Affichage des articles dont le libellé est darroussin. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est darroussin. Afficher tous les articles

dimanche 30 avril 2023

DVD - Le collège se rebelle dans « L’école est à nous »

Un film optimiste sur l’enseignement qui redonne confiance aux jeunes. Preuve que les grèves ont parfois du bon.


Un peu d’utopie dans un monde hyperformaté. Le film d’Alexandre Castagnetti s’attaque à un monument : l’Éducation nationale. Dans L’école est à nous qui vient de sortir en DVD chez UGC Vidéo, il imagine qu’une prof un peu plus humaine que ses collègues, décide de faire confiance à ses élèves. Ils décident et finalement s’en sortent assez bien.

Après deux années d’arrêt suite à un grave traumatisme, Virginie (Sarah Suco), prof de maths, est de retour devant des élèves. Mais la grosse tête n’enseigne plus en prépa mais dans un simple collège de banlieue. Pas évident de motiver des jeunes démissionnaires. Mais quand le syndicat des profs décide de se mettre en grève pour sauver des classes, Virginie se porte volontaire pour assurer la permanence. Avec Ousmane (Oussama Kheddam), prof de techno, ils vont innover et proposer aux jeunes de se prendre en main. Malgré les réticences du principal (Jean-Pierre Darroussin), les résultats ne se font pas attendre.

Jolie fable sur l’écoute, le partage et la compréhension, cette comédie devient émouvante quand on découvre les failles de Virginie, quand Émilie, une des élèves, montre son mal-être face à un père envahissant. Même la petite histoire d’amour entre deux élèves donne des frissons. Un film optimiste mais aussi très réaliste, n’occultant pas la lourdeur de l’administration. Dans les bonus, une longue séquence avec un bêtisier qui donne une bonne idée de l’état d’esprit sur le tournage : concentré mais très décontracté également. Sans oublier quelques scènes coupées.

mercredi 20 novembre 2019

Cinéma - “Les éblouis”, la foi jusqu’à la folie


Premier film de Sarah Suco, actrice née à Montpellier et déjà vue dans Discount ou Place Publique, Les éblouis se base sur son expérience d’adolescente dans une communauté religieuse chrétienne. Endoctrinée par le Berger (Jean-Pierre Darroussin) de cette communauté, toute la famille de Camille (Céleste Brunnquell) va se couper du monde pour tout donner au Saint-Esprit.
Mais comment en est-elle arrivée là ? 




C’est toute la première partie du film. Les parents de Camille (Camille Cottin et Eric Caravaca) ont tout du couple éduqué et progressiste. Une famille aux origines chrétiennes oubliées. La mère, dépressive, comptable sans emploi, se sentant inutile en dehors de son rôle de mère de quatre enfants, va être la première à chercher du réconfort auprès de cette congrégation, mélange de prêtres, de sœurs et de familles. Le Berger l’accueille avec bienveillance.

Révélations

Dans son sillage, le père aussi se met à prier quotidiennement. Ils croient se trouver une seconde famille. À condition de faire quelques concessions. Ainsi plus question de voir les grands-parents, suspicieux et craignant une dérive sectaire de ces religieux pourtant tolérés et aidés par le Vatican. De même Camille doit abandonner son école de crique, avilissant pour le corps humain.
En quelques mois, résumés dans la première heure du film, toute la famille se plie aux injonctions du Berger qui a pris l’habitude d’entrer dans le réfectoire commun sous les bêlements de ses disciples. Des moutons, dénués de tout jugement personnel, corvéables à merci.  Seule Camille, adolescente en pleine découverte de son corps, de ses envies, va ruer dans les brancards. Notamment quand elle voit sa mère en transe en plein exorcisme du Berger.

Le film est plus qu’une charge contre ces sectes agissant presque à visage découvert. Il nous permet de comprendre comment ces experts en manipulation parviennent non seulement à s’approprier l’âme de ces hommes et femmes, mais aussi de tous leurs biens matériels. Car à la base, ce ne sont que des escrocs pour qui le bien de leurs disciples compte peu face à leur désir de domination et d’appropriation.
Une réalisation parfaite, avec deux révélations côté distribution. Tout d’abord la jeune Céleste Brunnquell, écorchée vive dans le rôle de Camille, justement sélectionnée dans la liste des révélations aux Césars 2020. Puis Camille Cottin, formidable comédienne prouvant film après film que son personnage de Connasse, s’il l’a fait connaître du grand public, n’était qu’une infime partie de son immense talent.
 


