jeudi 3 mars 2022

Série télé - L’équipe de Space Force de retour à la base


Après une première saison très mouvementée qui se passait en grande partie sur la Lune, Space Force est de retour sur Netflix pour un second opus qui se déroule exclusivement dans la base du Colorado. Ces huit épisodes permettent de retrouver Steve Carell (photo ci-dessus) au meilleur de son humour. Il récupère un rôle qu’il adore : petit chef d’une équipe complètement barrée. La similitude avec The Office est cette fois flagrante. La personnalité du général Naird est très proche du légendaire Michael Scott : irascible, un peu niais et souvent à côté de la plaque. 

Ensuite les divers membres de la Space Force ont tous de sérieux problèmes, du docteur Mallory (John Malkovich), trop distingué pour supporter d’être au service de militaires américains complètement abrutis à l’astronaute Angela Ali (Tawny Newsome), première femme noire à avoir marché sur la Lune, mais qui ne supporte plus d’être présentée comme une héroïne après son retour sur Terre, en passant par le responsable de la communication de la Space Force, Tony Scarapiducci (Ben Schwartz), incapable de rester plus d’une minute sans consulter son smartphone. 

Moins d’effets spéciaux, plus de vie quotidienne et surtout une avalanche de gags font de cette seconde saison un objet télévisuel plus classique. Mais finalement, on y gagne au change car Steve Carrell et Greg Daniels excellent dans ce genre. Et visiblement une saison 3 est en préparation vu le suspense insoutenable des dernières secondes du dernier épisode.  

De choses et d’autres - L’essence de la campagne

En précisant que la nouvelle mesure du gouvernement pour alléger la facture énergétique des Français prendrait effet le vendredi 1er avril, certains ont pensé que Jean Castex se moquait de ses concitoyens en dévoilant le pire poisson d’avril 2022. C’est pourtant tout ce qu’il y a de plus sérieux, à partir de ce jour, tout client bénéficiera d’une ristourne de 15 centimes par litre acheté.

Pourquoi 15 ? Pourquoi le 1er avril ? Il est parfois des questions qu’il ne faut pas poser. Car au train où va l’inflation de l’essence, ces 15 centimes seront soustraits à un carburant qui dépassera les 3 euros. Autre problème qui se profile, durant cette semaine qui débute le lundi 28 mars, plus personne ne va faire le plein, attendant le vendredi et provoquer sans doute des files d’attente monumentales.

Sans compter les aigris qui vont souligner que ce cadeau électoral d’un président-candidat, n’intervient que 10 jours avant le premier tour. Est-ce suffisant pour obtenir leur voix ?

Et si par un incroyable concours de circonstances, Emmanuel Macron n’était pas réélu, son successeur maintiendrait-il la mesure où ferait mieux ? Car pour ce qui est des promesses sur le prix de l’essence, la surenchère est aisée. Zemmour promet de bloquer le prix du litre à 1,80 €. Sans doute avec du pétrole russe acheté à vil prix. Mélenchon promet encore plus d’économies avec le litre bloqué à 1,40 €. Là, ce sont des millions de barils de pétrole vénézuélien qu’il faudra importer en France.

Et puisqu’on parle provenance de la matière première, j’attends que des distributeurs précisent l’origine des carburants vendus à la pompe. Faire le plein c’est bien, mais faire le plein avec de l’essence garantie sans pétrole russe ni la moindre goutte de sang ukrainien, c’est quand même mieux.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le lundi 13 mars 2022

mercredi 2 mars 2022

DVD - Drive my car, théâtre des émotions

Drive my car, film de Ryusuke Hamaguchi fait figure de favori dans la course à l’oscar du meilleur film étranger. Mais ce chef-d’œuvre en langue japonaise qui vient de sortir en DVD et blu-ray chez Diaphana Vidéo, réussit l’exploit de briguer trois autres statuettes : meilleur réalisateur, meilleur scénario adapté et surtout meilleur film tout court, en compétition avec Licorice Pizza, Dune ou The Power of the dog. Mais on ne peut que vous conseiller, avant le verdict du 27 mars, de « rattraper » ce film dans sa version vidéo. Tiré d’une nouvelle de Haruki Murakami, cette histoire de deuil tourne autour du théâtre. 

