mardi 18 octobre 2011

BD - Arche bis : une série SF de Mallié sort des limbes chez Vents d'Ouest

Parue initialement entre 2003 et 2005 aux éditions Soleil, la série de SF « L'Arche » a droit à une seconde jeunesse chez Delcourt. L'occasion de découvrir les débuts de Vincent Mallié (avec Félix au scénario), dessinateur ayant repris « La quête de l'oiseau du temps » avec Loisel. 

Depuis l'Arche, Mallié a affiné son dessin, il lui a donné plus de profondeur et de richesse, mais on devinait déjà la pâte d'un très grand. Les deux premiers tomes sont parus en septembre et le troisième (et dernier) sera dans les rayonnages le 2 novembre. Dans un futur proche, l'économie est dominée par la société Cadillac qui a mis au point un lecteur neuronal permettant de coupler des données informatiques à votre esprit. La série suit les péripéties de quatre personnages : Pad est un flic intègre persuadé que Cadillac est derrière tous les mauvais coups, Asia, son ancienne fiancée, devenue l'égérie de la marque, Alice, adolescente qui recherche son père, un employé de Cadillac disparu depuis longtemps et Emilio, prodige de l'informatique. 

C'est ce dernier qui donne tout son sel à la série. Un peu obsédé sexuel sur les bords, il imagine sans cesse des scénarios pour se faire mousser. Quitte à être parfois en dessous de la vérité...

« L'Arche » (tomes 1 et 2), Vents d'Ouest, 13,90 €

lundi 17 octobre 2011

BD - Boule et Bill passent « A l'abordage ! » sous la plume de Laurent Verron


Ils n'ont pas pris une ride. Boule et Bill, malgré la mort de leur créateur Roba, poursuivent leurs gentilles aventures en une planche sous la plume inspirée de Laurent Verron. La reprise de personnages existants n'est pas chose aisée (Cubitus est sans saveur et on craint le pire pour le prochain Astérix...), mais parfois, les choix commerciaux et artistiques s'accordent à la perfection. 

En désignant Laurent Verron, Roba a fait l'essentiel du travail. Et les amateurs de BD traditionnelle s'en réjouissent encore. Dans ce 33e recueil des aventures du petit garçon et son espiègle cocker, il est beaucoup question de pirates. Dans le jardin familial, avec deux sabres factices, une caisse en bois et quelques tissus usés, Boule transforme son petit monde en mer déchaînée peuplée d'infâmes brigands et requins affamés. La grande aventure avec deux bouts de ficelle, c'est un peu cette enfance rêvée qui donne tout son charme à cette série. On est loin des modes et des tendances. 

Ce sont des enfants comme tous les enfants qui ont compris que l'imagination permettait de vivre tout ce qui n'est pas à notre portée. Une bande dessinée dans la grande tradition de l'école franco-belge, de la belle ouvrage d'un auteur consciencieux.

« Boule et Bill » (tome 33), Dargaud, 10,45 € 

dimanche 16 octobre 2011

Poches - Deux titres à ne pas manquer, "Country Blues" de Bathany et les "Dessins refusés par le New Yorker"

Cela aurait pu s'appeler « Bienvenue chez les frenchy freaks ». "Country Blues", roman de Claude Bathany, est avant tout une galerie de personnages tous plus barrés les uns que les autres. Et tous de la même famille, vivant ensemble dans un grand corps de ferme entre pâturages, vaches laitières et clapiers à lapins. Premier à entrer en scène, Dany. C'est le playboy, celui qui tient le plus de son père qui fut en son temps un grand coureur de jupons. Dany qui a décidé de relancer l'exploitation agricole. Il passe donc ses journées à s'occuper de ses vaches laitières. Le soir, il va culbuter les bourgeoises qui savent toutes qu'elles ne seront pas déçues.

