaine, sur une dualité complexe et maladive, il ne donne pas toutes les clés. Dans le dossier de presse, Carlos Vermut, le réalisateur de « Quien te cantara », précise son but : que le spectateur « passe un bon moment, qu’il soit perdu, qu’il soit ému, qu’il nourrisse les blancs du film par son propre imaginaire ou alors qu’il savoure le mystère qui échappe. »
Mystère. C’est le mot exact pour définir la fin, étonnante, déroutante et diablement mystérieuse.
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Duel musical
La musique tient une place prépondérante dans le film de Carlos Verlut. Si la bande originale est d’Alberto Iglesias, le compositeur attitré de Pedro Aldomovar, il y a aussi nombre de chansons romantiques comme l’Espagne aime en produire. Les amoureux du genre seront comblés avec plusieurs extraits et même une chanson complète à la fin du film, avec un trucage virtuose à la clé pour « boucler » le film. Mais quand Marta (Natalia de Molina) la fille de Violeta intervient, cette boule de nerfs à la violence explosive n’en a cure des romances.
Ce qui lui plaît c’est le défoulement extrême sur des rythmes modernes. Au bord de la plage ou dans sa chambre, place à la techno, brutale, agressive, assourdissante. L’opposé de la musique que sa mère aime. Ce duel musical et de générations passe par une opposition radicale des genres. La douceur, l’émotion et la mélancolie contre l’ardeur, la force et l’abrutissement.
Les deux styles permettent de mieux cerner l’opposition des deux femmes, la mère et sa fille. La plus jeune, autoritaire, exclusive et intransigeante domine littéralement sa génitrice. Mais cette dernière, grâce à Lila, va trouver les forces pour inverser la tendance. Quel qu’en soit le prix à payer.
➤ « Quién te cantará », drame de Carlos Vermut (Espagne, 2 h 02) avec Najwa Nimri, Eva Llorach, Carme Elias.
mercredi 24 octobre 2018
DVD et blu-ray : l'avocat japonais tourmenté de "The Third Murder"
Un avocat japonais est chargé de défendre un homme accusé du meurtre de son patron. Pour tenter d’éviter la peine de mort, l’accusé prétend que c’est la femme du mort qui a commandité l’assassinat. Mais l’avocat doute de la véracité de la version officielle. Ce thriller de Hirokazu Kore-eda raconte avec minutie le travail d’un avocat. Son empathie pour aider le client, ses doutes et failles personnelles.
Un film noir et oppressant, à l’intrigue implacable.
➤ « The Third Murder », Le Pacte, 19,99 €
Un film noir et oppressant, à l’intrigue implacable.
➤ « The Third Murder », Le Pacte, 19,99 €
mardi 23 octobre 2018
Série - The Haunting Hill House, une maison hantée à voir sur Netflix
Depuis le début du mois, vous pouvez voir sur Netflix une de ces séries qui n’en finissent pas de faire parler d’elles. De vous hanter aussi si vous y avez succombé. « The Haunting Hill House », série en 10 épisodes, est signée Mike Flanagan, le nouveau maître incontesté de l’horreur (Pas un bruit, Ouija).
Chaque épisode présente les différents membres de la famille Hill. De Steve, écrivain qui a connu la gloire en racontant l’histoire de la maison hantée à Luke, drogué en perdition en passant par le père ou la fille aînée, devenue croque-mort. Chacun se remémore ces mois passés dans la maison hantée, les hallucinations et nuits cauchemardesques jusqu’à la fuite en pleine nuit.
Toute la réussite du film est de raconter avec les visions multiples une même histoire. Série comportant quelques moments virtuoses comme ce plan séquence de 15 minutes aux obsèques de la sœur jumelle de Luke. Cela vaut largement tous les films d’horreurs programmés dans les cinémas depuis le début d’année…
lundi 22 octobre 2018
Livre sur le cinéma - Steve McQueen, le prince des bolides
Beau gosse emblématique du cinéma américain, Steve McQueen était un passionné de vitesse. Il l’a montré dans ses films, mais dans la vie privée il s’offrait souvent un tour en bolide. Ce beau livre, parfait pour les amateurs de cinéma et de voitures de légendes, revient sur la passion dévorante de l’acteur pour la course automobile.
