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samedi 30 août 2025

Roman noir - Au Sud, la résignation

Bienvenue dans le Snakefoot, région du sud des USA, zone sinistrée théâtre de « Nulle part où revenir », roman de Henry Wise.

Devenir l'adjoint du shérif d'une petite ville rurale de Virginie semblait la meilleure solution pour Will Seems. Il connaît la région pour y avoir passé toute son enfance. Il l'a quittée, comme la majorité des jeunes, pour la grande ville en plein essor de Richmond. Pourquoi alors revenir à Euphoria, près du sinistre marécage de Snakefoot, dans la maison presque en ruines abandonnée par son père devenu avocat ?  Premier roman de Henry Wise, « Nulle part où revenir » est une plongée angoissante et perturbée dans l'esprit de Will. Il n'est pas le narrateur, mais le principal protagoniste de ce roman noir entre ségrégation raciale, violence au quotidien et misère sociale. 

Alors qu'il vient de passer la nuit dans sa voiture au bord de la rivière, Will voit de la fumée au loin. Il se précipite et découvre la maison de Tom Janders en flammes. Il parvient de sortir son ami d'enfance du brasier, mais trop tard. Le shérif Mills arrive sur place pour tenter de réconforter la compagne de Tom, Day Pace : « Elle hurlait, semant son chagrin derrière elle comme une traînée de sang ou de mort. (…) Il la ceintura et elle continua à se débattre, si bien que, pendant un moment, ils semblèrent danser un pas de deux hébété. » Avec une science de la narration étonnante pour un premier roman, Henry Wise distille les indices, présente les protagonistes, intrigue le lecteur. 

Le traumatisme de l'enfance

Will semble perdu dans cette ville qu'il a violemment rejeté à une époque. C'est pourtant son univers, sa base, ses racines. Là qu'il a vécu heureux quelques années, quand sa mère était toujours en vie, avant que son meilleur ami, Sam, ne se fasse littéralement lyncher après avoir tenté de le défendre face à une bande de voyous. Le suicide de sa mère, la fuite de son père, la bienveillance des voisins, les parents de Sam... Will rumine sa culpabilité. Qui va augmenter d'un cran quand il surprend le père de Sam fuyant l'incendie et qu'il comprend que Tom a été tué de plusieurs coups de couteau avant l'embrasement de sa maison. 

Un meurtre, un innocent à sauver, des secrets à garder : le récit devient aussi touffu que la végétation luxuriante de ce Sud infesté de redoutables serpents (mocassins à tête cuivrée) et de marécages entre les immenses champs de tabac. Aidé d'une ancienne policière devenue détective privée, Will va pister le véritable meurtrier, comme pour tenter de trouver une nouvelle raison pour continuer son chemin dans cette région ravagée par des décennies de racisme et d'exploitation des esclaves noirs par les planteurs blancs. L'histoire de Will, Day, Sam et tous les autres, tragique et désespérée, semble le résumé parfait de cette Amérique toujours déchirée par des siècles d'injustice.

« Nulle part où revenir », Henry Wise, Sonatine, 432 pages, 23 €

vendredi 28 septembre 2012

Roman - L'amour vagabond par Robert Goolrick

Formidable roman d'amour et tragédie tout à la fois, « Arrive un vagabond » de Robert Goolrick confirme le génie d'un auteur essentiel.

Brownsburg, Virginie. Une petite ville américaine tranquille. Charlie Beale débarque en plein été 1948 au volant de son pick-up. Il bivouaque durant près d'une semaine sur un terrain ombragé au bord d'une rivière. C'est un vagabond. Il erre de ville en ville depuis son retour de la guerre. A la recherche de l'endroit où il pourrait enfin se sentir chez lui. Ces quelques jours passés à la belle étoile sont comme un déclic. Charlie a deux valises avec lui. Une pour ses habits, l'autre remplie de billets. Vagabond mais pas pauvre. Il achète le terrain et décide de rester.
Reste maintenant à se faire accepter par les habitants de la ville. Première étape trouver du boulot. Charlie est boucher, un bon boucher même. Il se rend donc à la seule enseigne de la ville et demande du travail. Il propose de faire un essai gratuitement pour être jugé sur ses compétences. Essai concluant. Charlie, en quelques semaines, passe de vagabond à ouvrier émérite, agréable avec la clientèle.

