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mercredi 11 décembre 2024

Un livre de poche : Le pire des Noëls

Amateurs de nouvelles noires, Le pire des Noëls va vous plaire. Ce recueil propose 21 textes inédits signés des meilleurs auteurs français actuels. Leur point commun : ils font partie de la Ligue de l’Imaginaire, un collectif qui veut promouvoir et défendre les littératures de l’imaginaire. Parmi les signatures, on retrouve Bernard Minier, Frank Thilliez, Maxime Chattam, Olivier Bal ou Olivier Norek.

Mais en plus de découvrir des pères Noëls retors et des réveillons horribles, vous aiderez également l’association Le rire médecin. Car une partie des droits de ce livre permettront de soutenir l’action de cette association qui organise des spectacles de clowns dans les hôpitaux.

« Le pire des Noëls », Le Livre de Poche, 240 pages, 7,90 €

lundi 9 décembre 2024

Un livre de poche - "13 à table" pour aider les Restos du Cœur


Lancée il y a dix ans par les éditions Pocket pour soutenir les Restos du cœur, l’opération 13 à table se poursuit avec de nouveau des nouvelles signées par de grands écrivains français. Un livre acheté, ce sont 5 repas de financés. Cette année, sous une couverture de Catherine Meurisse célébrant l’union qui fait la force, on retrouve au sommaire du recueil des nouvelles tournant autour du thème : dans le même bateau.

Au générique en cette année 2024 14 auteurs aux styles très diversifiés comme Sandrine Collette, Lorraine Fouchet, Karine Giebel, Raphaëlle Giordano, Christian Jacq, Marie-Hélène Lafon, Alexandra Lapierre, Marc Levy, Marcus Malte, Agnès Martin-Lugand, Étienne de Montety, François Morel, Romain Puértolas et Jacques Ravenne.
« 13 à table », Pocket, 240 pages, 5 €

vendredi 6 septembre 2024

Rentrée littéraire - Les solitudes d’Yves Harté

Yves Harté, journaliste, a rencontré nombre de solitaires dans le cadre de ses reportages. Il se souvient d’eux dans ce livre hommage où il parle aussi de la mort de son père et de sa propre solitude.

Ils sont partout mais on ne les voit pas. On les ignore. Certains le vivent mal. D’autres apprécient. Dans toute société, il y a des solitaires, des êtres qui ne s’épanouissent que dans la solitude, l’ignorance des autres. Dans son nouveau roman, Parmi d’autres solitudes, Yves Harté dresse le portrait de quelques-uns de ces hommes et femmes, perdus dans la foule tout en étant totalement ignorés d’elle.

Le journaliste à Sud-Ouest doit régler les dernières affaires de son père, mort dans un accident de la circulation. Notamment vider la maison où il s’était retiré entre Béarn et Landes, une fois à la retraite. Inventaire d’une fin de vie et dans les papiers personnels un classeur contenant les ébauches de portraits écrits des années auparavant par Yves Harté. Tout en racontant son père, Yves Harté reprend ces embryons de nouvelles du réel ayant pour point commun la solitude des personnes rencontrées. Il y a un clochard malchanceux, estropié par un camion, un fils de bonne famille, caché car alcoolique, un vieux paysan au bout du rouleau a près la perte de sa femme puis de sa chienne de chasse.
Seule femme dans le lot, Mademoiselle Anne, institutrice dans les Charente. Sa solitude est différente des autres. Car c’est dans la multitude des amants d’un soir qu’elle affirme cette envie d’oubli. Adolescente, elle était amoureuse de son grand frère. Pour contrer le sort, elle décide qu’à partir de 21 ans elle aura plein d’amants. Elle met son plan à exécution un été. « Le premier fut un homme d’un soir, à Canet-Plage, où elle passait des vacances au camping avec sa meilleure amie. Il avait une voiture de sport. Il la laissa le cœur barbouillé, un peu malheureuse et vaguement soulagée. A son retour, elle n’en parla à personne. »
Tranches de vies et exploration familiale font de ce roman un texte qui parle à tout le monde.

