mardi 11 août 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Chat sachant chasser des chaussettes


La France compte 12 millions de chats domestiques. A quel point influencent-ils la biodiversité ? Des chercheurs du Muséum national d'histoire naturelle lancent une vaste étude sur nos amis ronronnants. S'ils équipent quelques matous d'une balise GPS (pour suivre en direct leur parcours de chasseurs), le gros de l'étude sera fourni directement par nous, les maîtres. Un site internet permet de renseigner le type de proie que nos « chatminous » ramènent. Sur le formulaire, plusieurs options : mammifère (souris), reptile (du simple lézard à la vipère) ou oiseau (moineau ou plus rare troglodyte mignon). Nous avons trois chats à la maison. La plus âgée a beaucoup chassé dans sa jeunesse. Aujourd'hui elle se contente de dormir 23 heures sur 24. 
Les deux plus jeunes ne semblent pas constituer des exemples très représentatifs. Ils ont toujours un instinct de chasse assez poussé, mais n'influent plus sur la biodiversité. Marcel, beau mâle de 8 kilos, toujours affamé, ne chasse plus que les sachets de croquettes. Même en haut d'une étagère, il est capable s'escalader cette dernière pour déchiqueter l'emballage. Sa sœur Jane, gentille petite femelle, se révèle encore plus bizarre. Tout ce qu'elle chasse, elle le ramène à nos pieds. 
Cependant, elle dédaigne les petits animaux au profit des... chaussettes sales. Elle attaque régulièrement la panière et déterre ces bouts de tissu qu'elle ramène fièrement en miaulant de plaisir. J'ai bien cherché dans le formulaire des chercheurs, il n'existe pas de catégorie « habits ». Donc, nos chats sachant chasser des chaussettes sècheront la recherche.

BD - Un dessinateur sachant parodier


Michel Rodrigue a de la suite dans les idées. Ce dessinateur, expert en style franco-belge, a débuté à la fin des années 80 en participant à un album collectif de parodie d'Astérix. Il a par la suite acquis ses lettres de noblesse en reprenant les aventures de Clifton puis celles de Cubitus. Ce milieu de la BD, il adore et maîtrise à la perfection. Il a donc délaissé, le temps de cet album hors collection, ses personnages préférés pour signer une « parodie » loufoque et bourrée de clins d'œil. 
Le gros de l'album est le mélange improbable de l'univers de Thorgal et de XIII. L'enfant des étoiles, Thoraxe, adopté par un clan viking, tente de séduire la belle Aarissa. Mais un inconnu débarque un matin, un amnésique, beau comme un dieu et tatoué sur l'épaule d'un énigmatique « XIII & 1/2 » Les deux héros vont s'écharper comme le montre la couverture, parodie elle aussi de l'album d'Astérix, « La zizanie ». 
Rodrigue n'étant pas avare de caricatures dans ce 46 pages, glisse quelques figures incontournables du 9e art qui en prennent pour leur grade. Alix et Enak, en couple homo aux relations assez troubles, le professeur Tournesol en mode Léonard, Sœur Marie-Thérèse des Batignolles ou Michel Vaillant en preux chevalier. On a même droit à la participation de Dark Vador et du troll Hébus de l'univers de Troy
Un album à lire en deux temps. Premièrement profitez de l'histoire et des dialogues parfois surréalistes, puis reprenez chaque planche et cherchez les « petites bêtes » comme Blacksad, Cubitus ou l'hommage à la série Croisade de Jean Dufaux qui signe la préface de cette désopilante « Parodie ».
« La parodie » de Michel Rodrigue, Lombard, 12 €

lundi 10 août 2015

SF - La fabrique des Dieux selon Serge Brussolo

Lâchez trois petits dieux sur une planète déserte, mettez-les au travail et vous obtenez un roman de science-fiction foisonnant signé Serge Brussolo, un maître du genre.


