jeudi 4 mai 2023

BD - Deux détectives immortels : Harry Dickson et Sherlock Holmes

Sherlock Holmes, prototype du détective anglais, est le pur produit de l’imagination de Sir Conan Doyle. Il revient pour de nouvelles aventures inédites dans une série écrite par Pécau et dessinée par Suro. Le locataire de Baker Street qui a plus qu’inspiré Jean Ray quand il a signé ses romans populaires ayant pour vedette Harry Dickson. Une œuvre romanesque de nouveau adaptée sous forme graphique.

Certains héros de la littérature mondiale semblent immortels. Des personnages qui n’en finissent pas de vivre de nouvelles aventures. La reprise est à la mode et Sherlock Holmes tout comme Harry Dickson ne sont pas épargnés. Pour le plus grand plaisir des amateurs du genre feuilletonesque et policier.

Harry Dickson est présenté comme le Sherlock Holmes américain. Un détective privé à la personnalité directement inspirée par le héros anglais. En réalité, quand Jean Ray, écrivain belge, lance de personnage dans les années 30, il ne fait que traduire des romans de gare allemands. De fausses aventures de Sherlock Holmes. On retrouve dans les ingrédients de ces petits romans tout l’univers de Conan Doyle : un détective très sûr de lui, un disciple, une femme de ménage, un policier un peu bêta… 


Seule différence, là où la logique permettait de résoudre des affaires très terre à terre, le fantastique fait une entrée remarquée.. Car lassé de traduire de mauvais textes, Jean Ray décide de prendre son héros en main et se lance dans des histoires mouvementées et pleines de rebondissements, parfois improbables

 La redécouverte de ces romans dans les années 60 a redonné une seconde vie à Harry Dickson. Déjà adapté en BD, il revient cette fois dans une collection dédiée, sur des textes de Doug Headline et Luana Vergari et des dessins d’Onofrio Catacchio. Premier titre paru : Mysteras, tout un programme. Du haut de sa tour, Delphina Cruyshank, romancière à succès, surveille la prison de Hammersmith. Elle assiste à l’exécution d’un condamné à mort dans un prototype de chaise électrique.

Quelques jours après elle disparaît et le mort est revenu à la vie, a assassiné le médecin légiste et pris la fuite. Un mystère pour Harry Dickson et son ami et disciple, le jeune Tom Wills. L’enquête le conduira en Écosse, dans un manoir hanté. L’intrigue, multipliant les chausse-trapes, permet au détective de presque triompher à la fin. Il a démasqué Mysteras, le voleur assassin, mais ce dernier parvient à prendre la fuite. Les deux se retrouveront dans un an pour le second tome de la série intitulé La cour d’épouvante. Le scénario, fidèle au récit initial, permet à Catacchio de fournir des planches d’un grand classicisme. Une ligne claire très élégante digne de Jacobs.


Sherlock Holmes aussi est de retour sous forme de bande dessinée. Des histoires originales imaginées par Jean-Pierre Pécau et qui se déroulent à Londres. La noyée d ela Tamise débute par la découverte, à marée basse, du corps d’une fillette. Elle a les yeux et bouche cousue, un masque en bois sur le visage. La police suspecte les Jamaïcains et leur vaudou, mais selon Sherlock Holmes, appelé à la rescousse par Lestrade, ils n’y sont pour rien. Un détective qui avoue son manque de connaissance en masques anciens.

Il décide dès lors de solliciter le plus grand spécialiste connu de l’époque, un Français, Félix Fénéon. Problème, cet anarchiste est en prison. Il est suspecté d’avoir posé une bombe dans un restaurant. Holmes témoigne et le fait acquitter. Ensemble ils vont rejoindre la capitale anglaise et tenter de comprendre ce qui se trame la nuit dans les faubourgs. Car un second cadavre est découvert. Toujours une jeune fille. Dessinée par Michel Suro, la première partie de cette enquête permet au lecteur de découvrir le milieu anarchiste français en exil outre-Manche.

«Harry Dickson» (tome 1), Dupuis, 15,95 €
«Sherlock Holmes et les mystères de Londres» (tome 1), Soleil, 15,50 €

mercredi 3 mai 2023

Littérature - « Extinction des feux » pour le journaliste cloîtré imaginé par Olivier Chantraine

Le repli sur soi frappe le narrateur du roman d’Olivier Chantraine. Ce reporter de guerre n’ose plus sortir de chez lui depuis que sa femme a disparu.


