dimanche 6 novembre 2022

BD - Eclaircie chez Margaux Motin

Dessinatrice talentueuse, star de l'illustration et conteuse hors-pair, Margaux Motin se dévoile dans le tome 2 de la série Le printemps suivant. Rien ne va plus dans son couple. 

Pacco, le père de ses enfants, fait la tête. Et un peu plus même : Margaux va-t-elle devoir vivre sans lui ? Comment le retenir ? Dans la première histoire, elle se souvient de ce barbecue en famille. La petite Margaux joue dans le jardin. Et quand elle se sent menacée par une guêpe (phobie qui la poursuit aujourd'hui encore), elle se réfugie sur les épaules de Papa. Papa qui déménage peu de temps après. Le divorce brise le coeur des petites filles. 

Des tranches de vie universelles dans des décors de toute beauté. 

"Le printemps suivant" (tome 2), Casterman, 22 €

Cinéma - Pétaouchnok, presque un « western » entièrement tourné dans les Pyrénées-Orientales

Le film Pétaouchnok, tourné dans les Pyrénées-Orientales, sort ce mercredi 9 novembre dans toutes les salles de France. L'occasion de découvrir une comédie d'aventure dans les paysages magnifiés des Pyrénées.

Les habitants des Pyrénées-Orientales reconnaîtront quelques endroits du département dans le film Pétaouchnok d'Etienne Leduc avec Pio Marmaï et Philippe Rebboh. Par exemple le café où la compagne de Ludo travaille est à Tautavel. C’est là que les scènes de village ont été tournées. Le ranch est celui de Las Caneilles à Tautavel aussi. On distingue aussi les tours du Moulin à Vent de Perpignan. Mais l’essentiel du film se déroule en pleine nature. De longues semaines passées dans la montagne, dans les environs des Angles. On est rapidement subjugué par la beauté des paysages.

Que cela soit dans les prairies dans les hauteurs, avec simplement quelques pics en décor ou au cœur de forêts qui semblent aussi profondes et sauvages que le grand nord canadien ou le long d’un cours d’eau, toutes les images sont belles et dépaysantes. Mais ce n’est pas un clip publicitaire pour la montagne.

Au contraire, Pétaouchnok c’est une vision réaliste et sincère d’une région qui sait encore être sauvage, pas toujours hospitalière, mais où les sensations sont démultipliées.

samedi 5 novembre 2022

BD - L’Eden perdu de Paco Roca

Une simple photo de famille. Prise sur une plage de Valence durant les années 40, après la guerre civile. Cette photo est presque le dernier vestige qui reste de la jeunesse d’Antonia, la mère de Paco Roca. 

Autour de cette photo, où elle pose, enfant, avec sa mère, sa sœur et ses deux frères, l’auteur espagnol va tisser un récit émouvant d’une fillette tentant de comprendre la vie dans une famille dysfonctionnelle. 


Sa mère, très croyante, n’agit qu’en fonction de Dieu. Le père, cruel et violent, est un véritable tyran. Dans cet environnement toxique, elle a pourtant quelques moments de joie, comme cette journée passée à la plage. Les sorties avec sa grande sœur, Antonia. La découverte du cinéma… 

Un très bel album de plus de près de 180 pages racontant la vie de misère de la classe populaire espagnole, oppressée par le régime dictatorial de Franco. Une leçon d’Histoire et surtout d’Humanité. 

« Retour à l’Eden », Delcourt, 22,95 €

Cinéma - Destination Pétaouchnok

 Rarement un film met autant en valeur le territoire des Pyrénées-Orientales où il a été tourné. « Pétaouchnok » d’Édouard Deluc avec Pio Marmaï et Philippe Rebbot en vedette doit beaucoup aux Pyrénées. L’histoire de deux chômeurs, persuadés qu’ils peuvent s’en sortir en proposant ce que leur région offre de mieux : ses paysages, la grandeur de ses montagnes. Ils vont se lancer dans le raid à cheval loin de la civilisation. Le film raconte leur première excursion, forcément mouvementée car totalement improvisée. Un séjour inoubliable pour la dizaine de participants, les autres personnages de ce film choral qui sort partout en France ce mercredi 9 novembre. Édouard Deluc et Pio Marmaï ont répondu à l’Indépendant lors de leur venue à Perpignan pour l’avant-première du film.

D’où vous est venue l’idée de ce film ?