« Parmi d’autres solitudes » d’Yves Harté, Le Cherche Midi, 176 pages, 19 €
 

jeudi 15 août 2024

Littérature française - La vie en nouvelles


Le regard acéré et amusé de Véronique Ovaldé s’est arrêté sur huit vies imparfaites, huit existences racontées en partie dans autant de nouvelles. Un genre à part, qui est plus risqué que le roman car l’auteur doit aller à l’essentiel, oublier le superflu, ne conserver que le meilleur.

Pour que le lecteur s’y retrouve, Véronique Ovaldé a imaginé que ces différents paumés se connaissent. Collègues ou parents, tous se croisent à un moment de leur vie. Cela commence en fanfare avec Auguste, renommé par ses amis Baraka tant la vie ne lui fait pas de cadeau. D’ailleurs, quand il croit avoir fait une bonne affaire immobilière, une simple grève va ruiner ses illusions dès le lendemain. Mais il aura au moins fait la connaissance d’Eva, trop bonne, trop C…

Elle aussi saura séduire le lecteur avec ses histoires de survie en milieu hostile (un boulot de commerciale et une adolescente à la maison).

Véronique Ovaldé, en racontant les imperfections de ces huit personnages, agit comme la coiffeuse à la fin de la séance en nous montrant l’arrière de notre tête. On constate alors qu’on ne se connaît pas sous cet angle. Ce n’est pas brillant, mais cela reste une facette de notre personnalité.

« À nos vies imparfaites », Véronique Ovaldé, Flammarion, 160 pages, 19 €

mardi 30 août 2022

Polar - Nouvelles jalousies par Jo Nesbø

Un nouveau livre de Jo Nesbø est un événement pour tous les amateurs de polar et de thriller. Mais attention, De la jalousie est un recueil de nouvelles, genre qui a toujours tendance à moins satisfaire la majorité des lecteurs, plutôt avide de pavés et de récits au long cours. Le romancier norvégien qui a connu la célébrité mondiale avec les enquêtes de l’inspecteur Harry Hole propose six textes très courts et un plus long presque assimilable à un petit roman. Avec à chaque fois un problème de jalousie comme déclencheur du drame.

Dans Phtonos, la plus longue nouvelle, l’action se situe sur une petite île grecque. Un policier venu d’Athènes doit déterminer si la disparition d’un touriste américain est liée à une querelle amoureuse avec son frère jumeau. Très rapidement, le lecteur se pose des questions sur la véritable identité du suspect, son mobile et surtout où est le corps du disparu. Un engrenage fatal dans lequel le flic d’Athènes va tenter de démêler le vrai du faux, l’apparent de l’invisible.

Les autres textes, plus incisifs, ciselés telles des pierres précieuses, sont parfaits pour s’évader un bref moment, loin de notre quotidien et, qui sait, de nos crises de jalousie…

« De la jalousie » de Jo Nesbø, Gallimard, Série Noire, 19,50 €

dimanche 5 avril 2020

Littérature - Quelques nouvelles des éditions Zulma


Certes on a du temps libre en pagaille en ce moment. Surtout si vous vous retrouvez confiné et au chômage partiel. Mais ce n’est pas une raison pour dépenser des cents et des mille en livres numériques et qu’on doit s’attaquer à des œuvres de plus de 800 pages. Pour ceux qui n’ont qu’un petit appétit littéraire, l’offre des éditions Zulma est parfaite. Sous le titre futé d’« Une nouvelle pour échapper aux nouvelles », Zulma offre à toute personne se rendant sur son site internet (zulma.fr) une nouvelle extraite des livres parus chez cet éditeur parisien aux choix littéraires pointus. Une nouvelle sans la moindre contrepartie. On clique sur la couverture et elle s’affiche immédiatement à l’écran avec la possibilité de la lire sur le champ ou de la télécharger sur son disque dur, clé USB ou smartphone pour des jours meilleurs. Car trop souvent, les offres gratuites de certains éditeurs sont  conditionnées à l’obligation de laisser son email pour de futurs et probables démarchages commerciaux.