Film français de Sarah Suco avec Camille Cottin, Jean-Pierre Darroussin, Eric Caravaca et Céleste Brunnquell
 

mercredi 29 novembre 2017

"La Villa" de Robert Guédiguian : Quel héritage ou trace laisse-t-on ?

LA VILLA. Robert Guédiguian retrouve sa bande et les calanques de Marseille pour un film émouvant.



Un concentré de sentiments et d’émotions fortes. Le nouveau film de Robert Guédiguian est une réussite, signe que le réalisateur marseillais est devenu une référence incontournable du 7e art français. Une évidence en sortant de la projection de ce film simple dans sa facture mais aux ressorts multiples et allant crescendo dans les remises en cause intellectuelles des protagonistes. Impression confirmée quand Ariane Ascaride et Jean-Pierre Darroussin, deux fidèles de la bande, admettent que c’est son meilleur film, celui où, âge et expérience aidants, il casse la carapace et se confie le plus.


Entièrement tourné dans une calanque préservée près de Marseille, « La villa » débute par l’accident du père. Un AVC qui le laisse tel un lé- gume dans son lit, maintenu en vie par les appareils mais avec des dommages cérébraux irrémédiables. L’occasion pour ses enfants de se réunir dans cette villa qu’il compte leur léguer. Armand (Gérard Meylan) vit toujours sur place, repreneur du restaurant populaire monté par son père. Joseph (Jean-Pierre Darroussin), professeur à la retraite, arrive en compagnie de sa très jeune fiancée (Anais Demoustiers). Quant à Angèle (Ariane Ascaride), elle revient dans cette calanque après des années d’absence. Cette célèbre actrice de théâtre a voulu gommer de sa mémoire ce père et ce lieu après un drame.
■ Réunion de famille
Sur cette thématique de la réunion de famille, Robert Guédiguian va essentiellement parler de transmission, d’héritage, d’éducation. De l’idéal du père il ne reste plus grandchose. Juste ce petit restaurant et surtout celle villa et son balcon en arrondi qui surplombe la baie, vue paradisiaque qui fait bien des envieux parmi les nouvelles fortunes. Il est aussi beaucoup question de mort dans « La villa ». Physique comme ce couple de retraités qui se donne la mort, main dans la main, serein, persuadé que le monde n’est plus pour eux. Intellectuelle aussi pour le personnage de Jean-Pierre Darroussin, reniant son passé installé pour retourner à la source, dans cette calanque inspirante pour le livre qu’il a toujours rêvé d’écrire.
Mais il ne faut pas forcément tenter de tout comprendre dans le film, l’analyser. La meilleure façon de profiter de cet univers, c’est encore de se laisser couler dedans. Et de se laisser entraîner par le tourbillon d’émotions. Alors on comprend pourquoi on est sur terre et on garde longtemps en tête le prénom nom de cet enfant qui va, avec ses trois frères et sœurs, donner toute son humanité à ce très grand film.
___________
Paroles du réalisateur et de son actrice




Robert Guédiguian, sur la genèse du projet : « On est parti sur une histoire autour du constat que notre monde est en train de disparaître mais qu’on essaie à garder ce qu’il a de bon. Pendant qu’on écrivait, il y a eu le Bataclan. On a été, comme la terre entière, secoué par cette tragédie. Et je me suis dit qu’il est impossible de faire un film sans parler du problème des réfugiés. La question des attentats m’a renvoyé à se qui se passe aujourd’hui dans le monde d’une façon générale. »
Ariane Ascaride, sur le métier de comédienne : « Moi je cherche à retrouver l’aisance totale que j’avais sur une scène quand j’étais enfant. J’étais d’une liberté inimaginable. Le théâtre français est un théâtre bourgeois et ma représentation n’est pas celle de la bourgeoisie, que je le veuille ou non. Et encore j’ai fait des progrès parce que ça fait longtemps que je vis à Paris. C’est un métier très cruel. Moi j’appelle ça l’endurance du coureur de fond. Un truc très solitaire. » Sur le film : « C’était comme un studio à ciel ouvert. On habitait tous dans la calanque donc le soir on mangeait tous ensemble. C’est le seul film où je me suis levée le matin en pyjama et où je suis passée de ma maison en pyjama à la loge sans m’habiller puisque j’allais mettre mon costume. » Sur Robert Guédiguian et le théâtre « il l’a fait une fois mais c’était très mauvais. ça l’emmerde les répétitions, il n’aime pas ça. Il préfère le cinéma, ça va beaucoup plus vite. » 
-------------------
 ➤ « La villa » de Robert Guédiguian (France, 1 h 47) avec Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan.

dimanche 22 juin 2014

Cinéma - Ariane ou la vie comme elle vient

Robert Guédiguian prévient dès le générique : “Au fil d’Ariane” est une fantaisie. On suit la radicale remise en question d’une femme au seuil de la cinquantaine.