Etienne Deluc : J’avais un désir de western esthétiquement mais c’est vrai que ça croise la comédie d’aventure et sociale. J’ai aussi apporté quelques idées d’Amérique latine où je traine pas mal mes basques, notamment les ponchos. C’est une esthétique un peu hybride mais on est dès le début plongé dans une ambiance western.

Comment avez-vous approché le personnage très borderline de Ludovic ?


Pio Marmaï : Ludo c’est quelqu’un qui est assez proche de moi. Edouard a écrit cette partition en pensant à moi donc il y a sans doute des échos dans ma logorrhée que je peux avoir quand j’interprète ce personnage. Il y a aussi quelque chose dans l’énergie, quelqu’un qui avance quoi qu’il arrive. Pourtant cela m’a demandé beaucoup de travail dans l’apprentissage du texte, de tenue, de précision dans la langue comme rarement j’ai fait. Paradoxalement, même si on a l’impression qu’il y a une sorte de foutraque et d’énergie, un peu chaotique par moment, c’était quand même un travail assez intense.

ED : Il y a aussi une forme de tension dans le personnage de Ludo qui est liée aux enjeux. Il y a des enjeux très forts par rapport à son ex-femme, sa fille. Au début du film c’est compliqué pour lui mais il peut gagner énormément. Il sent qu’il porte sur ses épaules non pas une ambition démesurée de faire fortune mais de retrouver un peu d’équilibre, notamment sentimental qui le tient en vie.

Est-ce compliqué de tourner avec des chevaux ?


PM : Moi je ne montais pas avant ces deux dernières années mais j’ai enchaîné les films avec les chevaux comme Les Mousquetaires (sorties en avril et décembre 2023) ou Tempête (sortie le 21 décembre). Après il y a différentes techniques de monte. Ce ne sont pas les mêmes selles quand on fait un film du XVIIe siècle ou contemporain. Pour être un bon cavalier il faut être capable de s’abandonner à l’animal et c’est quelque chose que j’ai appris à faire. Je suis plus proche des sports mécaniques, comme la moto. Ça c’est très concret car c’est moi qui dirige totalement le véhicule et pas inversement. Alors que monter un cheval cela demande une écoute, un rapport à soi et à l’existence que je n’aurais pas été capable de faire il y a quelques années. Mais c’était une très belle découverte. Tout ce que j’ai fait c’est essayer de m’adapter à un nouveau partenaire de jeu car sur le coup, dans le film, c’est un véritable partenaire, ce n’est pas un simple cheval de cinéma qui se déplace d’un point A à un point B, c’est très différent, on passe beaucoup de temps dessus dans des endroits qui sont quand même gigantesques, on fait beaucoup de plans larges, on se rend compte aussi de l’immensité à certains égards des Pyrénées.

ED : Pour 20 secondes à l’image il faut rester quatre à cinq heures sur le cheval. Sur certains plans on découvre des kilomètres et des kilomètres de vallée, on doit refaire la prise trois fois car il y a 11 chevaux et des mules et que tout ne se passe pas forcément bien. Il faut que les comédiens rencontrent les chevaux et au début ça a été un peu rocambolesque, la rencontre n’a pas pris entre chaque personnage et chaque cheval, il y a eu des petits incidents et le film raconte ça : « Tu parles bien à ton cheval si tu veux qu’il t’amène quelque part car il est sensible, il est comme toi. » C’est une donnée, on ne fait pas ce que l’on veut avec un cheval.


Quels types d’incidents ?


PM : Un trauma crânien, une épaule démise, mais ça c’est la base, tu veux faire du cheval, il faut que tu t’éclates le visage sur un caillou, c’est comme ça que ça rentre (rires). Le groupe est censé être des néophytes et c’est toujours plus simple de faire semblant de ne pas savoir monter. Si tu ne sais pas monter et que tu joues quelqu’un qui ne sait pas monter, tu vas au clash, ça c’est sûr. Mais ce n’était pas grave, personne n’est mort…


Pour le réalisateur, le plus compliqué à gérer entre les chevaux et les comédiens ?