Pas de ça chez Zulma, même si vous avez la possibilité de vous inscrire pour recevoir directement par mail et chaque jour, la nouvelle offerte. L’opération a débuté avec une nouvelle d’une quarantaine de pages intitulée « Les murs ». Écrit par Vaikom Muhammad Basheer, c’est un texte lumineux d’un des écrivains les plus importants de l’Inde contemporaine.

Parmi la sélection de 9 œuvres déjà en libre accès, on retiendra celle extraite du recueil « Intérieur Nord » de Marcus Malte. L’écrivain français raconte la rencontre entre Jacques et la belle Lauren. Une nouvelle présentée ainsi par les éditions Zulma : « Jacques vit seul en montagne, avec ses chiens de traîneau. Dans son relais, il reçoit pour deux semaines la belle Lauren, accompagnée d’un homme bien plus âgé qu’elle. Quel mystère cache ce couple étrange ? Jacques s’interroge, il observe, puis se laisse emporter par une sorte d’éblouissement… »

Hubert Haddad dans le texte
Toujours dans la catégorie littérature française de qualité, osez vous plonger dans l’univers d’Hubert Haddad. La nouvelle « La belle Rémoise » est extraite du recueil « Nouvelles du jour et de la nuit : la nuit ». Selon l’éditeur « Hubert Haddad nous parle de notre être intime, de nos cauchemars comme de nos aspirations à un autre monde, avec un bonheur d’invention, une fantaisie alerte. » Un auteur que l’on retrouve à la tête de la revue Apûlée où il occupe le poste de rédacteur en chef. Et justement le 5e numéro de cette somme d’analyses littéraires fait partie des cadeaux de Zulma pour vous détourner des mauvaises nouvelles de la vraie vie.
Sur le thème générique des « Droits humains », ce sont plus de 400 pages denses et fouillées qui s’offrent à vous. Avec un éditorial signé Hubert Haddad et titré « La liberté d’être libres »…
Zulma nous régale depuis dix jours et comme les mesures de confinement sont prolongées jusqu’au 11 mai, on en aura au moins autant dans les prochaines semaines.

dimanche 30 juillet 2017

Nouvelles d’ici et d’ailleurs

Pascal Graff a enseigné aux quatre coins du monde. Dans des petits paradis comme Saint-Martin aux Antilles, ou dans des endroits moins bien lotis comme Mayotte. Il a également séjourné en Andorre. Un citoyen du monde, écrivain de toujours, partageur avec ces histoires vécues ou imaginées. « La présentation du roi » est son second recueil de nouvelles. On sera plus particulièrement sensible à cette balade autour du lac de Matemale. L’auteur y croise une famille à deux vitesses. Mais cela n’empêche pas l’amour. Plein de fraîcheur aussi le récit du périple d’une classe d’Andorrans à Paris. Pascal Graff, professeur d’histoire-géographie les encadre et se laisse entraîner par leur enthousiasme et émerveillement face aux étrangetés de la ville-lumière. Simple et émouvant.
➤ « La présentation au roi », Les presses littéraires, 12 €

mardi 14 mars 2017

Nouvelles : la petite musique de Gaëtan Roussel



Il sait écrire court. Normal, depuis des années ses couplets et refrains sont dans toutes les têtes. Gaétan Roussel, seul ou dans son groupe « Louise Attaque », cisèle des histoires du quotidien en moins de quatre minutes, durée standard d’une chanson. Se sentant sans doute un peu à l’étroit, il a laissé sa plume prendre un peu d’ampleur. Pas au point de pondre un roman fleuve, mais d’aligner quelques nouvelles désenchantées sur le thème de l’au revoir. De trois à 15 pages, concises, belles et poétiques, ces historiettes pourraient, pour certaines, être reprises en musique. On retrouve le rythme, la beauté de la formule comme cette fin où le narrateur parle de sa mère, malade « A mon départ, elle m’a dit au revoir en baissant les paupières. Plus tard dans la semaine, à son départ, j’ai su lui dire au revoir en gardant les yeux ouverts. »
➤ « Dire au revoir », Gaëtan Roussel, Flammarion, 15 € (sortie le 15 mars)


