mardi 24 juin 2008

BD - Duel en 60 pages


Richard Guérineau, dessinateur réaliste au trait nerveux et aux cadrages très cinématographiques, a connu le succès avec le Chant des Stryges scénarisé par Corbeyran. Il a voulu, le temps d'un album, s'échapper de cette ambiance contemporaine et fantastique pour signer un album de 60 pages dans un genre qu'il affectionne depuis sa jeunesse : le western. Il s'est associé à Henri Meunier pour raconter cette histoire de duel dans une petite ville de l'Ouest américain. 

Le shérif Jude Stanton est respecté. Le calme est revenu à Westwood City. Mais parfois un pistollero arrive en ville et refuse de se plier à l'exigence du shérif de déposer ses armes dans son bureau. Cela se règle alors au colt. Un matin, un jeune homme débarque en ville, deux cadavres sur son second cheval. Deux hors-la-loi, recherchés « mort ou vif ». Il s'installe à l'hôtel, sans rendre ses armes. 

Le shérif va lui réclamer ses colts et découvre qu'il a le même nom qu'un tueur abattu quelques mois plus tôt. Qui est ce fantôme énigmatique, si sûr de lui ? Ce duel sera-t-il celui de trop ? 

Un bijou graphique que l'on peut également apprécier dans une édition luxe en noir et blanc.

« Après la nuit », Delcourt, 13,95 € (20 € en noir et blanc) 

lundi 23 juin 2008

BD - Fantastique urbain dans "La légende du Changeling"


Pierre Dubois ne vit pas dans notre monde. Ce grand spécialiste des elfes, lutins et autres petits peuples de la forêt a définitivement tiré un trait sur la modernité et notre monde dédié à la technologie. Son combat contre l'oubli des légendes anciennes lui donne l'occasion de signer de plus en plus de scénarios de bande dessinée, support sans limite pour représenter ces êtres et mondes imaginaires. 

Cette fois, il s'est associé à Xavier Fourquemin dessinateur français à l'imagination débordante. « Le Mal-venu », premier tome de la Légende du Changeling débute dans cette campagne anglaise de la fin du 19e siècle. La misère est de plus en plus présente et la famille Jobson est obligée de quitter ce pays de bocages pour les bas-fonds de Londres. Un monde totalement nouveau pour le jeune Scrubby Jobson. 

Cet enfant, qui a beaucoup appris auprès d'un ermite, le chasseur sauvage ou homme vert. Mais que valent les enseignements d'un sorcier dans cette ville en proie au crime, en pleine révolution économique et sociale ?

« La légende du Changeling » (tome 1), Le Lombard, 13 € 



dimanche 22 juin 2008

BD - Guy Lefranc va-t-il sauver Londres en péril ?


Guy Lefranc, héros contemporain de Jacques Martin, après une longue éclipse, est de plus en plus présent grâce à une politique de reprise agressive. Francis Carin et Patrick Weber imaginent les aventures du reporter en parallèle à Taymans et Drèze qui eux se placent résolument dans une veine nostalgique. Ce 19e tome intitulé « Londres en péril » s'insère chronologiquement entre « Le Maître de l'atome » et « L'ouragan de feu ». 

Dans cette ambiance de fin de seconde guerre mondiale, des attentats frappent plusieurs quartiers de Londres. Il ne semble pas y avoir d'explication logique pour Scotland Yard. C'est Lefranc qui découvre le lien entre ces explosions. Les dates correspondent à des défaites importantes de l'armée nazie. Et sur le plan de Londres, si l'on rejoint les différents lieux frappés, ont obtient une croix gammée dont le centre est le quartier populaire de Pimlico. 

Lefranc va se rendre outre-Manche et se battre contre des nazis qui veulent venger leur führer. Une histoire qui manque un peu de densité, un dessin fidèle au maître, mais sans casser des briques : on reste sur sa faim. Mais l'ensemble est distrayant et prenant.

« Lefranc » (tome 19), Casterman, 9,50 € 

vendredi 20 juin 2008

Polar historique - Terreur à l'abbaye

Plusieurs meurtres inexplicables sèment le trouble dans l'abbaye des Clairets. La mère abbesse Plaisance de Champlois mène l'enquête.