Sans limite. Les romans de Serge Brussolo, notamment de science-fiction semblent totalement sans limite. Son imagination féconde ne cesse d'élaborer mondes, peuples, planètes, sociétés et même religions. Il s'était fait un peu rare dans son domaine de prédilection pour explorer d'autres genres comme le roman historique ou le fantastique pour adolescentes (Peggy Sue). Il marque son retour dans une collection de référence : Folio SF. En plus de la réédition de ses œuvres majeures parues en « Présence du futur », il propose des romans inédits. « Frontière barbare » en 2013 et la suite cette année, « Anges de fer, Paradis d'acier ». La religion est au centre de ce roman un peu déroutant au début, mais très cohérent dès que les personnages principaux arrivent sur la planète Almoha.
David Sarella, exovétérinaire, est toujours au service du pape Nothanos III. La religion dominante a du plomb dans l'aile. Les révolutionnaires et dissidents mènent une guerre sans merci. Replié dans une forteresse craquelante, David est chargé d'alimenter les défenses aériennes en munitions. Cela donne une ouverture digne de meilleures attaques aériennes.
Le héros, vieillard dans un corps jeune, ne se console pas de la perte de sa femme. Il a tout fait pour la faire revenir à la vie. En vain. Sa situation change quand le pape (un clone du précédent) l'envoie dans un pénitencier délivrer trois détenus. Pas n'importe qui. Ce sont trois Dieux, neutralisés depuis des siècles, mais qui pourraient de nouveau être utile en cette période trouble de guerre de religion. Le roman prend alors toute son ampleur.

Un monde à créer
Une fois sa mission évasion terminée, David, accompagné de sa fille, une redoutable guerrière, vogue vers la planète Almoha. Une boule sans la moindre vie. Mais c'est là que les dieux pourront être utiles. Ils auront une semaine pour rendre Almoha fertile et vivable. Sept jours pour fabriquer un paradis destiné à accueillir les religieux persécutés sur terre. Dans le trio, David apprécie particulièrement Anatalia : « une adolescente aux cheveux roux, à la peau très blanche. Sa beauté surannée évoquait les portraits féminins de l'époque victorienne. » Ces jeunes Dieux, aux pouvoirs immenses, semblent étonnés de leur mission. Mais ils acceptent de se mettre au service du pape (un paradoxe complet).
Comme ils ont carte blanche, les trois mondes qu'ils créent chacun de leur côté est assez déroutante. Anatalia a une vision très enfantine du paradis habité par des moutons, « grosses pelotes d'une laine dont les couleurs changeaient toutes les deux minutes. Ils ne bêlaient pas produisaient à intervalles réguliers, une sonnerie téléphonique des plus incongrues. » Et tout le reste est à l'avenant, entre loufoquerie et délire cauchemardesque. Car il y a aussi quelques animaux nuisibles dans cette jeune planète comme des lions méduses ou des moustiques dont la piqûre provoque l'explosion du corps. Rapidement hors de contrôle, les dieux n'en font qu'à leur tête et réclament des sacrifices humains. Comme si le sang frais servait d'engrais à la terre depuis peu féconde de la planète.
Sous couvert d'aventures spatiales, Serge Brussolo signe une réflexion sur les dérives des religions. Entre dieux virtuels et réels, les exigences sont parfois contradictoires. Mais le clergé restera toujours le grand gagnant de l'abrutissement des masses. Même quand le grand subterfuge (la véritable grande originalité du roman) est découvert par David. Une histoire sans temps mort, avec quantité de rebondissements comme cet extraordinaire conteur sait si bien truffer ses textes jamais insipides.

« Anges de fer, paradis d'acier » de Serge Brussolo, Folio SF, 8 €


BD - Communication de guerre dans "La peur géante"


Avec une régularité de métronome, plusieurs équipes d'auteurs adaptent depuis une paire d'années les romans de Stefan Wul. Si le triptyque « Piège sur Zarkass » (Cassegrain et Yann) est bouclé, Lapière et Reynès n'en sont qu'au second album de « La peur géante ». Dans un futur proche, la terre subit une attaque massive de créatures marines venues du fond des abysses. Elles provoquent la fonte des pôles pour élever le niveau des océans. L'humanité se retrouve en partie submergée. 
« L'ennemi des profondeurs » se concentre sur la technique militaire mise en place pour contrer les torpèdes, ces créatures issues d'une évolution de la raie manta, aussi grosses que des baleines, capables de tuer par électrocution. Les héros, Bruno et Pol, militaires, apprennent à manier de nouveaux bathyscaphes en forme de méduses alors que la belle Kou-sien se charge de décrypter le langage des envahisseurs. Mais le temps presse car non seulement l'eau ne gèle plus, mais elle ne s'évapore plus. Sans nuage ni pluie, c'est toute l'Humanité qui est menacée d'extinction à brève échéance. De la SF classique, un peu trop militaire (le roman date de la fin des années 50), mais terriblement efficace et divertissante.

