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mercredi 21 février 2024

Cinéma - “L’Empire”, le Star Wars du Nord par Bruno Dumont

 La Terre est sur le point d’être envahie par des armadas de vaisseaux spatiaux. Bruno Dumont donne sa version du space opéra dans L’Empire, étonnant mélange de science-fiction et de comédie ch’ti.


Bruno Dumont, cinéaste inclassable, primé à Cannes avec L’Humanité, ambassadeur du Nord avec sa série désopilante P’tit Quinquin, s’attaque à un genre peu pratiqué en France : le space opéra. Il y un peu de La Guerre des étoiles dans ce film sobrement titré L’Empire.

Deux civilisations s’affrontent dans l’infini de l’espace. Une veut faire triompher le Bien. L’autre, le Mal. Mais la bataille finale, gigantesque combat entre deux armadas de vaisseaux spatiaux, se déroulera aux abords de la Terre.

Une planète déjà en partie colonisée. Le Messie du Mal est en place. Un gros bébé joufflu, fils de Jony (Brandon Vlieghe), insoupçonnable général des armées de Belzébuth (Fabrice Luchini) sous sa couverture de marin-pêcheur du Nord. Il enrôle une cagole chti (Lyna Khoudri) et affronte une guerrière du Bien, experte en sabre-laser, Jane, (Anamaria Vartolomei), déguisée en simple touriste profitant de l’air pur et des plages de la région.

Cathédrales volantes

Accent du Nord, mélange entre comédiens pros et amateurs, vaisseaux spatiaux en forme de cathédrales ou de châteaux de la Loire, dialogues manichéens voire binaires qui semblent parfois directement tirés de la Bible...

L’Empire est un Ovni cinématographique qui peut être apprécié très différemment. Mauvaise série Z qui radote avec effets spéciaux ratés pour certains, le film peut aussi se révéler comme une future œuvre culte osant ce mélange de genre totalement improbable.

Mais rien que pour la présence au générique des deux gendarmes de la série P’tit Quinquin, toujours aussi largués et incompétents, rois du burlesque involontaire, les fans de Dumont apprécieront cette nouvelle variation de ses expérimentations sur grand écran.

Film de Bruno Dumont avec Lyna Khoudri, Anamaria Vartolomei, Camille Cottin, Fabrice Luchini, Brandon Vlieghe

 

mercredi 20 novembre 2019

Cinéma - “Les éblouis”, la foi jusqu’à la folie


Premier film de Sarah Suco, actrice née à Montpellier et déjà vue dans Discount ou Place Publique, Les éblouis se base sur son expérience d’adolescente dans une communauté religieuse chrétienne. Endoctrinée par le Berger (Jean-Pierre Darroussin) de cette communauté, toute la famille de Camille (Céleste Brunnquell) va se couper du monde pour tout donner au Saint-Esprit.
Mais comment en est-elle arrivée là ? 




C’est toute la première partie du film. Les parents de Camille (Camille Cottin et Eric Caravaca) ont tout du couple éduqué et progressiste. Une famille aux origines chrétiennes oubliées. La mère, dépressive, comptable sans emploi, se sentant inutile en dehors de son rôle de mère de quatre enfants, va être la première à chercher du réconfort auprès de cette congrégation, mélange de prêtres, de sœurs et de familles. Le Berger l’accueille avec bienveillance.

Révélations

Dans son sillage, le père aussi se met à prier quotidiennement. Ils croient se trouver une seconde famille. À condition de faire quelques concessions. Ainsi plus question de voir les grands-parents, suspicieux et craignant une dérive sectaire de ces religieux pourtant tolérés et aidés par le Vatican. De même Camille doit abandonner son école de crique, avilissant pour le corps humain.
En quelques mois, résumés dans la première heure du film, toute la famille se plie aux injonctions du Berger qui a pris l’habitude d’entrer dans le réfectoire commun sous les bêlements de ses disciples. Des moutons, dénués de tout jugement personnel, corvéables à merci.  Seule Camille, adolescente en pleine découverte de son corps, de ses envies, va ruer dans les brancards. Notamment quand elle voit sa mère en transe en plein exorcisme du Berger.

