lundi 2 juillet 2018

DE CHOSES ET D’AUTRES - Tombée du ciel

Quand je suis en stand-by comme la semaine dernière, me balader sur internet sans but précis fait partie de mes occupations favorites. « Pure perte de temps » me glisse perfidement mon épouse, toujours prompte à me trouver des activités plus utiles à la bonne marche du foyer.
 Reste que j’y trouve des images incroyables. Comme cette vidéo de cinq secondes découverte samedi. Tirée d’une caméra de vidéo surveillance d’un magasin situé à Alberta au Canada. On y voit un présentoir de produits ménagers. Tout à coup des morceaux de plafond s’écroulent, suivis par une femme qui chute lourdement sur le dos, roule sur le sol, se relève et court vers une porte, les bras en l’air. 
D’où sort cette femme « tombée du ciel » ? Par quelle incroyable circonstance a-t-elle été filmée en pleine chute et surtout, pourquoi ces images sont-elles diffusées ? J’ai parcouru péniblement (merci Google traduction) plusieurs articles en anglais pour comprendre qu’il s’agissait d’une voleuse présumée. Elle paye ses achats avec une carte bancaire volée. Découverte, elle tente de se cacher dans le faux plafond de la boutique à l’arrivée de la police. On la voit grimper sur les rayons et disparaître dans une ouverture. 
La vidéo a connu un beau succès. Mais je m’interroge sur le côté voyeur du fait divers. Car la présumée voleuse semble se faire mal en tombant. Et la suite de l’arrestation est assez musclée. 
Peut-on rire du malheur des autres même si, sur le coup, on trouve la scène cocasse ? 
Enfin, il faut avouer que toutes les situations comiques partent du même principe. Du jardinier qui se prend un râteau (au sens propre) au célèbre arroseur arrosé des débuts du cinéma. 
N’empêche. Dans ce cas précis, j’ai ri jaune. 

Chronique parue le lundi 2 juillet 2018 en dernière page de l'Indépendant

BD - L’éducation par l’enfermement



Paru chez Syros, la trilogie de Méto d’Yves Grevet inaugure la nouvelle collection « Log’In » de chez Glénat. Un premier volume qui campe le décor. Angoissant. 
Dans une maison sur une île quasi déserte, 64 garçons vivent dans un pensionnat aux règles draconiennes. Ils dorment tous dans un immense dortoir et si, par malheur, l’un d’entre eux détériore les parois de son lit, la nuit venue, des créatures de métal viennent l’enlever pendant que ses camarades doivent fermer les yeux et rester immobiles. 

Le lendemain, il sera remplacé par un plus jeune. 
L’histoire débute par le départ de Quintus et l’arrivée de Crassus.
 Il est placé sous la responsabilité de Méto, obligé de lui apprendre les règles. Adapté par Lylian, dessiné par Nesmo, cet album qui ressemble par certains aspects à un comic, en impose par sa virtuosité graphique mise entièrement au service de l’histoire. 

«Méto » (tome 1), Glénat, 16,90 €

dimanche 1 juillet 2018

BD - Solution finale, avant, pendant et après avec Wannsee et Irena


La bande dessinée comme outil de mémoire. Loin de n’être qu’un genre réservé aux plus jeunes ou à la distraction, la BD a gagné depuis longtemps ses lettres de noblesse. Ces deux albums sont l’exemple même d’un vecteur de communication grand public permettant de mettre en lumière des pans de notre histoire qu’il ne faut surtout pas oublier, les derniers développements de l’actualité (crise migratoire, populisme au pouvoir en Italie ou en Pologne) montrant que rien n’est gagné en ce qui concerne la paix en Europe. 

Fabrice Le Henanff aborde de façon frontale l’histoire de la solution finale des nazis contre les Juifs. Tout a débuté, de façon « pratique » et « matérielle », le 20 janvier 1942 dans une villa cossue de la banlieue de Berlin. 
À Wannsee, une vingtaine de cadres au cours d’une réunion voulue par Heydrich et dont le compte-rendu est rédigé par Heichmann. Là, dans un milieu bourgeois, entre champagne et buffet de charcuterie, sera élaborée la solution finale voulue pas Hitler : « nettoyer » l’Europe. Un plan pour évacuer puis exterminer dans des camps dotés de fours crématoires reliés aux chambres à gaz des millions de Juifs. 
La froideur du récit, donne l’ampleur de l’horreur de ces hommes dont certains échapperont longtemps à la justice. Un album à montrer dans toutes les écoles. 