« La peur géante » (tome 2), Ankama, 13,90 €

dimanche 9 août 2015

BD - Maggy rime avec ennuis


Les meilleurs scénaristes humoristiques deviennent excellents quand il leur prend l'envie de changer de registre. Yann ou Tome en sont les meilleurs exemples. Lewis Trondheim marche sur leurs pas en imaginant les enquêtes de Maggy Garrisson, jeune détective privée londonienne, un peu replète, pas toujours très honnête et présentement amoureuse. Stéphane Oiry dessine toujours le second volet de ses aventures. 
Maggy, tombée sous le charme du beau mais très voyou Alex. Ensemble ils ont délesté deux flics ripoux de 30000 livres. Dont l'inspecteur Sheena, la meilleure amie de Maggy. L'histoire est composée de deux intrigues indépendantes : un contrat pour découvrir qui a dérobé les bijoux d'une femme récemment décédée et les soupçons de Sheena sur l'identité de ses agresseurs, avec l'envie de retrouver le pactole, mal acquis mais bien utile en ces temps de crise. 
Trondheim parvient à distiller une ambiance très particulière, entre filature classique et montée de la paranoïa autour des liasses de billets. La séquence au cours de laquelle Maggy se creuse les méninges pour trouver une cachette indétectable vaut à elle seule de lire cet album.

« Maggy Garrisson » (tome 2), Dupuis, 14,50 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Du cinéma à la réalité

Succès cinématographique de cet été, les Minions quittent les écrans pour s'immiscer dans la vraie vie. Et de réussir à pourrir le quotidien des gens, but premier de leur existence. Ces bestioles idiotes, apparues une premier fois dans le film « Moi, moche et méchant », ont pris leur liberté dans un long-métrage d'animation hilarant. 
Une grosse production qui bénéficie de moyens de promotion considérables. En Irlande par exemple, un Minion géant (pas moins de dix mètres de hauteur) gonflé à l'hélium flotte dans le ciel de Dublin. Qui a eu la mauvaise idée de sectionner un des câbles retenant la structure au sol ? Peut-être quelques Minions en mal de bêtises... Toujours est-il que le gros bonhomme jaune, poussé par le vent, s'est couché sur le sol. En plein au milieu d'une route très fréquentée. 
Conséquence, nombres d'Irlandais ont pu appeler leur boulot ou leur conjoint pour s'excuser d'un retard imprévu. Par contre, la cause a dû en étonner plus d'un : « Je suis bloqué par un Minion couché en travers de la chaussée... » Cette mésaventure pourrait donner des idées à certains en mal d'imagination. Vous avez boulotté tout le Nutella en cachette une nuit de fringale ? « Incroyable, Ant-Man a envahi le placard et emporté le pot de Nutella ! » 
Une bosse au pare-choc de la voiture ? « Tu me croiras si tu veux, mais La Chose, des « 4 Fantastiques » a traversé devant moi au feu vert... » Et pour les plus jeunes, l'échec au brevet ou au bac pourra sans difficulté être mis sur le dos des « Profs », un autre des films vedettes de l'été.

samedi 8 août 2015

DVD - Morck et Assad, flics danois atypiques du Département V


Adaptés des thrillers de Jussi Adler-Olsen, 'Miséricorde' et 'Profanation' sont deux enquêtes du Département V.Affaire classée ? Pas pour Carl Morck (Nikolaj Lie Kaas) dont c'est justement le fonds de commerce. Ce flic danois d'élite est à la tête du plus petit service du pays. Il doit se contenter d'un assistant, Assad (Fares Fares), un Syrien, touche exotique dans un thriller très noir. Les romans de Jussi Adler-Olsen, parus en France chez Albin Michel, ont rapidement rencontré un grand succès auprès des lecteurs amateurs de littérature policière scandinave.

Logiquement, cette autre pépite nordique, comme Millénium, a intéressé des producteurs de cinéma. C'est Mikkel Norgaard, jeune réalisateur danois, qui a hérité du projet. Il s'est plongé dans les romans et après de longues réflexions (racontées en détail dans le making-of), il s'est approprié cet univers. Résultat les lecteurs seront un peu déboussolés car si les personnages et les intrigues sont respectés, les caractères sont un peu modifiés.