Dans son appartement lumineux, Ariane s'active. Aujourd'hui n'est pas un jour comme les autres. Elle dresse une belle table et passe des heures à confectionner un énorme gâteau. Son gâteau d'anniversaire. Mais quand on sonne à la porte ce ne sont que des coursiers avec des fleurs. Et au téléphone les messages d'excuses pleuvent. Quand elle constate qu'elle sera seule pour déguster son chef-d'oeuvre, Ariane préfère prendre ses jambes à son cou. Et finalement, ce jour particulier ne sera vraiment pas comme les autres, mais pour de toutes autres raisons.

Robert Guédiguian, cinéaste engagé, aux œuvres parfois aussi sombres que Marseille, sa ville d'élection est lumineuse, semble avoir voulu s'offrir une récréation. Comme une pause dans une filmographie trop sérieuse. Et cette « fantaisie » il a voulu la partager avec ses acteurs fétiches. Ariane est interprétée par Ariane Ascaride, derrière le comptoir du bar-restaurant on retrouve Gérard Meylan, Jacques Boudet montre toute l'étendue de sa connaissance de l'anglais, Jean-Pierre Darroussin est irrésistible en chauffeur de taxi. Une joyeuse bande autour d'Ariane qui déprime sérieusement. Son coup de tête l'entraîne au port de Marseille, bloquée par un pont basculant, elle accepte l'invitation d'un jeune scootériste d'aller déjeuner dans une petit restaurant en bord de mer.

Aider les autres
Bien décidée à n'en faire qu'à sa tête, Ariane accepte. Elle prend la vie comme elle vient, sans se poser de questions. Elle mange donc en compagnie de retraités et de Jack (Jacques Boudet), l'écrivain américain. Denis (Gérard Meylan), le patron, grand fan de Jean Ferrat, est le pivot de ce petit monde autour duquel gravite également Martial, un vieil Africain et une jeune prostituée.
Séduite par ces personnages, Ariane décide de s'inviter, remplace la serveuse, dort sur le bateau de Denis, aide Martial et va pêcher avec Jack aux sentences imparables comme « la fureur destructrice du libéralisme ». Cela donne à Denis de lui dire, esbaudi : « Jack, tu es épatant ! »
De son côté, Ariane est sur un petit nuage, heureuse, amoureuse, apaisée. Avec l'envie de mettre à exécution cette maxime « On joue toujours sa vie en une seule fois» Mais tout cela est-il réel ? Pourquoi Ariane entend la tortue de Denis lui parler ? Et Martial, qui sont ces enfants à qui il souhaite bonne nuit le soir, en hurlant ? Robert Guédiguian va finalement beaucoup plus loin qu'une simple fantaisie. Et à trop vouloir aider les autres, Ariane, comparée à un ange par Denis, risque de se brûler les ailes.
__________________________

Une bande d'acteurs fidèles

Robert Guédiguian, cinéaste marseillais, a su s’entourer d’acteurs fidèles qu’il retrouve régulièrement dans ses réalisations. En tête de distribution Ariane Ascaride, évidemment. Celle qui est sa femme depuis plus de 30 ans est de la première aventure. Le premier film de Guédiguian, “Dernier été”, en 1980 donne le premier rôle à Ariane Ascaride et Gérard Meylan, l’autre fidèle de la “tribu”. Durant des années le cinéaste s’est contenté de succès d’estime jusqu’à la consécration de “Marius et Jeannette”. Entre-temps Jean-Pierre Darroussin a rejoint la bande.
Comme une troupe de théâtre, les acteurs se retrouvent et jouent les scénarios de leur mentor. Du drame social au polar en passant par le film historique, pas un genre n’échappe à Robert Guédiguian. Un touche à tout de génie, pouvant s’appuyer sans réserve sur ses talentueux comédiens. “Au fil d’Ariane”, film plus léger, sans trop de pathos, loin de la réalité, comme dans un monde idéal, est une nouvelle expérience. C’est totalement différent des précédentes productions mais reste avant tout du Guédiguian.

jeudi 12 juin 2014

Cinéma - "La Ritournelle" ou l'écart de la « petite bergère »

Le monde rural s'émancipe dans « La ritournelle », fable amoureuse de Marc Fitoussi avec Isabelle Huppert et Jean-Pierre Darroussin.