Serge est un reporter de guerre qui a de plus publié quelques romans avec un relatif succès. Un talent reconnu par la profession. Mais depuis quelques années, la disparition de sa femme, Laura, exactement, il n’arrive plus à sortir de chez lui. Un repli sur soi synonyme de bidonnage de ses reportages. Extinction des feux, roman d’Olivier Chantraine aurait aussi pu s’appeler, La guerre racontée de mon salon. Cependant les malheurs du monde, s’ils permettent à Serge de conserver son salaire au prix de mensonges de plus en plus compliqués, ne sont que peu présents dans ce récit. Le narrateur s’apitoie surtout sur son sort, son impossibilité à être tranquille, à ruminer l’absence inexpliquée de sa dulcinée.

Serge vit toujours avec son fils, Matthieu, 25 ans. Et reçoit quasiment tous les jours la visite de Cynthia, sa voisine. Une attachée de direction à mi-temps qui lui saute dessus tous les après-midi le transformant en amant contre son gré. Juste pour le maintenir en vie selon elle.

« Se préparer à ramper tôt ou tard devant une femme »

Sur cette situation qui aurait pu se transformer en pièce de théâtre, l’auteur greffe une intrigue écologique (l’eau du robinet apporte des maladies, c’est une hécatombe en ville) et aborde indirectement plusieurs thèmes actuels. Sur la violence de notre société : « La violence sous-jacente qui a inondé notre société s’est infiltrée dans chaque interstice de la vie de la cité. La planète est à bout, le monde est à cran ». La relation avec les enfants : « J’aime terriblement mon fils, je l’admire, je redoute son départ, la perspective de son absence me terrifie, et pourtant j’ai hâte de me confronter à ce vide. » Sur l’image que l’on donne à ses enfants, cette réflexion (imaginaire) de Matthieu : « Pourquoi certains auraient le droit d’avoir des pères comptables alors que le mien ne saurait se définir autrement que comme ex-reporter de guerre, usurpateur en chef, éleveur de poules de garage, gamer amateur spécialisé en Call of Duty, alcoolique notoire, paumé célèbre, reclus volontaire, handicapé manuel, phobique. »
Il a enfin cette réflexion, que tout homme devrait méditer, à propos des amours naissantes et compliquées de son fils avec une altermondialiste radicalisée : « N’importe quel homme sensé doit se préparer à ramper tôt ou tard devant une femme si elle en vaut la peine. Les autres sont des imbéciles. »

Un roman brillant sur cette folie qui nous guette tous face à un événement imprévu (là, la disparition totalement inexpliquée de Laura, l’épouse vénérée). Une histoire qui met aussi en exergue l’importance des animaux de compagnie dans notre vie de tous les jours. Si Serge ne supporte plus les Humains en général, il ne peut se passer de sa chienne Tess et, à un moindre niveau, de ses poules pondeuses vivant dans son garage.

« Extinction des feux » d’Olivier Chantraine, Gallimard, 21 €

mardi 2 mai 2023

De choses et d’autres - Bataille de sacs à main

Ils ne savent plus quoi inventer pour faire oublier la séquence réforme des retraites. Alors que le président Macron, après des semaines d’hibernation, repart à la conquête des Français (et de leurs casseroles) et que Bruno Le Maire fait une sortie bien nauséabonde pour remettre l’immigration au centre du débat, la palme de l’originalité revient à Marlène Schiappa.


Après sa couverture du dernier numéro de Playboy, elle est parvenue à faire mieux en lançant une énième polémique qui va faire parler dans les foyers. Une coproduction, exactement, avec une autre membre du gouvernement, Isabelle Rome. Cette dernière est ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes.

À ce titre, elle s’était permis de critiquer sa collègue et les photos illustrant l’interview dans le magazine de charme. Mais avec Marlène Schiappa, mieux vaut se méfier.

La réponse est venue d’un SMS, pour le moins abrupt, dans lequel elle accusait Isabelle Rome de « ne pas avoir de tripes » et la traitait de « sac à main de seconde main ». Une insulte un peu trop genrée mais qui dans la bouche d’une ministre (au bout de ses doigts exactement, c’est un SMS), fait mal. Le SMS a fuité (comme par hasard…) et depuis, tout le monde tombe sur la secrétaire d’État chargée de l’Économie sociale et solidaire et de la Vie associative.

Non seulement ça ressemble à une querelle de cour de récréation avec insulte approximative mais en plus, c’est particulièrement dénigrant pour toute la filière de la seconde main et du recyclage, pourtant essentielle dans notre société trop consumériste.

Mais en attendant, l’effet est immédiat : on parle (un peu) moins de la réforme des retraites !

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le vendredi 21 avril 2023

lundi 1 mai 2023

Cinéma - “Pour l’honneur” des valeurs du rugby


Le rugby comme facteur d’intégration dans la société française, tel est le thème central du nouveau film de Philippe Guillard avec Olivier Marchal et Mathieu Madénian.