Le film est plus qu’une charge contre ces sectes agissant presque à visage découvert. Il nous permet de comprendre comment ces experts en manipulation parviennent non seulement à s’approprier l’âme de ces hommes et femmes, mais aussi de tous leurs biens matériels. Car à la base, ce ne sont que des escrocs pour qui le bien de leurs disciples compte peu face à leur désir de domination et d’appropriation.
Une réalisation parfaite, avec deux révélations côté distribution. Tout d’abord la jeune Céleste Brunnquell, écorchée vive dans le rôle de Camille, justement sélectionnée dans la liste des révélations aux Césars 2020. Puis Camille Cottin, formidable comédienne prouvant film après film que son personnage de Connasse, s’il l’a fait connaître du grand public, n’était qu’une infime partie de son immense talent.
 


Film français de Sarah Suco avec Camille Cottin, Jean-Pierre Darroussin, Eric Caravaca et Céleste Brunnquell
 

mercredi 19 avril 2017

DVD et blu-ray : Papa veuf et filles agitées


Cigarettes et chocolat chaud. Émouvant premier film de Sophie Reine.

Dans la famille Patar, je veux le père. Les filles aussi. « Cigarettes et chocolat chaud » de Sophie Reine raconte les déboires de ce trio fusionnel, sorte de famille clown perdue dans un monde trop pragmatique. Comme toujours chez les clowns, il y a celui qui est triste. C’est Denis, le père (Gustave Kervern). Il y a trois ans, sa femme, la mère de ses deux filles, est morte. Depuis il tente de survivre et de donner le meilleur à ses enfants, une adolescente, Janine (Héloïse Dugas) et Mercredi (Fanie Zanini). Dans la maison, joyeux bordel mal rangé mais au charme indéniable, il est un papa très cool. Le samedi c’est pique-nique au supermarché, en semaine, si les filles ont encore envie de dormir, pas de problème, il les laisse se reposer et quand la petite montre trop d’agressivité, il l’inscrit à des cours de... catch. Lui cumule deux boulots pour rembourser les dettes, notamment l’enterrement de son amour de toujours.


■ Kervern et Cottin, opposés qui s’attirent
En journée il est caissier dans une grande jardinerie, la nuit, officiellement pour ses filles il est vétérinaire de garde, en réalité caissier dans un sex-shop. Consé- quence il n’est pas toujours là pour récupérer les enfants à la sortie de l’école. Malgré la gentillesse des policiers, habitués aux retards de Denis et charmés par l’espiègle Mercredi, ils sont obligés de faire un signalement. Et là, c’est le drame !
De comédie déjantée, le premier film de Sophie Reine, inspiré de sa propre famille, bascule dans le drame. Mais pas trop. Une assistante sociale se rend chez les Patar. Séverine (Camille Cottin), guindée, rigide, à cheval sur les principes, cache son horreur face à un tel délire. Denis est mis à l’amende. Il devra suivre un stage pour lui inculquer les bon principes qui font les bons parents. C’est bien un drame pour la famille car les deux filles risquent d’être confiées à une famille d’accueil. Et si ça se trouve même pas la même fait remarquer Robert (Thomas Guy), meilleur ami de Janine et par ailleurs un peu amoureux d’elle. Le challenge est rude pour Denis, un « insoumis » de la première heure, qui a rencontré sa future épouse dans les années 80, en manifestant contre la réforme Devaquet.


Mais Séverine, derrière ses airs de vieille fille coincée se laisse séduire. D’abord par les filles. Puis par Denis. Un « feel good movie », selon l’expression à la vogue, a cependant ce petit plus qui en fait surtout une ode à la différence, avec beaucoup de tendresse, de réels moments d’émotion et de la poésie trop rare dans nos vies formatées.
Gustave Kervern, en gros maladroit dépassé, est génial. Il sait faire rire mais aussi toucher la corde sensible des parents. Camille Cottin, à mille lieues de son rôle de « Conasse », se révèle excellente actrice, jouant avec subtilité la modification de sa vision première de cette famille hors normes.
Dans les bonus, un making of permet de mieux comprendre la démarche et le parcours de la réalisatrice, monteuse qui a franchi le pas et a tenté de mettre son univers si personnel sur pellicule. On a même droit à son premier court-métrage, les prémices des aventures de la famille Patar.
 « Cigarettes et chocolat chaud », Diaphana, 17,99 € le blu-ray, 14,99 € le DVD