jeudi 20 octobre 2016

Nouvelles : De petits bouts de Jean Teulé

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Les romans de Jean Teulé ne sont jamais épais. L'auteur maîtrise l'art du court et direct. Il applique cette méthode à ses nouvelles, signant un recueil où chaque texte ne dépasse pas les cinq pages. Sortes de chroniques du quotidien, cela va du portrait intimiste, à la fausse BD en passant par le poème raturé. Il se livre aussi, comme cette histoire de vieille maison bretonne, se transformant, le printemps venu, en lupanar à plumes. Et puis au détour de ces textes, il y a le témoignage du fils de Philippe Bertrand, dessinateur décédé en 2010. Un dialogue fort et optimiste, des clés pour mieux accepter la mort et l'absence d'un être aimé.
« Comme une respiration », Jean Teulé, Julliard, 17,50 euros

dimanche 10 janvier 2016

BD : Moments de grâce avec Jim

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Les auteurs aussi sont tentés par les nouvelles. Jim, scénariste et dessinateur prolixe, déjà remarqué pour quelques romans graphiques à la petite musique douce comme « Une nuit à Rome ». On retrouve ce ton dans les 12 histoires complètes de moins de dix pages sur les petits moments de la vie, si beaux qu'on est incapable de s'en apercevoir sur le moment. Alors Jim nous ouvre les yeux et au gré de ces situations si basiques et classiques, on se surprend à se dire que finalement, nous aussi si on voulait on pourrait mieux profiter de notre existence. Comme ce papa qui en regardant ses deux grands enfants, devenus presque des adultes, regrette tant et tant cette enfance où il conduisait sa fille à l'école en lui tenant la mains, ou quand il allait choisir un personnage de Pokemon avec son fils dans une grande surface spécialisée. Ou cette soirée trop arrosée au cours de laquelle une ami vous fait une blague idiote quand vous êtes au toilette. Elle prend votre téléphone et à deux heures du matin envoie ce texto à votre mère : « Maman, je t'aime » déclenchant un tsunami de réactions dans votre famille. Parce que jamais vous n'aviez envoyé ce genre de message. La plus belle reste celle où il se rappelle la semaine passée à Cadaquès avec cette femme exceptionnelle, de celle que l'on se dit « ce serait dingue de pouvoir la revoir, et la connaître davantage. » Une semaine qui représente le bonheur absolu, même si après, tu a passé des années à vivre avec elle, à la regarder vieillir, à l'aimer toujours aussi fort... « De beaux moments » que Jim partage avec ses lecteurs. Merci à lui.
« De beaux moments », Bamboo, 18,90 euros


samedi 25 juillet 2015

Nouvelles - Brèves existences

S'il y a bien quelques animaux dans ce recueil de nouvelles de David James Poissant, il y est surtout question d'histoires de famille, de pères notamment.


Une nouvelle permet aux bons écrivains de délaisser les longueurs nécessaires pour la bonne compréhension d'un roman pour ne se concentrer que sur l'essentiel, l'humain. Exemple parfait avec « Le paradis des animaux » de David James Poissant. Il semble avoir sélectionné deux thèmes récurrents qui lui semblaient importants et les décline sous une dizaine de formes dans autant de nouvelles. 
Il y a donc des animaux au programme. Et des pères. Exactement les relations entre un père et son fils. Si la première thématique semble la plus importante au vu du titre, en fait ce sont les rapports familiaux qui inspirent le plus le jeune auteur américain qui vit en Floride. Ainsi il raconte la rencontre entre un homme et un crocodile dans la maison du père décédé d'un ami. Une lutte presque au corps à corps pour sauver l'animal. Mais en filigrane, le narrateur pense surtout à son fils, jeune adulte qu'il a quasiment renié quand il a découvert son homosexualité. Et en transportant le reptile vers la liberté, il fait un examen de conscience : « J'aurais voulu lui dire : j'aimerais tant te comprendre. J'aurais voulu lui dire : je t'aime. Mais cela, je ne l'ai pas dit. Je ne supportais pas de dire ces mots à mon fils pour la première fois et de ne pas les entendre en retour. »

