mercredi 29 juillet 2015

DVD - La réalité pour ultime inspiration

Un flic, par ailleurs écrivain, devient le « nègre », d'un redoutable assassin. « Pacte avec un tueur » est un film noir, typique des années 80.Blessé dans un hold-up, un policier en fait un best-seller. Des années plus tard, sans inspiration, un tueur va lui proposer de raconter sa vie jalonnée de meurtres. Avec deux objectifs : être le "gentil" de l'histoire et dénoncer les magouilles de son ancien patron, un riche homme d'affaires de Californie. Le scénario, alléchant, est signé Larry Cohen, une pointure dans sa catégorie. Lancé avec la création de la série des "Envahisseurs", il a multiplié les scripts, les vendant aux plus offrants, se réservant quelques réalisations, généralement les plus gore comme la série des "Monstres".


"Pacte avec un tueur" est longtemps resté dans les cartons des maisons de production. Larry Cohen espérait des "superstars" pour interpréter les deux rôles principaux. Finalement ce sera James Woods pour Cleve, le tueur et Brian Dennehy en policier, connu sous son nom de plume, Dennis Meechum

Après une scène d'ouverture nerveuse et sanglante (un hold-up dans le dépôt du commissariat où Dennis officie), on retrouve le flic dans une descente sur le port. Un peu enrobé, il a toutes les peines à suivre un voleur de diamants. D'ailleurs ce dernier est sur le point de lui tirer dessus quand un tueur providentiel fait son apparition et lui sauve la vie. Cleve tient à Dennis car il est persuadé que ce dernier est l'homme idéal pour raconter sa vie, son œuvre. Depuis une vingtaine d'années, Cleve officie comme tueur à gages pour un riche magnat. Licencié comme un malpropre, il veut se venger en dévoilant comment le milliardaire a acquis son pactole. Dennis, s'il refuse dans un premier temps, accepte car il n'a plus d'inspiration et ses éditeurs lui mettent de plus en plus la pression. Typique des films des années 80 s'appuyant sur un duo désapparié, "Pacte avec un tueur" est réalisé par John Flynn dont le plus gros succès reste "Haute Sécurité" avec Stallone.

Larry Cohen dans le texte
La sortie du film en DVD permet de retrouver cette ambiance des années 80, quand fumer partout était permis et que l'absence de téléphones portables simplifiait certains rebondissements. L'époque aussi où les producteurs avaient toujours le dernier mot. Dans les bonus, Larry Cohen revient sur la genèse de ce film et sa fin qu'il qualifie de "catastrophique". Il est vrai que la scène finale confine au ridicule quand la fille de Dennis se précipite dans les bras du méchant, armé de surcroît, se transformant en otage idiote et pathétique. Dans cette même interview de Larry Cohen, il distille avec fiel des piques sur les acteurs et les producteurs, révélant au passage qu'en plus de sa forte paranoïa (c'est toute la trame des Envahisseurs) il souffre d'une excroissance de l'ego quand il déclare sans ambages que le film aurait forcément été meilleur si c'était lui qui l'avait réalisé...
"Pacte avec un tueur", Wild Side, 19,99 euros le DVD, 24,99 euros le blu-ray


BD - Mobutu s'envoie en l'air


Le Zaïre, anciennement Congo Belge continue de fasciner la bande dessinée francophone depuis les très polémiques aventures de Tintin dans la colonie créée de toute pièce par le roi Léopold II. Pourtant Aurélien Ducoudray et Eddy Vaccaro ne sont pas Belges. Français bon teint ils racontent dans de roman graphique de plus de 100 pages un pan méconnu de l'histoire du pays longtemps sous la coupe du dictateur sanguinaire Mobutu. Désireux de propulser son pays au firmament des nations africaines, il voulait placer un satellite zaïrois en orbite. Pour la gloriole, mais aussi (et surtout) espionner ses voisins. Il passe un accord avec une société privée allemande à qui il assure logistique et protection. En 1978, alors que les Français sont aux balbutiement du programme Ariane, Mobutu est sur le point de réussir son pari. La base est opérationnelle et le petit-fils de Von Braun est aux manettes. La BD raconte comment un jeune ingénieur, Manfred, va se retrouver au centre de ce mic-mac compliqué, petit Blanc manipulé par de grands Noirs. Paradoxalement, le plus sympathique dans cette histoire semble Mobutu. Ou du moins le plus réaliste et le moins retors. Edifiant.

