Une acrobate, blessée, tente une reconversion en clown pour enfants malades. « Sur un fil », premier film sensible et très émouvant du comédien Reda Kateb.
On se croit trop souvent indestructible. Jo (Eloïse Sauvage), acrobate, passe des heures à répéter son numéro. Accrochée à sa corde à dix mètres au-dessus du sol, elle multiplie les figures. Elle est confiante. Un peu trop. Mais il suffit d’une demi-seconde d’inattention pour que tout soit remis en cause. Chute, jambe cassée, chômage. Mais pas d’indemnité pour cette intermittente du spectacle.
Elle n’a pas assez d’heures pour bénéficier de cette protection sociale. Alors, claudicante entre ses deux béquilles, elle va tenter une reconversion sur les conseils de son ami Gilles (Philippe Rebbot) : clown pour enfants hospitalisés. Si elle prend ça un peu à la légère, elle va vite découvrir un monde totalement différent.
Un monde où le public est en souffrance, où le rire a déserté les existences de ces petits malades, espérant guérir, redoutant la mort sans avoir presque rien connu de la vie.
La vie à l’hôpital
Pour son premier film en tant que réalisateur, Reda Kateb n’a pas choisi la facilité. Car il a l’ambition avec Sur le fil d’allier la comédie et l’émotion. Un pari souvent risqué, mais qui fonctionne à merveille dans ce cas précis. S’appuyant au plus près de l’expérience d’une véritable association, le cinéaste a soigné son casting. La dinguerie habituelle de Philippe Rebbot trouve son utilité quand il devient M. Poireau, le comparse de Roger Chips (Jean-Philippe Buzaud), véritable clown, formidable acteur.
Et pour découvrir ce milieu, Aloïse Sauvage distille naturellement grâce et tendresse. En devenant Zouzou, sorte de clown libellule au grand cœur, elle va réussir à rendre le sourire à Yacine (Massil Imine), gamin courageux, supportant les durs traitements pour vaincre une leucémie. L’émotion est vite au rendez-vous. Et malgré les pitreries du trio dans les couloirs ou dans l’intimité des chambres, le rire laisse parfois la place aux larmes.
Un film à portée sociale aussi, car il plonge le spectateur dans le quotidien de ces soignants (Sara Giraudeau en infirmière efficace et pleine d’empathie) souvent débordés par une masse de travail astronomique et des moyens humains de plus en plus limités. Eux aussi, sont Sur le fil toute la journée.
Reda Kateb : « Je me dévoile énormément dans ce film »
Venu en septembre dernier présenter son film en avant-Première au Méga CGR et au Méga Castillet, Reda Kateb avait fait le déplacement en compagnie de l’inspiratrice de son premier long-métrage, Caroline Simonds, fondatrice de l’association « Le Rire Médecin ».
Ensemble, ils ont expliqué la genèse de ce beau projet. « Même si je n’apparais pas à l’écran, souligne Reda Kateb, ce film me ressemble. Je me dévoile énormément, j’y ai mis un peu tout ce que je suis. C’est le milieu dans lequel se déroule l’histoire qui m’a inspiré. La plongée dans le monde des clowns à l’hôpital et un terrain où les personnages ne sont dans aucune posture, à nus, quand on n’est plus sur nos appuis et que la vie tient à pas grand-chose parfois. La maladie de l’enfant peut nous laisser désemparés mais elle est aussi vécue, avec le regard des clowns, dans une dimension autre que l’anxiété que je pouvais avoir avant de découvrir ce monde à l’hôpital. »
Pour Caroline Simonds, ce « film est le résultat d’une rencontre il y a plus de quatre ans grâce à mon livre* et d’un dialogue quotidien depuis. »
Une mutuelle compréhension et entraide essentielle pour Reda Kateb : « Je suis très heureux du retour des gens qui travaillent dans ce domaine et qui ont, d’une certaine manière, validé mon geste. C’est très important pour moi car je ne voulais pas les trahir. Jean-Philippe Buzaud, qui est clown à l’hôpital et qui a un des rôles principaux du film, m’a dit qu’il le vivait comme une forme d’hommage, de compréhension de leur métier. Mais je n’ai pas d’attente particulière si ce n’est de toucher les gens avec ce film. »





Si Omar Sy a découvert l'univers du cirque et de la comédie clownesque à l'occasion du film de Roschdy Zem, James Thiérrée, son partenaire, est au contraire un pro de ce monde du cirque. Petit-fils de Charlie Chaplin, il a suivi ses parents dans les incessantes tournées du cirque familial. Très jeune il a arpenté la piste ronde en tant qu'acrobate, mime et... clown. Plus tard il prendra des cours de comédie et fera de nombreuses apparitions dans des films européens ou américains. Dans « Chocolat », c'est lui qui a mis au point les numéros du duo. Il a insufflé un peu de modernité et de surréalisme aux scénettes présentées au début du XXe siècle par les deux véritables artistes. Il a amplifié la grâce et l'agilité de Chocolat, gommant en partie sa gaucherie qui faisait tant rire le public, pour transformer chutes et fuites en ballet aérien. Son propre rôle est très physique. Mais cela ne fait pas peur à James Thiérrée, déjà remarqué dans le film « Mes séances de lutte » de Jacques Doillon. Déjà un duo fusionnel. Avec Sara Forestier, ils se battaient tout au long des 90 minutes du film, une lutte amoureuse déconcertante.