Irena, la «Juste» Autre style avec « Irena » écrit par Morvan et Trefouël et dessiné par Evrard. Dessin « enfantin » pour montrer l’horreur de la mise en place des décisions de Wannsee. En Pologne, le ghetto est vidé de ses milliers d’habitants. Direction les fameux camps, sans espoir de retour. Sauf si vous avec la chance de croiser la route d’Irena Sendlerowa. 


Cette Polonaise, catholique, a sauvé des milliers d’enfants en les plaçant dans des familles polonaises sous de fausses identités. 
Dans cette troisième partie, on retrouve une de ces petites rescapées, aujourd’hui maman dans l’État d’Israël. L’histoire de cette Juste, exemplaire à bien des égards, ne peut qu’émouvoir. Surtout quand la vielle dame se retrouve confrontée aux milliers de fantômes de ceux qu’elle n’a pas réussi à sauver de la barbarie nazie. 
Là aussi, la lecture en classe devrait être obligatoire. 

➤ «Wannsee», Casterman, 18 €

➤ « Irena » (tome 3), Glénat, 14,95 €

BD - Vacances et mensonges



Les vacances dans la France profonde des années 80 ne sont pas toujours très passionnantes. Hervé et Romuald s’ennuient à mourir. La journée, ils ont pour seule occupation de zoner sous les piliers en béton du projet d’aérotrain abandonné au milieu des années 70 au détriment du TGV. Hervé, l’aîné, vient de tripler sa 3e. Romuald, par contre, a brillamment réussi son année scolaire. Mais il n’a pas osé le dire à son pote. La crainte de le décevoir. Surtout de ne plus aller en cours avec lui...
 Un duo qui, le soir, retrouve Mathilde. Caissière dans le supermarché du coin, elle compense son surpoids par un bagou d’enfer. Des amis sans véritable avenir quand ils tombent sur Lucie. Blonde, filiforme, audacieuse elle va les faire rêver à tour de rôle. Mais attention, Lucie semble une experte en mensonge. 
Ce roman graphique de Ducoudray, illustré par Corgié, s’achève dramatiquement. Un peu comme le destin de cet aérotrain, prometteur mais abandonné car trop coûteux et rouillant dans un hangar. 

« Les lumières de l’aérotrain », Bamboo, 16,90 €

lundi 11 juin 2018

BD - Une bande dessinée retrace l'oeuvre et le parcours d'Edouard Luntz, cinéaste maudit


Un cinéaste peut-il disparaître ? Du moins son œuvre ? La question est lancinante dans cette BD de Julien Frey et Nadar. Édouard Luntz a signé une dizaine de courts-métrages avant de passer au long. Rapidement il rencontre le succès. Au point de signer avec la Fox. Ce sera « Le grabuge », tourné au Brésil. Un autre film maudit. Budget dépassé, trop long, remonté par le producteur. Procès, victoire du réalisateur français, mais sortie confidentielle et copie à jamais perdue.

Julien Frey est allé jusqu’au Brésil pour tenter de voir ce film. Étudiant en cinéma, il a failli travailler avec Luntz.. C’est un peu pour rattraper cette occasion manquée qu’il a écrit cette BD passionnante sur le milieu du cinéma, impitoyable.

➤ « Avec Édouard Luntz », Futuropolis, 23 €.

dimanche 10 juin 2018

DVD et blu-ray - Après "Pentagon Papers", la liberté de la presse, inscrite dans la constitution... américaine


Steven Spielberg est un surdoué du cinéma. À l’aise dans les films d’aventures, visionnaire dans la science-fiction, il sait aussi raconter des histoires vraies avec un sens du suspense inégalable. Dans « Pentagon papers », le sujet n’est pas spécialement cinématographique. Pourtant on est happé par le rythme, la tension et les rebondissements de ce film sur le rôle de la presse dans une démocratie. L’action se dé- roule au début des années 70. Nixon est président des ÉtatsUnis et continue la guerre du Vietnam, débutée depuis des années. Les forces américaines, malgré la mobilisation de milliers de jeunes recrues, ne parviennent pas à contenir les révolutionnaires vietnamiens. En fait, depuis des années, des rapports secrets annoncent la défaite US. Mais pour ne pas perdre leur « honneur », les présidents successifs s’entêtent.