Avant un superbe portfolio et une filmographie exhaustive de sa carrière à la télévision et au cinéma, Guillaume Evin raconte la vie à 100 à l’heure de cet acteur qui aime piloter ou de ce pilote qui aime jouer à l’acteur. Car en plus de ses succès dans les salles obscures, Steve McQueen a participé à quantité de courses récoltant d’autres lauriers.
➤ « Steve McQueen, king of cool » de Guillaume Evin, Hugo Motors, 272 pages, 35 €
dimanche 21 octobre 2018
BD - Un détective à l’ancienne
Nom : Vercorian. Prénom : Atom. Particularité : fils d’un flic parisien d’origine arménienne, ancien grand Résistant. Le nouveau héros imaginé par Yann et dessiné par Olivier Schwartz est résolument vintage. L’action de sa première enquête se déroule à l’été 49. Le jeune Atom veut prouver à son père, grand ponte de la PJ, qu’il vaut autant que lui. Il se rêve détective privé et profite d’un fait divers retentissant pour se lancer dans sa première affaire.
Dans le sud, le Bégum, la femme de l’Aga Khan, vient de se faire dérober ses bijoux dans un « carjacking » avant l’heure. Atom est flanqué de son assistante, la belle et intrépide Mimi et d’un associé-financeur, Jojo la Toupie, colosse qui a connu son heure de gloire dans le milieu du catch.
Un trio explosif pour une enquête menée à 100 à l’heure, entre la Riviera, les bas-fonds de Paris et la banlieue. Délicieusement nostalgique (mais avec un peu de parodie et de sarcasme, Yann oblige) d’une époque qui a fait les beaux jours de BD à la Tillieux avec un trait proche de Jijé, les aventures d’Atom ne devraient pas passionner les jeunes mais rencontrer un réel enthousiasme auprès des vieux collectionneurs.
« Atom Agency » (tome 1), Dupuis, 15,95 €
samedi 20 octobre 2018
Roman - Pascal Bruckner nous offre un cauchemar le temps d'une nuit ou d'une année
Si vos nuits sont déjà un peu agitées en raison de cauchemars récurrents et troublants, évitez ce roman de Pascal Bruckner. Ou au choix dévorez-le en une nuit blanche. Ainsi vous n’aurez pas de cauchemar, même si les mésaventures de Jézabel valent largement toutes les inventions paranoïaques de votre inconscient. Pascal Bruckner, dans une veine fantastique qu’il apprécie tant, renoue avec les dédales du temps.
En route pour le Canada afin de présenter à un ami de son père une montre particulière, Jézabel croit sa dernière heure arrivée lors d’une violente tempête. L’avion de ligne, chahuté, est détourné vers le Maine aux USA. De là, elle rejoint un hô- tel perdu dans les montagnes avant d’espérer prendre un bus pour le Canada quand les conditions météo le permettront. Un hôtel étrange, immense, silencieux et sinistre.
En rejoignant la chambre, elle croise pour une première rencontre avec les Insomniaques : « Au loin apparut, accoudé à la balustrade de l’entresol, un trio de vieux messieurs, debout à cette heure, un manchot, un bossu et un boiteux avec leurs cannes qui la fixaient sans mot dire. Ils sautillaient, vifs et agités, malgré leurs handicaps ». Une ambiance étrange, à la Shinning, qui ne l’empêche pas de sombrer dans le sommeil après 24 heures éprouvantes.
A son réveil, elle découvre qu’elle a dormi une année complète. Rêve ou réalité, jamais le lecteur ne sait où est la frontière. Un peu comme si le présent, le passé et l’avenir se mélangeaient allègrement dans un récit alambiqué. Avec Jézabel, on résiste pour ne pas sombrer dans la folie.
➤ « Un an et un jour » de Pascal Bruckner, Grasset, 18 €
➤ L’adaptation en BD de son roman « Les voleurs de beauté », prix Renaudot, vient de sortir aux éditions Glénat
En route pour le Canada afin de présenter à un ami de son père une montre particulière, Jézabel croit sa dernière heure arrivée lors d’une violente tempête. L’avion de ligne, chahuté, est détourné vers le Maine aux USA. De là, elle rejoint un hô- tel perdu dans les montagnes avant d’espérer prendre un bus pour le Canada quand les conditions météo le permettront. Un hôtel étrange, immense, silencieux et sinistre.