Autre ambiance dans « Remboursement ». Un jeune couple a un enfant surdoué. Si la mère fait tout pour pousser son fils à briller, le père craint de lui gâcher son enfance. La bascule se fait lors d'une soirée entre parents de surdoués où, pour la première fois ils sont invités. La mère rayonne au milieu de ces gens distingués. Le père se tétanise, s'inquiète pour son fils. Les enfants sont à l'étage. Ils jouent. En théorie. Mu par une sorte de pressentiment, il va voir et découvre son gamin : « Assis sur l'abattant des toilettes, les bras ballants, il était en slip. Une épaisse couche de rouge à lèvres s'étalait sur son visage et deux ovales écarlates encerclaient ses mamelons. Il avait la poitrine et les jambes entourées de longs rubans de papier toilette. » Ainsi sont les surdoués : cruels. Le père décide alors de ne plus considérer son fils comme une personne plus intelligente que la moyenne mais comme l'enfant qu'il est, doué certes, mais qui recherche avant tout amour, tendresse et joies simples.
Il s'agit certainement du plus beau texte, le plus optimiste, contrairement à « Amputée », un amour fugitif entre un divorcé et une mineure (animal : gecko) ou « La fin d'Aaron », folie destructrice d'un esprit paranoïaque (animal : abeilles).
Selon son éditeur, « David James Poissant est depuis quelques années l'une des sensations de la scène littéraire américaine. Ses nouvelles ont été distinguées par de nombreuses récompenses. » Vraiment rien d'étonnant ! 

« Le paradis des animaux », David James Poissant (traduction de Michel Lederer), Albin Michel, 25 €

samedi 11 juillet 2015

Roman - Simonetta Greggio nous donne des nouvelles de nos amours

Simonetta Greggio se livre en partie dans cette douzaine de nouvelles allant de la confession très personnelle à l'histoire ample et détaillée que d'autres auraient délayé pour en faire des romans.


Une écriture sensuelle permet à Simonetta Greggio d'aborder tous les sujets de la vie d'une femme sans jamais flirter ni avec le scabreux et encore moins la vulgarité. Même si elle dévoile ses amours dans certaines des nouvelles composant ce recueil, elle y insuffle une grande poésie. On fait donc connaissance avec Abraham, un 
« homme café au lait – plus café que lait - » mais aussi Antoine avec qui « nous nous étions si bien mélangés dans les quelques semaines de notre histoire que j'avais du mal à retrouver l'usage de moi-même. » Dans la nouvelle « Il pleuvait quand je suis partie », elle écrit, durant le trajet Paris Avignon en TGV, la fin de cette belle rencontre, de ces jours fusionnels, de ces nuits torrides. Un parmi d'autres. Mais toujours dans le même style. Constante dans ses amours multiples, l'auteur en donne la raison. « Je n'aime que les anomalies et les fêlures chez les êtres, les déchirures et les failles, car c'est par là que s'engouffre la vie, que la lumière passe. Ce qu'on appelle normalité me fait peur. (…) Il y a une droiture chez les fêlés, ils ne font que chercher dans le quotidien ce qui n'est pas visible à l'œil nu. C'est un sacerdoce, une mission, j'en sais quelques chose, moi qui ne peut vivre que comme ça. » Beauté d'un texte lumineux qui reste longtemps imprégné dans la mémoire.