L'aîné, Jean-Bruno, est un ancien boxeur. Il continue à s'entraîner sur le ring placé au milieu de la grange. Lucas, le plus jeune, est limite mongolien. Il a complètement viré schizophrène après la mort de sa sœur jumelle. Il l'a remplacée par une marionnette, Olive. Enfin il y a Cécile. La seule fille de la maison. Grosse, lesbienne, passionnée par les armes à feu : elle semble en guerre contre tout le monde, notamment les tarés qui lui servent de famille. Pour compléter le tout, cerise sur le gâteau, il y a la mère. Atteinte d'Alzheimer, elle passe ses journées à chasser les mouches, regarder la télé sans le son et se faire sur elle. Ce roman policier hors normes, dérangeant, loin des sentiers battus ne vous décevra pas si vous êtes lassé par le politiquement correct. Même la fin imaginée par Claude Bathany aura ce goût amer, si caractéristique de la triste réalité. (Points Noir, 6,50 €)

Dessins refusés par le New Yorker

D'une façon générale, les cartoonistes américains sont les meilleurs. Ceux du New Yorker l'élite. Alors pourquoi publier les dessins refusés ? Tout simplement car ils sont les plus osés, les moins politiquement corrects, ceux qui vont le plus loin.

Matthew Diffee, l'éditeur prévient dans la préface : « Si vous êtes comme moi, la plupart de ces dessins méchants, obscènes et dégoûtants vous feront mourir de rire. » (Points, 9 €)


 






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samedi 15 octobre 2011

Thriller - Sursis pour un condamné dans "L'honneur d'Edward Finnigan » de Roslund et Hellstrom

Condamné américain pour enquête suédoise, tel est le menu de ce polar nordique dénonçant en filigrane l'inhumanité de la peine de mort.

Dans le concert de nouveaux talents venus des pays nordiques, Roslund et Hellstrom ont un parcours un peu dissonant. Leurs premiers best-sellers traduits en France (La Bête et Box 21) décrivaient une Suède assez déprimante. La faute aussi à leur héros, Ewert Grens, un commissaire de police vivant dans le passé, sans famille, dur pour ses hommes et ne supportant pas l'échec. Pourtant, Grens va faire embaucher dans son équipe une nouvelle coéquipière, plus positive, qui va même réussir à le faire danser.

Le prélude à « L'honneur d'Edward Finnigan » se déroule aux USA. « Autrefois », dans le couloir de la mort d'une prison américaine. John, condamné à mort alors qu'il n'avait que 17 ans pour le meurtre de sa petite amie, attend l'exécution de son voisin, Marv. Il sait que la prochaine fois ce sera lui qui prendra la direction du couloir. Marv il ne le connaît qu'en lui parlant à travers les barreaux. Quelques heures avant son exécution le surveillant-chef, Vernon Eriksen, autorise John à aller lui faire des adieux. Le même jour, John se retrouve face à l'homme qu'il hait le plus (et c'est réciproque), Edward Finnigan, le père de la jeune fille assassinée.

Aussi quand John s'imagine la mort de Marv, quelques heures plus tard, il se voit lui aussi griller sur la chaise électrique, imaginant ce qui arrive à son ami : « les globes oculaires avaient dû exploser. L'urine et les matières fécales devaient couler. Le sang devait jaillir de tous les orifices du corps. » C'est une des marque de fabrique des romans de Roslund et Hellstrom, ils n'épargnent rien à leurs lecteurs.

Du ferry à la cellule de garde à vue

La suite du roman se déroule « aujourd'hui » en Suède. Première scène dans un ferry faisant la liaison entre Abo et Stockholm. Dans la salle de bal, un groupe joue quelques chansons douces. Des couples se forment, des femmes dansent, des hommes ivres en profitent pour se frotter à elles. Le chanteur assiste à cette scène et son sang ne fait qu'un tour. Il s'appelle lui aussi John et craque car la femme ressemble trop à son épouse. Il s'arrête de chanter, interpelle le malotrus qui lui rit au nez. « Sans même s'en rendre compte, il fit un pas en arrière et balança son pied en avant avec une force que seul le temps peut emmagasiner. En plein dans cette bouche qui ricanait. » A l'arrivée du bateau, John parvient à prendre la fuite, mais il est arrêté quelques heures plus tard par les hommes de Grens.

