dimanche 20 octobre 2024

BD - Kim et Manon explorent


Nouvelle étoile dans les mondes d’Aldebaran : Bellatrix. Cette planète, imaginée par Léo, est très semblable à la Terre. Mais version conquête de l’Ouest avec des sortes d’autruches pour chevaux. Manon et Kim, réunies, débarquent incognito pour tenter d’insuffler un peu de modernité et de liberté dans cette société très machiste.

Dans le second tome, le vaisseau en orbite devant les protéger, reçoit l’ordre d’abandonner la mission. Et de partir. Sans elles. Comment ces deux jeunes femmes à l’esprit libre et indépendant vont-elles pouvoir survivre dans un monde où la femme est rabaissée à son rôle de génitrice et de pourvoyeuse de plaisir aux mâles ?

Sous couvert de science-fiction, Léo livre un vibrant plaidoyer pour l’égalité entre hommes et femmes.
« Bellatrix » (tome 2), Dargaud, 48 pages, 14,50 €

samedi 19 octobre 2024

Littérature et science-fiction - Dans le futur, le « Chien 51 » de Laurent Gaudé se rebelle

Dans un futur proche, les entreprises ont remplacé les Etats. Zem est un policier de terrain, un « chien » comme les surnomme la population.


Pour qu’un roman de science-fiction soit crédible, il suffit qu’il se baser sur quelques faits connus de tous. Le roman Chien 51 de Laurent Gaudé débute par la crise économique en Grèce. Le pays, en faillite, est finalement racheté par une multinationale GoldTex. Tout le pays, habitants compris. « On leur dit que leur seule chance de survie est de se laisser racheter par GoldTex. Ils apprennent à prononcer le mot, à le détester. Ils ne seront plus Grecs, ils seront salariés. Et comme GoldTex veut donner une image moderne de son fonctionnement on ne dit plus salarié mais cilarié. » Ensuite la Grèce est revendue à la découpe à des sous-traitants. Certaines parties sont transformées en immenses zones vouées à devenir de gigantesques décharges.

Beaucoup choisissent l’exil, offert par GoldTex. Parmi ces réfugiés d’un tout nouveau statut, Zem Sparak qui rejoint Magnapole, mégalopole propriété de la multinationale. L’intrigue débute 30 ans plus tard. Un cadavre est découvert dans la Zone 3 de la ville. Éviscéré. Zem se rend sur place. La cinquantaine désabusée, il est policier. Exactement chien. Un simple enquêteur de terrain sans grand pouvoir dans cette zone 3, celle où vivent les plus pauvres. La zone 2 héberge les classes moyennes. La zone 1 est réservée à l’élite de GoldTex.

Zem qui va devoir enquêter en duo avec Salia Malberg, enquêtrice de la zone 2 qui méprise les chiens. Beaucoup tenteront de ralentir ses investigations. Mais pour une fois, il décide de ne pas plier l’échine et se rebelle.

Qui est ce mort mystérieux ? Pourquoi lui avoir volé ses prothèses internes ? Pourquoi les flics des zones 2 et 3, qui se détestent, doivent-ils collaborer ?

Ce roman, donne une image terrifiante de notre futur si les grandes sociétés parvenaient à prendre le pouvoir. Mais objectivement, n’est-ce pas déjà le cas avec les fameuses entreprises dites GAFAM ou, la pire d’entre elles, celle dirigée par Elon Musk ?

« Chien 51 », Laurent Gaudé, Babel, 296 pages, 8,90 €

vendredi 18 octobre 2024

Cinéma - Comment s’en sortir “Quand vient l’automne” ?

Thriller à la Simenon, « Quand vient l’automne » de François Ozon offre un superbe premier rôle à Hélène Vincent, 81 ans.


L’automne dont il est question dans ce film de François Ozon, c’est d’abord la saison, quand la campagne humide se prépare à se mettre en sommeil. Mais c’est aussi métaphoriquement l’automne de la vie des deux personnages principaux, Michelle (Hélène Vincent) et Marie-Claude (Josiane Balasko).

Elles vivent dans la même petite ville de Bourgogne, entourée de bois et de champs. La première dans une grande bâtisse avec un immense jardin, la seconde dans un petit pavillon. Deux femmes seules, qui ont un même secret lié à leur passé. Michelle a une fille, Valérie (Ludivine Sagnier) et Marie-Claude un garçon, Vincent (Pierre Lottin), tous les deux adultes.

La première est mariée, en instance de divorce, mère d’un jeune Lucas qui adore sa mamie. La situation est plus compliquée pour Marie-Claude. Vincent, après quelques « bêtises », se retrouve en prison. Quand il sort, il retourne chez sa mère et accepte de travailler dans le grand jardin de Michelle. Le début du film, pose les bases de l’histoire et se révèle déjà très intrigant. La réalisation, toute en délicatesse, en non-dits, plante l‘ambiance, renforcée par une musique obsédante de Evgueni et Sacha Galperine.

