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vendredi 8 juin 2018

Roman : Patrick Rambaud raconte son Mai-68


Membre de l’académie Goncourt, expert en romans historiques (essentiellement l’épopée napoléonienne) et chronique politique sarcastique, Patrick Rambaud a fusionné ses deux talents pour signer « Les aventures de Mai ». De Mai 68 évidemment.
Raconté comme un roman, au jour le jour, ce roman fidèle aux événements, montre les réactions de plusieurs protagonistes de l’époque. Parmi les « imaginaires », un groupe d’amis, souvent issus de la bonne bourgeoisie, étudiants et découvrant les joies de la révolte, du libertinage, des manifs et un peu moins des matraquages des CRS.
CRS qui ont eux aussi leur représentant dans l’histoire. Un certain Misson, peu enclin à recevoir des pavés sur le casque. « Misson aperçoit une femme en chemise de nuit sous la porte cochère entrouverte ; avec Pelley, il se précipite, ouvre la porte en grand d’un coup de talon, la femme aux yeux rouges valse contre le mur, Pelley se baisse pour la matraquer aux tibias, elle hurle, Misson lui cogne les épaules et le crâne ». Loin d’être une sympathique parenthèse, Mai-68 a parfois été d’une rare violence.
Ça aussi Patrick Rambaud le raconte, se mettant même en scène en racontant la frustration d’un des amis de la bande, éloigné de Paris pour cause de service militaire dans une base aérienne.
On s’enthousiasme avec les jeunes, on stresse avec les politiques, on regrette un peu le dénouement.
Mai a quand même laissé des traces. Une société plus libre et intelligente. Même si l’épilogue montre des « anciens combattants » totalement dépassés par l’évolution de notre société numérique digne du Big Brother de George Orwell.

 ➤ « Les aventures de Mai », Patrick Rambaud, Grasset, 18 €

vendredi 18 novembre 2016

SOLEIL AMER. Jacques Verdier raconte les amours compliquées voire impossibles entre deux jeunes provinciaux des années 70 que tout oppose.
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Amateurs de rugby passez votre chemin. Jacques Verdier, directeur du Midi Olympique, « bible » des amateurs de XV, grand spécialiste des groupés pénétrants et autres « up and under », abandonne le temps de ce roman son domaine de prédilection. Preuve que le sport mène à tout, à condition d’en sortir... Par contre Jacques Verdier fait partie de ces hommes qui n’oublient jamais leurs racines, l’action du roman se dé- roulant à Saint-Gaudens, cité pyrénéenne où il a lui même usé ses fonds de culottes dans sa jeunesse. Il admet d’ailleurs avoir instillé un peu de son adolescence dans le personnage de Pierre, piochant dans ses souvenirs pour apporter quelques touches de vérité.
L’authenticité est d’ailleurs l’impression générale qui ressort de la lecture de ce texte entre chronique rurale, roman d’apprentissage et portrait d’une France provinciale défunte. Le roman est construit comme un dialogue à deux voix. Pierre et Juliette, chacun de leur côté, sans encore se connaître, partagent leur quotidien avec le lecteur
. Pierre est le fils d’un couple aimant. Mais quand le père meurt subitement, le monde de cet adolescent solitaire, passionné de dessin, se fissure, « J’essayais, mais en me cachant, déchirant les pages aussitôt dessinées, de tracer les contours du visage de mon père sur son lit de mort, sa rigidité mortuaire. Ce n’était pas vraiment un portrait. Je ne voulais pas restituer son visage tel qu’il me revenait dans mon souvenir, mais ses angles, ses creux, son vide, la couleur de la mort. »
■ Léo Ferré, le point commun
L’image du père de Juliette, l’autre protagoniste du roman, est radicalement différente. Ce chirurgien, abreuvé des discours révolutionnaires et libertaires de Mai 68, est un notable aux mœurs plutôt dissolues. Sa femme, adepte de l’amour libre, participe à ses jeux sexuels. Juliette, encore enfant, les surprend un jour lors de vacances en Espagne. Depuis elle est partagée entre dégoût et envie.
Adolescente, sans doute par provocation, elle devient une de ces « filles faciles » qui rencontrent tant de succès auprès des jeunes hommes. Des plus âgés aussi. « Rico me fait signe de le suivre. Je suis sa proie, sa chose. Ça ne me plaît pas. Ça ne me déplaît pas non plus. Ce n’est pas moi, cette fille à moitié saoule qui suit ce mec de trente ans. »
Autant la partie Pierre est sage, nostalgique, parfois presque digne d’un roman de terroir, autant les passages avec Juliette sont chauds et osés. Deux mondes qui se côtoient sans se croiser dans ces années 70 si particulières.
Pour les rapprocher, Jacques Verdier trouve le vecteur parfait : Léo Ferré. Pierre adore ce poète d’un nouveau genre, Juliette adhère à ses idées anarchistes, voire nihilistes. Ferré incarnation d’une époque capable d’être corsetée dans une rigidité extrême tout en vénérant ces personnalités si scandaleuses et provocatrices. Une fracture irrémédiable. Qu’illustre la difficulté pour Pierre et Juliette de trouver une façon de s’aimer. Car « Soleil amer » est aussi (et surtout) un roman d’amour. Un amour fou et absolu, de ceux qui ne durent pas et laissent des cicatrices à vie.
L’écriture fluide et imagée de Jacques Verdier emporte le lecteur loin dans cette histoire passionnée. On vibre avec Pierre quand il boxe ou au côté de Juliette lors de ses promenades à cheval sur les bords de Garonne. Deux personnages lumineux, que l’on quitte à regret. A moins que l’auteur ne se dé- cide d’imaginer une suite à leur relation. Dans les années 80 ?
➤ « Soleil amer » de Jacques Verdier, éditions Anne-Carrière, 19,50 € 
(Chronique parue le dimanche 13 novembre dans la page livres de l'Indépendant)

