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samedi 30 août 2025

Roman noir - Au Sud, la résignation

Bienvenue dans le Snakefoot, région du sud des USA, zone sinistrée théâtre de « Nulle part où revenir », roman de Henry Wise.

Devenir l'adjoint du shérif d'une petite ville rurale de Virginie semblait la meilleure solution pour Will Seems. Il connaît la région pour y avoir passé toute son enfance. Il l'a quittée, comme la majorité des jeunes, pour la grande ville en plein essor de Richmond. Pourquoi alors revenir à Euphoria, près du sinistre marécage de Snakefoot, dans la maison presque en ruines abandonnée par son père devenu avocat ?  Premier roman de Henry Wise, « Nulle part où revenir » est une plongée angoissante et perturbée dans l'esprit de Will. Il n'est pas le narrateur, mais le principal protagoniste de ce roman noir entre ségrégation raciale, violence au quotidien et misère sociale. 

Alors qu'il vient de passer la nuit dans sa voiture au bord de la rivière, Will voit de la fumée au loin. Il se précipite et découvre la maison de Tom Janders en flammes. Il parvient de sortir son ami d'enfance du brasier, mais trop tard. Le shérif Mills arrive sur place pour tenter de réconforter la compagne de Tom, Day Pace : « Elle hurlait, semant son chagrin derrière elle comme une traînée de sang ou de mort. (…) Il la ceintura et elle continua à se débattre, si bien que, pendant un moment, ils semblèrent danser un pas de deux hébété. » Avec une science de la narration étonnante pour un premier roman, Henry Wise distille les indices, présente les protagonistes, intrigue le lecteur. 

Le traumatisme de l'enfance

Will semble perdu dans cette ville qu'il a violemment rejeté à une époque. C'est pourtant son univers, sa base, ses racines. Là qu'il a vécu heureux quelques années, quand sa mère était toujours en vie, avant que son meilleur ami, Sam, ne se fasse littéralement lyncher après avoir tenté de le défendre face à une bande de voyous. Le suicide de sa mère, la fuite de son père, la bienveillance des voisins, les parents de Sam... Will rumine sa culpabilité. Qui va augmenter d'un cran quand il surprend le père de Sam fuyant l'incendie et qu'il comprend que Tom a été tué de plusieurs coups de couteau avant l'embrasement de sa maison. 

Un meurtre, un innocent à sauver, des secrets à garder : le récit devient aussi touffu que la végétation luxuriante de ce Sud infesté de redoutables serpents (mocassins à tête cuivrée) et de marécages entre les immenses champs de tabac. Aidé d'une ancienne policière devenue détective privée, Will va pister le véritable meurtrier, comme pour tenter de trouver une nouvelle raison pour continuer son chemin dans cette région ravagée par des décennies de racisme et d'exploitation des esclaves noirs par les planteurs blancs. L'histoire de Will, Day, Sam et tous les autres, tragique et désespérée, semble le résumé parfait de cette Amérique toujours déchirée par des siècles d'injustice.

« Nulle part où revenir », Henry Wise, Sonatine, 432 pages, 23 €

jeudi 12 juin 2025

Roman d'espionnage - Jeux troubles à Paris en 1919


Présenté comme la grande œuvre de Robert Goddard, Sur les chemins du monde, roman d'espionnage se situant à Paris en 1919, n'est que la première partie d'une trilogie qui se poursuivra en Écosse puis au Japon. Formidable conteur, l'auteur britannique plonge ses lecteurs dans le Paris de 1919. La capitale française est aussi le centre du monde. 

Au Quai d'Orsay, les grandes puissances (USA, Grande-Bretagne, France...) négocient une paix durable après les millions de morts de 14-18. Paris grouille d'espions. C'est dans cette ville décrite avec un luxe de détails, que Sir Henry, diplomate anglais, est retrouvé mort. Il a chuté du toit de l'immeuble de sa maîtresse française. Un scandale qui interpelle Max, son plus jeune fils, héros de l'aviation anglaise. Max va affronter cette jungle urbaine, face aux services secrets américains, police française, espions allemands et manipulateurs japonais. Car il est persuadé que son père a été assassiné après avoir dérobé des secrets d’État. 

Un roman historique passionnant, mené de main de maître par un écrivain qui a plus d'un tour dans son sac pour rendre son histoire palpitante.   

