Après Bluebird, Bluebird, la seconde aventure du Ranger du Texas, Darren Mathews, Au paradis je demeure (Folio policier, 350 pages, 9,20 €), vient de paraître en poche, toujours sous la plume de la très talentueuse Attica Locke. Darren Mathews a la particularité d’être Texan, Ranger et Noir. Dans cet État toujours très marqué par un racisme omniprésent, c’est parfois difficile à concilier.
Alors qu’il enquête sur la Fraternité Arienne du Texas (FAT), regroupement de néonazis qui exige de ses futurs membres, avant d’adhérer, de tuer un Noir, il est chargé par ses chefs (tous Blancs), de superviser les recherches d’un jeune garçon disparu sur le lac Caddo, entre Texas et Louisiane, dans une zone où les marécages rendent la vie moite et compliquée. Le père de Levi King est un ponte de la Fraternité.
Être dans les parages devrait permettre à Darren de mieux infiltrer la FAT. Alors que Trump vient d’accéder à la Maison Blanche, Darren va devoir prendre sur lui pour ne pas faire un carnage dans ce milieu d’affreux qui au mieux l’ignore, au pire tente de l’assassiner. Un roman sombre, décrivant l’Amérique comme elle est depuis quelques années : très raciste, repliée sur elle-même et scindée en deux camps radicalement opposés.
Scott Snyder est le scénariste de comics à suivre ces dernières années. Nouvelle preuve éclatante avec La nuit de la goule (Delcourt, 168 pages, 17,95 €), récit d’horreur dessiné par Francesco Francavilla et qui rend hommage au meilleur du cinéma d’épouvante. Un passionné de série Z a découvert les restes d’un film maudit tourné dans les années 50. L’unique copie aurait disparu dans l’incendie des studios.
Mais Forest Innman a retrouvé le début du long métrage. Le récit débute quand il arrive dans un hospice perdu dans le désert. Là, le réalisateur de La nuit de la goule semble attendre la mort. Forest lui demande s’il sait où se trouverait la dernière bobine du film. Le vieil homme, à moitié fou, va alors lui raconter ce qu’il considère comme la vérité : la goule existe véritablement, un monstre qui se repaît des cadavres et vit dans le corps de son médecin.
Angoisse à toutes les cases dans ce récit complet qui utilise toutes les ficelles du genre. Le dessinateur italien utilise son trait sombre pour instiller la peur à bon escient. Jusqu’à l’arrivée de la véritable goule… L’horreur n’est plus sur l’écran, mais dans la vraie vie.
Un thriller iranien de Mani Haghighi sur la rencontre de deux couples de sosies.
Magistral thriller psychologique que ce film iranien de Mani Haghighi. Dans un Téhéran crépusculaire, noyé sous une pluie battante incessante, une femme croit devenir folle. Farzaneh (Taraneh Alidoosti), monitrice d’auto-école, voit son mari Jalal (Navid Mohammadzadeh) prendre un bus. Elle décide de le suivre et découvre qu’il se rend dans un immeuble.
De la rue, elle le voit à la fenêtre en pleine conversation avec une autre femme. Le lendemain, elle lui demande des explications. Mais il prétend ne jamais avoir pris ce bus. Il se rend à cette adresse et la porte s’ouvre sur une femme, Bita, qui est le sosie parfait, quasiment le clone, de son épouse. Cette dernière est, elle aussi, éberluée car l’homme qui vient de sonner est la copie conforme de son mari, Mohsen.
L’histoire prend alors un tour quasi fantastique. Farzaneh doute de sa santé mentale, Jalal tombe sous le charme de Bita qui lui rappelle tant sa femme quand elle était plus jeune, Bita est sensible à la gentillesse de ce dernier, sa délicatesse. Reste Mohsen, jaloux et violent. Il sera le dernier à être mis au courant. Pris dans une précédente affaire de violence au travail, il ne comprend pas cette situation, comme si son honneur était une nouvelle fois mis à l’épreuve.
Le scénario, subtil, toujours surprenant, jamais dans la facilité, permet à ces Ombres persanes de toucher à l’universalité. Et malgré une interprétation impeccable des deux comédiens iraniens, c’est l’œuvre idéale pour être adaptée par des scénaristes hollywoodiens (quand ils ne seront plus en grève…) pour devenir un immense succès à l’international.
Sorti au Japon au même moment qu’Avatar 2, The first slam dunk, film d’animation de Takehiko Inoue, tiré de son propre manga, a réalisé l’exploit de battre à plate couture au box office le film pourtant tant attendu de James Cameron. Il est vrai que la BD, omniprésente depuis des décennies, fait partie des mangas les plus vendus au Pays du Soleil levant. En France, c’est au cœur de l’été que ce film d’animation sort. Deux heures qui enchanteront les fans (les 31 tomes sont disponibles chez Kana) et d’une façon plus générale, les amateurs de basket.