mercredi 6 juillet 2016

Livre : Nice, la rouge


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Patrick Raynal refait vivre Nice en mai 68. Quand les étudiants « rouges » tentaient de faire exploser tous les carcans.

Nice, sa Promenade des Anglais, ses retraités, son vote à droite. La riante ville du Sud n'est pas réputée pour ses velléités révolutionnaires. Pourtant, en mai 68, là aussi une poignée de jeunes idéalistes ont longtemps cru pouvoir changer la société française en profondeur. « Une ville en mai » de Patrick Raynal, roman noir, revient sur cette période au cours de laquelle une poignée de gauchistes a occupé l'université. Tout l'intérêt du livre réside dans la vision des différents protagonistes de l'action. Des « vieux de la vieille », totalement allergiques à cette liberté débridée. Le narrateur, Frédéric, a quitté Nice depuis 10 ans. Il revient en France (après dix années passées en Afrique) car sa fille Sophie, âgée de 18 ans, a disparu depuis trois mois. Il découvre, à son grand désespoir, qu'elle faisait partie des meneurs de la révolte estudiantine. Frédéric, en témoin extérieur, n'en croit pas ses yeux. Car Nice est encore plus embourgeoisée qu'à son départ il y a une décennie. Et de se demander comment ces étudiants « pouvaient-ils songer un seul instant à faire la révolution dans une ville qui, depuis plus de quatre-vingts ans, se figeait les traits à grands coups de truelle de fond de teint ? »
Pancrazi aussi recherche la demoiselle, par ailleurs petite amie officielle du leader de la révolte, Figasso. Ce commissaire des Renseignements généraux tente de surveiller le bouillon de culture de la fac. Ancien résistant, fidèle à de Gaule, il n'a qu'une envie : mettre au pas ces fils de petits-bourgeois en mal de sensations fortes. Tout se complique quand un prof, réputé pour se idées d'extrême-droite, est retrouvé mort dans le port. Les étudiants ont-ils dérapé ? La disparition de Sophie est elle liée à ce meurtre ? Non seulement le roman est passionnant par son intrigue, mais il offre aussi et surtout une grosse bouffée de nostalgie, tant aux soixante-huitards qu'aux tenants de l'ordre gauliste.
« Une ville en mai », Patrick Raynal, L'Archipel, 18 euros





mardi 21 août 2012

BD - Guerre civile française dans Jour J de Pécau, Duval et Damien


Mai 68, révolution, avortée, n'a finalement accouché que d'une souris. Dans la série de politique fiction « Jour J », Duval et Pécau ont imaginé une autre suite pour le mouvement étudiant. De Gaulle retrouvé mort à l'Elysée (attentat ou suicide ?), les deux France se retrouvent face à face. Certains militaires tentent d'en profiter pour mener un coup de force. Les armes parlent. La guerre civile se répand partout, rouges contre bleus. Après 8 années de guerre civile, l'ONU tente de calmer le jeu. Des troupes américaines encerclent Paris. 
L'album, dessiné par Damien, s'accroche aux basques de Oliver Nooman, un photographe de presse pour le Boston Globe. Il se retrouve au cœur des combats dans un Paris ravagé, partagé en zones contrôlées par différentes milices, de celle des intégristes religieux aux punks anarchistes. Un déchaînement de violence comme on en voit actuellement, mais à Bagdad... 
Particulièrement crédible, cette histoire démontre qu'aucun pays n'est à l'abri. Une étincelle parfois suffit pour embraser une nation...

« Jour J, Paris brûle encore » (tome 8), Delcourt, 14,40 €

mercredi 22 juin 2011

BD - Jour J : et si l'imagination avait pris le pouvoir après mai 68 ?


Mai 68, grande bouffée de liberté, s'est achevé par une sévère reprise en main des institutions. Mais si... Jean-Pierre Pécau et Fred Duval ont imaginé une autre version de l'Histoire. Finalement, après deux années de guerre civile provoquée par la mort de de Gaulle dans le crash de son hélicoptère, un gouvernement d'union nationale ramène la paix, avec trois hommes clés : François Mitterrand, Daniel Cohn-Bendit et Jacques Chirac. Dans un Paris en pleine reconstruction, les intrigues battent leur plein. Pour pimenter le tout, les scénaristes imaginent qu'un petit commando a dérobé 200 millions de francs pendant les émeutes et qu'un des exécutants, après trois années enfermées dans un asile psychiatrique, vient demander des comptes.

Mr Fab, au dessin, ne force pas trop les caricatures des hommes politiques connus mais s'éclate visiblement en imaginant un Paris psychédélique, moderne et très coloré.

« Jour J » (tome 6), Delcourt, 14,95 €