ED : Globalement c’était très enthousiasmant. J’ai essayé de ne jamais oublier la chance que j’avais de faire le film que j’avais envie de faire dans des paysages pareils avec des comédiens qui donnent autant et généreusement. Ça se sent et je crois que le film il vibre de plein de choses que j’avais envie de raconter. Je pense que ce qui imprime le cœur des spectateurs c’est l’envie des comédiens de partager cette matière. Mais après c’est compliqué car on a une cinquantaine de techniciens, des ours, des chines, des comédiens, des comédiennes, il fallait le porter, ça c’est sûr, mais c’est jamais très simple de faire un film. Là, il était particulièrement compliqué à plein d’endroits mais je sentais bien qu’il se passait quelque chose et qu’après ça allait rester.


Vos meilleurs souvenirs de ce tournage ?

ED : Tout n’a pas été léger, il y a eu des coups de fatigue, mais tout était volontaire et globalement généreux. Moi j’ai pris un plaisir four dès le début du tournage au conseil régional quand j’entendais Pio faire ses trucs presque à la Lois de Funès. Il était incroyable, ses gestes, les sons qui sortaient se sa bouche, c’était fou et moi j’essayais de pas rire trop fort, avec en contrepoint la tête de Philippe. Le duo était là et j’avais totale confiance en eux et c’était encore plus beau de les voir en vrai. Il y a eu pleines de scènes savoureuse comme celle d ela valise avec Camille Chamoux. La scène du lac n’a pas été simple car ils rentrent dans une eau à 12 degrés mais je sentais qu’elle allait être très belle, elle dit quelque chose du rapport à la nature. Pour moi c’est très important tout en ayant ce soupçon de comédie de fantaisie puisque Pio entre dans l’eau cul nu et en santiags. La scène de la tente entre Pio et Philippe fonctionne très bien : il y a de la fantaisie, de l’émotion, ils sont beaux tous les deux ; je suis gâté.


Comment avez-vous formé ce duo ?


PM : Avec Philippe, il y a quelque temps qu’on avait envie de travailler ensemble car on fait partie des gens qui sont assez honnêtes. On s’est rencontré il y assez longtemps et on s’est vite dit qu’on avait envie de fabriquer un objet ensemble. Le fait qu’Etienne ait déjà tourné plusieurs films avec Philippe a fait que ce trio a pris de l’épaisseur, du sens. Mais il ne faut pas se rater, on n’a pas 36 occasion de faire des duos au cinéma. On ne va pas faire 15 duos avec Philippe dans notre vie. Je fais toujours attention à ça, de ne pas gâcher les choses.

Le tournage semble avoir été assez éprouvant : bivouac, pluie, humidité… comment ça c’est passé ?


ED : C’est un film d’aventure, ils ont signé pour ça ! Mais bien sûr que c’était un investissement physique réel. On montait à 2000 mètres d’atitude, soit à cheval, soit à pied soit en voiture pour rejoindre les décors. Etre à cheval toute la journée ou se baigner dans un lac c’est costaud. La pluie on a eu à la fois des orages magnifiques qu’on a voulu filmer, notamment la scène de casting de Camille Chamoux et d’Olivia Côte. On les voit jouer, on a l’impression qu’ils s’amusent mais c’est un boulot physique au-delà du talent que ça demande.


PM : ça reste du cinéma. C’est un luxe, on n’est pas dans une mine, il faut se rappeler les choses. Mais c’est pas la même chose quand tu tournes au milieu de nulle part, que tu as deux heures de trajet pour y arriver, que tu as des tempêtes, des blessures et que tu tournes dans un bureau en région parisienne. Mai quand tu es au milieu des Pyrénées, il y a déjà une dimension de décor simplement qui dépasse la séquence en elle-même que tu est en train d’incarner car quoi que tu fasses, ce qui est derrière toi, en fond, va parle quinze fois plus que soi on joue quelque chose dans cette pièce qui n’est pas dingue. Il y a quelque chose qui transcende une simple séquence de cinéma. On peut simplement se reposer sur ce que l‘on regarde, c’est assez agréable, ça joue beaucoup. En plus on sortait du covid. On a la chance de refaire des films et en terme de respiration c’était quand même un luxe.
ED. C’est tellement beau. Et on cherche à la filmer cette beauté. On se rendait régulièrement d’être dans des endroits incroyable, magnifique, qu’on était tous ensemble et qu’on avait une chance folle.


D’où venait cette envie de filmer les Pyrénées ?


