dimanche 24 août 2008

BD - Hommage à Gotlib, le maître


Alors que tous les médias célébraient les 40 ans des événements de Mai 68, un autre anniversaire, presque aussi important, a failli passer inaperçu. Heureusement, les éditions Dargaud ont un peu de mémoire et ont décidé de célébrer les 40 ans de la Rubrique à brac en demandant à quelques cadors de la BD de s'essayer au plaisir de l'histoire courte pédagogique et divertissante. 

Mais le problème avec Gotlib, c'est qu'il a définitivement arrêté de dessiner. Cela permet de faire un clin d'œil en couverture de l'album précisant que ce collectif est réalisé « par tous les caïds de la bédé (sauf Gotlib) ». Dans ces 64 pages très diverses on retrouve les noms de successeurs naturels comme Dupuy & Berberian ou Lindingre et Julien CDM, des copains comme Bilal, Tardi ou Mézières, des fidèles de la période Fluide Glacial comme Binet, Maester, Edika, Solé ou Léandri. 

La couverture est de Zep qui signe également deux planches mettant en scène le maître en personne qui juge les planches du jeune Suisse, multi millionnaire avec son héros Titeuf. Un album qui nous donne également l'occasion de retrouver avec plaisir la signature de Mandryka.

« Rubrique abracadabra », Dargaud, 13 € 

samedi 23 août 2008

BD - Les cas graves se succèdent dans le cabinet des Psy de Bédu et Cauvin

On ne sait pas si Cauvin, dans une autre vie, était psy. Toujours est-il que de toutes ses séries comiques, celle des Psy est une des plus criantes de vérité. Pourtant les patients qui défilent dans le cabinet du docteur Médard sont des cas graves. Très graves même, parfois. 

Comme ce strip-teaser qui illustre la couverture et qui vient se rassurer. Est-il véritablement aimé ou les personnes qui l'applaudissent tous les soirs ne sont que de simple voyeurs curieux ? Il a rapidement la réponse (grâce à la secrétaire) et donnera des idées au docteur qui tentera de les appliquer le soir même dans sa chambre à coucher, mais sans les résultats escomptés. 

Le brio de Cauvin vient peut-être également de la position couchée dans le divan. Il l'avoue, ce n'est que comme cela qu'il parvient à « faire du scénario ». Il est vrai aussi que les frappadingues et autres givrés sont de plus en plus nombreux. Il suffit de regarder un peu les spécimens qui se baladent dans les rues pour y trouver une source infinie de gags. 

Au dessin, on retrouve Bédu. C'est son quinzième titre. Il ne se consacre plus qu'à cette série ayant totalement abandonné Clifton. C'est un peu dommage car si les personnages des Psy sont très variés, les décors sont répétitifs. La richesse de son dessin est certainement sous-exploitée.

« Les Psy » (tome 15), Dupuis, 9,2 € 

vendredi 22 août 2008

Roman - Dans la tête d'une actrice

Dorine M. est une célèbre actrice. Ce roman raconte, heure par heure, sa dernière journée de tournage dans le premier film d'une jeune réalisatrice.


Mais qui a servi de modèle à Delphine Coulin pour le personnage de Dorine M. le personnage principal de son roman ? Dorine est une comédienne, assez âgée, mais qui rayonne encore de beauté. Elle a débuté dans les années 60. Elle est toujours une tête d'affiche, une star que l'on recherche car souvent synonyme de qualité et de succès. Ce rapide portrait, le lecteur met un peu plus de temps pour le cerner. Delphine Coulin a ménagé le suspense de la description de cette femme qui fait encore se retourner les passants dans la rue.

Dorine, au début, semble être une femme comme toutes les autres. Réveil avec du café, douche, lecture de la presse, départ pour le travail. A pied, dans les rues de Paris. En ce moment elle travaille à l'hôpital du Val-de-Grâce. Exactement, la production utilise l'hôpital comme décor du film. Cela fait six semaines que Dorine est dans la peau d'Emma. Cette femme tombe amoureuse du médecin qui lui explique que son mari, malade, est condamné.

Le souvenir de l’amour défunt

Aujourd'hui, Dorine doit tourner une scène difficile. Elle appréhende. L'occasion pour elle de se retourner sur sa carrière. Un monologue intérieur qui apprend beaucoup au lecteur sur la motivation des comédiennes. Des femmes qui ont envie de vivre mille vies. Elle se souvient de tous ses films, des films d'amour : « J'étais passée par tous les états amoureux? Pour les vivre tous en vrai, il eût fallu avoir mille vies. Prodige d'être une actrice, une mille-vies. Fantasme absolu de notre époque, où chacun court après les temps pour vivre le plus possible. Où tout est démultiplié. » Histoire d'amour dans le film qui contamine la réalité. Le jeune premier qui interprète le médecin lui avoue, en privé, qu'il est en train de tomber amoureux d’elle. Dorine à l'habitude. Elle est tentée. Elle a souvent couché avec ses partenaires. 