Ancien joueur, ancien commentateur, Philippe Guillard a finalement trouvé sa voie en devenant réalisateur. Un premier succès, Le fils à Joe, et quelques comédies plus tard, il revient à son sujet de prédilection : le rugby de village. Pour l’honneur raconte la rivalité entre deux villages : Trocpont-sur-Vézère et Tourtour-les-Bains. Dans cette Corrèze rugueuse et en voie de désertification c’est la lutte des classes qui fait des heures supplémentaires. Trocpont est plutôt bourgeoise, Tourtour plus prolétaire.

Marco Bianchoni (Olivier Marchal), patron du bistrot et entraîneur de Tourtour ne sait plus comment faire pour remporter le derby. Car la riche Trocpont, sponsorisée par les salaisons Lalanne, attire d’anciennes gloires du ballon ovale. Quand la préfecture décide de placer une dizaine de demandeurs d’asile à Tourtour, dans l’ancien hôtel de Marco, c’est un choc pour ce petit village très (trop…) Français.

Mais le fils d’immigré italien sait d’où il vient et va tenter une intégration des congolais, Afghans et autres Africains en les enrôlant dans son équipe. Un petit jeune a une botte redoutable, un autre au gabarit impressionnant capte les balles en touche et un lutteur afghan déménage en mêlée. Reste à leur expliquer les règles de ce sport. Ce n’est pas gagné d’avance, d’autant que Marco est sous pression : ce derby il veut le gagner.

Hilarant Mathieu Madénian 

On aurait pu craindre que le fond de l’histoire sur l’intégration fasse un peu trop bisounours, mais le scénario de Philippe Guillard et Éric Fourniols évite aisément les gros pièges. Au contraire, il apporte une vision assez juste de la fracture de la société française. Tout en restant résolument optimiste. Et souvent très comique.

Olivier Marchal assure une performance majeure quand il harangue ses troupes. Le meilleur du rire à gorge déployée reste quand même le Catalan de la distribution : Mathieu Madénian. Son personnage d’adjoint, taillé comme une crevette mais qui ne peut pas s’empêcher de chambrer les armoires à glace, affublé d’une casquette et d’une moustache ridicule, mériterait presque une suite uniquement consacrée à son humour dévastateur.

Comédie française de Philippe Guillard avec Olivier Marchal, Olivia Bonamy, Mathieu Madenian.

 

dimanche 30 avril 2023

DVD - Le collège se rebelle dans « L’école est à nous »

Un film optimiste sur l’enseignement qui redonne confiance aux jeunes. Preuve que les grèves ont parfois du bon.


Un peu d’utopie dans un monde hyperformaté. Le film d’Alexandre Castagnetti s’attaque à un monument : l’Éducation nationale. Dans L’école est à nous qui vient de sortir en DVD chez UGC Vidéo, il imagine qu’une prof un peu plus humaine que ses collègues, décide de faire confiance à ses élèves. Ils décident et finalement s’en sortent assez bien.

Après deux années d’arrêt suite à un grave traumatisme, Virginie (Sarah Suco), prof de maths, est de retour devant des élèves. Mais la grosse tête n’enseigne plus en prépa mais dans un simple collège de banlieue. Pas évident de motiver des jeunes démissionnaires. Mais quand le syndicat des profs décide de se mettre en grève pour sauver des classes, Virginie se porte volontaire pour assurer la permanence. Avec Ousmane (Oussama Kheddam), prof de techno, ils vont innover et proposer aux jeunes de se prendre en main. Malgré les réticences du principal (Jean-Pierre Darroussin), les résultats ne se font pas attendre.

Jolie fable sur l’écoute, le partage et la compréhension, cette comédie devient émouvante quand on découvre les failles de Virginie, quand Émilie, une des élèves, montre son mal-être face à un père envahissant. Même la petite histoire d’amour entre deux élèves donne des frissons. Un film optimiste mais aussi très réaliste, n’occultant pas la lourdeur de l’administration. Dans les bonus, une longue séquence avec un bêtisier qui donne une bonne idée de l’état d’esprit sur le tournage : concentré mais très décontracté également. Sans oublier quelques scènes coupées.

samedi 29 avril 2023

Fantastique - Stephen King réenchante à sa façon le « Conte de fées »

Retrouvez un Stephen King en très grande forme dans un roman foisonnant d’inventions narratives. Prêts pour la descente au pays des contes de fées ?