ED : J’ai commencé l’écriture du film pour la cordillère des Andes car ma femme est Argentine et j’y passe du temps. Le première idée que j’avais eu c’était deux zigotos à l’aéroport de Santiago du Chili qui arrivaient en retard pour accueillir un groupe de touristes et traverser la cordillère et très vite en écrivant le scénario j’ai eu besoin de donner une réalité sociale à mes personnages. Après j’ai eu une envie d’ours et je suis parti en repérage dans les Pyrénées et très vite je suis entré dans la vallée de la Cerdagne, du Capcir et c’était acquis que c’était là que je voulais tourner, c’était sublime. Et j’aimais bien le côté transfrontalier avec l’Espagne. Je récupérais quelques chose de mon fantasme d’Amérique latine aussi. Après c’était presque des choix cornéliens entre deux décors magnifiques. On a essayé de rendre grâce à la majesté des décors.
PM : J’ai été très sensible au travail de Jeanne Lapoirie à l’image qui a réussi à nous montrer les Pyrénées dans toute leur majesté. A l’image, on sent vraiment un souffle et le film propose un dépaysement assez joyeux !


D’où vient le nom du film, Pétaouchnok ?


ED : Au début du projet c’était déjà un peu là. Ça racontait quelque chose d’une promesse d’aventure, de perdition, de lointain et de comédie dans la façon que ça sonne. Quand j’ai décidé du combo, les deux personnages, les ponchos, la traversée des Pyrénées à cheval, c’était assez net pour moi que ça devait appeler Pétaouchnok.


Vous envisagez une suite ?


ED : On ne demande que ça que le public réclame la beauté de ce duo, après je ne suis pas sûr qu’on satisfasse la demande parce qu’on réfléchira à deux fois avant de se fourvoyer dans une suite qui n’aurait pas de sens. On n’en est pas là, moi je voudrais juste que le public soit curieux de ce film. Quand on va chercher un film il vous donne d’autant plus c’est pourquoi c’est bien que les gens aillent en salle, la démarche change tout. On les invite à voir une comédie, d’aventures, de mésaventures, globalement les gens rient pas mal dans la salle, on a de très bons retours. Mais il y a plus que ça et si derrière les gens sont sensibles à notre poésie, humanité et ont envie d’un Pétouchnok 2 bien sûr qu’on le fera. Mais on était très contents de travailler ensemble car ça avait du sens.

 

 

vendredi 4 novembre 2022

Jeunesse - Oktobre dans la nature


Ce livre richement illustré de Steve McCarthy devrait donner envie aux petits lecteurs de sortir de leur zone de confort et d’aller à la découverte de La nature sauvage. Cet album grand format de 40 pages pour les enfants à partir de 5 ans (collection Pastel), raconte la vie mouvementée de la famille Vasylenko. 


1
2 enfants, tous plus aventureux les uns que les autres. Excepté Oktobre qui préfère rester au chaud dans sa maison, à lire des livres. Ses découvertes, elles ont la forme d’images sur le papier, de textes relatant des exploits aux quatre coins du monde. Mais ce n’est pas comme cela qu’on grandit. Oktobre va devoir sortir et affronter la nature sauvage. 

Un conte d’apprentissage pour donner confiance aux plus jeunes face à l’inconnu.

« La nature sauvage », L’école des loisirs, 15 €

De choses et d’autres - Du rêve sonnant et trébuchant

Un certain Ludovic Girodon, qui se présente sur Twitter comme « formateur, conférencier au service des managers et de leurs équipes » m’a rappelé combien le jargon en vogue dans ce milieu est dramatiquement infantilisant. Et surtout comment il est facile de se moquer de ces idiots utiles au monde sans pitié de l’entreprise.

Selon son expérience, le sieur Girodon estime que « pour maintenir votre équipe engagée, pensez D.R.E.A.M. » Du rêve. Et de traduire le mot anglais en acronyme : « Direction (avoir du sens), Reconnaissance (être valorisé), Environnement social (bonne ambiance), Autonomie (responsabilisé), Montée en compétences (apprendre de nouvelles choses). »

La belle démonstration que voilà. Mais selon beaucoup de commentaires, il manque quelque chose d’essentiel pour que l’équipe soit aux taquets. Un internaute le résume par une autre définition du fameux D.R.E.A.M. : « Dinero (être bien payé), Radis (être bien payé), Euros (être bien payé), Argent (être bien payé), Monnaie (être bien payé) ». Un autre oublie le DREAM pour clamer haut et fort que ce qu’il faut aux équipes c’est du pognon !

