vendredi 25 mars 2016

BD : Notables dépravés dans le "Club des prédateurs"

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Londres à la fin du XIXe siècle. La révolution industrielle permet à de riches propriétaires de faire encore plus fructifier leur fortune. Les usines marchent à plein, la main-d'œuvre facile à trouver dans les bas-fonds de la capitale. Quand on a faim, un simple verre de lait attire les enfants. Même si dans la foulée ils doivent travailler dix heures dans la foulée. Jack, un gamin des rues, refuse cette situation. Il préfère voler, déguisé en petit ramoneur. Il croise la route de Liz, fille d'un notable membre d'un club sélect. Leur amitié va être mise à rude épreuve quand ils rencontrent le Bogeyman, un croquemitaine à la réputation sulfureuse. Il enlèverait les enfants... L'album écrit par Valérie Mangin et dessiné par Steven Dupré débute comme une critique sociale de l'Angleterre victorienne. Mais l'intrigue bascule dans le grand-guignol, avec une dernière case à la limite du soutenable.
"Le club des prédateurs" (tome 1), Casterman, 13,95 euros

DE CHOSES ET D'AUTRES : De l'image du Belge

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Une nouvelle adaptation de la légende de Tarzan en 3D sort au cinéma le 6 juillet. Une super production de la Warner avec Alexander Skarsgård dans le rôle-titre.
Rien de bien exceptionnel si ce n'est cette petite phrase dans le résumé du film dont la bande-annonce spectaculaire a été dévoilée hier : "Tarzan est convié au Congo en tant qu'émissaire du Commerce. Mais il est loin de se douter du piège qui l'attend. Car le redoutable Belge Léon Rom est bien décidé à l'utiliser pour assouvir sa soif de vengeance et sa cupidité... » Vous avez bien lu : le "redoutable Belge". Comme si les pauvres sujets du roi Philippe n'avaient pas assez souffert depuis le 22 mars, voilà qu'ils sont décrits comme de vils colonisateurs "assoiffés de vengeance et cupides" dans le film qui s'annonce comme le gros succès mondial de cet été.
Je m'insurge. Interdit de toucher aux Belges durant quelques mois. Les majors américaines devraient montrer un peu plus de respect au peuple qui a engendré des génies tels que Brel, Hergé, Magritte ou Jean-Claude Van Damme. Je suggère d'ailleurs au prince de "l'aware" d'aller dire deux mots aux scénaristes hollywoodiens spécialistes en clichés éculés. Il devrait trouver des arguments suffisamment percutants pour obtenir le changement de la nationalité du "méchant" dans la version finale.
D'ailleurs, Léon Rom est interprété par Christoph Waltz (alias Spectre dans le dernier James Bond). Et Waltz, jusqu'à preuve du contraire, n'est pas Belge mais Autrichien. Alors pourquoi pas le "redoutable Autrichien assoiffé de vengeance" ?
En bonus, la fameuse bande annonce. 

jeudi 24 mars 2016

DVD : Le club des curés ripoux


Au Chili, dans une vaste maison face à l'océan dans une petite ville de province, la vie s'écoule sereinement entre prières et entraînement d'un lévrier de compétition. Quatre anciens curés et une sœur vivent retirés, cloîtrés, oubliés de tous. Dans ce lieu secret, la hiérarchie catholique cache des prélats recherchés par la police pour pédophilie et autres crimes répréhensibles.

L'arrivée d'un nouveau prêtre va menacer l'édifice. Il a été suivi par une de ses victimes. Il vient l'apostropher sous ses fenêtres. La honte et le remords sont trop forts, il se suicide dans le jardin. Ce n'est pas l'enquête policière qui menace ce "club" d'un genre particulier mais un jésuite chargé d'évaluer le fonctionnement de la maison. Avec la mission de la fermer et de remettre les fautifs à la justice. Signé Pablo Larrain, ce film est d'une rare actualité. Comme en France récemment, l'Église est suspectée de "protéger" ces religieux aux vies dépravées et qui font tant de mal dans leur entourage. La réalisation, sobre et sombre, donne un sentiment d'oppression extrême. Un film coup-de-poing qui, tout en dénonçant, donne un point de vue original sur ce scandale. En bonus, un long entretien du réalisateur chilien, le meilleur et le plus politique de ces dernières années.
"El Club", Wild Side Vidéo, 19,99 euros.

BD : S'évader des profondeurs avec Bec et Rafaele

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Conclusion de la série "Deepwater prison" écrite par Christophe Bec et dessinée par Stefano Rafaele. Dans un futur proche, pour résorber l'augmentation de la population carcérale, les autorités construisent des prisons au fond de l'océan. A 800 mètres de profondeur, impossible de s'évader. Ce huis clos angoissant est digne des meilleurs films d'évasion. Un petit groupe de prisonniers fomente un audacieux plan pour se faire la belle. Leur ticket de sortie c'est une fonctionnaire du gouvernement qui vient enquêter sur les conditions de vie de cet état dans l'état. On trouve à la manœuvre un ancien marine, condamné pour désobéissance. Et pour donner un peu plus de corps à l'ensemble, l'histoire tourne autour des exactions d'une grande compagnie pétrolière. Politique et écologique, la série est particulièrement crédible. Les dessins hyper réalistes de Rafaele renforçant cette impression.
"Deepwater prison", (tome 3), Soleil, 15,50 euros

DE CHOSES ET D'AUTRES : Twitter et la génération Hashtag ont 10 ans

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Dix ans déjà. Dix ans que le premier tweet a été envoyé sur le réseau social devenu le symbole de l'immédiateté de l'information.
Pour ceux qui ne pratiquent pas Twitter et ne se considèrent pas de la "génération Hashtag", petite leçon de rappel.