L'ami de Sam
Sa bonne humeur, sa gentillesse lui permettent de s'intégrer. D'autant que son plus grand fan est Sam, un garçonnet de 5 ans, le fils du boucher. Sam passe quasiment tout son temps libre avec lui.
La vie semble simple, heureuse, à Brownsburg. Mais Robert Goolrick est un écrivain virtuose pour décrire, petit à petit, par minuscules touches, le côté sombre des choses. Tout en présentant Charlie, il dresse le portrait de la ville, de ses habitants. En façade cela semble être l'harmonie. En réalité le poids de la religion, de la ségrégation raciale et des différences entre riches et pauvres provoquent des tensions. Charlie s'en accommode, achète une petite maison. Mais il reste célibataire malgré les efforts d'entremetteuse de la femme du boucher et les œillades de quelques clientes.
La vie de Charlie prend un tout autre tour quand il croise Sylvan Glass. Dans une ville très conventionnelle, cette blonde semble sortie d'un film hollywoodien. Belle, presque surnaturelle, perdue dans ses pensées, Sylvan est la femme du plus gros propriétaire terrien de la région.

Étincelle du coup de foudre
A la seconde rencontre, ils se serrent la main. « Sylvan se tourna vers Charlie, retira ses lunettes de soleil de sorte que ses yeux verts étincelèrent au soleil, puis elle lui prit la main, sans un mot. Mais à la manière qu'il eut de laisser les doigts suspendus dans l'air un instant, là où ils avaient rencontré ceux de Sylvan, il était évident que quelque chose s'était passé entre eux, une reconnaissance puissante et immédiate. Si l'on avait été en hiver, il y aurait sans doute eu une étincelle d'électricité statique, un signe visible, mais c'était l'été. Il s'était dit quelque chose, et elle était la seule à savoir quoi. » Un coup de foudre. Réciproque. Mais un amour impossible.
Sylvan, encore mineure, a été littéralement achetée par son mari. Fille de fermiers très pauvres, elle s'est engagée à ne jamais fuir le domicile conjugal au moment de la vente. Alors Charlie et Sylvan vont s'éviter. Puis l'attirance trop forte les poussera dans les bras l'un de l'autre. Des rendez-vous secrets, avec cependant un témoin, le petit Sam. L'enfant devient la pierre angulaire de l'histoire, l'élément déclencheur de la tragédie.
Toute la force de ce roman réside dans cette vision de l'histoire par les yeux d'un enfant de 5 ans. Peut-il comprendre l'interdit ? Que ce que fait son meilleur ami est un péché ? Richard Goolrick reprend un de ses thèmes de « Féroces », son premier roman : la parole d'un enfant face aux secrets des adultes. Ce roman est moins dur que le précédent, à l'écriture plus fluide, parfois poétique. Mais au final on ne ressort pas indemne d'un roman de Robert Goolrick, sa plume a le tranchant et la précision d'un scalpel.

« Arrive un vagabond » de Richard Goolrick, Anne Carrière, 21,50 €


samedi 3 mars 2007

BD - Virginie, nostalgie de jeunesse


Son premier amour, qui ne se souvient pas de son premier amour ? Généralement c'était sur les bancs de l'école. Des jeux innocents, sans lendemain. Un redoublement, un déménagement... il existe tant de bonnes raisons pour oublier. Kek, alors qu'il avait 9 ans, était très amoureux de Virginie. Et cette dernière le lui rendait bien. A la récréation ils se faisaient des bisous, en cours ils s'échangeaient des mots doux. Et puis le père de Virginie a trouvé du travail à Grenoble. La famille a quitté Dunkerque, Kek s'est retrouvé seul. Mais il pensait régulièrement à Virginie. Bien des années plus tard, comme pour conjurer une malédiction, il s'est mis en quête de cette petite fille. Il a raconté ses recherches sur un blog dessiné qui a rapidement attiré des milliers de visiteurs chaque jour. Un travail de narration rigoureux, une approche dessinée originale : il n'en fallait pas plus pour que Lewis Trondheim remarque et publie cette BD. Cela donne un petit album très romantique pour "une histoire qui sent la colle Cléopâtre". 
(Delcourt, 7,90 €)

vendredi 2 mars 2007

BD - Virginie, nostalgie de jeunesse


Son premier amour, qui ne se souvient pas de son premier amour ? Généralement c'était sur les bancs de l'école. Des jeux innocents, sans lendemain. Un redoublement, un déménagement... il existe tant de bonnes raisons pour oublier. Kek, alors qu'il avait 9 ans, était très amoureux de Virginie. Et cette dernière le lui rendait bien. 

A la récréation ils se faisaient des bisous, en cours ils s'échangeaient des mots doux. Et puis le père de Virginie a trouvé du travail à Grenoble. La famille a quitté Dunkerque, Kek s'est retrouvé seul. Mais il pensait régulièrement à Virginie. 

Bien des années plus tard, comme pour conjurer une malédiction, il s'est mis en quête de cette petite fille. Il a raconté ses recherches sur un blog dessiné qui a rapidement attiré des milliers de visiteurs chaque jour. Un travail de narration rigoureux, une approche dessinée originale : il n'en fallait pas plus pour que Lewis Trondheim remarque et publie cette BD. 

Cela donne un petit album très romantique pour "une histoire qui sent la colle Cléopâtre". (Delcourt, 7,90 €)