Le prisonnier et le chien
Les autres nouvelles sont plus classiques, moins personnelles, comme de grandes respirations. « Os de lune » est de loin la plus aboutie, la plus marquante. Sur une trentaine de pages pleines de bruit et de fureur, on écoute le récit d'un violoniste rescapé des camps de la mort. Déporté avec un ami musicien, il n'a jamais voulu se défaire de son instrument. A l'arrivée à Auschwitz, ce violon lui a sauvé la vie. Repéré par un officier, il est intégré à l'orchestre du camp. Car dans ces antichambres de l'enfer, les bourreaux aussi sont parfois mélomanes.
Le musicien, grâce à son statut particulier, échappe à la mort. Il parvient même à se faire un ami dans le camp : le chien d'un garde SS. Quelques mois avant la libération du camp, il réussit à s'échapper, accompagné de son fidèle compagnon. Cette errance dans l'Europe du Nord, à feu et à sang laissera des traces indélébiles. D'autres romanciers auraient trouvé là matière à un gros pavé assuré de confortables ventes en ces temps de commémoration. Simonetta Greggio se contente d'une nouvelle, incisive et directe, comme si cette histoire était trop forte pour être source d'exploitation. Il en est de même avec le récit du mafieux qui va abattre un juge sicilien ou l'embryon de biographie de Romain Gary. Courts et percutants, ces textes n'en sont que plus marquants.
« Femmes de rêve, bananes et framboises », Simonetta Greggio, Flammarion, 17 €

mercredi 9 décembre 2009

Littérature - Nouvelles de genre

Trois anthologies de nouvelles, trois genres, un point commun : ces jeunes auteurs sont les futures stars de la littérature française.

Que vous soyez science-fiction, thriller ou littérature générale, ces trois recueils de nouvelles vous donnent l'occasion de découvrir la crème de la nouvelle génération. Si « Retour sur l'horizon » célèbre les dix ans de la collection « Lunes d'encre » de Denoël, « L'empreinte sanglante... » joue dans la catégorie thriller et « Disneyland » offre l'opportunité à neuf jeunes auteurs français de donner leur vision du célèbre parc d'attraction de la région parisienne.

Dix ans de « Lunes d'encre »


Ce livre-anniversaire célèbre les dix ans de la collection Lunes d’encre et les cent ans de la science-fiction française. Quinze nouvelles où on traverse un Canada hanté par les drones de Dieu. On chemine vers une forme de vie impalpable entre Mars et Jupiter, et dans les couloirs d’un lieu qui contient tous les lieux. On subit un lavage de cerveau magico-marxiste, on explore l’esprit des morts en quête d’œuvres d’art inédites, on prend contact avec des entités orbitales capables de changer l’Histoire.

On se pose aussi beaucoup de questions : sur les propriétés chimiques de la potasse, la tête robotisée de Philip K. Dick et d’autres mystères plus ou moins solubles dans le réel. En gardant l’esprit ouvert, on peut même y découvrir un poème en prose et deux romances postmodernes.

En quinze nouvelles sélectionnées par Serge Lehman, un panorama de la science-fiction la plus actuelle par quelques-uns des maîtres français du genre. On notera parmi ceux-ci : Fabrice Colin, Emmanuel Werner, Éric Holstein, Catherine Dufour, Jean-Claude Dunyach, Laurent Kloetzer, Thomas Day, Léo Henry, Philippe Curval ou Xavier Mauméjean. Un instantané très réussi de la littérature imaginaire française actuelle. (Denoël, 25 €)

Neuf auteurs au pays de Mickey

Quand la fine fleur de la nouvelle génération d'écrivains français se rend à Disneyland, ce n'est pas pour le plaisir, mais pour le travail. Ils sont neuf, d'Ariel Kenig en passant par Tania de Montaigne, Nicolas Rey, David Abiker, Barbara Israël, Nicolas Bedos, Pierre Stasse, Simonetta Greggio et Thomas Lélu qui ont accepté d'écrire une nouvelle inspirée d'un séjour à Disneyland. Le concept, qui serait une idée (pour ne pas dire une commande) de Disneyland, était assez casse-gueule, mais au final l'ensemble est plaisant et divertissant. Car ce pays magique a eu le don de débrider l'imagination des auteurs qui n'ont pas cherché à descendre ce temple de l'amusement tarifié. Le résultat est frais et distrayant. (Flammarion, 17 €)