Toute l'intrigue de ce roman policier historique d'Andrea H. Japp se déroule en 1308 dans les murs de l'abbaye des Clairets placée sous la responsabilité de la jeune mère abbesse Plaisance de Champlois. Sauf le premier chapitre. Nous sommes en 1209 au cours du sac de Béziers . Les croisés, pour lutter contre l'hérésie cathare, vont massacrer une grande partie de la population. A leur tête Arnaud Amalric. Un homme très puissant et très déterminé. Il participe à la curée tout en ne quittant pas une croix rapidement maculée de sang. « Arnaud Amalric plaqua la croix contre lui, comme s'il redoutait qu'on la lui arrachât. Il s'émut fugacement se la pression du long Christ d'argent contre son torse. Ils ne firent qu'un durant un court instant. » Cette croix est au centre de l'intrigue de ce roman, suite de Monestarium paru en 2007. Le lecteur y retrouve de nombreux personnage, mais il n'est pas obligé de lire ce précédent titre pour apprécier ce petit monde à part.

Un meurtre peu avant vigiles

Andrea H. Japp prend beaucoup de soin à décrire les différents protagonistes de cette histoire qui pourrait apparaître complexe avec ses nombreux termes passés d'usage (une notes en bas de page sont légion). Mais on se surprend à adopter le rythme de vie des moniales rythmées par les prières à différents heures, des laudes (avant l'aube, entre 5 et 6 heures) aux complies (dernier office du soir vers 18-20 heures en passant par sexte (vers midi). C'est d'ailleurs très tôt le matin, peu avant vigiles (vers 3 heures) que Thibaude Santenet découvre Blanche de Cernaux, jeune novice, morte, la tête fracassée par un fer à repasser. Le corps est pendu par un pied à un chandelier et une croix est tracées sur son front. Emoi dans

l'abbaye. Plaisance se rend sur place ainsi que quelques soeurs ayant des postes importants.

Les deux apothicaires

On retrouve autour de la scène du crime Hermione de Gonvray, l'ancienne apothicaire qui va prochainement quitter l'abbaye, Plaisance ayant découvert son secret. Elle est accompagnée de Mary de Baskerville, sa remplaçante, mystérieuse et perspicace, arrivée depuis moins d'une journée en compagnie d'Arnoldus de Villanova. Ce dernier plus connu sous le nom d'Arnaud de Villeneuve dit le « Catalan » est médecin. Il fut un temps menacé par l'Inquisition, mais il a conquis son rachat en guérissant le pape Boniface VIII.

Qui a tué Blanche ? Pour quelle raison ? La mise en scène signifie-t-elle qu'on se trouve en présence d'un rite satanique ? Ces questions vont tourmenter les héroïnes de cette enquête policière peu banale. D'autant que d'autres meurtres seront commis dans l'édifice. L'ambiance va se détériorer, Plaisance ayant accepté quelques semaines plus tôt d'accueillir un groupe de "monstres" errant sur les routes. Il est composé d'un enfant loup, de deux nains et de Claire, une fillette ne supportant pas la lumière du jour. Le suspense est à son comble quand Arnaud Amalric refait son apparition, à la recherche de cette fameuse crois de perdition...

L'intrigue imaginée par Andrea H. Japp puise ses racines dans les croyances les plus profondes. Dans ce monde de femmes et de pureté, la mort va frapper, les plaies seront difficiles à cicatriser.

« La croix de perdition », Andrea H. Japp, Calmann-Lévy, 20,90 €

jeudi 19 juin 2008

BD - Trop rare énergie


Nävis, dernière petite humaine, naufragée sur une planète hostile, passe ses journées entre l'amusement avec son fauve adoré Houyo et l'éducation dispensée par son robot Nsob. Un robot qui a depuis quelques temps une baisse de régime. Une perte d'énergie qui n'est pas du goût de la bouillonnante petite fille. Elle branche l'engin sur le générateur principal et la machine... explose. 

Seule solution pour Nävis : rejoindre l'épave et y dénicher des pièces de rechange. Mais c'est très dangereux car le mal absolu règne dans les couloirs délabrés : un robot détraqué qui tue toute forme de vie pour lui soutirer la moindre parcelle d'énergie. Le trio va recevoir l'aide d'autres robots restés loyaux aux humains. Histoire très actuelle écrite par Morvan, l'énergie étant de plus en plus rare et chère, nos portefeuilles peuvent en attester depuis quelques mois. Il y greffe une intrigue jouant beaucoup sur la force de l'amitié. 