Mais cette fois, elle hésite plus que de raison. Est-ce l'âge ? Ou cette scène difficile ? A moins que cela ne soit à cause de la ressemblance de l'acteur avec Max, son seul amour, mort dans un accident de voiture ? Une journée particulière pour Dorine qui se questionne intérieurement. « Je ne sais pas pourquoi je suis devenue actrice. Pour oublier la réalité. Ou aller à la rencontre de moi-même. »

Ce roman, en plus de raconter par le menu la cuisine interne d'un tournage (l'auteur est également réalisatrice de courts-métrages), permet au lecteur de mieux comprendre ce qui fait avancer les actrices, ce qui leur permet de se dépasser, de prendre possession d'un personnage et de le faire vivre, sur pellicule et bien au-delà, dans la mémoire de plusieurs générations.

« Les mille-vies », Delphine Coulin, Seuil 

jeudi 21 août 2008

BD - Le monde tel qu'il est...


Adeptes du politiquement correct, passez votre chemin. Tibo Soulcié est allé très loin dans la caricature. Son héroïne, Marine, adolescente de bonne famille, va passer par les pires outrages. Tout va basculer le jour où sa grand-mère lui avoue qu'elle a un cancer et qu'elle n'a plus que quelques mois à vivre. Elle décide alors de dévoiler sa vision du monde à Marine : « Les idées préconçues et la bienséance sont des balivernes. Il faut être ivre de vie. Il faut vivre sans modération, jouir sans entraves ! » 

Et rapidement la réalité va bousculer le train-train de Marine. Elle découvre que son papy est pédophile alors que sa mère et son père se séparent. Ruinée, elle se retrouve en HLM, tombe dans les griffes d'islamistes, puis d'un trader suisse et d'un pornographe hongrois. Sa carrière d'actrice sera de courte durée. 

Mariée à un Tibétain, elle se retrouvera dans un camp de rééducation chinois avant d'être revendue à des forestiers brésiliens. C'est horrible, mais tout à fait réaliste. Et au final on n'est pas loin des malheurs des jeunes orphelines des feuilletonistes du début du XXe siècle. Mais le monde a changé...

« Marine à Babylone », L'Echo des savanes, 10 € 

mercredi 20 août 2008

BD - Cigares connection


La mode est aux BD se déroulant sur deux époques différentes. « Flor de Luna » est écrite sur ce principe. Le lecteur suit en parallèle les événements contemporains qui bousculent l'empire du cigare dirigé par la famille Porter et la création de cette société, à Cuba au 19e siècle. Diego Castellano, seul, est arrivé à faire pousser du tabac sur un bout de terre qu'il a défriché de ses propres mains.

 Mais sa situation financière reste précaire. Il assure ses arrières en passant un accord secret avec des contrebandiers. Diego qui n'est pas insensible aux malheurs de la belle Lucia. Fille d'un riche planteur, elle est donnée en mariage au chef de l'armée espagnole. Un homme violent, égoïste et raciste. De cette union naîtra une petite fille, ressemblant plus à son père qu'à sa mère. Une saga qui va être marquée par des meurtres déclenchant une vengeance qui pourrait trouver son aboutissement de nos jours. 

Un scénario intrigant et plein de rebondissements de Pierre Boisserie, dessiné par Eric Stalner associé pour l'occasion à Eric Lambert.

« Flor de luna » (tome 2), Glénat, 12,50 € 

mardi 19 août 2008

BD - L'éveil du démon


Un tueur en série frappe Paris. « L'équarisseur » comme le surnomme la presse, toujours prompte à trouver des sobriquets aux pires abominations. Il s'attaque à des personnes n'ayant aucune relation les unes avec les autres. 

Une mort violente, presque immédiate, puis il enlève un membre. Jambe, main, tête et même un cœur. Les policiers, sans une seule piste, sont sur les nerfs. Ils ont bien un brocanteur pour suspect, mais sont obligés de le relâcher faute de preuve. Les policiers, très terre-à-terre, sont loin de se douter que c'est un démon, sur le point de se libérer de la prison de Piranèse située dans le vortex de Montfort qui sème la terreur. 

Par contre Arnaud de Saint-Glaive, occultiste, à la tête d'un groupe chargé de surveiller Montfort, se doute de ce qu'il se passe. Mais il est impuissant tant qu'il ne connaît pas l'identité du démon et surtout sous quelle enveloppe charnelle il parvient à agir dans le monde réel. 

Cette passionnante série fantastique, écrite par Isabelle Mercier et Roger Seiter, est illustrée par Max, très à l'aise sur le volet fantastique.

« Dark » (tome 2), Casterman, 9,80 € 

lundi 18 août 2008

BD - Dans l'enfer de Verdun


Souvenirs de Verdun, de la Grande guerre et d'un soldat de légende, Amaréo Zamaï. Ces souvenirs, ce sont ceux de Blaise Boforlant, intellectuel et soldat durant la guerre de 14 – 18, créateur du journal réservé aux poilus, « Le cœur des batailles ». 