« Sur les chemins du monde », Sonatine, 528 pages, 24,90 €

mardi 15 octobre 2024

Thriller - Cornouailles, Japon, Islande : voyagez avec Robert Goddard

Thriller haletant, « 18 Barnfield Hill » de Robert Goddard vous fera cheminer dans trois continents et le temps.


La discrétion est un atout essentiel quand on a la prétention de faire le métier de détective privée. Umiko Wada, un peu plus de 50 ans, veuve, n’est que la secrétaire de cette petite agence basée à Tokyo, mais quand son patron Kodaka l’envoie sur le terrain, il souligne qu’« elle avait de bonnes chances d’éviter d’être repérée. Elle était plutôt douée en la matière. Sans vouloir l’offenser, Kodaka lui dit qu’elle avait le don d’être invisible. Elle était anonyme, et personne ne la remarquait ni ne lui prêtait la moindre attention. »

Une héroïne particulièrement discrète, mais déterminée. Tous ceux qui voudront l’éliminer (et ils sont très nombreux) au cours du roman, l’apprendront à leurs dépens. Dans le cadre d’une enquête pour retrouver les présumés tueurs d’un homme d’affaires japonais à Londres en 1977, Wada part à Londres rencontrer un témoin de l’époque. Il faisait partie d’une bande de jeunes activistes, révolutionnaires, persuadés qu’ils pouvaient changer le monde.

40 années plus tard ils sont vieux et rangés. Mais le mystère reste entier. Et rapidement Wada se lance dans une seconde enquête, la mort au cours de cet été 1977, sur une plage des Cornouailles, de deux des étudiants de la bande. Or, l’un d’entre eux, Peter Ellery, est vu quelques mois plus tard en compagnie du Japonais assassiné peu de temps après.

Le récit, mené d’une main de maître par Robert Goddard, romancier maniant à la perfection les rebondissements, alterne le point de vue de Wada qui va de Tokyo à Londres en passant par la campagne islandaise et en terminant dans les Cornouailles et celui de Nick, professeur de dessin londonien, fils de Caro, une des activistes de l’été 1977.

Qui est le père de Nick ? Quelles mafias internationales agissent en coulisses pour des montants dépassant l’entendement ? Que s’est-il passé sur la plage ? Le gaz sarin est-il le point commun dans cette affaire ?

Ce thriller vous happe littéralement. Vous allez trembler avec Wada et vous poser bien des questions avec Nick.

« 18 Barnfield Hill » de Robert Goddard, Sonatine, 408 pages, 23 €

dimanche 18 août 2024

Polar - La quête du shérif


Dans son nouveau roman policier, R. J. Ellory plonge le lecteur dans la base du système policier des USA. Victor Landis est shérif. Il gère les désordres d’une petite ville de Géorgie, près de la frontière avec le Tennessee. Son jeune frère, Frank, est lui aussi shérif. Ils sont brouillés mais Victor est obligé de le rencontrer une dernière fois. Pour reconnaître son corps. Écrasé par un chauffard. Volontairement. Un meurtre.

Même si ce n’est pas de sa compétence, il décide d’enquêter dans le dos des fédéraux et va découvrir que cette région des Appalaches, très pauvre, est gangrenée par la corruption et les trafics de toutes sortes. Un polar classique qui prend une dimension de plus quand Victor découvre que son frère a été marié, a divorcé mais qu’il laisse derrière lui une petite fille, Jenna.

Le shérif Landis se retrouve avec un frère mort cachant de nombreux secrets, une nièce attachante qui va rapidement le vénérer et des cadavres d’adolescentes dans une autre affaire qui finalement pourrait avoir un rapport avec l’assassinat de l’autre shérif.

De la grande littérature noire par un auteur anglais qui a fait de l’Amérique son terrain de jeu préféré.
« Au nord de la frontière », R. J. Ellory, Sonatine, 496 pages, 24 €

mardi 26 décembre 2023

Thriller - Apprenties romancières piégées dans « La Reine du noir »

 Une romancière célèbre, un vieux manoir, cinq jeunes autrices ambitieuses : cocktail parfait pour un thriller littéraire d’exception signé Julia Bartz. 


À l’heure de la grande révolution woke, certaines romancières ne se posent plus la question. Un personnage masculin dans mon roman ? Totalement superfétatoire ! Ainsi pas l’ombre d’un homme dans les protagonistes essentiels de La Reine du noir, roman de Julia Bartz.