Voiture rouge

Yûsuke Kafuku (Hidetoshi Nishijima) est metteur en scène. Il travaille sur la pièce Oncle Vania de Tchekov. Sa femme, scénariste pour la télévision, trouve ses idées en faisant l’amour. Les 20 premières minutes du film (qui dure au total 2 h 45), montrent ce quotidien très millimétré du couple, marqué par de nombreux trajets dans la voiture d’un rouge rutilant de Yûsuke. La première bascule intervient quand il apprend que son épouse le trompe avec le jeune acteur d’une de ses séries. Peu de temps plus tard, il la retrouve morte dans l’appartement, victime d’une hémorragie méningée. Deux ans plus tard, Kafuku se rend à Hiroshima pour mener un atelier international toujours sur Oncle Vania. Il a une chauffeuse pour lui faire les trajets entre le théâtre et sa résidence provisoire. Misaki Watari (Toko Miura), jeune provinciale est une taiseuse. Au fil des trajets, ils vont se découvrir et comprendre qu’ils ont un point commun : un deuil récent. La femme de Yûsuke d’un côté, la mère de Misaki de l’autre. Et chacun se sent responsable de cette mort. 

Théâtre universel

Le film devient grandiose au fur et à mesure du rapprochement de ces deux écorchés, continuant à vivre, travailler et à avancer, mais sans la moindre envie. Et pour donner encore plus de corps à ce propos fort, le réalisateur filme longuement les répétitions de la pièce, décortiquant avec minutie la technique de travail d’un metteur en scène exigeant et original. C’est ce parallèle entre la plongée dans le monde intérieur des protagonistes et l’universalité d’une œuvre culturelle qui a traversé les siècles et les continents qui donne sa formidable maestria à ce film envoûtant. Du très grand cinéma. L’académie des Oscars ne s’est pas trompée.


De choses et d’autres - Un (très) léger retard

Certaines informations semblent parfois tomber comme un cheveu sur la soupe. Lundi le masque ne sera plus obligatoire dans les lieux clos soumis au passe vaccinal. De plus, selon Gabriel Attal, la prochaine étape courant mars sera la levée dudit passe tant décrié par les « adorateurs de la liberté individuelle ». Bref, sur le front du Covid, tout va mieux.

On n’est pas sorti de la crise, mais on a l’impression de pouvoir reprendre une vie normale. C’est pile à ce moment tant attendu depuis des mois et des mois par les Français épuisés après couvre-feu, attestation de déplacement, confinement et triple vaccination que le laboratoire français Sanofi annonce la mise au point de son vaccin anti-covid.

Dans un proche avenir, l’expression « arriver après la bataille » sera remplacée par « utiliser le vaccin Sanofi ».

J’espère que le gouvernement ne s’est pas engagé à acheter des millions de doses de ce nouvel anti-virus car au rythme où est tombée la vaccination ces dernières semaines, il faudra des années pour écouler tous les flacons. On est comme ça en France : quand la situation est grave, on prend son temps pour réagir. Et même quand on arrive longtemps après la plupart, on continue à claironner qu’on est une grande puissance.

Par chance, cette annonce du vaccin de Sanofi est passée relativement inaperçue dans le flot d’informations de la journée de mercredi. Pas à cause de la crise ukrainienne. Non, un certain Douglas (qui en réalité se nomme Clovis) a agité la sphère des commentateurs politiques. Douglas, le premier des chiens à voter lors de la primaire des Républicains.

Non mais sans blague, cette campagne n’est plus « Impossible n’est pas français », mais plutôt « le pire est toujours français ».

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le 24 février 2022

mardi 1 mars 2022

Série animée - The Boys Diabolical


Amazon Prime Vidéo prolonge le succès de sa production originale, « The Boys ». La série de super-héros pas du tout politiquement correcte bénéficie d’une déclinaison en version animée interdite aux moins de 18 ans. « The Boys Diabolical » vient de débarquer sur la plateforme de streaming et les amateurs de second degré, de gore et d’excès en tout genre seront comblés. Ces épisodes de 14 minutes sont indépendants les uns des autres. Ils utilisent les ressorts du monde imaginé par Eric Kripke. Les Supes sont au centre des intrigues. 

Le premier épisode, quasiment muet, comme un toon de la grande époque, raconte comment un chercheur de chez Vought, tente de sauver un bébé dont les pouvoirs ne sont pas convaincants. Un adorable bébé qui devient redoutable quand il éternue : ses yeux se transforment en laser et détruisent tout ce qu’il regarde. Un exemple parmi les 8 épisodes qui semblent aller crescendo dans l’hémoglobine

De choses et d’autres - Menu unique : poutine

Poutine par-ci, Poutine par-là : l’actualité internationale manque de diversité. Le maître du Kremlin impose son tempo et dicte son menu à tous les autres grands du monde. Il n’y a qu’au Canada que le Vladimir est considéré avec amusement. Car là-bas, le mot Poutine, loin de signifier une menace de 3e guerre mondiale est associé au plat national. La poutine canadienne est par excellence le plat qui réchaufferait un mort par - 40 degrés.