En juin 1940, en pleine débâcle française, à Strasbourg, il est interrogé par un jeune journaliste américain. Ce dernier cherche à en savoir un peu plus sur Zamaï, devenu un véritable mythe dans toutes les armées du monde. Morvan, dans ce scénario très littéraire, parvient à faire ressortir l'extraordinaire boucherie que fut cette guerre des tranchées. « Des morts-vivants, voilà ce que nous étions, coincés dans un purgatoire sans savoir quand viendrait notre tour de passer à la trappe » fait-il dire à Boforlant. 

Un cauchemar qui n'a pourtant aucune emprise sur le fier soldat noir, guerrier plus que simple fantassin. Sa légende s'écrira au quotidien, notamment à la bataille du fort de Vaux. Sang, tripes, boue, chairs putrides et blessures gangrenées : Kordey, le dessinateur, n'a pas la partie facile. Heureusement il lui reste Zamaï... 

« Le cœur des batailles » (tome 2), Delcourt, 12,90 € 

dimanche 17 août 2008

BD - Les rois de la bricole


Ne vous laissez pas avoir par la première impression du dessin de Laudrain. Il semble assez sommaire, brouillon et enfantin. En fait, le dessinateur parvient à faire passer beaucoup de choses dans les regards, poses et attitudes de ses personnages caricaturaux à l'extrême. Son petit monde est exclusivement composé de bricoleurs. 

Pas très doués. Donc source de gags multiples et variés. C'est le second tome et Laudrain n'hésite pas à aborder tous les thèmes, de l'électricité au jardinage en passant par la peinture ou la maçonnerie. Des amateurs d'une bêtise absolue, mais passionnés. 

Ce n'est bien évidemment pas la série du siècle, mais il faut bien admettre qu'au détour d'un gag on reconnaît un voisin, un ami, voire soi-même, preuve que l'auteur est un bon observateur.

« B. comme bricoleur » (tome2), Vents d'Ouest, 9,40 € 

samedi 16 août 2008

BD - Les trois damnées


Il ne faut pas tenter de faire des innovations en magie quand on n'est pas sûr du résultat. Ibrahim, jeune sorcier d'une île imaginaire de la caraïbe en fait les frais. Il tente de mêler vaudou et informatique. Pour impressionner une jolie fille, il tente de faire revivre une damnée. Il essaie trois fois (en crachant de l'alcool frelaté sur de l'argile de Yambomba arrosée du sang d'une poule pondeuse) mais n'obtient que des monticules informes. 

Ce n'est que quelques heures plus tard qu'il découvre que sa recette n'était pas si mauvaise. Les trois formes se sont transformées en trois êtres vivants : la même personne, Sandra, à trois âges différents. Il y a la Sandra enfant, la Sandra adulte dans la plénitude de ses moyens et la Sandra morte, zombi décharné. Ibrahim va essayer de réparer son erreur car Sandra étant damnée, les démons de l'enfer ont bien l'intention de la capturer pour la ramener dans les flammes des bas-fonds. 

Une série fantastique ne se prenant jamais au sérieux, par un auteur espagnol, Santiago Arcas au trait ressemblant parfois à celui de Crumb. Il aime les femmes, les femmes ayant du caractère. Sandra, ancienne championne de lutte (l'album a un côté Lucha Libre) n'a pas l'intention de se laisser faire et les démons vont passer un sale quart d'heure.

« Sandra », Vent des Savanes, 12,50 € 

jeudi 14 août 2008

BD - L'heure des mutants, dernière aventure de Zowie


Troisième et dernier tome des nouvelles aventures de Zowie. Le blondinet imaginé par Bosse et Darasse a la lourde tâche de sauver le royaume de Magisterra. Il est l'Alpha protecteur alors que sa copine, Zia, une ado gothique, est l'Omega. Problème, un des seigneurs de l'ombre est bien décidé de régner en maître sur Magisterra. Il a donc mis la tête de Zowie à prix. Le jeune héros a une bande de pirates aux trousses et un assassin aveugle utilisant des boites à désintégrer très efficace. 

La première partie est une course poursuite dans notre monde, avec combats à la clé. Ensuite l'action se déplace à Magisterra. Zia, sceptique au début (tout en étant gothique elle ne croit pas à la magie...) doit admettre que les monstres, zombies et autres mutants existent et qu'ils ne sont pas spécialement amicaux. 

L'affrontement final permettra à Magisterra de retrouver son calme. Espérons que ces trois tomes, imaginatifs, amusants et bien rythmés, ne seront pas les seuls du renouveau d'une série poétique et novatrice restée trop longtemps dans les oubliettes de la BD.

« Zowie » (tome 3), Dargaud, 9,25 €