mardi 5 mai 2015

BD - Nids d'extraterrestres dans "Namibia" de Léo, Rodolphe et Marchal


Léo est un faiseur de best-sellers. Après les centaines de milliers d'exemplaires de sa série phare Aldébarran, il a multiplié les collaborations. Soit seul au scénario, soit aidé de Rodolphe qui l'a « lancé » avec le western hivernal « Trent ». Moins inventif, plus complexe, Kenya mélange habilement fantastique et espionnage. Après une première saison de cinq albums, Léo et Rodolphe ont confié le dessin à Marchal qui s'est accaparé l'ambiance, délaissant petit à petit le style de Léo. 
La suite des aventures de la belle Kathy Austin se déroule en Namibie. Dans le cinquième et ultime épisode, elle descend dans les entrailles d'une mine désaffectées pour y découvrir un nid d'extraterrestres en train de fomenter la destruction de la planète. Elle saura convaincre Churchill et Staline d'intervenir rapidement pour détruire ces dangereuses bases. Si la fin semble un peu abrupte, on est rassuré car les auteurs annoncent d'ores et déjà une troisième saison qui prendra place cette fois en Amazonie.

« Namibia » (tome 5), Dargaud, 11,99 €

lundi 4 mai 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES - Au tour de la Force


Star Wars prend de plus en plus des airs de religion, voire de secte. Les fans, ou disciples, ont même leur jour férié. Le 4 mai constitue depuis quelques années la date de référence. La faute à Dark Vador, le grand méchant. Une de ses répliques cultes, "Que la force soit avec toi", peut se comprendre en anglais "May the 4th be with you".

Donc ce 4 mai, partout dans le monde, des animations, soirées, colloques ou conférences se penchent sur cette mythologie d'un nouveau genre. Avec encore plus d'excitation car cette année 2015 sera marquée par la sortie du 7e volet de la saga ("Le réveil de la Force" sur les écrans le 18 décembre). Outre les grands anciens (Harrison Ford, Carrie Fisher...), de nouveaux personnages apparaîtront. Celui qui semble avoir le plus de succès dans les quelques extraits distillés au compte-gouttes par Disney, est tout rond. Rien à voir avec Obélix, il s'agit d'un robot-boule au doux nom de BB-8. R2D2 a du mouron à se faire.
Star Wars, une "religion" qui accepte en son sein les marchands du temple. Licences et droits dérivés représentent une formidable machine à cash. Pour preuve la mise en vente aujourd'hui du premier numéro d'un nouveau bimestriel édité par Panini Comics : l'adaptation en BD de la trilogie de base. Et pour rendre encore plus fous les adeptes (collectionneurs), la maison d'édition publie ce numéro 1 sous dix couvertures différentes. Conséquence, le fan absolu devra débourser 10 fois 5,50 euros pour ne rien manquer... Sans compter les quatre éditions spéciales destinées à la FNAC ou La Grande Récré. Dark Vador, le nouvel Oncle Picsou de la galaxie.
En bonus, les premiers extraits de Star Wars 7

BD - Vidocq, policier de choc et de légende


Héros de romans, de série de télévision et même de films, Vidocq est de nouveau sollicité pour une adaptation en bande dessinée de ses aventures. Richard D. Nolane, le scénariste qui monte chez Soleil, s'intéresse à ce personnage complexe et rempli de contradictions. Il confie le dessin à Banovic, illustrateur Serbe au trait parfois chargé mais qui parvient à rendre l'ambiance de ce Paris du second Empire, écartelé entre richesse des parvenus et misère des laissés pour compte. 
Vidocq, ancien bagnard, vient d'être embauché pour faire diminuer la délinquance dans Paris. Il a des méthodes peu orthodoxes mais efficaces. Il a recruté d'anciens délinquants, experts en camouflage, filature et infiltration du milieu. La première enquête, « Le suicidé de Notre-Dame », le met en présence d'anciens soldats durement éprouvés par la campagne de Russie. Mais ce que l'on apprécie surtout c'est la mise en place de son équipe et notamment le recrutement de Pauline, une jolie prostituée prête à faire le grand saut : se mettre au service de la justice. Un premier tome prometteur tant l'ensemble des personnages a de la ressource.