Munuera, au dessin, s'en donne à cœur joie dans les décors forestiers et tropicaux et les machines aux formes alambiquées. Une série à l'univers de plus en plus riche, pour les plus jeunes, mais idéale pour se « préparer » à découvrir des BD plus adultes comme Sillage, où on retrouve la même héroïne, mais plus vieille de 15 ans.

« Nävis » (tome 4), Delcourt, 12,90 € 

mercredi 18 juin 2008

BD - La brousse ou la vie pour le Choucas de Lax


Lax, tout en adaptant des classiques du polar dans la collection Casterman Rivages Noir, y va de ses histoires personnelles de détective blasé et malchanceux. Son Choucas est plus digne de la Série Noire. Une collection qu'il affectionne particulièrement, la dévorant quand il n'est pas sur une enquête. 

Le Choucas lit beaucoup... Il voyage de plus en plus également. Dans le précédent album il sillonnait le Népal. Cette fois, il va au Mali puis au Burkina Faso. Mais tout débute en France, à Paris. La police se sent de plus en plus « libre ». Les bavures pour délit de faciès sont de plus en plus fréquentes. Mais ce n'est pas la défense et de la veuve et de l'orphelin noirs qui pousse le Choucas à prendre l'air, mais une banale fuite de lavabo. Il se retrouve malgré tout embringué dans une affaire de fugue d'un jeune adolescent. Benoît, originaire du Mali, adopté très jeune, ressent de plus en plus sa différence. 

Surtout quand il croise une patrouille. IL décide donc de rejoindre le pays de ses ancêtres, au grand désespoir de ses riches parents. Commence un périple au pays de la bière de mil épique et dangereux. Une façon très habile pour dénoncer une certaine ambiance dans les grandes villes.

« Les tribulations du Choucas » (tome 2), 13 € 

mardi 17 juin 2008

BD - La guerre à nos portes


Depuis quelques années les tensions communautaires en Irlande du Nord ont quasiment disparues. Mais il n'y a pas très longtemps, vivre à Belfast c'était un peu comme se balader dans un camp militaire assiégé. Kris l'a vécu à 14 ans. Heureux de décrocher un mois de séjour linguistique pour perfectionner son anglais, il part pour l'Irlande avec son copain Nicolas. Après avoir fait un stock de chocolat et de préservatifs, les deux compères se lancent dans un périple de 24 heures via Paris, Londres et l'Ecosse. Arrivés sur place, ils sont accueillis par une famille de catholiques, pauvres mais joyeux. Le paradis. Mais pour un seul jour. 

Car Kris découvre avec effroi qu'il n'est pas prévu qu'il reste dans cette famille. Il est récupéré par une famille de protestants. Riches, froids et déprimants. Les eux copains peuvent cependant passer leurs journées ensemble, jusqu'au jour où la tension remontant, les déplacement entre les quartiers devient impossible. Kris va fuguer, traversant toute la ville à ses risques et périls. 

De ces vacances inoubliables, le scénariste en a tiré un récit romancé, mêlant souvenirs personnels et faits divers réels, illustré par Vincent Bailly qui a utilisé une large palette de couleurs pour retranscrire toutes les ambiances de ces « Coupures irlandaises ».

« Coupures irlandaises », Futuropolis, 16 € 

lundi 16 juin 2008

BD - Long et mystérieux coma


Dix années de coma. Dix années de perdues pour Zack Kosinski. De 10 à 20 ans, il est resté dans un lit médicalisé. Son père, un chercheur, a été quelques temps à son chevet. Puis il a disparu. A 20 ans, Zack se réveille. Le jeune garçon émerge de sa longue absence dans un corps d'adulte, en partie amnésique. Son retour à la vie se déroule sous la férule de son infirmière, la jeune et très belle Tia Brown.

 Zack se pose beaucoup de questions et lentement va découvrir les nombreux mystères existant autour de son cas. Première interrogation, d'où vient la fortune que lui lègue ses parents. Son père a disparu, mais sa mère s'est suicidée. Instalé dans le vaste duplex newyorkais, Zack embauche Tia pour qu'elle s'occupe de lui à plein temps. Et entre les deux jeunes gens, l'amour va compliquer les choses. Au moment où Zack apprend qu'il a des pouvoirs psychiques surnaturels, Tia découvre des micros dans l'appartement. Ils sont espionnés par la CIA... 

Ce troisième volet de la série « Uchronies » de Corbeyran se déroule à New York et est dessiné par Defali avec qui il a déjà travaillé sur « Asphodèle ».