« Mobutu dans l'espace », Futuropolis, 18 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Lointaines vacances

Il faut se rendre à la raison, les vacances sont terminées. Ma semaine à la campagne n'est plus qu'un lointain souvenir. Retour au train-train quotidien et dans quelques jours aux horaires de bureau. Mais à peine les valises déballées, on se met à rêver à de nouvelles destinations. « La Polynésie française » suggère mon épouse toujours prompte à la nostalgie et au romantisme. « On y a déjà vécu, répliqué-je. Quitte à aller très loin je te propose plutôt Kepler-452b. » Mon imagination, nourrie de centaines de romans de SF, tente de la convaincre. « Kepler452b est une exoplanète. Semblable à la terre, elle tourne autour d'une étoile comparable au soleil. Nous aurons une planète vierge pour nous tout seuls. Des continents à explorer, des plages désertes. Comme dans les romans de Brussolo ou les BD de Léo, on découvrira de nouvelles espèces animales ou végétales, des fleurs géantes d'une couleur inconnue et des êtres de lumière, aussi éphémères qu'un coucher de soleil, aussi beaux qu'une nuit de pleine lune. Des profondeurs des océans jailliront des mammifères doux et intelligents, comme les dauphins, mais en plus « lolcat ». Tels deux nouveaux Adam et Eve, nous vivrons dans un paradis pur et non souillé par les Parisiens ou pire, de pseudo-stars de la téléréalité. De vraies vacances de rêve, sans Tour de France ni Fort Boyard... » Elle me considère d'un air attendri, pianote sur l'ordi et me rétorque, ironique : « Chéri, Kepler452b est à 1400 km années-lumière de la maison. Soit un voyage de 1,3 million de kilomètres puissance 16. Ça va nous coûter un bras. »

mardi 28 juillet 2015

BD - Vie de Chien

La mode des blogs BD a permis à nombre d'auteurs de se lancer dans l'autofiction. Souvent une psychanalyse au rabais avec quelques lecteurs mongoliens pour avancer dans des commentaires soit laudateurs, soit clairement trollesques. Et puis il y a les autres. Ceux qui dessinent vite et bien, qui ont plein de choses à raconter mais qui préfèrent transformer le tout en délire compulsif. Monsieur Le Chien dénote déjà dans son pseudonyme. Petit, poilu, laid, méchant, égocentrique, de droite et obsédé sexuel, il a tout pour plaire. On pense à une caricature extrême, mais au fil des pages de gags et autres histoires courtes reprises dans le 4e volet de ses aventures, on se dit que finalement, le portrait semble assez crédible. 
Notamment quand il raconte sa vie de famille (Hélène une compagne aux gros seins et ses deux enfants, dont une fillette fan de licorne...). Il tente de jouer son rôle de père. En vain. Logique quand on sait qu'il ne se lave pas, pue des pieds et ne crache jamais sur les expériences sexuelles extrêmes. On le déteste. Et puis on se reconnaît un peu. Et quand il se fait larguer, on se lamente en sa compagnie. Etrange comme les pires salauds parviennent à émouvoir. Mais même les chiens sont attendrissants...

« Homuncule », Fluide Glacial, 16 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Mon GPS déraille