Des frites chaudes, garnies de morceaux de fromage (généralement de la mozzarella) et recouvertes d’une sauce brune à base d’échalotes, de sucre, de maïzena et de bouillon de volaille. Environ un million de calories aux 100 grammes. Il est sûr que si Poutine mange une bonne part de poutine, après le repas du midi, il n’aura pas envie d’aller guerroyer aux frontières de l’Ukraine mais plus certainement de s’allonger dans un canapé et de lentement digérer cette arme de destruction massive fabriquée outre-Atlantique.

On pourrait d’ailleurs imaginer une tactique culinaire des alliés occidentaux pour mettre l’ours russe hors d’état de nuire. Le chancelier allemand arrive avec une choucroute, le président Macron avec un cassoulet, Joe Biden avec une dinde de Thanksgiving (minimum 5 kg, avec la confiture aux airelles qui colle aux dents) et Boris Johnson avec n’importe quoi de mitonné dans un foyer anglais.

Si après ça Justin Trudeau propose une poutine à Poutine pour clore les négociations, on assistera à une débandade intestinale du nouveau Tsar.

Chronique parue en dernière page de l’Indépendant le 23 février 2022

lundi 28 février 2022

Romans - Spectres d’Islande et de Chine

La peur, irrationnelle, n’a pas de frontière. Lire pour frémir est une expérience partagée par les lecteurs de toutes les origines. Exemple avec ces deux romans qui viennent d’Islande et de Chine. 

Arnaldur Indridason abandonne le héros qui l’a révélé au monde entier (Erlendur), pour désormais se consacrer à un autre flic, encore plus compliqué : Konrad. Dans Le mur des silences, il poursuit son enquête sur le meurtre de son père des dizaines d’années auparavant mais est surtout obnubilé par la découverte dans le mur d’une maison du corps d’une femme assassinée. Cette maison est au centre du roman. Les propriétaires et locataires s’y succèdent depuis des années et tout le temps, les femmes se sentent mal à l’aise. Exemple avec le récit de cette jeune propriétaire fait à une amie de Konrad, une médium qui croit aux esprits : « Je n’entends aucune voix et je n’ai pas non plus de visions. Je me sens oppressée, c’est tout. J’ai l’impression que des choses affreuses se sont passées entre ces murs. C’est un sentiment qui me submerge. Une profonde anxiété. » Que s’est-il passé dans cette maison ? Des fantômes prolongent-ils le cauchemar de pauvres victimes ? Ce polar avec de faux airs de fantastique est d’une redoutable efficacité. Arnaldur Indridason prouve roman après roman qu’il est le meilleur dans le genre noir nordique.

Des spectres et de l’angoisse, il y en a également à revendre dans ce thriller de Cai Jun, écrivain chinois. Comme hier, titre du roman, est également le nom d’une sorte de jeu vidéo. Une interface qui permet de plonger dans ses souvenirs et de revivre grâce à la réalité virtuelle les moments forts de son existence. 

Cheveux rouges  et chien noir

C’est un professeur d’informatique qui a mis au point ce code. Il est retrouvé assassiné dans son appartement le 13 août 2017 par le policier Ye Xiao. Aussi désabusé que Konrad, il semble dépassé par les événements. Car il y a pile 5 ans, il était chargé de l’enquête sur le meurtre d’une collégienne dans la même rue. Deux affaires reliées entre elles par la présence de Sheng Xia, la véritable héroïne du roman. Cette lycéenne aux cheveux rouges, fan de boxe thaï, hacker toujours accompagnée d’un grand chien noir, était la meilleure amie de la collégienne assassinée et élève appréciée du professeur assassiné. Sheng Xia que tout le monde surnomme la Démone : « Selon la légende qui courrait dans le lycée, tous les ans, en été, à trois heures du matin dans la rue Nanming, si on apercevait une mystérieuse jeune fille tenant en laisse un gros chien noir, c’était le fantôme de la Démone. » Elle va utiliser Comme hier pour tenter de remonter le temps, découvrir la vérité dans ces réalités parallèles. Entre pur fantastique et anticipation technologique, cette histoire dépayse le lecteur français mais parvient aussi à lui glacer les sangs. 

« Le mur des silences » d’Arnaldur Indridason, Métailié, 22 €

« Comme hier » de Cai Jun, XO, 21,90 €

Cinéma - « Super-héros malgré lui », exploits comiques

Gags et quiproquos à gogo dans ce film hommage au cinéma de genre.