L’opinion gronde, la jeunesse se rebelle. C’est à ce moment que les rapports secrets sont exfiltrés et communiqués à la presse. Le film raconte dans un premier temps la rivalité entre le Washington Post et le New York Times. Le second sort le scoop. Mais Nixon obtient de la justice la suspension de la série d’articles.

Quand Ben Bradlee (Tom Hanks), le rédacteur en chef du Post, récupère à son tour l’intégralité des rapports, il veut se lancer dans leur analyse. Mais pour cela il doit obtenir l’aval du patron de son journal. En patronne en l’occurrence, Kay Graham (Meryl Streep).

Ce film, qui a multiplié les nominations aux Oscars et Golden Globes, aborde plusieurs thématiques. La première du lanceur d’alerte, les Pentagon Papers étant récupérés et divulgués par un ancien marine. Celui du pouvoir des femmes, Kay Graham devant sans cesse se battre pour imposer ses choix face à un conseil d’administration entièrement masculin. Il est aussi question de concurrence mais surtout de liberté de la presse. Et sur ce dernier point, saluons la décision de la cour Suprême qui a clairement soutenu les journalistes face à un pouvoir, même élu démocratiquement.

Bref, un biopic totalement dans l’actualité.

➤ « Pentagon Papers », Universal, 19,99 € le DVD, 22,99 € le blu-ray

samedi 9 juin 2018

Cinéma : L’humour au quotidien des Belges de "Mon ket" par François Damiens

François Damiens marie cinéma et caméra cachée dans son premier film.

Son personnage de « François l’embrouille », héros de caméras cachées très borderline, l’a fait connaître. François Damiens, comédien belge, a su sortir de cette étiquette et a transformé l’essai au cinéma. Dans des rôles typiquement belges dans un premier temps (inoubliable dans Dikkenek) puis en comique plus francophone que Belge jusqu’au succès phénoménal de « La famille Bélier ».

Aujourd’hui il retourne à ses amours initiales en réalisant son premier film, subtil et savant mélange de scènes de fiction et de caméras cachées. « Il y a 25 personnes piégées dans le film, explique-t-il lors de la présentation de son film en avant-première au Méga-Castillet de Perpignan. Et nous avons fait 12 prises différentes par séquences. » Conséquence, pas moins de 300 Belges ont participé à cette production étalée sur plus d’une année et demi. «Nous devions multiplier les piégés car ça ne marche jamais du premier coup. Parfois on me reconnaît, d’autres fois ce n’est pas marrant. Il m’arrive aussi d’éclater de rire face à une situation. Et puis dans ce film, il est arrivé que les pié- gés ne réagissent pas comme le scénario l’exigeait. Par exemple, mon personnage, un détenu en cavale, va chez un chirurgien esthétique et lui demande de lui refaire entièrement le visage. Ceux qui refusaient fermement ne pouvaient être retenus... »
En écrivant un scénario complet et cohérent pour les 90 minutes du film, François Damiens n’a pas choisi la facilité. Mais des caméras cachées, comme il le fait remarquer avec ironie, il y en a des centaines sur le net. Et gratuites. Il fallait faire mieux.

Ancien prisonnier
Son film est plus que l’accumulation de situations cocasses. Tout se tient et devient une véritable leçon de vie de son père à son fils. Le père c’est Dany Versavel. En prison depuis 10 ans, quand il apprend que son fils, Sullivan, 15 ans, demande l’émancipation, il décide de s’évader pour le reprendre en mains.