Cap au sud. Villégiature terminée dans ce département verdoyant du Nord de la région, retour vers le Languedoc chaud et sec. Si à l'aller, nous avions opté pour la route « Est », passant par le Pas de l'Escalette et le viaduc de Millau, pour rejoindre Perpignan, on opte cette fois en faveur du trajet « Ouest », via Toulouse et Castelnaudary. Comme à chaque périple de plus de 200 km, je sors le GPS de la boîte à gants et planifie le trajet. A l'aller, malgré une mise à jour des cartes, il a souvent déraillé, ne reconnaissant pas les infrastructures récentes. Rebelote en sens inverse. Un œil sur la route, un autre sur la carte en couleur, je me retrouve tout à coup dans les champs. En réalité nous circulons à 100 km/h sur une superbe 2x2 voies. D'après Oncle « Tom », nous sommes en pleine campagne, loin du trajet recommandé. S'il disait vrai, je devrais faire du gymkhana entre les énormes ballots de paille dispersés sur les chaumes ou slalomer parmi les troupeaux de ruminants. Par chance, le son est coupé. Sinon nous aurions eu droit à la voix féminine autoritaire « Faites demi-tour dès que possible ! », voire des cris d'hystérie (même si les machines paniquent rarement) : « Attention aux vaches ! » Les panneaux me confirme la bonne direction, je file et quand le GPS a enfin recalculé l'itinéraire je constate satisfait avoir gagné cinq bonnes minutes. Sympa le raccourci. Le plus impressionnant restera ce viaduc non répertorié. Si la formule avait été en mémoire, mon GPS m'aurait certainement dit : « Attention, vous venez de décoller... » 

lundi 27 juillet 2015

BD - Le bon filon de Christophe Bec


Certains aigris pourraient lui reprocher de ne pas beaucoup se renouveler. Certes les multiples scénarios de Christophe Bec ont un air de similitude indéniable. Mais n'est-ce pas, également, le signe de la parfaite cohérence de son univers ? Il ne faut pas prendre chacun de ses albums pour une création différente, mais comme une piste nouvelle de son oeuvre suprême. Que cela soit aux Humanoïdes, chez Soleil et maintenant aux éditions Casterman il est toujours question de puissance supérieure face à notre infinie médiocrité, notre fragilité et manque de clairvoyance. « Eternum » débute par la découverte d'un sarcophage dans les entrailles de la lune minière Aldéma, au milieu de la voie lactée. Il dégage un rayon lumineux intense se propageant au-delà des limites connues de l'univers. 
Quelques semaines plus tard, tous les hommes de la colonie se sont entretués. Des scientifiques arrivent pour tenter de comprendre ce qui se passe. Dans le sarcophage, une femme, image de la perfection, en état de semi coma. Eve ? Quand un second rayon lumineux fait son apparition, l'Humanité tremble. Ouvertement inspirée des grands films de science-fiction des années 80, cette série est née de l'envie de Jaouen de dessiner ce genre d'univers. On approuve à 100%

« Eternum », Casterman, 13,50 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Les fantômes du presbytère

Dernière escapade dans la verdoyante campagne de ce hameau d'un département rural de la région. Logés chez des amis, ils nous ont demandé, à notre arrivée, qu'elle chambre nous préférions. La bâtisse est effectivement vaste et habituée à accueillir les grandes réunions de famille. Soit la belle et grande chambre à l'étage, dotée d'une fenêtre plein sud, soit la petite, au rez-de-chaussée, juste éclairée par un fenestron en partie caché par un rosier. Malgré son exiguïté en totale opposition avec nos trois énormes valises, mon épouse préfère cette dernière. Sachant qu'on n'y fera que dormir, elle a simplement testé les lits pour prendre sa décision. Le bon sens féminin l'emportera toujours sur l'impétuosité masculine. 
Comme nous sommes dans un presbytère, encore habité par le curé du village il y a moins de 40 ans, j'imagine sans peine que cette chambre, petite, spartiate et proche de la cuisine devait être dévolue à la bonne. La nuit je m'endors en pensant à cette vieille fille qui n'a peut-être jamais connu l'amour, esclave des temps anciens, sans congés payés et encore moins de RTT. De quoi cauchemarder. Mais pas autant que dans l'autre chambre. Elle était attribuée à la mère du curé. Vers la fin de sa vie, impotente, elle ne la quittait plus. Son fils avait alors fait abattre une partie du mur mitoyen entre église et presbytère pour qu'elle puisse assister, bien installée derrière un miroir sans tain, aux offices célébrés par son rejeton. Entre la bonne et la mère, devinez qui est venue hanter mes nuits dans le presbytère ?

dimanche 26 juillet 2015

BD - Mère, père et bébé dans trois albums sur la famille

La famille pour inspiration. Si Rodéric Valambois règle ses comptes avec une mère peu aimante, Seb Piquet raconte son quotidien de papa déjanté et Juliette Merris son apprentissage de maman. Trois BD radicalement différente, du drame poignant à l'émerveillement des premiers pas de bébé.