« New York » (tome 1), Glénat, 12,50 € 

dimanche 15 juin 2008

BD - Casterman offre de nouveaux « Rivages » au polar en BD

Nouvelle collection présentant des adaptations en BD de romans policiers. Première fournée avec Jim Thompson, Donald Westlake, Miles Hyman, Lax...


Lancée en 1986, la collection Rivages/Noirs est devenue une référence en matière de littérature policière, détrônant la Série Noire. Une collection de poche dirigée par François Guérif qui va maintenant se décliner en bande dessinée grâce à un partenariat avec les éditions Casterman. Les quatre premiers titres (il devrait ne pas y en avoir une demi-douzaine par an) permettent à quatre dessinateurs confirmés de s'approprier l'univers d'auteurs français et américains. Et logiquement c'est par un roman de Jim Thompson que tout débute.

 Nuit de fureur. Peardale, années 40, quelque part dans l’Amérique profonde. Un homme à l’allure juvénile débarque dans cette petite ville tranquille, pour y suivre de sages études, dit-il à Mme Winroy, la séduisante logeuse qui l’accueille dans sa pension de famille. Mais évidemment, la réalité est tout autre. Carl Bigelow, alias Charlie “Little” Bigger, tueur à gages officiellement reconnu coupable d’au moins seize assassinats, est en repérage pour le compte d’un ponte de la pègre new-yorkaise, afin de préparer la liquidation en douceur d’un escroc repenti. Miles Hyman peint cette Amérique profonde des années 40 avec talent. Il déshabile les quelques femmes de l'histoire avec un brio étonnant. Le héros, froid et sinistre, se bat avec son absence totale de moralité. Il se sait condamné, par la maladie et son employeur, mais honore son contrat quand même. Une désespérance typide des romans de Jim Thompson adapté par Rodolphe.


 Pierre qui roule.
New York, juin 1969. Fraîchement sorti de prison, John Dortmunder se voit proposer un “coup” par l’un de ses anciens complices, Kelp, spécialiste du vol de voitures : profiter d’une exposition d’art africain à New York pour dérober le clou de la manifestation – une émeraude d’une valeur d’un demi-million de dollars – au bénéfice d’un obscur état africain dont la pierre précieuse constitue le totem. L'adaptation de Lax (auteur du Choucas) est aussi délirante que le récit original. Elle souligne à la perfection la démesure progressive des plans imaginés par le sympathique mais très malchanceux cambrioleur. Les dessinateur, plus habitué aux décors parisiens ou exotiques (le dernier Choucas se déroule au Mali après une aventure népalaise), est très à l'aise avec les décors très verticaux de Big Apple.

« Nuit de Fureur » de Jim Thompson (adaptation Matz, dessin Miles Hyman), 16,95 €

« Pierre qui roule » de Donald Westlake (adaptation et dessin Lax), 16,95 € 

samedi 14 juin 2008

BD - Le plus grand, le plus fort et le plus remarquable de tous les héros tricolores !

Tremblez adeptes du langage SMS et du franglais, Superdupont est de retour et il sera sans pitié pour ces massacreurs du français. Le super héros 100 % français, imaginé par Lob et Gotlib et qui a débuté ses aventures sous le pinceau d'Alexis, est de retour après une trop longue absence. 

La mort de Lob a beaucoup nuit à la poursuite des aventures, les lenteurs légendaires de Gotlib et Solé (le dessinateur repreneur) y sont aussi pour beaucoup. Il aura fallu l'arrivée d'un jeune et dynamique scénariste pour relancer les histoires courtes de l'homme au béret. Lefred-Thouron a donc pris le risque de s'associer à deux monstres sacrés de la BD pour animer un personnage de légende. Pas évident, mais à l'arrivée l'ensemble est fidèle à l'esprit d'origine. Superdupont, qui coûte plus cher à l'état en réparation de fenêtres qu'en salaire brut, affronte divers adversaires composant l'axe du mal. 

Du camembert fabriqué avec du lait de chamelle, aux faux académicien français qui dénature notre belle langue, il a fort à faire. Il s'autorise une incursion sur la toile dans un épisode très chaud où il retrouve la belle Georgette qui vend ses charmes par webcam interposée. 

L'occasion pour Solé de dessiner quelques images psychédéliques et des femmes aux rondeurs provocantes. Un régal pour les yeux.

« Superdupont » (tome 6), 9,95 €