Ce dernier semble avoir une dent contre lui. Le danseur est dans le coma. Le vieux flic ne veut pas que John s'en tire facilement. C'est un homme résigné qui est conduit au commissariat, mais il se transforme en fou furieux quand il est question de l'enfermer dans la « cellule de garde à vue » une « petite pièce contenant en tout et pour tout une couchette et une cuvette de WC. »

Les auteurs nous font partager l'enquête de Grens et ses découvertes. Le passeport canadien de John serait un faux. Et grâce à Interpol les enquêteurs suédois apprennent que sa photo correspondrait à un autre repris de justice. Mais ce dernier serait mort depuis une dizaine d'années. Une crise cardiaque. Dans sa cellule du couloir de la mort. Grens se retrouve donc avec un ressortissant américain, condamné à mort. Comment a-t-il refait sa vie en Suède, comment s'est-il évadé, que vont faire les autorités suédoises ? Ces interrogations vont transformer le roman en un brillant essai sur la peine de mort et ses excès, d'un camp comme de l'autre. Un thriller qui vous tourneboule par sa fin machiavélique et laisse Grens, le héros policier, encore plus dépressif que dans les premières pages.

« L'honneur d'Edward Finnigan » de Roslund et Hellstrom, Presses de la Cité, 21,50 € (« Box 21 », le précédent roman de Roslund et Hellstrom vient de paraître chez Pocket) 

vendredi 14 octobre 2011

BD - L'enfance de Dracula décortiquée par Freud : un album de Corbeyran et Fino


Il fallait y penser : si Dracula est si méchant, c'est qu'il a été victime d'un traumatisme dans son enfance. Cette évidence, c'est tout simplement Sigmund Freud qui la formule, dans son bureau à Vienne, en 1899, face à Bram Stoker et Van Helsing... L'idée de base de « Dracula, l'ordre des dragons » était trouvée par Corbeyran, le scénariste de cette série dessinée par Fino. Dracula est à Venise. 

Chaque nuit il assassine quelques amoureux venus roucouler sur les canaux. Van Helsing et ses amis vont tenter de le mettre hors d'état de nuire en remontant jusqu'à cette nuit où le jeune Vlad a été enfermé dans une grotte dans les bas-fonds du château du Sultan Murad II. L'horreur qu'il verra le transformera à jamais. 

Une variation intéressante qui ne pouvait que venir du scénariste des Stryges...

« Dracula » (tome 1), Soleil, 13,50 € 

jeudi 13 octobre 2011

BD - « La dernière vie » de Juan Gimenez au Lombard : des jeux de fou


Publiée à l'origine en 2002 en Espagne, « La dernière vie » de Juan Gimenez arrive en France en deux volumes de 72 pages chacun. C'est un un peu le procès des jeux vidéos et des excès qui vont souvent de pair qui est au centre de cette histoire entre fantastique et réalité virtuelle. Fito, un jeune lycéen, manque de mourir en découvrant un nouveau jeu prêté par sa voisine, Clara. 

De son côté, elle est allée trop loin et c'est dans le coma qu'elle est retrouvée le lendemain matin. Fito va aller aux plus profond du jeu pour tenter de faire revenir à la vie la pauvre Clara. Ces différents univers sont autant d'occasion pour Gimenez pour faire admirer sa virtuosité au dessin, des machines de guerre infernales aux architectures audacieuses en passant par les guerriers et autres monstres peuplant le jeu.

« La dernière vie » (tomes 1 et 2), Le Lombard, 15,95 € chaque volume 

mercredi 12 octobre 2011

BD - Cyril Pedrosa part à la découverte de ses racines portugaises


C'est l'album (le pavé plus exactement) de BD de la rentrée à ne pas rater. Cyril Pedrosa propose sur plus de 260 pages une longue introspection sur ses racines portugaises. Ce qui aurait facilement pu tomber dans le cliché, se révèle un roman graphique d'une sensibilité forte. Il a pris le temps de raconter l'histoire de sa famille, présentant dans deux longs préambules comment cette envie s'est imposée dans sa propre vie. Alors que rien ne va plus dans sa vie amoureuse, trois jours en tant qu'invité d'un petit festival de BD au Portugal va redonner des couleurs à Simon Muchat, le héros. 

Ensuite il retrouvera une partie de sa famille au mariage de sa cousine. L'occasion pour aller passer quelques jours, puis quelques semaines, dans le village où tout a commencé. 