Le premier choc vient quand Valérie manque de mourir. Un midi, chez sa mère, elle a mangé des champignons ramassés la veille dans les bois. Elle seule en a mangé. Et frôle la mort. Elle quitte le soir même la maison de sa mère, refusant de lui laisser Lucas durant les vacances comme convenu. C’est aussi à partir de ce moment que l’on doute. Accident ou acte délibéré ? Michelle, sous ses airs de mamie gâteau ne cache-t-elle pas de profondes fractures psychologiques ?

L’explication viendra peut-être du métier qu’elle exerçait à Paris avant de se retirer à la campagne. Un climat, un sentiment de doutes et de soupçons, renforcés par l’attitude de Vincent. Le spectateur se pose beaucoup de questions au sujet de cet être, a priori frustre, joué avec naturel par Pierre Lottin. Un condensé de violence contenue d’où affleure une gentillesse désarmante.

La suite du film, surprenante, voire déconcertante tant François Ozon pousse loin le curseur de la rupture avec le politiquement correct, nous entraîne dans ces limbes de l’automne, quand la nature s’endort et que de sous les feuilles mortes sortent les champignons. Bons ou mauvais.

Film de François Ozon avec Hélène Vincent, Josiane Balasko, Ludivine Sagnier, Pierre Lottin.

jeudi 17 octobre 2024

Cinéma - “On fait quoi maintenant ?” ou trois seniors en galère


Se faire licencier à 59 ans : certains en rêvent, d’autres vivent ça comme un cataclysme. Alain (Lucien Jean-Baptiste), commercial spécialisé dans la vente de portails fait partie des seconds. N’arrivant pas à retrouver un emploi, il a la géniale idée de créer sa boîte. Cela inquiète un peu sa femme Mathilde (Zabou Breitman). D’autant qu’il envisage de se lancer dans la garde d’enfants.

Grand-père gâteau, Alain est souvent sollicité par sa fille pour garder ses trois petits-enfants. Le marché est porteur. Pour mettre toutes les chances de son côté, il doit étoffer son équipe. C’est à la composition du trio que la comédie de Lucien Jean-Baptiste devient irrésistible.

Si lui est avant tout un doux rêveur, aveuglé par son envie de se prouver qu’il peut être indépendant, Véronique (Isabelle Nanty) et Jean-Pierre (Gérard Darmon) sont deux cas sociaux au fort potentiel humoristique. La première, ancienne responsable de la logistique dans l’entreprise d’Alain, est en arrêt maladie depuis deux ans.

Son mari l’a quittée. Depuis, elle ne voit plus personne. Il vaut mieux tant elle est incontrôlable à la moindre contrariété. Le second, ancien présentateur d’un jeu télévisé, survit en vendant les dernières miettes de son image de marque.

Convaincre les banquiers est une gageure. Ils y croient pourtant, trouvant dans cet investissement l’opportunité pour se bonifier. Mais les obstacles (autant de gags en puissance), sont nombreux. Entre la mythomanie de Jean-Pierre et la franchise destructrice de Véronique, Alain va devoir souvent jouer le pompier appelé d’urgence. Une très bonne comédie sur les seniors qui ne se laissent plus faire.

Film de et avec Lucien Jean-Baptiste et avec Isabelle Nanty, Gérard Darmon


mercredi 16 octobre 2024

En vidéo, “Le deuxième acte”



Quentin Dupieux fait partie des meilleurs cinéastes au monde. Il a tout compris au fonctionnement de ce divertissement, et de la frontière entre réalité et fiction.

Le deuxième acte est tout simplement génial et sa sortie en vidéo chez Diaphana permettra à tous ceux qui l’ont raté sur grand écran de bénéficier de cette master classe. Il y est question de paraître, d’intelligence artificielle, de superficialité, de travelling et d’arrogance.

Une histoire basique : un homme demande à son meilleur ami de séduire la femme qui le désire, en présence de son père, se déroulant dans un petit restaurant en bord de route. Les comédiens (Léa Drucker, Vincent Lindon, Louis Garrel, Raphaël Quenard et Manuel Guillot) réalisent des acrobaties périlleuses pour jongler entre fiction, réalité et un entre-deux, typique des films du réalisateur.

mardi 15 octobre 2024

Thriller - Cornouailles, Japon, Islande : voyagez avec Robert Goddard

Thriller haletant, « 18 Barnfield Hill » de Robert Goddard vous fera cheminer dans trois continents et le temps.