Ceux qui doutent de l’efficacité de cette version du DREAM devraient aller regarder du côté des rémunérations des super managers, autrement dit les PDG de grandes sociétés du CAC 40. Ils ne cherchent ni reconnaissance ni montée en compétence. Tout ce qu’ils demandent, ce sont des augmentations de leurs émoluments et autres primes. Progressions généralement supérieures à 10 %. Faudrait quand même pas que l’inflation grignote leur pactole à ces pauvres malheureux.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le mercredi 2 novembre 2022

jeudi 3 novembre 2022

Cinéma - “Mascarade”, méfiez-vous des apparences

Ils sont beaux, riches et célèbres. Mais derrière les masques, la réalité est peu glorieuse. 

Adrien (Pierre Niney), jouet sexuel de Martha (Isabelle Adjani), star sur le retour.  LES FILMS DU KIOSQUE - PATHÉ FILMS

Comédie clinquante pleine de strass, de paillettes et de luxe, Mascarade de Nicolas Bedos, sous des airs de jolie réalisation très léchée, est un film qui joue sur la saleté de l’âme humaine. Les quatre protagonistes de ce film se déroulant sur la Côte d’Azur, entre villas de rêve et palaces de légende, sont beaux, parfois très riches et ne manquent de rien. Juste d’un peu d’humanité. Beaucoup en fait. 

Toute l’histoire de ce qui aurait pu être une comédie romantique - et se révèle un thriller social machiavélique - tourne autour du personnage de Martha. Cette star du cinéma, interprétée par une Isabelle Adjani décrochant enfin un rôle à la démesure de son talent, donne une réception dans sa villa avec vue sur la baie de Nice. Elle veut montrer, exhiber plus exactement, à ses connaissances son nouveau jouet, Adrien (Pierre Niney), prétendument écrivain, gigolo de son état. A cette soirée, il croise Margot (Marine Vacth), qui, elle, est la dernière conquête d’un riche notable local. Entre ces deux jeunes pour qui l’amour n’a jamais été une réalité tangible, les points communs sont nombreux.

Presque un film féministe

Avec une même envie de mettre fin à cette existence qui ressemble furieusement à de l’esclavage. Le gigolo et l’escort vont unir leurs talents pour ponctionner quelques millions à la tyrannique Martha et au trop naïf homme d’affaires, Simon (François Cluzet), une proie de choix pour Margot. 

Nicolas Bedos, pour son nouveau film, signe un scénario alambiqué, aux multiples rebondissements, dévoilant, par petits bouts, les véritables personnalités des uns et des autres. Si les « vieux », Martha et Simon, sont assez lisibles (méchanceté et égoïsme de la première, prétention et trop grande estime de soi pour le second), le profil des « jeunes » est plus complexe. Si Adrien est dans le regret après avoir dû abandonner une prometteuse carrière de danseur classique sur blessure, Margot fonctionne essentiellement sur la colère contre les hommes ; tous les hommes, sans exception. Ils croient la posséder, en réalité c’est elle qui les manipule, toujours avec deux coups d’avance. 

Un film féministe, finalement, même si le portrait de Martha est au vitriol et à charge. Comme si Nicolas Bedos, pour compenser la tendresse qu’il a pour le personnage de Margot, devait compenser en retrouvant sa méchanceté légendaire dirigée, cette fois, vers une Isabelle Adjani, toujours aussi belle, mais terriblement odieuse.

Film de Nicolas Bedos avec Pierre Niney, Isabelle Adjani, François Cluzet, Marine Vacth

De choses et d’autres - L'art moderne peut nous mettre la tête à l’envers

L’art contemporain et abstrait, s’il passionne certains, en déstabilise d’autres. Il est parfois bien compliqué de déterminer le haut du bas de certaines compositions. Heureusement, les artistes ont souvent conservé ce signe distinctif et très classique de signer l’œuvre en bas. Une indication importante qui permet de mettre un Soulages ou un Klein dans le bon sens.

Mais attention, toutes les œuvres ne sont pas signées. Par exemple, le tableau intitulé New York City 1 de Piet Mondrian est dépourvu de la moindre indication. Or, une spécialiste de l’artiste, a révélé que cette toile est exposée, depuis plus de 50 ans, à l’envers.