Roman graphique de plus de 220 pages en noir et blanc, « 
Mal de mère » de Rodéric Valambois aborde un sujet sensible et rarement évoqué dans l'univers de la BD. Cela débute comme des souvenirs de jeunesse classiques. Rodéric présente Cédric son grand frère, Vanessa sa petite soeur, son papa et sa maman. Une famille unie, normale. La mère est institutrice, le père a quitté l'enseignement pour devenir écrivain et maire de la ville. C'est du moins l'impression qu'il a quand il a 9 ans. Bien sûr ses parents se disputent parfois. Mais rien d'exceptionnel. La révélation vient un jour de Vanessa, plus clairvoyante. « Maman est alcoolique » assène-t-elle sans précaution. Trois mots et tout un univers qui s'écroule. La suite du récit entre dans le dur. Rodéric ouvre enfin les yeux. Il comprend que les bouteilles de Porto qu'il achète régulièrement chez l'épicier sont exclusivement bues par sa mère. En cachette. Il en découvre un peu partout derrière la chaudière, dans le linge sale, sous l'évier. Même dans le tas de bûchers dehors. Les disputes ? Toujours à propos de l'alcool. L'aveu, un soir à table devant toute la famille est un véritable psychodrame. Car pour expliquer son état, la mère accuse mari et enfants, qui ne l'aiment pas, la considèrent comme une bonniche à leur service. La force de ce témoignage réside dans la durée. Rodéric raconte en fait 20 ans de vie familiale, avec cure de désintoxication, rechute, déchéance physique. Adulte, il rejette cette femme qui lui a pourri son enfance. Il faut un courage certain pour dessiner cette histoire très personnelle. Mais cet album, comme la parole, est salutaire. Rodéric, devenu père lui aussi, solde tous ses comptes. Le lecteur lui prend un direct au foie et reste longtemps le souffle coupé.


La famille heureusement c'est aussi dans 99 % des cas beaucoup de bonheur. Seb Piquet est un de ces jeunes pères nouvelle génération. Graphiste, il devient papa tout en conservant une âme d'enfant. Dans sa BD « 
Père et impairs » composée de gags il raconte la joie qu'il a faire découvrir à sa petite fille ses passions d'enfance. Mais quand la gamine aux couettes veut jouer à la dinette, lui s'obstine à la déguiser en Yoda (le chevalier Jedi de la Guerre des étoiles) ou a truffer sa chambre de dinosaures et autres vaisseaux spatiaux. Dessiné dans un style très simple et efficace, ces gags raviront surtout les adolescents attardés qui envisagent de faire des enfants. N'hésitez pas, ce n'est que du bonheur.


Beaucoup de bonheur aussi chez Juliette Merris, blogueuse venue à la BD grâce à son désir de maternité. Après un premier tome où elle raconté comment elle a fait un bébé avec son compagnon, suite des aventures avec en guest-stars les couches, le caca, la gastro, les premières dents... Bébé est là. Le jeune couple amoureux se transforme en parents un peu dépassés. Mais ils assurent quand même, transformant toutes ces petites mésaventures en scènes cocasses ou à forte puissance émotionnelle. Si le premier recueil de «
 Je veux un bébé tout de suite » donnait fortement envie de faire un bébé, ce second tome va décupler votre motivation.
« Mal de mère », Soleil Quadrants, 18,95 euros
« Père ou impairs » (tome 1), Dargaud, 11,99 euros

« Je veux un bébé tout de suite » (tome 2), Hugo Desinge, 14,50 euros


samedi 25 juillet 2015

Nouvelles - Brèves existences

S'il y a bien quelques animaux dans ce recueil de nouvelles de David James Poissant, il y est surtout question d'histoires de famille, de pères notamment.