En rejoignant la chambre, elle croise pour une première rencontre avec les Insomniaques : « Au loin apparut, accoudé à la balustrade de l’entresol, un trio de vieux messieurs, debout à cette heure, un manchot, un bossu et un boiteux avec leurs cannes qui la fixaient sans mot dire. Ils sautillaient, vifs et agités, malgré leurs handicaps ». Une ambiance étrange, à la Shinning, qui ne l’empêche pas de sombrer dans le sommeil après 24 heures éprouvantes.
A son réveil, elle découvre qu’elle a dormi une année complète. Rêve ou réalité, jamais le lecteur ne sait où est la frontière. Un peu comme si le présent, le passé et l’avenir se mélangeaient allègrement dans un récit alambiqué. Avec Jézabel, on résiste pour ne pas sombrer dans la folie.
➤ « Un an et un jour » de Pascal Bruckner, Grasset, 18 €
➤ L’adaptation en BD de son roman « Les voleurs de beauté », prix Renaudot, vient de sortir aux éditions Glénat
vendredi 19 octobre 2018
Roman - Sur la trace de Federica Ber, la belle disparue
Qui était Federica Ber ? Qu’est-elle devenue ? Ces deux interrogations sont au centre du roman de Mark Greene. Le narrateur se souvient de cette belle Italienne qui lui a fait découvrir les toits de Paris quand il était jeune.
Aujourd’hui elle est suspectée dans la mort d’un couple d’architectes découvert attachés au pied d’une muraille rocheuse des Dolomites. Entre ces récits distincts, l’auteur aurait pu signer un faux polar, avec rebondissements et coups de théâtre. Il a préféré jouer à fond la nostalgie. Les souvenirs de cet été magique. Puis la disparition de cette femme libre, visionnaire. Cela donne deux histoires d’amours incomplètes, inachevées. Marquées par le destin. Un roman fort et vertigineux.
➤ « Federica Ber » de Mark Greene, Grasset, 18 €
jeudi 18 octobre 2018
BD - Valise mystérieuse et camions du diable
L’histoire ne compte que huit planches dont une dernière inédite. L’essentiel de l’embryon de récit tourne autour d’une valise, dérobée par un vagabond et qui, en découvrant ce qu’elle contient, préfère s’en débarrasser immédiatement en la jetant dans une mare. Que contenait cette valise ? La question est restée sans réponse durant des décennies. Tillieux, qui travaillait à l’époque comme un feuilletoniste, n’avait pas encore pensé à la suite de l’histoire. Risque-Tout abandonné, il lâche Marc Jaguar pour se consacrer à son autre série vedette, Gil Jourdan. Ce n’est que 50 ans plus tard que Walthéry et Borgers ont osé imaginer une suite aux « Camions du diable ». Le dessin en a été confié à Delvaux, grand spécialiste des voitures de l’époque. Cela donne un album hommage, dans l’esprit, avec pour boucler la boucle, la reproduction des planches dessinées par Tillieux. Le Marc Jaguar « moderne », de journaliste, se transforme en détective privé et même espion, n’hésitant pas à utiliser la manière forte quand il se retrouve en position délicate. Courses-poursuites, bagarres, intrigues, trahisons, secret d’État, le tout saupoudré de quelques clins d’œil en référence à Zappy Max ou César et son incorrigible fillette, autres personnages du prolifique Tillieux.
« Marc Jaguar, les camions du diable », Dupuis, 17,50 €
mercredi 17 octobre 2018
BD - Ouvrir la boîte de ses origines
Ses parents sont Coréens. Ils vivent en France depuis longtemps. Elle y est née comme son petit frère. Mais quand la mère meurt dans un accident de la route et que son père se retrouve dans le coma, Claire va devoir se plonger dans les papiers de la famille et découvrir qu’elle a été adoptée à l’âge d’un an. Elle a été trouvée dans une babybox. Pour faire le deuil de sa mère qui ne l’était pas, elle va en Corée pour tenter de retrouver sa véritable mère. Un récit initiatique peut-être encore plus fort que les mémoires dessinées de Jung, « Couleur de peau : miel ».
« Babybox », Soleil Noctambule, 18,95 €
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