Suivre l'empreinte sanglante


« L’Empreinte sanglante d’un pied nu, la suivre au long d’une rue… » Tel est le point de départ des sept nouvelles inédites de ce recueil. Huit auteurs de renom du thriller français contemporain se sont amusés à suivre les règles d’un petit jeu d’écriture : donner corps à une idée en devenir depuis presque un siècle et demi, posée par l’un des pères de la littérature américaine, Nathaniel Hawthorne, dans un texte au nombre de signes limité. Pour, à l’unisson, entraîner les lecteurs sur les traces de L’Empreinte sanglante en donnant plusieurs versions des faits et autres pistes à suivre, qui révéleront à l’occasion autant de reflets de leurs univers respectifs…

Raphaël Cardetti, Maxime Chattam, Olivier Descosse, Karine Giébel, Eric Giacometti, Jacques Ravenne, Laurent Scalèse et Franck Thilliez ont relevé ce défi apportant chacun leur style et leur univers. Cela donne un ensemble très éclectique où chaque lecteur amateur du genre trouvera l'angoisse nécessaire à son bonheur... (Fleuve Noir, 18 €)

jeudi 4 juin 2009

Nouvelles - Les pollueurs de vie

Quarante portraits, quarante « insupportables ». Vous en avez certainement dans vos relations. A moins que vous n'en soyez un vous aussi...


Ce petit livre pourrait devenir, dans quelques dizaines d'années, un témoignage criant de vérité sur les années 2000. Un nouveau millénaire qui a vu le développement de l'individualisme, de la solitude, du culte de la réussite et surtout de l'apparence. Sven Ortoli, journaliste et écrivain, s'est associé à Michel Etchaninoff, professeur de philosophie pour dresser le portrait de cette génération en quarante personnages, caricaturaux, typiques, bien de notre temps.

Ces sont les Insupportables car leurs avis ou attitudes sont entre l'abject et le répugnant. Vous en connaissez certainement certains exemplaires. Et attention car parfois vous pourriez vous reconnaître (en partie ou en totalité) dans ces textes courts. De « La reine du monde », impériale sur les trottoirs en conduisant sa poussette à « L'amoureux du monde », bavard impénitent, sachant tout sur tout et qui fait fuir tout le monde avec ses connaissances encyclopédiques.

Je glande donc je suis

Parmi les portraits les plus réussis, retenons le paresseux d'entreprise. Avant de le suivre dans une matinée de non-travail, découvrons comment les auteurs le décrivent : « Il est universel. Publique ou privée, multinationale ou régionale, aucune entreprise n'échappe à sa présence : c'est le ninja de la flemme, le Napoléon de la cosse, l'experts n° 1 dans l'art de ne rien foutre ; au nom de la fin de toutes les illusions, excepté celles qu'il entretient à son sujet. » Chaque portrait débute par cette présentation générale. Mais ensuite les deux auteurs donnent de la chair et du liant à ces exemples tous théoriques. Et pour donner encore plus de corps à l'ensemble, les Insupportables se croisent, parfois, au gré d'une réunion de travail ou d'un dîner en ville.

Souvent c'est dans la bourgeoisie que les pires spécimens se trouvent. Il est vrai que rien ne vaut un peu d'aisance pour malmener ses congénères. Ainsi « L'esclavagiste soft » trouve normal d'employer, au noir, Lovely, une Philippine, 10 heures par jour, sept jours sur sept. Une grande bourgeoise qui n'a qu'une inquiétude : que cette nounou servile et illettrée ait trop d'influence sur ses enfants. Comment est-elle arrivée là : « Julienne, la Capverdienne d'avant, déclarée, se servait dans le frigo et tombait malade toutes les deux semaines. Un calvaire. A peine si elle ne menaçait pas de se mettre en grève. Avec Lovely, c'est plus facile : elle vient même quand elle a 40 de fièvre. »

Irréprochable et immonde

Des portraits qui prêtent souvent à rire. On les plaindrait presque. Pourtant il y a également des monstres dans cette galerie. « L'irréprochable » détonne un peu dans ce livre. Pourtant c'est là aussi bien vu et certainement plus fréquent qu'on ne le pense. Cet irréprochable, père de famille exemplaire, a son jardin secret. Chaque mercredi après-midi, alors que femme et enfants sont sortis, il s'enferme dans son grenier et se plonge dans son monde virtuel. Il surfe sur les sites internet montrant des petites filles « qui font des choses vilaines, très vilaines. Et en général il coupe le son parce qu'il n'aime pas les cris. Quelquefois, quand il a fait sa petite affaire, il se regarde dans la glace et se trouve un peu limite. Mais enfin, il mate, c'est tout ! Ça compte pour du beurre. » Celui-là, il est un peu plus qu'insupportable.