Les quatre Fantastiques du cinéma comique français : Elodie Fontan, Philippe Lacheau, Tarek Boudali et Julien Arruti. Julien Panié

En quelques années, Philippe Lacheau est devenu une valeur sûre de la comédie française. Il a entraîné dans son sillage Tarek Boudali, complice d’écriture et de délires. Assurés d’attirer des centaines de milliers de spectateurs dans les salles (quand ce ne sont pas des millions), ils se permettent de plus en plus de trucages, scènes d’action et cascades. Dans Super-héros malgré lui, Philippe Lacheau franchit un cran dans la démesure en parodiant un film de super-héros. Ils ne s’attaquent pas directement au phénomène mais à sa représentation si populaire dans la jeunesse actuelle. Cédric (Philippe Lacheau), petit comédien n’arrivant pas à percer, a l’opportunité d’interpréter le rôle-titre de la superproduction « Badman ». En réalité, c’est un assez mauvais film de série B, avec surtout la participation d’un vieil acteur sur le retour pour interpréter le méchant. Mais qu’importe, Cédric en profite au maximum. Jusqu’à ce moment où victime d’un accident, il perd la mémoire et se découvre affublé de la combinaison de Badman. Il se persuade, dès lors, d’être véritablement un justicier de la nuit. Un enchaînement de gags et de quiproquos qui vont le propulser à la Une des journaux. Ses meilleurs amis (Elodie Fontan, Tarek Boudali et Julien Arruti) vont tenter de lui faire retrouver sa véritable personnalité. Mais difficile de persuader un super-héros qu’il n’est en réalité qu’un petit acteur surtout connu pour des publicités honteuses…

Le film rythmé et toujours aussi bien dialogué, donne l’occasion à la petite bande de multiplier les gags visuels. Un côté burlesque encore plus marqué que d’ordinaire. La partie romance est très légère ; par contre, les ficelles sont un peu grosses en ce qui concerne la reconnaissance du père. Cédric est le fils du commissaire Dugimont (Jean-Hugues Anglade), un grand flic qui n’a pas supporté que son garçon devienne saltimbanque, contrairement à sa sœur, devenue une militaire d’élite. Tout change quand il devient Badman…

Venu présenter le film dans la région, l’an dernier, en compagnie de Julien Arruti, le réalisateur a expliqué au public présent en masse son plaisir à interpréter un super-héros. Mais entre arrêter les vilains et faire rire le public, le choix est vite fait pour Philippe Lacheau. Ça tombe bien, il est quand même plus crédible dans le second rôle.

Film français de et avec Philippe Lacheau, avec aussi Julien Arruti, Tarek Boudali, Elodie Fontan.




dimanche 27 février 2022

Revue littéraire - Comment lisez-vous ?


Le dernier numéro de la revue littéraire « La règle du jeu » porte sur la lecture. Des dizaines d’écrivains, intellectuels et politiques ont répondu à la question « Comment lisez-vous ». Une sorte de radiographie de la lecture des élites qui donne quelques indications quand on leur demande quel est le classique dans lequel ils n’ont jamais réussi à apprécier. 

Deux titres arrivent nettement en tête : Don Quichotte et le Ulysse de Joyce. Plusieurs candidats à la présidentielle sont sollicités, d’Emmanuel Macron à Valérie Pécresse. A noter qu’Anne Hidalgo apprécie beaucoup les poèmes d’Antonio Machado

La dernière question concerne les mauvais livres et le plaisir coupable, parfois de les apprécier. Réponse pleine de bon sens de David Foenkinos : « Certains des miens quand j’ai dû les relire. Pour la tendresse d’un certain passé. »

 


Cinéma - Dans le film « Selon la police », le drame est permanent


Présenté en janvier dernier au festival du film politique de Carcassonne, Selon la police de Frédéric Videau est une accumulation de tranches de vie dans un commissariat au bord de l’implosion. Pourtant des travaux viennent d’être effectués dans les toilettes, resplendissantes. Et des plantes vertes ornent les couloirs. Mais c’est juste car le ministre de l’Intérieur est de passage.


Une fois parti, Ping-Pong (Patrick d’Assumçao), brûle sa carte de police dans le lavabo. Il n’aime plus son métier, lui qui a débuté comme flic de proximité, chargé de parler avec les jeunes des quartiers. Maintenant le ministère exige des résultats. En clair des chiffres pour gonfler les statistiques des affaires résolues.

Pyramide Ce film, parfois aussi authentique qu’un documentaire, raconte aussi le quotidien d’une policière stagiaire. En plus des réflexions machistes, elle doit subir les insultes racistes car issues d’une famille maghrébine. On suit aussi le groupe dirigé par Tristan (Simon Abkarian), formé de filles et de garçons animés souvent d’envies contradictoires.

L’histoire la plus forte reste celle de ces deux frères (Alban Lenoir et Émile Berling), fils de flic. Le premier a la foi en son métier, le second au contraire est au bout du rouleau. Émotion garantie. Tout comme la fin du film où plusieurs personnages de retrouvent pour un sacrifice poignant.