Le film se concentre sur le parcours de Ryota. Gamin, il est petit et pas forcément très bon. Il tente de ressembler à son grand frère, âgé de trois ans et très fort. C’est pour lui rendre hommage que Ryota va élever son niveau de jeu, se muscler et devenir un meneur d’exception. Le film raconte, en grande partie, la finale du championnat des lycées entre l’équipe de Ryota, Shohoku, et celle du lycée de Sannoh, imbattable depuis des années. Tous les points sont filmés, avec une technique d’animation visiblement basée sur de véritables prises de vue.
Entre les différentes phases de jeu, le spectateur découvre comment Ryota est parvenu à ce niveau, malgré un complexe d’infériorité fort. Jamais il ne se sent à sa place. Comme s’il usurpait l’identité de son frère, le surdoué du rebond. Pourtant, malgré les difficultés (harcèlement, culpabilité, déracinement…), le jeune basketteur parvient à se hisser au plus haut niveau et c’est lui qui a le destin de son équipe en mains lors de cette finale.
Impossible de ne pas se laisser prendre au jeu, de plonger dans le suspense de la partie, grâce à une bande-son rock du meilleur effet.
Une avocate zinzin s’associe à un avocat dépressif. Un tandem explosif au menu de cette comédie déjantée de Marie Garel-Weiss portant sur la folie ordinaire.
Mimi (Daphné Patakia) souffre d’une maladie psychiatrique grave. C’est la version politiquement correcte. En réalité, Mimi est complètement zinzin. Pas folle à lier, mais sacrément dérangée. Sur l’autoroute, elle roule à 50 km/h pour ne pas risquer de se laisser griser par la vitesse. Quand elle est trop émue, immanquablement, elle en vient à penser au sexe. Une seule solution pour s’en sortir : céder à la tentation. Elle aime ranger les choses, s’oublier dans des tâches répétitives et croire qu’elle tombe amoureuse au moindre coup de téléphone d’un inconnu.
Mimi vient tout juste de sortir d’un long séjour en clinique psy. Normalement, elle aurait dû faire un stage d’insertion aux espaces verts d’un parc de la ville. Mais comme elle est avocate (même si elle n’a jamais eu l’occasion d’exercer…), elle postule dans un cabinet. Maître Claire Bloch (Agnès Jaoui) voudrait s’en débarrasser, mais son étrangeté lui donne l’idée de l’utiliser pour récupérer un dossier important chez son associé et ancien mari, Paul (Benoît Poelvoorde). Ce dernier, en plein burn-out, ne veut plus sortir de chez lui. Et ne plus voir personne. Il risque une radiation du barreau, après avoir escroqué quelques clients. Il a pourtant longtemps été un grand avocat, capable de faire « pleurer un procureur ». Contre toute attente, Mimi parvient à récupérer le dossier et se retrouve presque embauchée. Elle va devenir l’assistante officieuse de Paul, dénichant une affaire de vol de livre rare au fin fond de la Bretagne profonde.
Une comédie avec du fond
Sur la branche, second long-métrage de Marie Garel-Weiss après La fête est finie, débute sur les chapeaux de roues. Le personnage de Mimi, déjanté, charmant et parfois inquiétant, apporte tout son sel à cette réalisation qui semble être une pure comédie. L’arrivée de Benoît Poelvoorde change un peu la donne. Blessé moralement, déprimé, il apporte un peu de profondeur dans un film qui, finalement, parle essentiellement de folie et de notre perception des différences des autres.
La suite, entre enquête policière, film d’action, et grande évasion surprend. Mais, reste Mimi dans toute sa folie et démesure, parfaitement incarnée par une Daphné Patakia (déjà vue dans la série OVNI(s) sur Canal + et le film Benedetta de Paul Verhoeven) particulièrement douée.
Le premier film de la comédienne Camille Japy a des airs de comédie noire, mais c’est une jolie réflexion, finalement très positive, sur le deuil et les façons de le transcender.
Odile (Ariane Ascaride) est impatiente. Cette mère de famille, aujourd’hui à la retraite et deux fois grand-mère, se réjouit d’accueillir dans sa maison, à la campagne, ses deux enfants pour fêter son anniversaire le soir même. Mais alors qu’il est dans la chambre en train se préparer, Alain, le mari, meurt d’une crise cardiaque. Odile, paniquée, tente d’appeler les secours. Mais une fois qu’elle est certaine que son mari vient de rendre son dernier souffle, elle prend la décision de glisser le corps sous le lit. Comme pour ne plus voir cette horrible réalité qui va forcément gâcher cette soirée.