Il n’a rien perdu de son génie de la narration. Stephen King est toujours passionnant quand il se lance dans de grands projets permettant de donner libre cours à son imagination débordante. Conte de fées, ce pavé de plus de 700 pages est un excellent cru dans la longue bibliographie de celui qui a popularisé le thriller fantastique à travers le monde. L’histoire suit les péripéties sur terre et dans l’Autre Monde du personnage principal, Charlie, 17 ans, qui semble le reflet de l’auteur quand il était jeune et surtout une simple chienne nommée Radar, vieille, malade, mais très attachante.

Le début du roman, raconté à la première personne par Charlie, est très réaliste. Du style Chronique sociale qui dépeint cette Amérique qui ne fait pas vraiment rêver. Charlie vit simplement dans une petite ville de province entre sa mère et son père.

Le trou vers l’Autre Monde 

Mais un soir, en allant acheter à manger, la maman est tuée par un chauffard. Le père tombe dans une longue période d’alcoolisme. Durant près de 10 ans, Charlie devra se débrouiller presque seul à la maison. C’est donc un garçon déjà dur au mal qui découvre un matin son inquiétant voisin M. Bowditch, blessé dans son jardin. C’est sa chienne, Radar, un berger allemand au pelage élimé, qui a donné l’alerte en hurlant à la mort. Charlie va aider ce vieillard taciturne, devenir son aide familiale, son ami. En échange, le vieil homme lui livre ses secrets : il a plus de 100 ans, a ramené de l’Autre Monde, un pays merveilleux mais très dangereux, des pépites d’or qui lui permettent de vivre simplement sans avoir à travailler. Dernière révélation : la porte de l’Autre Monde est un puits caché dans le cabanon de jardin.

Les 200 premières pages du roman, très humaines, racontent avec gravité et beaucoup d’humanisme cette amitié naissante. La suite est beaucoup plus agitée. Charlie descend le long escalier en colimaçon qui le mène vers l’Autre Monde. Il part avec sa chienne, car un cadran solaire aurait le pouvoir de la faire rajeunir. Dès lors le lecteur, happé par cet univers extraordinaire, va palpiter dans le sillage d’un Charlie bravant tous les dangers pour sauver Radar. Il découvre un peuple malade, qui perd ses traits, devient gris. Notamment une jeune princesse, Leah, charmante mais dont la bouche s’est refermée comme une vilaine cicatrice : « Voilà bien la veine de Charlie Reade, tomber raide amoureux d’une fille que je ne pourrai jamais embrasser sur la bouche. » Dans ce monde crépusculaire, peuplé de loups la nuit, de gros cafards rouges et d’hommes et de femmes mourants, il va trouver des réponses auprès d’un aveugle. Notamment sur la maladie grise : « Respirer devient de plus en plus difficile. La chair inutile avale le visage. Le corps se referme sur lui-même ».

Charlie devra donc affronter de nombreux cauchemars bien réels (Stephen King en a toujours un plein sac en réserve) avant sauver son animal adoré et retrouver sa jolie (mais défigurée) princesse. Car c’est dans un véritable monde de conte de fées, où le Mal tente de l’emporter sur le Bien, que le jeune Américain tombe en descendant l’escalier. Un monde à préserver qu’on quitte à regret à la fin du roman.

« Conte de fées » de Stephen King, Albin Michel, 24,90 €

Album jeunesse - "Ma maison et moi" d'Arthur Dreyfus et Elliot Royer chez Robert Laffont


Nos souvenirs d’enfance passent par plusieurs stades. Souvent, c’est le lieu où l’on a habité qui permet de retrouver ces délicieux moments de la jeunesse insouciante. C’est le thème de cet album écrit par Arthur Dreyfus et illustré par Elliot Royer. Le narrateur entretient un rapport très étroit avec sa maison en bois « en bordure de forêt ».

Il lui est même arrivé de lui donner à manger en cachette. La nuit elle le protège des monstres et le jour elle fait fuir les jeunes harceleurs de son école. C’est dans cette maison qu’il a pour la première fois pris la main de Camille, son amoureuse. Un texte comme un long poème avec de superbes dessins pour prolonger l’enchantement.

« Ma maison et moi » d’Arthur Dreyfus et Elliot Royer, Robert Laffont, 16 €

vendredi 28 avril 2023

Cinéma - “Avant l’effondrement” personnel et de toute la société

L’effondrement dont il est question dans ce film de la romancière Alice Zeniter est personnel et sociétal. Tristan (Niels Schneider), est un jeune homme de gauche engagé pour changer la société. Directeur de campagne d’une candidate de gauche écologiste à Paris, il mène une vie trépidante.