De la Normandie très british au Paris plus cosmopolite, « La Ritournelle » de Marc Fitoussi propose au spectateur un grand écart intellectuel réjouissant. Un film sur les affres amoureux d'un couple de ruraux à des années lumière des paysans solitaires et frustrés des émissions de téléréalité en vogue. A la campagne aussi on s'aime, on s'éloigne et parfois on est tenté par faire un accroc à son contrat de mariage. Une histoire universelle dans un milieu en pleine révolution, servi par deux acteurs d'une rare conviction.

Xavier Lecanu (Jean-Pierre Darroussin) est éleveur de charolaises. Ces vaches destinées à la viande sont dociles et robustes. Elle ont la belle vie dans les vertes prairies de son exploitation en Normandie. Régulièrement il participe à des concours où ses taureaux reproducteurs récoltent nombre de prix. Il s'occupe de ses bêtes avec sa femme, Brigitte (Isabelle Huppert). La cinquantaine, ses deux enfants hors du nid (et pas intéressés par la reprise de l'exploitation familiale), elle aimerait un peu plus de fantaisie dans une vie qui ronronne trop à son goût. Elle repousse cette envie, cette démangeaison qui prend physiquement la forme d'une plaque d'eczéma sur la poitrine. Mais quand des jeunes viennent fêter un anniversaire dans la maison d'à côté, Brigitte se surprend à rêver danse, musique, joie et émancipation. Un songe qui prend forme avec la visite de Stan (Pio Marmai), étudiant loin d'être insensible à la beauté de cette femme mûre et mystérieuse. Mais Brigitte n'ose pas. Et elle quitte la soirée avant de commettre l'irréparable.
Deux jours à Paris
Le lendemain, elle regrette et invente une consultation à Paris chez un dermatologue pour tenter de retrouver Stan. Avec sa petite valise cabine elle va passer deux jours dans la capitale entre rendez-vous ratés avec Stan et rencontre inopinée de Jesper (Michael Nyqvist), dentiste norvégien peu motivé par le congrès international motif de son séjour en France mais très barbant. Pendant que Brigitte se laisse faire la cour, Xavier découvre que le prétendu dermatologue a pris sa retraite. Soupçonneux il confie ses bêtes à son ouvrier agricole et rejoint Paris.
Cette histoire d'épouse lassée et de mari jaloux est beaucoup plus subtile qu'un banal marivaudage. Notamment dans les réactions du mari. Xavier a pour habitude d'appeler sa femme « Petite bergère ». Elle n'aime pas trop mais c'est toute la marque de l'amour fort et entier entre ces deux êtres qui se sont rencontrés à l'école d'agriculture. Le grand risque de Marc Fitoussi était de rendre crédible ses acteurs en ruraux. Jean-Pierre Darroussin, cela n'étonnera personne, est parfait dans ses habits de gentleman farmer. Isabelle Huppert réussi l'exploit de rendre son personnage de bergère rêveuse aussi désirable qu'attachant, malgré des habits qui ne la mettent jamais en valeur. Et en une scène muette, vers la fin, elle donne toute sa profondeur à ce personnage en quête de meilleur tout en conservant l'acquis. Belle et émouvante. Elle mérite son bonheur.
___________________

Jean-Pierre Darroussin gentleman farmer

Acteur tout-terrain, habitué des petits rôles, fidèle à une bande, Jean-Pierre Darroussin éclabousse le film de son talent. Il porte cette histoire de Marc Fitoussi du début à la fin. Que cela soit dans la peau d'un paysan un peu rétrograde (en mode Jean-Pierre Bacri), du petit garçon encore amoureux de sa bergère, en mari jaloux espionnant sa femme ou en grand seigneur à la Raimu, il passe par tous les états avec une facilité et une authenticité déconcertantes. 
Ce n'est certainement pas le comédien le plus « bankable » du cinéma français, mais il est depuis longtemps dans le Top 5 des plus doués. Il sera de nouveau à l'affiche la semaine prochaine pour la sortie de « Au fil d'Ariane », dernière fantaisie de Robert Guédiguian. Il y interprète cette fois un chauffeur de taxi.