La discrétion est un atout essentiel quand on a la prétention de faire le métier de détective privée. Umiko Wada, un peu plus de 50 ans, veuve, n’est que la secrétaire de cette petite agence basée à Tokyo, mais quand son patron Kodaka l’envoie sur le terrain, il souligne qu’« elle avait de bonnes chances d’éviter d’être repérée. Elle était plutôt douée en la matière. Sans vouloir l’offenser, Kodaka lui dit qu’elle avait le don d’être invisible. Elle était anonyme, et personne ne la remarquait ni ne lui prêtait la moindre attention. »

Une héroïne particulièrement discrète, mais déterminée. Tous ceux qui voudront l’éliminer (et ils sont très nombreux) au cours du roman, l’apprendront à leurs dépens. Dans le cadre d’une enquête pour retrouver les présumés tueurs d’un homme d’affaires japonais à Londres en 1977, Wada part à Londres rencontrer un témoin de l’époque. Il faisait partie d’une bande de jeunes activistes, révolutionnaires, persuadés qu’ils pouvaient changer le monde.

40 années plus tard ils sont vieux et rangés. Mais le mystère reste entier. Et rapidement Wada se lance dans une seconde enquête, la mort au cours de cet été 1977, sur une plage des Cornouailles, de deux des étudiants de la bande. Or, l’un d’entre eux, Peter Ellery, est vu quelques mois plus tard en compagnie du Japonais assassiné peu de temps après.

Le récit, mené d’une main de maître par Robert Goddard, romancier maniant à la perfection les rebondissements, alterne le point de vue de Wada qui va de Tokyo à Londres en passant par la campagne islandaise et en terminant dans les Cornouailles et celui de Nick, professeur de dessin londonien, fils de Caro, une des activistes de l’été 1977.

Qui est le père de Nick ? Quelles mafias internationales agissent en coulisses pour des montants dépassant l’entendement ? Que s’est-il passé sur la plage ? Le gaz sarin est-il le point commun dans cette affaire ?

Ce thriller vous happe littéralement. Vous allez trembler avec Wada et vous poser bien des questions avec Nick.

« 18 Barnfield Hill » de Robert Goddard, Sonatine, 408 pages, 23 €

lundi 14 octobre 2024

De la science-fiction - Les essaims


Si vous avez envie de découvrir la littérature de science-fiction mais que vous redoutez les pavés interminables, les titres de la collection « Le labo » de Robert Laffont sont parfaits.

Les essaims de Chloé Chevalier, raconte comment d’immenses vaisseaux, hébergeant une Reine chargée d’amener la vie sur des planètes mortes, sont pilotés par des jeunes femmes solitaires, dénuées de sentiment et qui n’ont pas la notion du temps. Tenyka va faire étape dans un système qui pratique la jachère de planète.

Trois globes habitables et tous les 51 ans, l’ensemble des humains change de lieu de vie. Cela permet de préserver toutes les ressources. Une idée qu’on devrait mettre en place au lieu de maltraiter la Terre.

« Les essaims » de Chloé Chevalier, Robert Laffont, 112 pages, 12 €

dimanche 13 octobre 2024

De l’humour : Addictions

Fin, très actuel, joliment dessiné : le recueil de dessins d’humour signé François Ravard a tout pour vous faire passer un excellent moment. Il y est question d’Addictions. Souvent celles qui passent par les nouvelles technologies, du GPS aux réseaux sociaux.

Un dessin pleine page en couleur, une phrase prononcée par un des protagonistes et vous pouvez imaginer toute une histoire avec début, fin et chute. Exemple avec cette jeune fille attablée dans un restaurant. Le serveur lui explique, placide : « Je suis navré Madame, mais vos 135 followers ne seront pas suffisants pour prétendre à un repas gratuit. Pour un café à la rigueur. » .

« Addictions » de François Ravard, Fluide Glacial, 96 pages, 22,90 €

samedi 12 octobre 2024

Un album jeunesse : Je suis moi et personne d’autre


L’histoire de cet album jeunesse écrit par Baptiste Beaulieu et illustré par Qin Leng est malheureusement trop fréquente dans les écoles. Francisco est un petit garçon hésitant. Il découvre la vie et pour se faire des amis décide de cacher ses sentiments, ses envies et choix pour aller dans le sens de la majorité.

Un effacement de la personnalité qui l’empêche de s’épanouir de jour en jour. L’aide d’une copine de classe plus clairvoyante va lui permettre de comprendre qu’à trop vouloir se cacher dans la masse, on risque de carrément disparaître.

« Je suis moi et personne d’autre », Les Arènes, 40 pages, 16,90 €

vendredi 11 octobre 2024

Un essai : Ils sont elles


Si certains veulent s’affranchir du genre, il faut parfois en changer pour réussir. Catherine Sauvat dans cet essai littéraire revient sur toutes ces romancières qui ont utilisé des noms d’hommes pour réussir à être éditées. Il y a bien évidemment George Sand, Aurore Dupin de son vrai nom, mais aussi Vernon Lee, René Vivien ou Claude Cahun, Violet Paget, Pauline Mary Tarn et Lucy Schwob pour l’état-civil.

Et même récemment la masculinisation de son nom de plume était en vigueur comme ce génial créateur de romans de SF, James Tiptree Jr, qui était en réalité une vieille dame de plus de 50 ans. Alice Bradley Sheldon, qui une fois découverte, a perdu l’inspiration….

«Ils sont elles », Flammarion, 320 pages, 21 €