Au cours de sa cavale, Dany se rend aux urgences et demande à ce qu’on lui retire du gros colon les trois rouleaux de billets de banque et le téléphone (à clapet) qu’il y dissimule. Cela donne une scène totalement loufoque avec une infirmière qui, malgré le cas totalement farfelu, garde son calme et son professionnalisme. Des moments d’anthologie, il y en a d’autres, qui provoquent des fous rires démentiels (la demande d’emprunt, l’achat des cigarettes) où de belles leçons d’humanité comme cette discussion avec une « artiste et intellectuelle », draguée lourdement par Dany et qui lui explique quelques règles de la vie, comme si elle s’adressait à un gamin de 10 ans.

Mais le passage le plus surréalisme, Belgique oblige, reste celui de la salle d’attente à l’hôpital. Dany s’installe au hasard autour de patients qui regardent la télévision. Et sa photo apparaît dans un flash spécial, présenté comme un dangereux criminel en cavale. Et son voisin de lui donner des conseils pour éviter la police car lui-même a passé 30 ans en prison. Quand la réalité dépasse la fiction et donne un moment de cinéma vérité d’anthologie.

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Méconnaissable

Plusieurs heures de maquillage chaque jour avant les prises. Tourner ce film a été un véritable calvaire pour François Damiens. La partie la moins intéressante de son job. Mais il sait que c’est une étape inévitable et cruciale. Car non seulement il faut qu’il soit méconnaissable (il est très connu en Belgique) mais également que les postiches soient les plus discrets et naturels possibles.
Après, pour rentrer dans la peau de ce beau parleur un peu prétentieux, il n’a aucune difficulté. Au contraire, on sent qu’il adore ce personnage sans limite. Il prend un malin plaisir à aller loin, très loin dans la provocation. Ce qu’il a conservé pour le film n’est qu’une petite partie de certaines scènes qui sont parties en live et dont on aperçoit des extraits dans le générique de fin.
Et aussi quelques fous rires qui ont failli faire capoter des prises bien parties. Comme quand le complice de François Damiens, celui qui interprète son père, s’exclame après que le banquier ait répondu en anglais, « Qu’est-ce qu’il a dit ? Je comprends pas le Flamand ». Là, François Damiens avoue avoir craqué, incapable de garder son sérieux. Par chance il a pu conserver le début. Résultat, le public aussi risque le fou rire lors de la scène...

 ➤ « Mon Ket », comédie de François Damiens (Belgique, 1 h 29) avec François Damiens, Matteo Salamone, Tatiana Rojo.

vendredi 8 juin 2018

Roman : Patrick Rambaud raconte son Mai-68


Membre de l’académie Goncourt, expert en romans historiques (essentiellement l’épopée napoléonienne) et chronique politique sarcastique, Patrick Rambaud a fusionné ses deux talents pour signer « Les aventures de Mai ». De Mai 68 évidemment.
Raconté comme un roman, au jour le jour, ce roman fidèle aux événements, montre les réactions de plusieurs protagonistes de l’époque. Parmi les « imaginaires », un groupe d’amis, souvent issus de la bonne bourgeoisie, étudiants et découvrant les joies de la révolte, du libertinage, des manifs et un peu moins des matraquages des CRS.
CRS qui ont eux aussi leur représentant dans l’histoire. Un certain Misson, peu enclin à recevoir des pavés sur le casque. « Misson aperçoit une femme en chemise de nuit sous la porte cochère entrouverte ; avec Pelley, il se précipite, ouvre la porte en grand d’un coup de talon, la femme aux yeux rouges valse contre le mur, Pelley se baisse pour la matraquer aux tibias, elle hurle, Misson lui cogne les épaules et le crâne ». Loin d’être une sympathique parenthèse, Mai-68 a parfois été d’une rare violence.
Ça aussi Patrick Rambaud le raconte, se mettant même en scène en racontant la frustration d’un des amis de la bande, éloigné de Paris pour cause de service militaire dans une base aérienne.
On s’enthousiasme avec les jeunes, on stresse avec les politiques, on regrette un peu le dénouement.
Mai a quand même laissé des traces. Une société plus libre et intelligente. Même si l’épilogue montre des « anciens combattants » totalement dépassés par l’évolution de notre société numérique digne du Big Brother de George Orwell.