« Vidocq » (tome 1), Soleil, 13,95 €

BD - Tragédie banlieusarde

Plongée au cœur de la noirceur de la misère banlieusarde dans le second épisode de ce roman graphique aux accents de tragédie. Moudy et Alex, le Noir homosexuel et le Blanc introverti, sont devenus amis sur leur travail : un centre de tri des ordures. Deux jeunes paumés dans la grise crise économique. Quelques petites combines leur permet de s'en sortir. Mais quand Alex fait une grosse bêtise, ils fuient et se réfugient dans une ancienne barre d'immeuble promis à la démolition. Là, ils croisent la route de Samir, petit trafiquant de cigarettes et autres produits « tombés du camion ». Un trio qui a besoin de se refaire une santé et de repartir à zéro. Ils imaginent donc un casse qui leur permettra enfin d'être à armes égales avec les autres, les privilégiés... 
Cette seconde partie, toujours écrite par Piatzszek et dessinée par Cinna, est essentiellement consacrée à l'irruption dans la bande de la belle et rebelle Cheyenne, une Gitane experte en ouvertures illicites de serrures en tous genres. Samir craque pour la jolie voleuse. Un côté romantique entre deux écorchés de la vie qui renforce la tragédie qui rode.

« Ordures » (tome 2), Futuropolis, 17 €

dimanche 3 mai 2015

BD - Trois albums bourrés de monstrueux et de fantastique

Des avocats chargés de défendre des monstres et autres goules, une Europe entièrement peuplée de zombies et un vampire dans le ciel de New York : ces trois BD fantastiques sont des modèles du genre.


Le cabinet d'avocats Wolff & Byrd s'est spécialisé dans les procès hors normes. Exactement ce sont ses clients qui sortent de l'ordinaire. Alanna Wolff et Jeff Byrd sont «
 Les avocats du surnaturel ». Ils défendent vampire, loup-garou et ce genre d'abominations. Ce comics américain imaginé par Batton Lash rencontre un beau succès depuis le début des années 80. Une première salve d'histoires complètes est enfin traduite dans ce recueil de 100 pages. On croise un homme qui défie les lois de la pesanteur, une maison hantée (uniquement les nuits de pleine lune,) ou un présentateur de show télévisé d'horreur sur le retour. Un dessin simple et efficace et surtout un ton résolument décalé donne une saveur particulière à cette série qui surfe entre humour et horreur.


Des zombies, il y en a en très grande quantité dans le premier tome de «
 Nous, les morts », série écrite par Darko Macan et dessinée par Igor Kordey. Le récit débute au XVIe siècle. La peste fait des ravages sur le continent européen. Une maladie qui mute et touche la totalité de la population. Fin de l'Humanité ? Sous cette forme, oui. Mais les morts se relèvent et continuent d'exister sous forme de zombies. Conséquence, l'Amérique n'est pas découverte, les Incas développent leur civilisation et asservissent les autres peuples. Les auteurs imaginent une conquête à rebours. Les vaisseaux incas traversent l'Océan et découvrent cette contrée maudite. Prévue en quatre tomes, cette série est particulièrement violente. Les zombies européens massacrent tout ce qui est encore vivant, mais les Incas, qui ont élevé le sacrifice humain au rang d'art de vivre, supportent la comparaison.


Pour terminer ce tour d'horizon abominable, un petite dose de vampire s'impose. « 
Les vestiges de l'aube », roman de David S. Khara, adapté par Serge Le Tendre et mis en images par Frédéric Peynet se déroule à New York de nos jours. Un jeune policier, Barry Donovan, enquête sur une série de meurtres d'hommes d'affaires. Il pense avoir découvert le commanditaire grâce à la collaboration de Werner von Lowinsky, une connaissance rencontrée sur internet. Mais Werner est bien plus que cela. Ce vampire vit à New York depuis la guerre de Sécession. Il n'a plus de famille, ni d'ami. Si ce n'est Barry. Alors quand le policier est en danger, il intervient. Radicalement. L'histoire (qui a un peu des airs de True Blood, la série télé, par certains aspects) est un peu trop classique. Mais les dessins de Peynet sont remarquables de précision et on a envie de connaître la suite des relations entre le jeune policier et le vieux vampire.