Contrainte initiale, le message ne doit pas dépasser les 140 signes. Court, mais cela permet d'aller à l'essentiel. Premier atout : le réseau est ouvert. Tout le monde peut suivre tout le monde, sans avoir à en demander l'autorisation contrairement à Facebook. Second atout : on peut twitter de partout si l'on dispose d'un smartphone.
Pour se convaincre de l'utilité de Twitter, il suffit d'établir un bref récapitulatif des grands événements de ces dernières années. A chaque fois, c'est le tweet d'un témoin qui le premier a alerté la presse puis la planète. Parfois même sans le savoir quand un anonyme signale des hélicoptères militaires près de chez lui, sans se douter qu'il s'agit de marines US en train de mettre fin à la traque de Ben Laden.

De même, le 13 novembre, avant l'ouverture d'éditions spéciales sur les chaînes d'infos, des passants parisiens twittent pour signaler des coups de feu ou des mouvements de panique. Sans imaginer l'ampleur de la tragédie en cours. Twitter semble rétrécir les dimensions de la planète. Il y en a toujours un parmi les millions de "twittos" actif, à lancer l'info. Ensuite, l'effet boule de neige se met en branle.

Une modification essentielle de notre société de l'information, avec l'apparition d'un autre type de journalisme. En plus du travail de terrain, la veille tient une place essentielle.

mercredi 23 mars 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Attentats de Bruxelles, si loin, si impuissants

bruxelles, BD, attentatsLes attentats d'hier à Bruxelles me touchent directement. Plus que ceux de Paris pour cause de famille. Mon épouse est belge, de ce fait mes liens, déjà étroits avec le pays (passion pour la BD), n'en sont que renforcés. Nous apprenons qu'une explosion s'est produite dans l'aéroport de Zaventem, nos premières pensées vont vers Thierry, beau-frère et pilote de ligne.
Et lorsque sur Twitter le mot métro revient en boucle, nous imaginons tous nos amis et proches susceptibles d'appartenir aux dizaines de blessés. Réseaux sociaux et SMS permettent de nous rassurer au compte-goutes.
Comme nous l'écrit Vincent qui travaille à la Commission européenne, "tout le monde est safe". Il en est quitte pour rentrer chez lui à pied. Cynthia, en formation à Bruxelles, a pris le métro avant l'explosion. Elle a pu rassurer sa mère qui durant de longues minutes n'a pu s'empêcher de penser au pire.
Margaux, au travail depuis 6 heures du matin dans un supermarché, se prépare à de longues heures d'embouteillages. En réunion toute la matinée, Marie-Hélène n'a pas du tout suivi les événements. Elle nous répond vers midi après avoir contacté mari et enfants : "Tout va bien. C'est très stressant mais personne à Bruxelles".
Isabelle (la sœur de ma femme) est la dernière à donner des nouvelles : Thierry n'était pas à Zaventem ce matin, ses enfants pas dans le métro.
Paradoxalement, l'épicentre des explosions est plus éloigné de notre région, mais nous nous sentons encore plus proches, plus concernés, plus menacés. Nous sommes si loin et si impuissants.

Livres de poche : de la Jonquère aux bas-fonds écossais


L'histoire débute dans un de ces bars à filles de La Jonquère. Virginie y est Bégonia Mars. Une vie de passes et de coups. Alors elle décide de faire le grand saut. Une cavale en compagnie d'un inconnu sur les routes du sud de la France. Anne Bourrel, originaire de Carcassonne, fait partie des nouvelles voix du polar. Elle vient de publier 'L'invention de la neige' à La Manufacture du Livre.
"Gran Madam's", Pocket, 5, 30 euros.