La narratrice, Alex est une jeune New-yorkaise rêvant de faire carrière dans l’édition. Elle survit avec un petit emploi, mais rêve de grand roman, de tirage faramineux et de célébrité mondiale. Comme son idole, Roza Vallo. Al, désespérées souffre du syndrome de la page blanche après une grosse brouille avec sa meilleure amie, Wren. Tout pourrait changer quand les deux apprenties romancières sont sélectionnées, avec trois autres filles, à une retraite d’un mois dans le manoir de Roza, pour écrire un roman tout en bénéficiant des conseils de la romancière. Mais quand elles se retrouvent isolées dans cette région montagneuse, coupées du monde par d’importantes chutes de neige, le rêve se transforme en cauchemar.

Ce thriller, teinté de fantastique, met les femmes en avant. mais il y a forcément dans le lot des « méchantes » pour amener la tension dans le récit. Des femmes qui selon l’autrice doivent trouver les ressources pour se libérer : « Quand on était une femme, on avait une tâche à accomplir, qui consistait à feindre d’apprécier tous ceux qui vous piétinaient en vous laissant des marques sur le visage. Mais ici, dans ce cachot souterrain… les règles habituelles ne s’appliquaient pas. Ici-bas, les femmes pouvaient être aussi franches qu’elles voulaient. »

Un premier roman très réussi, avec une variation de styles et d’ambiance prometteurs.

« La Reine du noir » de Julia Bartz, Sonatine, 448 pages, 24,50 €

mardi 11 juillet 2023

Thriller - Trois moins un


Depuis le succès planétaire de son premier roman, La fille du train, les nouveaux livres de Paula Hawkins sont attendus par des milliers de fans. Ils ne seront pas déçus avec la lecture du court et percutant Angle mort (160 pages, Sonatine, 17,90 €). Edie, Jake et Ryan sont amis depuis le collège. Un trio composé d’une fille et de deux copains inséparables. Edie qui choisira Jake et l’épousera. Un scénariste au succès timide, alors que Ryan, trader, croule sous l’argent facile.

Quand Edie et Jake s’installent dans la maison de famille, perchée sur une falaise au nord de l’Écosse, Ryan déménage à proximité. Le roman débute par la mort de Jake, le crâne fracassé par le seul trophée qu’il a remporté dans sa carrière. Cambriolage qui a mal tourné ou vengeance préméditée. Ce n’est pas Edie qui est suspectée puisqu’elle a quitté le domicile conjugal depuis quelques jours. Elle s’est réfugiée chez… Ryan.

Ce couple à trois est au centre d’une intrigue machiavélique, où au fil des pages on découvre qu’aucun membre du trio n’est honnête avec les autres. Le second thème central du roman est la maison du crime, vieille, isolée, sinistre, battue par les vents. Une ambiance autant qu’un roman.

mardi 6 juin 2023

Un roman d’horreur - Le clown et le maïs


Amateurs de littérature de genre, réjouissez-vous, Sonatine fait désormais dans l’horreur. Un clown dans un champ de maïs d’Adam Cesare est un bel hommage aux films d’horreur des bouseux américains.

Quand une petite famille de la grande ville débarque à Kettle Springs, bled paumé du Missouri, elle remarque surtout les dessins de Frendo dans la rue, un clown pas spécialement marrant. Quand quelqu’un déguisé en Frendo décide de se lancer dans un grand massacre, Quinn, l’héroïne, va regretter d’avoir suivi son père dans ce déménagement.

Dans des champs de maïs infinis, elle va devoir beaucoup courir pour tenter d’échapper à cette future star de la littérature d’horreur.

« Un clown dans un champ de maïs », Adam Cesare, Sonatine, 20,90 €

jeudi 2 mars 2023

BD - Formidable Riviera de Joann Sfar

Sonatine, éditeur de polars de qualité, de lance dans la BD. Joann Sfar propose un gros roman graphique en noir et blanc de plus de 220 pages se déroulant en temps de covid entre Paris et Nice. Monsieur Formidable, pied-noir et juif, vit sereinement à Paris. Avec sa femme, ils tiennent un restaurant qui recréée l’ambiance de cette Afrique du Nord regrettée.