L'autre Assad
Morck reste le flic détruit par une grosse bavure qui a causé la mort d'un collègue et provoqué la paralysie de son meilleur ami. Dépressif, alcoolique, totalement asocial, il hérite du département V, un service chargé de classer les affaires non résolues. Sa feuille de route est simple : clôturer trois affaires par semaine. Mais ce limier, infatigable chercheur de vérité, à l'encontre de sa hiérarchie, préfère rouvrir des dossiers mal ficelés. Dans Miséricorde, le premier volet, il tente de tirer au clair la disparition d'une jeune femme politique. Il y a cinq ans, Merete Lynggaard (Sonja Richter), prend un ferry avec son frère handicapé mental. À l'arrivée, elle a disparu. Les policiers concluent à un suicide. Morck n'y croit pas et va finalement retrouver Merete.

Le second film, Profanation, une bande de jeunes aisés, pour se procurer quelques pics d'adrénaline, laissent libre cours à leur violence. Passages à tabac puis meurtres les transforment en tueurs sans la moindre empathie. Devenus adultes, personnalités influentes, ils voient d'un très mauvais œil l'arrivée de Morck dans leurs affaires de jeunesse. Les films, un peu moins sombres que les romans, perdent un peu de leur saveur avec la modification des caractères d'Assad et Rose. Le premier, de petit, bedonnant et chauve, devient un grand flic baraqué, toujours musulman mais beaucoup plus sûr de lui. Quant à Rose (Johanne Louise Schmidt), exit la gothique provocatrice imaginée par Jussi Adler-Olsen. Elle laisse la place à une secrétaire timide et insipide, juste identifiée par une chevelure rousse là où l'originale avait "une coiffure ébouriffée ultra-courte et noire, des yeux de jais et des vêtements plus sombres que sombres.".
Les deux films sont cependant très efficaces, bien menés, avec un tempo haletant. Mais là où les films adaptés des romans de Stieg Larsson conservaient la force de l'original, ces enquêtes du Département V semblent beaucoup plus quelconques. Dommage, le duo Morck Assad aurait certainement pu devenir aussi célèbre que celui formé par Blomkvist et Lisbeth.
"Miséricorde" et "Profanation", Wild Side, 12,99 euros les DVD, 17,99 euros les blu-ray (sortie le 8 août).

vendredi 7 août 2015

BD - Le rock en famille de Jano et Baru


Dix ans que Jano n'avait pas publié de BD. Le créateur de Kébra, après quelques aventures en Afrique, semblait retiré des affaires. Heureusement Baru l'a sorti de sa retraite anticipée en lui écrivant un superbe scénario bourré de rock, de baston et d'ambiances américaines. Retour gagnant avec la rencontre de ces deux anciens, icônes de la BD rock des années 80. Tout commence par la découverte dans un grenier d'un vieil électrophone et de quelques 45 tours des années 50. 
Jérémie, alias King Automatic, musicien à ses heures perdues, va se lancer sur les traces de sa grand-mère, mystérieusement disparue au début des années 60. En fait, la jeune femme, mère de famille en mal de sensations, a craqué pour un de ces GI's venus libérer l'Europe. Elle a tout plaqué pour suivre Johnny Jano, chanteur de rockabilly de Louisiane. 
Avec une simple adresse découverte sur une vieille carte postale, Jérémie et son frère vont mener l'enquête et se découvrir une seconde famille, « The Four Roses ». 
Ces 70 pages, entre concerts rétro et plongée dans le bayou actuel sont un pur délice que l'on peut prolonger en écoutant un 45 tours offert dans la première édition de cet album qui passionnera les nostalgiques du rock simple et basique.