 ➤ « Les aventures de Mai », Patrick Rambaud, Grasset, 18 €

jeudi 7 juin 2018

« Madame » : clichés mondains


Film français, se déroulant en France (Paris essentiellement), réalisé par une romancière française (Amanda Sthers), « Madame » ressemble pourtant plus à un dépliant touristique formaté pour les Américains fortunés. Justement, les deux acteurs principaux, le sont, Américains. Anne (Toni Collette) et Bob (Harvey Keitel), vivent dans un immense hôtel particulier. À leur service, une ribambelle de femmes de ménages menées de main de maître par la gouvernante, Maria (Rossy de Palma). Lors d’un dî- ner, pour ne pas être 13 à table, la maîtresse de maison décide de faire passer Maria pour une amie espagnole.

Et comme de bien entendu, la gentille bonne à l’accent hispanique prononcé tape dans l’œil d’un riche britannique. Qui croit qu’elle est incognito à Paris car cousine du roi Juan Carlos. Panique chez Anne, rébellion chez Maria qui espère avoir rencontré l’amour.
Cela se veut sans doute une critique sociale. Mais en pointillé. La seule véritable réplique à conserver est prononcée par la bonne, d’origine philippine « nous sommes leurs esclaves ». Oui, tout à fait Madame. Et pourtant, vous êtes bien la seule dans le lot qui mérite qu’on vous appelle Madame...

➤ « Madame », Studiocanal, 12,99 €

mercredi 6 juin 2018

Cinéma : Cauchemars éveillés avec "No dormiras", thriller insomniaque

"Le sacrifice est propre à tous les grands artistes" explique le réalisateur de « No Dormiras », Gustavo Hernandez dans ses notes de production. Ce thriller, sur le monde artistique, explore les limites entre la création et la folie. La créatrice, c’est Alma (Belen Rueda), une dramaturge qui veut monter une pièce de théâtre dans un ancien asile psychiatrique à moitié en ruines.

Il s’agit de pousser les acteurs au bout de leurs limites en les privant de sommeil. Selon elle, au bout de 108 heures d’éveil en continu, la personne entre dans les « limbes » et est victime d’hallucinations. La pièce, tirée d’un véritable fait divers au cours duquel une femme a tué son mari puis son bébé, est intimement liée au lieu.


C’est dans cet asile que la femme a été internée jusqu’à sa mort. Pour l’interpréter, Alma doit trouver en urgence une actrice volontaire de tenter cette expérience de théâtre immersif. Deux amies, jeunes actrices prêtes à tout pour dé- crocher le rôle, Bianca (Eva de Dominici) et Cecilia (Natalia de Molina) sont mises en concurrence.

Elles tentent de s’intégrer à la petite troupe formée par un régisseur, une autre comédienne et le fils d’Alma. Tous se lancent dans ce marathon de l’insomnie. Très vite, Bianca a l’impression de voir des ombres fugitives dans le vieux bâtiment. Et plus le temps passe, plus ces visions sont fortes et terrifiantes.

Les limites de la création
Il est vrai que la folie, elle connaît : son père, paranoïaque, fait des séjours réguliers dans des cliniques psychiatriques. Elle-même a parfois des doutes sur son équilibre psychique. Sans surprise, c’est elle qui réagit le plus à la privation de sommeil.

Elle obtient le rôle, mais à quel prix ?

Sans effets sanguinolents, juste en instaurant une ambiance de doute et de peur, Gustavo Hernandez signe un film qui ne laisse pas indiffé- rent. On ne peut s’empêcher de penser que le cap des 108 heures est réellement un point de non-retour. Et loin de se contenter de cette intrigue, déjà glaçante d’effroi, le réalisateur y rajoute des coups de théâtre concernant les véritables personnalités de différents protagonistes et le but final de l’expérience menée par Alma.

« No Dormiras » fait peur, indéniablement. Mais il donne aussi à réfléchir sur les limites de l’art et de l’implication des créateurs. Presque une fable. Mais sous forme de cauchemar éveillé.

 ➤ « No Dormiras », thriller de Gustavo Hernandez (Argentine, 1 h 46) avec Eva de Dominici, Belén Rueda, Natalia de Molina