« Les insupportables », Sven Ortoli et Michel Etchaninoff, Seuil, 15 € 

jeudi 23 avril 2009

Nouvelles ordinaires par Mark Greene

Vies simples ou vies ratées ? Les personnages très ordinaires de ces nouvelles, signées Mark Greene, se posent forcément la question.


Mon meilleur ami de mes jeunes années est-il toujours aussi abordable ? Mon premier amour pense-t-il encore à moi, parfois ? Que garderai-je de mon père quand il sera mort ? Ces questions, bêtes questions, les héros imaginés par Mark Green dans ce recueil de nouvelles se les posent. Ils s'interrogent d'autant plus qu'en filigrane se dessine la carte de leurs réussites, sociale, professionnelle, personnelle.

Des histoires de tous les jours, banales mais qui parfois correspondent à un moment clé de l'existence du principal protagoniste. Comme quand cet homme d'affaire, Parisien distingué, fasciné par sa coiffeuse et ses ongles démesurés, décide de la suivre, un soir, dans les transports en commun desservant la banlieue. Il ne rentrera pas chez lui et décide même d'éteindre son portable. « C'est l'heure de vérité, pensai-je. Dans un sens, ma vie n'avait été qu'une longue suite de préparatifs, une mise en place méthodique des conditions de basculement. Ce soir, j'en eus subitement la conviction, j'allais atteindre le point de non-retour. »

Premier amour

Mark Greene explore des solitudes comme il y en a tant autour de nous. Pas évidentes, pas forcément subies. Cécile est responsable du contentieux dans une grande société. Un poste important lui offrant une certaine aisance financière. Mais elle est seule à en profiter. Aujourd'hui elle a 40 ans. Ses rares amis ne lui souhaiteront pas un joyeux anniversaire. Il y a longtemps qu'elle leur a fait comprendre qu'elle n'aimait pas les anniversaires. Oui mais ce jour-là, « elle a quarante ans, et elle voudrait ne plus y penser. Elle aura beau tourner les choses dans tous les sens, elle sait qu'elle n'obtiendra ni réponses à ses interrogations, ni réconfort d'aucune sorte. » Elle se lance dans le nettoyage de la salle de bain. « Lorsqu'elle a terminé, elle se demande s'il reste encore un peu de travail. Les vitres sont propres, malheureusement. Elle a passé l'aspirateur il y a deux jours. » Le jour de ses 40 ans, elle se met à penser à son premier amour. Le jeune lycéen qui l'a embrassée pour la première fois. Elle va tenter de le retrouver, comme pour retrouver cette fougue qui l'a irrémédiablement désertée. Mais 25 ans ont passé...

Meilleur ami

Solitaire également cet homme, absorbé par son travail. Ses amis d'enfance il les a perdus de vue, petit à petit, sans raison, simplement par lassitude. « Je vivais comme un moine. Ma dernière petite amie m'avait quitté six mois plus tôt. Je n'avais même pas essayé de la retenir. » Quand il croise par hasard dans la rue son meilleur ami, ce dernier l'invite au restaurant. Toute la bande, quinze ans plus tard, se retrouve autour d'un repas bien arrosé. Il n'était pas invité, il partira le dernier.

Ces chroniques de la vie courante sonnent juste. L'auteur a beaucoup observé ses contemporains, devinant leurs doutes et espoirs dans des silences parfois lourds de sens. Il leur donne la parole, mais au final c'est un peu chacun nous qui parle.

« Les plaisirs difficiles », Mark Greene, Seuil, 16 €