« The Four Roses », Futuropolis, 20 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Parking trop étroit

Évidemment, à force de me moquer, ça me pendait au bout du nez. Un retour de bâton carabiné qui fait réfléchir. Hier matin, je découvre une information qui me réjouit. Outre qu'elle me fait sourire, elle me donne un sujet de chronique rêvé. L'aéroport de Francfort suscite la polémique outre-Rhin après avoir installé dans son parking des places plus larges destinées aux conductrices
Dans le genre cliché misogyne, difficile de faire pire. De plus, ces places sont signalées par un rose vif, comme pour renforcer la caricature. Et de me remémorer toutes ces maximes négatives, « Femme au volant... » Je me mets à ruminer sur ce thème, à collecter des vidéos de conductrices maladroites qui, en se garant emboutissent une dizaine de voitures ou cette autre qui défonce une barrière de parking souterrain après avoir mis son ticket dans la borne. 
Mais avant de me lancer dans la rédaction d'un texte drôle et incisif, je me rappelle que je dois faire une course urgente. Je prends donc la voiture, file au supermarché (à 700 mètres de la maison, mon empreinte carbone est abominable), conduit distraitement, obnubilé par l'invention de jeux de mot autour des femmes au volant. 
Pas assez concentré, arrivé sur le parking quasi vide, j'évalue mal la distance avec l'arête d'une bordure. Boum ! Le pneu avant droit explose. En plein cagnard je change la roue et me maudis. Comme si toutes les femmes (dont la mienne qui effectue des créneaux impeccables) s'étaient vengées par anticipation de mes intentions moqueuses. 
Et de songer que si la place avait été plus large, mon pneu n'aurait pas fini en lambeaux. 

jeudi 6 août 2015

Roman - Hawaï et son singe d'or

Humour non stop dans ce roman tropical déjanté de Jack Handey, célèbre gagman américain.

Hawaï, pour une majorité de Français ce sont des images de cartes postales. Des surfers bronzés, des vahinés peu vêtues voire des policiers télégéniques pour les adeptes des séries américaines du samedi soir sur M6. Il existe un autre Hawaï, celui décrit dans le roman de Jack Handey, auteur américain devenu célèbre après avoir multiplié les brèves anecdotes absurdes dans le revue d'humour « National Lampoon » puis en prêtant sa plume à l'émission satirique « Saturday Night Show », véritable institution télévisée outre-Atlantique. Ce roi du bref, de la réplique cinglante, de la situation absurde s'essaye pour la première fois au roman. Une histoire découpée en courts chapitres (plus de 80) eux-mêmes truffés de dizaines de situations cocasses et invraisemblables. Au total 200 pages et pas moins de 1000 images ou scènes incongrues. On en a pour son argent.
A la base, le narrateur, à priori Jack Handey himself, raconte comment il fait l'acquisition d'une mystérieuse carte indiquant la cachette d'un singe d'or caché dans la jungle près d'Honolulu. Comme il est passablement fauché il saute sur l'occasion. Il est vrai qu'il est au bout du bout au niveau social : « Je songeai un instant à aller réclamer une aide sociale, mais j'étais trop fier pour cela. Je décidai de mendier. Mais il faut se lever de bonne heure pour pouvoir concurrencer les lépreux, les amputés, sans parler des orphelins affamés. » Arrivé à Hawaï, il dégote un boulot de « gardien de crabes sur la plage ». Très fatigant : « Chaque soir, je revenais en marchant de travers comme on dit dans le métier ».

Cannibales et hommes-tortues
Vient le grand départ pour la quête du singe d'or. Mais on ne s'improvise pas Indiana Jones quand on ne fait pas la différence entre une antiquité et un simple bibelot pour touristes comme cette danseuse de hula fabriquée en « puantoxite, la forme solide de la puanteur. L'essence pure et cristalline de la puanteur ». Une statuette qui a de plus le pouvoir de « déclencher des catastrophes en chaîne quand on la dépose sur (je ne me rappelle plus quoi). »
Voilà donc notre aventurier en train de remonter les méandres d'une rivière hawaïenne ressemblant plus à l'Amazone qu'à un paisible cours d'eau. Les dangers sont multiples, du diabolique docteur Ponzari, lui aussi à la recherche du singe en passant par les hommes-tortues ou la bizarre tribu des Patangis, aux dictons étonnants comme « Purée de pois au réveil, matelot au dîner. » Il est vrai que « comme beaucoup d'autres tribus, ils pratiquaient le cannibalisme, mais ils n'obligeaient personne à les imiter. » Le roman, bourré de running gags (avec la danseuse de hula ou le docteur Ponzari) est mené à un train d'enfer, multipliant les invraisemblances donnant tout son sel à ces histoires totalement tarabiscotées. Un régal pour les amateurs de non sens. 

« Mésaventures à Honolulu », Jack Handey, Seuil, 16 euros