Mais quand le confinement arrive, il se retrouve le bec dans l’eau. Certes il y a les aides de l’État, mais comme il faisait plus des deux-tiers de son chiffre d’affaires au noir, sa situation financière se détériore rapidement. Il va tenter de redevenir taxi et finalement décroche un job de transporteur d’argent liquide. 30 000 euros en petites coupures qu’il doit convoyer à bord d’une grosse Mercedes de Paris à Nice. Rien de véritablement illégal. Juste des loyers, eux aussi perçus au black…

Le roman déroule en parallèle le voyage et les souvenirs de Monsieur Formidable. Au cours du premier, il a des démêlés avec un curieux qui en veut à son magot. Il le trucide et se retrouve avec « cent kilos de viande » dans le coffre à faire disparaître. Côté souvenirs, c’est en compagnie de son meilleur ami, un certain André Sfar (dont le fils vit à Paris et gagne sa vie en dessinant des Bibi Fricotin...), qu’il fait les 400 coups sur cette Riviera et Promenade des Anglais de la grande époque.

Avec un sens de la narration et du rebondissement qu’il maîtrise à la perfection, Johann Sfar mélange souvenirs de jeunesse, cavale à travers la France et bons mots d’un voyou adorable.

« Riviera », Sonatine, 24,90 €


mercredi 22 février 2023

Thriller - Terreur au nord du Québec avec "Une saison pour les ombres" de R. J. Ellory

Un thriller ayant pour cadre une ville minière à l'extrême-nord du Canada. Meurtres de jeunes femmes, légendes indiennes et familles décomposées sont au centre de cette histoire signée R. J. Ellory chez Sonatine qui s'étale sur des décennies. 

Bienvenue dans la ville la plus au nord du Québec : Jasperville. Ville est d’ailleurs un peu excessif pour ces bâtisses plantées dans ce désert blanc où rien ne peut survivre en hiver face à des températures extrêmes. Mais comme il y a quantité de minerai de fer, une mine et une fonderie permettent à quelques centaines d’âmes perdues de survivre dans cet environnement hostile.

Jack Devereaux a quitté Jasperville il y a 26 ans. A 19 ans. Et n’y a plus jamais remis les pieds. Trop de mauvais souvenirs, une famille en morceaux, la peur de finir fou comme son grand-père ou son père. Jack, le personnage principal de ce thriller de R. J. Ellory doit pourtant retourner à Jasperville. La peur au ventre. Son petit frère est emprisonné. Il aurait tenté d’assassiner un homme sans raison apparente.

Une saison pour les ombres se déroule dans sa première partie en deux histoires parallèles. Le retour de Jack vers la ville de son enfance, en parallèle au récit de son enfance justement, comment il a découvert le grand nord du Québec. Et ses légendes.

Quand des jeunes femmes sont assassinées, la légende prétend que c’est l’œuvre d’un wendigo, fantôme indien. Et de se souvenir de ces nuits de terreur derrière la fenêtre : « Il y avait des êtres, dehors, dans l’obscurité, qui retenaient leur souffle, qui attendaient leur heure. Leurs yeux étaient d’une lumière noire, aussi terne qu’éclatante, qui ne les trahissaient pas. Ils pouvaient rester tapis dans la nuit, sur leur séant, les narines tressaillant au même rythme que des cœurs d’enfants. » Des légendes colportées par le grand-père. Jack a préféré les fuir. Mais son petit frère, bloqué à Jasperville, y a cru de plus en plus.

Dans cet hiver sans fin, quand le soleil disparaît même la journée, « la nuit enveloppait tout, si bien qu’inexorablement, elle donnait l’impression de pénétrer l’âme des habitants. »

Le roman va vous glacer les sangs, vous comprendrez la panique de Jack face à ce retour en enfer. Il va tout faire pour sauver son petit frère, Mais avant tout il devra comprendre pourquoi il a fui, le laissant seul face à ses cauchemars ainsi que sa petite amie de l’époque, Carine, abandonnée dans cet environnement toxique. Un texte puissant sur l’oubli, la rédemption et la découverte de la vérité.

« Une saison pour les ombres » de R. J. Ellory, Sonatine, 25 €

vendredi 25 novembre 2022

Roman - Quand la vengeance fait « Boum »


Entre Argentine et New York, Nicolas Giacobone raconte comment un fait divers peut influer durablement sur la vie des gens. Un roman à la construction un peu déroutante. Les différents personnages interviennent à la première personne à tour de rôle. Il y a Juan, l’artiste conceptuel, Paula, sa sœur, future romancière, Agustina, la compagne de Juan, comédienne transsexuelle, Matthew, vendeur de pneus et Véronica, scénariste. Fragmentation du récit mais aussi de l’espace-temps. 