Les spectateurs, dans la confidence, voient donc arriver le reste de la famille joyeuse et enjouée. La fille, Sylvie (Bérénice Béjo), mère de deux enfants et qui arrive avec un nouveau compagnon, Mathieu (Stéphane Brel). Le fils, Lucas (Thomas Scimeca), éternel célibataire mais qui semble très amoureux de Clara (Marilou Aussilloux). Un début de film très rythmé, avec des portraits bien brossés. On trouve rapidement ridicule Mathieu, obnubilé par sa participation à la course cycliste de son entreprise. Par contre, on ne peut qu’être sous le charme de la douce folie du personnage de Clara interprétée avec un naturel enthousiaste par Marilou Aussilloux, la jeune comédienne originaire de Narbonne, déjà remarquée dans la série Netflix La Révolution (elle y avait le premier rôle féminin) ou le dernier film de Dupontel, Adieu les cons. Les retrouvailles familiales sont joyeuses. Seul problème, l’absence d’Alain.
Odile se met alors à mentir à ses enfants (une dispute, il est sorti…), incapable d’admettre que cet anniversaire marque aussi le début de sa vie de veuve. Un réalisateur paresseux aurait étiré le quiproquo sur les trois-quarts du film. Mais Camille Japy a choisi de donner beaucoup plus de sens et de profondeur à sa première réalisation.
Quand tout le monde découvre le cadavre caché sous le lit, les réactions diffèrent. Il y a le deuil digne, notamment de Sylvie qui devient, du jour au lendemain, la référence de la famille ; le déni de deuil par Odile, qui refusera que les pompes funèbres emportent la dépouille de son mari, traumatisée des années auparavant par un décès qui l’a durement ébranlée ; le deuil floral et végétal des enfants, pas encore apeurés par la mort ou encore le deuil festif de Clara et Lucas, toujours prompts à trouver le bon côté des choses, même les plus tristes.
L’ensemble apparaît un peu désordonné, mais la fin, résolument positive, pourrait presque être proposée en option par les services funéraires.
Film de Camille Japy avec Ariane Ascaride, Bérénice Bejo, Thomas Scimeca, Marilou Aussilloux
Trois nouveaux titres pour la collection des années 70 lancée par StudioCanal. Une décennie trop souvent oubliée par les amateurs. Pourtant c’est du très bon cinéma qui est exhumé dans ces blu-ray de copies restaurées.
Ne manquez pas dans le trio le très étonnant Ursule et Grelu de Serge Korber avec Annie Girardot et Bernard Fresson. Sorti en 1973, ce film avec pas mal de chansons entraînantes est une satire au vitriol de la société française de l’époque.
On retrouve, par exemple, Roland Dubillard en homosexuel distingué ou Romain Bouteille en mendiant motorisé. Une pépite d’humour décalé.
Sont également sortis en blu-ray La cage avec Lino Ventura et Le secret avec Jean-Louis Trintignant, Marlène Jobert et Philippe Noiret.
On ne se méfie jamais assez de nos smartphones. Ils sont devenus, au fil des ans, les gardiens de nos pires secrets. Fred Cavayé en a tiré un film, Le jeu (Studiocanal), que l’on pourrait qualifier de vicieux tant une bande d’amis va constater combien il est risqué de partager ses communications.
Chez Marie et Vincent (Bérénice Béjo et Stéphane de Groodt), des amis d’enfance viennent dîner en toute décontraction. Jusqu’à ce que soit lancé ce jeu malsain : chacun met son téléphone au milieu de la table et répond publiquement aux messages ou appels. Un véritable jeu de massacre au cours duquel chacun va laisser entrevoir ses failles, défauts, compromissions ou tromperies.
C’est enjoué au début, plus dramatique et triste à la fin. Encore une fois, méfiez-vous des smartphones !
Retour réussi pour Métal Hurlant. Devenue trimestrielle, la revue de SF offre dans son 7e numéro 20 histoires courtes inédites sous une couverture horrifique.
Des auteurs confirmés (Stéphane Levallois, Corbeyran) et d’autres en devenir. Côté rédactionnel, on saluera le retour du Mange-Livres, critique littéraire lancée à l’époque par Dionnet. (Les Humanoïdes Associés, 19,95 €)
Pas toujours facile de revenir au pays. Victoire, flic à Paris depuis quelques années, revient dans son pays catalan natal. L’arrivée de cette boxeuse, hargneuse et déterminée, imaginée par Éric Dupuis (lui-même ancien policier et heureux retraité dans les Pyrénées-Orientales), ne va pas passer inaperçue. D’autant qu’elle se retrouve mêlée à une découverte macabre dans l’église de Millas.
L’intrigue passera aussi par Vinça. Des lieux que les lecteurs de la région connaissent bien. C’est là tout l’intérêt de ce polar nerveux : permettre aux lecteurs locaux de visualiser les décors. Intrigue tortueuse à souhait pour le 10e titre de cet auteur qui a débuté par raconter son Nord natal.