« Les avocats du surnaturel » (tome 1), Fluide Glacial, 17 euros
« Nous, les morts » (tome 1), Delcourt, 14,95 euros
« Les vestiges de l'aube » (tome 2), Dargaud, 13,99 euros

BD - Une rônin en Chine


Les rapports entre Japon de Chine ont toujours été conflictuels. « Senseï », nouvelle série historique de Jean-François Di Giorgio (scénario) et dessinée par Vax, écrit une nouvelle page de cette longue et interminable guerre froide. Alors que la vaste Chine est composée d'une multitude de provinces plus ou moins indépendantes, une rônin se trouve mêlée à une histoire d'amour impossible. Kang Jie, jeune noble obligé de quitter son palais, file la parfaite romance avec la belle Nuo. Mais il n'ose pas demander sa main au père très exigeant. 
Une nuit, alors qu'ils batifolent dans la campagne, ils sont témoins de l'assassinat d'un enquêteur chargé d'élucider une série de meurtres de jeunes femmes. Pourchassés par les tueurs, ils sont sauvés par l'intervention de Yukio, une rônin japonaise en terre chinoise. Dès lors, leurs trois destins sont liés. Une BD dépaysante, avec une intrigue assez classique mais des personnages forts. Notamment l'énigmatique et invincible Yukio au charme fou quoique très dangereux...

« Senseï » (tome 1), Soleil, 14,50 €

samedi 2 mai 2015

BD - "Dad", les Filles à papa de Nob


Nob a longtemps été un pilier de « Tchô », le défunt magazine de Titeuf. Il y a animé les séries « Mon ami Grompf » et surtout « Mamette », adorable mamie pleine de tendresse. Il fait une première infidélité aux éditions Glénat pour rejoindre Dupuis. Cela permet à son nouveau personnage, Dad, d'être prépublié dans les pages de Spirou. Des gags qui ont rapidement fait mouche et logiquement ils sont repris dans un recueil qui devrait toucher un large public. Dad c'est un acteur, ancien jeune premier cantonné depuis quelques années dans les publicités ringardes. 
Ce grand nonchalant séduit facilement. Il a ainsi eu plusieurs aventures. Toutes conclues par la naissance d'une fille. Résultat il doit, en plus de gérer sa carrière, assurer l'éducation de quatre sœurs toutes très différentes. Panda, l'aînée, un peu gothique, est une étudiante bosseuse et ambitieuse, comme sa mère, maire de la ville... 
Ondine, la suivante, en pleine adolescence, est aussi romantique que ses cheveux sont roses. Roxane, passionnée de jeux vidéo, est de loin la plus turbulente. Enfin Bébérénice vient compléter la smala. Encore au biberon, cette adorable métisse a la chance d'avoir un papa aimant et trois grandes sœurs qui jouent, à tour de rôle, les mamans de substitution. C'est tendre, bien vu et souvent hilarant. De loin la nouveauté la plus rafraîchissante de cette année 2015.

« Dad » (tome 1), Dupuis, 9,90 €

Cinéma - "Le labyrinthe du silence", un procès pour l'Histoire

Quinze ans après la fin de la 2e guerre mondiale, des juges allemands font le procès des tortionnaires d'Auschwitz. « Le labyrinthe du silence », un film contre l'oubli.


Au début des années 60, en Allemagne (de l’Ouest comme de l’Est), tout était fait pour oublier les horreurs de la folie nazie. Nuremberg a condamné quelques dignitaires, mais l’immense majorité des soldats, officiers et responsables SS a échappé à toute poursuite. Pire, leurs crimes sont systématiquement effacés de l’histoire officielle. Tout doit être fait pour la reconstruction du pays. Il y a eu trop de morts pour se passer des compétences d’hommes et de femmes qui ont pourtant activement participé au génocide. Alors que l’ennemi n’est plus que Bolchevique et qu’Israël se débat contre tous ses voisins, il reste cependant quelques rescapés des camps de la mort en Allemagne.

C’est le cas de Simon, un peintre qui croise un matin la route d’un de ses tortionnaires. Il est redevenu instituteur et parfaitement intégré dans cette nouvelle nation. Comment un ancien SS, qui a des centaines de morts sur la conscience, peut-il se promener en toute quiétude et être chargé de l’éducation des enfants ? Simon alerte un ami journaliste, Thomas Gnielka (André Szymanski) qui raconte cette histoire dans le journal de Francfort et va au parquet demander que des poursuites soient lancées contre ce criminel de guerre. Il apporte des preuves, mais cela n’intéresse personne. Le temps est au pardon. A l’oubli...