Elle a été présentée dans divers musées, le haut en bas, le bas en haut. Selon son interprétation, les lignes de ruban collant jaune et rouge plus rapprochées ne symbolisent pas la ligne d’horizon (le bas du tableau), mais un ciel sombre (le haut de l’œuvre). Le problème, c’est qu’il est désormais impossible de retourner simplement la toile. Ancienne et fragile, les rubans pourraient se décoller.

Comment voir l’œuvre dans le bon sens ? Je suggère aux véritables amateurs d’art d’installer face à New York City 1 de Mondrian, un de ces engins de torture réservés aux futurs astronautes et qui leur permettent d’appréhender l’absence de pesanteur en les maintenant tête en bas durant de longues heures. Chaque visiteur aura la possibilité de s’arnacher et de profiter de l’œuvre, dans le bon sens.

Pour les plus lestes (ou casse-cou, dans tous les sens du terme), il est simplement envisagé de leur demander de faire le poirier face au tableau. Au moins, pour une fois, visiter un musée sera également source de dépense physique.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le lundi 31 octobre 2022

mercredi 2 novembre 2022

BD - Vilains super marrants

Beaucoup d’entre vous rêvent d’avoir un superpouvoir. Et si ça se trouve, vous êtes nombreux à en avoir un. Mais restez discrets car il y a pouvoir et pouvoir. Sur ce constat, Philippe Pelaez (scénariste) a imaginé une BD illustrée par Morgann Tanco. Ils sont trois, adolescents dans un lycée de province, à s’être découvert un don. Mais qu’en faire ?


Sandra peut déclencher une diarrhée, Wilma casser votre smartphone et Hugo vous rendre amoureux. Contrairement au titre de la série, ils ne vont pas devenir des Super Vilains. Au contraire ils vont déployer des trésors d’imagination pour transformer leurs pouvoirs en arme contre la bêtise.


Cela donne des scènes assez croquignolesques qui feront sourire voire rire à gorge déployée comme cette prof de physique prise d’un besoin pressant en plein cours, un CPE qui craque pour son adjoint, un vigile découvrant l’amour auprès de son berger allemand.

Et comme les auteurs sont généreux, il y a également un jeune qui parle aux crustacés et un autre qui peut se téléporter. Mais ce dernier don a un bug… 

Super vilains de Morgann Tanco et Philippe Pelaez est édité par Fluide Glacial et coûte 12,90 €

Chronique parue en dernière pager de l’Indépendant le samedi 29 octobre 2022

mardi 1 novembre 2022

De choses et d’autres - Le sauveur de la planète

Mort à 94 ans la semaine dernière, Amou était un peu un précurseur dans la préservation de l’eau sur Terre. Cet Iranien, qui vivant seul en ermite, ne s’est pas lavé durant 50 ans. Longtemps, il a été considéré comme l’homme le plus sale du monde. Mais finalement, au vu de la crise climatique, il a terminé sa vie en exemple, devenu l’homme le plus économe en eau de la planète.

 

Comment a-t-il fait pour ne pas attraper toutes les maladies possibles et imaginables ? Mystère car Amou, en plus d’être recouvert de crasse, les cheveux filasses, vivait dans une décharge, ne mangeant que des carcasses d’animaux morts au milieu de montagnes d’immondices.

L’eau devenant de plus en plus rare (comme l’essence, la moutarde et l’huile de tournesol), la vie d’Amou pourrait bien, dans quelques décennies, devenir un exemple pour tous ceux qui tenteront de survivre malgré les restrictions. Le peu d’eau disponible sera utilisé en priorité pour se désaltérer. Dès lors, se laver sera assimilé à un luxe dont on peut tout à fait se passer puisqu’Amou l’a fait durant plus d’un demi-siècle.

Pour montrer qu’on est un bon citoyen soucieux de l’avenir de la planète, il faudra, en plus de rejeter les jets privés (facile…) et de se déplacer à vélo à la place de la voiture (un peu plus compliqué), s’afficher avec des cheveux sales, une bonne couche de saleté sur le visage et sentir le bouc.

Saint Amou sera vénéré par ses adeptes qui, comme lui, resteront célibataires toute leur vie. Mais ça, ce sera le plus facile à faire. Autre avantage : la natalité va rapidement s’écrouler et toutes les autres espèces vivantes terriennes ne s’en porteront que mieux.

Billet paru en dernière page de l’Indépendant le vendredi 28 octobre 2022