Un roman qui doit beaucoup au cinéma, Nicolas Giacobone est surtout connu pour être le scénariste d’Alejandro Gonzalez Inarritu (Birdman). Il met beaucoup de son propre vécu dans les réflexions de Véronica et de Paula qui déclare, « Les lecteurs sérieux ne vont jamais à ces événements (des rencontres avec l’auteur). Ils ne veulent pas voir leurs écrivains préférés bégayer, transpirer ou répondre à des questions impossibles, non pas parce qu’elles seraient difficiles mais parce qu’elles sont stupides. »

« Boum, boum, boum » de Nicolas Giacobone, Sonatine, 21 €

mercredi 19 octobre 2022

Roman - Impressions manipulatrices

En premier lieu voyage à travers l’histoire de la photographie, ce thriller psychologique de Robert Goddard est aussi, et avant tout, le récit d’une manipulation de haut vol. Comme si le personnage principal de L’inconnue de Vienne, un photographe professionnel talentueux, se retrouvait piégé dans une de ses compositions un peu trop artistique pour être réelle.

Photographe anglais, Ian Jarrett a couvert plusieurs guerres ? Un de ses clichés, pris durant la guerre du Golfe, a fait toutes les couvertures des magazines et lui a permis de se faire un nom. Depuis, il a abandonné les zones de conflit et se contente de signer des clichés artistiques pour des livres de commandes. Voilà comment il se retrouve en cet hiver à Vienne. Une semaine pour rapporter une dizaine d’images typiques de la capitale autrichienne. Une bonne occasion pour abandonner l’ambiance délétère de la maison familiale. Ian n’aime plus sa femme, au grand désespoir de leur fille adolescente, Amy. 

C’est en photographiant la place Saint-Etienne qu’elle lui est apparue : « Une silhouette déboucha dans l’image du côté sud de la cathédrale, vêtue d’un manteau rouge boutonné jusqu’au col pour se protéger du froid. » Il prend la photo mais cela ne plaît pas à L’inconnue de Vienne. « Elle marcha droit vers moi, les sourcils froncés. Elle donnait presque l’impression d’être en colère, ses yeux sombres me fixaient avec un air de défi. » Rencontre impromptue et coup de foudre immédiat. Elle dit s’appeler Marian, fuir son mari et ne pas savoir de quoi sera fait son avenir. Durant une semaine ils vont d’aimer. Et se promettre de se retrouver en Angleterre, de repartir à zéro. 

La disparition de l’inconnue

La première partie du roman est presque trop belle pour être vraie. Mais le talent de Robert Goddard fait qu’on est totalement happé par cet amour fou. On veut y croire, même si on se doute que l’avenir sera moins rose. De retour à Londres, Ian quitte le foyer et se rend au rendez-vous convenu avec Marian. Qui n’est pas là. Commence une longue quête pour la retrouver. Percer ses mystères. Ian découvre que Marian est le nom d’une femme ayant vécu au XIXe siècle. Elle aurait, la première inventée la photographie. La femme de Vienne serait en réalité « possédée » par le fantôme de Marian. Une explication non rationnelle. Contrairement aux négatifs de la véritable Marian, retrouvés dans une vieille demeure. Ils valent de l’or. Est-ce le véritable mobile de la disparition de la belle inconnue de Vienne ? 

Au gré des 430 pages du roman, Robert Goddard multiplie les fausses pistes, alternant les récits en parallèle, du présent compliqué de Ian à son passé traumatisant en passant par les bonds dans le temps racontant la vie de la véritable Marian, génie de la chimie, femme brimée par un mari violent et rétrograde. Et quand quelques escrocs viennent mettre leur grain de sel, on se retrouve avec un petit chef-d’œuvre de manipulation entre les mains, un roman brillant qui vous surprendra jusque dans son dernier chapitre. 