Un scénario solidement charpenté et des dessins « sur le vif » en couleurs directes donnent une puissance à ce récit rarement atteint par une BD.

« Portugal », Dupuis, 35 € 

lundi 10 octobre 2011

BD - Mauvaise nuit pour des cambrioleurs malchanceux

Hermann, 73 ans, n'a plus la même souplesse de trait qu'avant, mais reste quand même un des meilleurs dessinateurs réalistes. Le plus typé, certainement. A côté de ses séries régulières (Jeremiah, Bois-Maury...) il a toujours aimé s'accorder des espaces de respiration, des « one-shot » souvent violents et sombres. Depuis quelques années, ces récits sont signés Yves H. , son fils. Avec « Une nuit de pleine lune », Hermann réussit l'exploit de rendre passionnant un scénario tenant en deux lignes : des cambrioleurs s'attaquent à un psychopathe à la retraite. Ce dernier les élimine tous en une nuit... 

Délaissant la couleur directe, le dessinateur belge a retrouvé toute la puissance du trait noir, au pinceau, pour planter cette ambiance de plus en plus pesante, menaçante, massacrante... Les scènes de nuit, dans la cave, sont les plus noires, dans tous les sens du terme. Pourtant l'horreur finale se déroulera au petit matin, en plein jour, alors qu'un gai soleil semble annoncer une riante journée. Perdu !

« Une nuit de pleine lune », Glénat, 13,50 € (Il existe une édition luxe en noir et blanc à 25 euros) 

BD - La fin (provisoire ?) d'Ythaq, série d'Arleston et Floch


Le succès d'une série dépend parfois de sa régularité. Un dessinateur trop lent dessert souvent ses héros car le lecteur, lassé d'attendre la suite, les oublie trop rapidement. En lançant « Les Naufragés d'Ythaq », Arleston a choisi le bon dessinateur. Adrien Floch, en plus d'être excellent (cela reste l'essentiel, ne l'oublions pas) est de plus rapide et efficace. Depuis juillet 2005, 9 albums sont parus et le 9e, « L'impossible vérité », semble mettre un point final à cette saga. 

Les trois naufragés, Narvath, le poète aux pouvoirs de plus en plus grands, Granite, la blonde mécanicienne amoureuse, impétueuse et... dévêtue et Callista, la grande bourgeoise toujours en train de râler, se retrouvent enfin. C'est la dernière bataille, celle au cours de laquelle Sarkun'hr, entité cosmique prisonnière au cœur de la planète d'Ythaq, va tenter de se libérer. 

La conclusion est éblouissante, donnant l'occasion à Floch de signer des doubles planches foisonnantes de détails. Floch qui, au passage, va jouer désormais les pompiers de service en « dépannant » Vatine légèrement en retard sur le tome 3 de Cixi. La régularité...

« Les naufragés d'Ythaq » (tome 9), Soleil, 13,95 € 

vendredi 7 octobre 2011

BD - Vikings contre aliens dans le double « Midgard » de Stephen Dupre


Stephen Dupré fait partie de ces trop rares dessinateurs maniant avec bonheur tous les genres. Il excelle dans le réalisme tout en sachant parfaitement y introduire du « nez rond » ou de la caricature pour alléger le récit. Il s'est fait connaître avec l'adaptation (très réussie) de la série télé Kaamelott et se lance cette fois en solo sur une ambitieuse série racontant la rencontre du peuple viking avec un représentant extraterrestre. 

Le premier tome peut se lire dans deux sens. D'un côté 110 pages présentent les héros vikings, de l'autre comment Oon s'évade d'un vaisseau prison. Si la partie vikings est tout ce qu'il y a de plus classique (pillage, vol et batailles sanglantes), l'autre est très originale. Les petits êtres bleus sont à la recherche d'air pur. 

Oon, jeune délinquant, semble avoir trouvé un filon dans des réserves secrètes. Mais elles sont bien gardées. Poursuivi par toute la police du vaisseau, il est obligé de voler une navette. Il se posera (pas sans dommages) près du village irlandais que les Vikings sont en train de piller. C'est là que la rencontre a lieu et que Midgard commence véritablement. Mais ce sera pour le prochain album...

« Midgard » (tome 1), Casterman, 15 €