Condamné à mort pour un crime pédophile dont il est innocent, Donovan demande de l'aide à Douglas Brodie. Cet ancien flic, issu de l'imagination de Gordon Ferris, reconverti dans le journalisme, va enquêter dans les paysages sauvages d'Ecosse. Ce sera très violent... La seconde enquête de Brodie, "Les justiciers de Glasgow", vient de paraître au Seuil.
"La cabane des pendus", Points, 7,70 euros

La décapitation comme art suprême. Wolf et Silver, deux flics hors-normes, découvrent une jeune femme samouraï à côté de son "œuvre". Ce premier roman de Sébastien Raizer paru dans la Série Noire est à la frontière du polar et de la saga fantastique. Héros atypiques face à un montre de la pire espèce, "La Vipère", inquiétant et mystérieux. La suite, "Sagitarius", vient de sortir chez Gallimard.
"L'alignement des équinoxes", Folio, 8,70 euros


mardi 22 mars 2016

DE CHOSES ET D'AUTRES : Record mondial de connerie et de perte de temps

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Dans le genre de bêtise particulièrement gratinée et consternante, le nouveau record du monde battu cette semaine par cinq jeunes Autrichiens. Le défi consistait à regarder la télévision durant 96 heures d'affilée dans un centre commercial. Les fesses au fond d'un canapé, au vu de tous dans cette galerie commerçante, ils ont réalisé l'"exploit" de rester 96 heures devant un écran qui retransmettait les programmes d'une chaîne de télévision, partenaire bien évidemment. Quatre garçons et une fille de 19 à 24 ans (comme quoi les garçons obtiennent la palme de l'idiotie) ont explosé les 91 heures franchies par des Canadiens en décembre 2014. Un marathon sur canapé sponsorisé par un magasin spécialisé en meubles et... télévisions. Pour éviter de sombrer dans le sommeil, les jeunes disposaient d'un vélo d'appartement, de café et de boissons énergisantes. Sans oublier les cinq minutes par heure pour se rendre aux toilettes.
Le Guiness Book des records inscrira le nom de Johannes, Markus, Zivan, Nadine et Dominik dans sa prochaine édition. A leur place, j'aurais honte en racontant à mes petits-enfants l'exploit international qui m'a valu cette reconnaissance. D'autant que le record ne tiendra pas longtemps. Sans aucun doute, cinq nouveaux "champions" atteindront un jour les 100 heures.
Difficile cependant de l'imaginer en France. Les émissions de Michel Drucker assurent un sommeil de plomb au bout de 10 minutes. Et la lobotomie menace les concurrents face à Cyril Hanouna.

Roman : Noyade dans la pluie et le whisky

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Un publicitaire américain n'en peut plus de sa vie vaine. Une prise de conscience qui passe par la lecture de "1984" de George Orwell. Quand il décide de tout balancer et de prendre six mois de congés sans solde, il part sur l'île écossaise de Jura, dans la maison où l'écrivain anglais a écrit cette histoire de Big Brother. Loin de la civilisation, sans internet, ni chauffage, il vit en reclus, ne tenant qu'en buvant des litres de whisky, la spécialité locale.
Entre paranoïa, dépression et retour à la nature, il constate combien Orwell était éloigné du monde qu'il décrivait. Il doit d'abord lutter contre la météo. "Il ne se demandait plus s'il pleuvait ou non n la pluie était une constante, une donnée de départ. Ce n'était plus de la pluie, mais quelque chose d'immuable et permanent." Ensuite il tente d'amadouer les autochtones. Mais cette rédemption passera par bien des épreuves.
Andrew Ervin passionne le lecteur avec quelques moutons et un chef-d'œuvre de la littérature.
"L'incendie de la maison de George Orwell" d'Andrew Ervin, Editions Joelle Losfeld, 22 euros

lundi 21 mars 2016

Livre : Un faux Elvis chez les Belges

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Nadine Monfils agrandit sa galerie de monstres. Après Mémé Cornemuse, place à Elvis Cadillac Presque une parade de monstres. La distribution du nouveau roman de Nadine Monfils ne fait pas dans la dentelle en ce qui concerne les phénomènes de foire. Finalement, Elvis Cadillac, le personnage principal semble le plus « normal » dans cette histoire de sosie et d'héritage dans une grande famille belge.
Elvis ne ressemble pas spécialement au King, mais il l'admire tellement qu'il se confond avec lui. Voiture, habits, attitude : logiquement il devient sosie officiel belge du rocker décédé. Une fois le bonhomme présenté, place au délire made in Belgium. Abandonné par sa Môman, Elvis la voir débarquer chez lui et taper l'incruste. Une vieille folle, digne de Mémé Cornemuse, précédente création de cette romancière qui marche dans les pas de Frédéric Dard. Elvis va donner un récital privé dans une riche famille belge pour l'anniversaire de la doyenne. Elle s'accroche malgré l'envie de ses enfants et petits-enfants de la voir disparaître pour récupérer l'héritage.
Impossible de faire plus délirant que cette réunion de famille, avec meurtre à la clé, enlèvement de chat (prénommé Houellebecq...) et vol de bijoux. Elvis traverse ces événements avec indifférence. Pas très fini le héros : « S'il s'était donné corps et âmes à ce personnage de sosie, c'était d'abord par amour pour Elvis, bien sûr, mais aussi parce que se déguiser faisait partie de l'enfance, de l'insouciance; que quand on est môme, on croit au père Noël et lorsque quelqu'un meurt, on te raconte qu'il est parti en voyage. La mort, c'est rien que des grandes vacances d'où tu ne reviens jamais. » Un roman de Nadine Monfils c'est parfois cru, mais toujours un peu poétique.
"Elvis Cadillac, King from Charleroi", Fleuve éditions, 17,90 euros