Pourtant il a conscience que tout est fragile. Le réchauffement climatique semble incontrôlable. La société va mourir en suffoquant. Et personnellement, il a une épée de Damoclès au-dessus de la tête. Sa mère est morte à 40 ans d’une maladie génétique rare. Héréditaire une fois sur deux. Il n’a jamais voulu se faire tester. C’est donc avec la peur de mourir dans quelques années et la crainte de transmettre cette malédiction qu’il survit.

Des états d’âme qu’il partage avec Fanny (Ariane Labed), sa colocataire, professeur de français. Quand il reçoit dans une enveloppe anonyme un test de grossesse positif, sa vie bascule. Il va mener l’enquête auprès des quatre femmes avec qui il a couché ces derniers mois.

C’est sans doute le gros bémol de ce film politique un peu brouillon. Car s’il avait véritablement une conscience politique responsable du futur, Tristan ne multiplierait pas les aventures d’un soir. Encore moins avec la jeune stagiaire qu’il a lui-même engagée dans le staff de la candidate. Moralité, on peut être de gauche et écolo et se comporter comme un macho sexiste réactionnaire…

Film d’Alice Zeniter et Benoît Volnais avec Niels Schneider, Ariane Labed, Souheila Yacoub

 

BD - Tanguy et Laverdure face au Sabre jaune


Exactement comme Buck Danny, dont l’univers est décliné sur plusieurs plans, les aventures des Chevaliers du Ciel, les fameux Tanguy et Laverdure imaginés par Charlier et Uderzo, n’en finissent plus de voler pour la France et le monde libre. En plus de la série actuelle, avec des avions récents comme les Rafale, le lecteur fan de loopings et de combats aériens, peut retrouver ses deux héros préférés au moment où ils débutent leur carrière. La série dite « Classic » est désormais scénarisée par Patrice Buendia et dessinée par Matthieu Durand.

En 1961, les pilotes français participent à des exercices avec les aviateurs canadiens basés à Marville dans l’Est de la France pour le compte de l’Otan. Lors d'un combat simulé, un sabre aux couleurs jaunes (avion à réaction qui a participé à la guerre de Corée), fond sur un canadien et le descend. D’où venait ce jet ? Pourquoi a-t-il pris cet avion canadien pour cible ? Les interrogations sont nombreuses et les deux Français vont se retrouver, bien malgré eux, au centre d’une histoire ancienne qui date de la guerre de Corée.
Une intrigue bien développée, avec ressort diplomatique et référence géo-stratégique, des dessins très inspirés par ceux d’Uderzo, quand il mélangeait réalisme et caricature : l’ensemble est parfait pour les nostalgiques de la grande période des BD d’aventures franco-belge.
« Tanguy et Laverdure Classic » (tome 5), Dargaud Zéphyr, 15,50 €
 

jeudi 27 avril 2023

De choses et d’autres - Au rendez-vous des chakras

Il n’est pas toujours facile d’honorer des rendez-vous. Surtout quand on les prend longtemps à l’avance. Pour le suivi d’une opération, le secrétariat d’un chirurgien vient de me demander si le mercredi 4 octobre à 10 heures je serais disponible. J’ai tendance à répondre « Peut-être ».

Je ne peux objectivement pas en être sûr et certain car, qui me dit que dans six mois à cette même date et heure, un autre rendez-vous encore plus important ne me serait imposé par ailleurs. Et d’une façon plus prosaïque, rien ne m’assure que je serai toujours de ce monde en octobre. Si j’écoutais mon côté pessimiste, je ne prendrais pas le moindre rendez-vous au-delà de trois jours.

Pas très pratique, mais on n’est jamais assez prudent. D’autres sont moins regardants et partent du principe qu’un rendez-vous ne les engage pas. Ainsi, une amie proche m’a raconté pourquoi elle n’est pas allée à une consultation et n’a même pas prévenu la personne qui la lui avait fixée. Souffrant d’une maladie mystérieuse qui transforme ses pieds en braises incandescentes (du moins, c’est l’impression très douloureuse qu’elle en a), après plusieurs non-réponses de spécialistes, elle s’est décidée, à contrecœur, de se rendre chez une rebouteuse.

Une magnétiseuse, exactement, qui voulait lui « rééquilibrer les chakras ». Aussi sceptique qu’un électeur progressiste quand il entend Olivier Dussopt prétendre que sa réforme des retraites est de gauche, elle décide finalement de conserver ses chakras en l’état et de ne pas effectuer le déplacement. Et de se justifier de cette annulation cavalière : « Elle m’a dit qu’elle était aussi un peu médium. Si c’est vrai, elle a certainement deviné que je ne viendrais pas. »

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mardi 4 avril 2023