« L’inconnue de Vienne » de Robert Goddard, Sonatine, 23 €


mercredi 10 août 2022

Roman - Duchess, la petite hors-la-loi

Entre thriller, polar et roman social, Duchess de Chris Whitaker est avant un grand roman américain, de ceux qui vous prennent aux tripes avec des personnages qui longtemps vont hanter votre mémoire. Il y a bien évidemment Duchess, l’adolescente qui donne son nom au livre, son frère, Robin et puis Walt, le flic qui tente d’avoir raison contre tout le monde, impuissant dans un monde qui ne tourne plus rond.

L’action se déroule à Cape Haven, une petite station balnéaire de Californie, perchée au bord du Pacifique. Premier drame : une petite fille disparaît. Son corps est retrouvé par Walt, encore enfant. Sissy est morte par la faute de Vincent King, le meilleur ami de Walt et amoureux de Star, la sœur de Sissy. Dans ce petit paradis, ce drame va durablement marquer les esprits. La suite du roman se déroule 30 ans plus tard. Vincent va sortir de prison. Walt est devenu le policier municipal de Cape Haven et Star, alcoolique, a deux enfants, Robin et Duchess. Cette dernière fait office de maman de substitution. Dure au mal, déterminée, elle s’accroche à une certitude : ses ancêtres étaient des hors-la-loi. Elle aussi sort du cadre, provoque, dynamite tout ce qui l’approche : « Duchess préférait Cape Haven en hiver, quand une certaine honnêteté décapait le vernis et laissait apparaître une petite ville ordinaire. Elle détestait les étés, longs, beaux, affreux. »

Ce roman propose le meilleur portrait d’une adolescente depuis très longtemps. À la psychologie compliquée. « Le bruit flottait jusqu’à elle et lui glissait dessus. Elle avait cette capacité à se sentir complètement seule sur une plage noire de monde ou dans une classe remplie d’élèves. » Duchess qu’on aimerait pouvoir aider, protéger. Mais c’est une boule de nerfs qui n’a plus confiance en personne. Duchess, qui tente de sauver sa mère du naufrage et de préserver son petit frère. Mais le retour de Vincent King va provoquer un nouveau drame. Le roman prend alors une dimension supplémentaire dans la douleur.

« Duchess » de Chris Whitaker, Sonatine, 23 €

dimanche 29 mai 2022

Roman - Duchess, la petite hors-la-loi

Entre thriller, polar et roman social, Duchess de Chris Whitaker est avant un grand roman américain, de ceux qui vous prennent aux tripes avec des personnages qui longtemps vont hanter votre mémoire. Il y a bien évidemment Duchess, l’adolescente qui donne son nom au livre, son frère, Robin et puis Walt, le flic qui tente d’avoir raison contre tout le monde, impuissant dans un monde qui ne tourne plus rond.

L’action se déroule à Cape Haven, une petite station balnéaire de Californie, perchée au bord du Pacifique. Premier drame : une petite fille disparaît. Son corps est retrouvé par Walt, encore enfant. Sissy est morte par la faute de Vincent King, le meilleur ami de Walt et amoureux de Star, la sœur de Sissy. Dans ce petit paradis, ce drame va durablement marquer les esprits. La suite du roman se déroule 30 ans plus tard. Vincent va sortir de prison. Walt est devenu le policier municipal de Cape Haven et Star, alcoolique, a deux enfants, Robin et Duchess. Cette dernière fait office de maman de substitution. Dure au mal, déterminée, elle s’accroche à une certitude : ses ancêtres étaient des hors-la-loi. 

Elle aussi sort du cadre, provoque, dynamite tout ce qui l’approche : « Duchess préférait Cape Haven en hiver, quand une certaine honnêteté décapait le vernis et laissait apparaître une petite ville ordinaire. Elle détestait les étés, longs, beaux, affreux. » Ce roman propose le meilleur portrait d’une adolescente depuis très longtemps. À la psychologie compliquée. « Le bruit flottait jusqu’à elle et lui glissait dessus. Elle avait cette capacité à se sentir complètement seule sur une plage noire de monde ou dans une classe remplie d’élèves. » 

Duchess qu’on aimerait pouvoir aider, protéger. Mais c’est une boule de nerfs qui n’a plus confiance en personne.  Duchess, qui tente de sauver sa mère du naufrage et de préserver son petit frère. Mais le retour de Vincent King va provoquer un nouveau drame. Le roman prend alors une dimension supplémentaire dans la douleur.

« Duchess » de Chris Whitaker, Sonatine, 23 €