Une nouvelle permet aux bons écrivains de délaisser les longueurs nécessaires pour la bonne compréhension d'un roman pour ne se concentrer que sur l'essentiel, l'humain. Exemple parfait avec « Le paradis des animaux » de David James Poissant. Il semble avoir sélectionné deux thèmes récurrents qui lui semblaient importants et les décline sous une dizaine de formes dans autant de nouvelles. 
Il y a donc des animaux au programme. Et des pères. Exactement les relations entre un père et son fils. Si la première thématique semble la plus importante au vu du titre, en fait ce sont les rapports familiaux qui inspirent le plus le jeune auteur américain qui vit en Floride. Ainsi il raconte la rencontre entre un homme et un crocodile dans la maison du père décédé d'un ami. Une lutte presque au corps à corps pour sauver l'animal. Mais en filigrane, le narrateur pense surtout à son fils, jeune adulte qu'il a quasiment renié quand il a découvert son homosexualité. Et en transportant le reptile vers la liberté, il fait un examen de conscience : « J'aurais voulu lui dire : j'aimerais tant te comprendre. J'aurais voulu lui dire : je t'aime. Mais cela, je ne l'ai pas dit. Je ne supportais pas de dire ces mots à mon fils pour la première fois et de ne pas les entendre en retour. »

Autre ambiance dans « Remboursement ». Un jeune couple a un enfant surdoué. Si la mère fait tout pour pousser son fils à briller, le père craint de lui gâcher son enfance. La bascule se fait lors d'une soirée entre parents de surdoués où, pour la première fois ils sont invités. La mère rayonne au milieu de ces gens distingués. Le père se tétanise, s'inquiète pour son fils. Les enfants sont à l'étage. Ils jouent. En théorie. Mu par une sorte de pressentiment, il va voir et découvre son gamin : « Assis sur l'abattant des toilettes, les bras ballants, il était en slip. Une épaisse couche de rouge à lèvres s'étalait sur son visage et deux ovales écarlates encerclaient ses mamelons. Il avait la poitrine et les jambes entourées de longs rubans de papier toilette. » Ainsi sont les surdoués : cruels. Le père décide alors de ne plus considérer son fils comme une personne plus intelligente que la moyenne mais comme l'enfant qu'il est, doué certes, mais qui recherche avant tout amour, tendresse et joies simples.
Il s'agit certainement du plus beau texte, le plus optimiste, contrairement à « Amputée », un amour fugitif entre un divorcé et une mineure (animal : gecko) ou « La fin d'Aaron », folie destructrice d'un esprit paranoïaque (animal : abeilles).
Selon son éditeur, « David James Poissant est depuis quelques années l'une des sensations de la scène littéraire américaine. Ses nouvelles ont été distinguées par de nombreuses récompenses. » Vraiment rien d'étonnant ! 

« Le paradis des animaux », David James Poissant (traduction de Michel Lederer), Albin Michel, 25 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Tourisme agraire


Le tourisme autour de l'agriculture a mis du temps à s'imposer dans certains départements très ruraux. Aujourd'hui le vacancier en mal d'authenticité en a pour son argent. Les plus concernés optent pour le gîte à la ferme. Comme dans un vieux film de Georges Rouquier (« Farrebique », chef-d'œuvre du documentaire), on assiste aux travaux quotidiens des hôtes, de la traite des vaches aux moissons en passant par la collecte des œufs dans la basse-cour. Œufs dégustés le lendemain matin au petit-déjeuner arrosés de lait cru au goût incroyablement différent de celui des grandes surfaces. D'autres formules existent. Un peu plus didactiques et, il faut bien le dire, attrape-touristes. Lors de notre séjour dans ce département verdoyant du centre de la future grande région, nous avons failli visiter les allées du plus grand marché aux bestiaux du coin. Failli seulement. Deux événements nous en ont dissuadés.
La semaine précédente, un bovin s'est échappé de son box, foncé à l'aveuglette et encorné un éleveur qui y a perdu la vie. Le quotidien local a beau préciser que « les touristes naviguent quant à eux dans un espace hautement sécurisé », j'aime trop les animaux pour finir embroché comme un bête matador. L'autre réserve vient de ma femme. Une précédente visite, en ravissantes tennis blanches, s'est mal terminée. Si au début le sol est immaculé, rapidement elle s'est retrouvée à patauger dans de la paille imbibée d'urine et de bouse. Les chaussures n'y ont pas survécu. L'authenticité c'est bien joli, mais uniquement chaussé de bottes en caoutchouc.