Petit procureur obstiné
Seul Johann Radmann (Alexander Fehling), jeune procureur à peine sorti de l’école, cantonné aux infractions routières, est interpellé. D’une rigueur absolue, il considère que tout meurtrier doit être poursuivi. Même s’il a commis ses meurtres en tant que soldat obligé d’obéir aux ordres de ses supérieurs. Il va tenter de retrouver le maximum de ces tortionnaires en recueillant le témoignage des rescapés. Mais le chemin est long, semé d’embûches, tel un véritable labyrinthe où il est vite fait de se perdre.
Basé sur une histoire vraie, ce film de Giulio Ricciarelli bénéficie d’une distribution de grande qualité. Alexander Fehling dans le rôle du petit juge entièrement dévoué à son métier rend parfaitement l’évolution de ce jeune homme, ce « blanc-bec » pour certains anciens déportés, qui va épouser cette cause après avoir pris conscience des horreurs d’Auschwitz. Une scène explique tout. Le journaliste Gnielka apostrophe Johann au début de l’enquête en lui demandant s’il sait ce qu’il s’est réellement passé en Pologne dans ce sinistre camp. Le procureur n’en a qu’une vague idée. Et c’est le cas de tous les jeunes gens qui l’entourent.
Ce devoir de mémoire, des Allemands envers les victimes de leurs parents, a sans doute permis que ces milliers d’histoires dramatiques ne disparaissent pas les limbes de la réécriture de l’histoire officielle. Et toute la force du film est de parler de déportation sans montrer la moindre image dure, insoutenable. Au contraire, rescapés et bourreaux se ressemblent étrangement une fois la paix retrouvée, comme s’il était facile d’endosser un costume d’homme respectable après avoir commis les pires ignominies. C’est aussi cette leçon que l’on retiendra de ce très édifiant « Labyrinthe du silence ».

vendredi 1 mai 2015

BD - Militer contre l'homophobie


Si en France l'opposition au mariage pour tous s'est focalisée sur des manifestations de rue, dans d'autres pays européens c'est le gouvernement qui mène le combat. En Lituanie, une loi votée en 2009 interdit toute « propagande pro homo ». A Vilnius, la Ligue Gay Lituanienne se bat au quotidien pour faire avancer les droits des homosexuels. Cette association accueille en son sein des militants bénévoles venus de toute l'Europe. Comme pour prouver à la population locale que le pays est à la traîne dans une évolution des mœurs inéluctable. 
En octobre 2012, après des heures d'avion, Joana Estrela, jeune dessinatrice portugaise, débarque dans cette grande ville pour préparer la Gay Pride de 2013. Elle raconte au quotidien son travail et ses rencontres sous forme de petites bandes dessinées entre reportage et journal intime. Un dessin très épuré pour un message politique plein d'espoir mais loin d'être optimiste. En Lituanie, homosexualité est systématiquement associée à pédophilie. C'est sous couvert de protection des enfants qu'il est interdit dans les films de montrer deux femmes se tenant par la main ou deux hommes s'embrassant. 
Une BD édifiante sur la différence de conception des libertés individuelles au sein même de l'Union européenne.

« Propaganda », Warum, 16 €

DE CHOSES ET D'AUTRES - Conseils publicitaires décalés

Campagne de publicité choc du fournisseur de programmes télé Netflix. La chaîne s'est payé les conseils de Saul Goodman. Apparu dans la saison 2 de Breaking bad, il joue l'archétype de l'avocat corrompu, expert en contournement de la loi. Netflix veut populariser ce personnage qui sera bientôt le héros à part entière de sa propre série, Better Vall Saul !. Dans les pubs, il semble s'adresser aux passants parisiens sur une cinquantaine d'affiches adaptées à chaque quartier. Ainsi, dans une rue chaude de la capitale, entre deux enseignes de peep-show, Saul prévient le chaland : "Attention amigo, dans ce quartier il y a autant de flics en civil que de sex-shops".

Encore plus direct dans le métro : "Il y a moins de contrôles à l'autre sortie. Je dis ça." Ces slogans se remarquent car ils sont ouvertement malhonnêtes. Du moins, ils prétendent donner des tuyaux pour devenir "moins" honnête. Devant de nombreuses boulangeries parisiennes, tout un chacun semble être mis dans la peau d'un gangster : "Acheter sa baguette avec de l'argent sale est un délicieux moyen de s'en débarrasser".
Beaucoup plus limites ces deux autres. Le premier pourrait être attaqué pour incitation à la consommation de drogue "Usage de cannabis, 3 750 euros d'amende. Un week-end à Amsterdam, 250 euros". Le second est très péjoratif pour les commerçants en général, même si c'est la stricte vérité : "Les centres commerciaux acceptent toujours le cash. Peu importe d'où il vient."
Désolé pour les nostalgiques, mais les héros des séries télé ont bien changé depuis Thierry La Fronde...