dimanche 10 février 2008

BD - Acariens rieurs


Ce n'est pas parce qu'on est tout petit, voire microscopique que l'on n'a pas une vie sociale normale. Prenez les acariens par exemple. Invisibles à l'oeil nu, il ont pourtant une vie comme vous et moi. De Groot, le scénariste (Robin Dubois, Léonard) et Godi le dessinateur (l'élève Ducobu) relatent sous forme de gags et histoires complètes cette vie de l'infiniment petit. 

Surprise cela se passe essentiellement dans un bar et les deux héros, pour fuir leurs femmes envahissantes, engloutissent des quantités astronomiques « d'eau de vie de jus de furoncle ». Ils ont également des problèmes avec le fisc et détestent faire des courses dans les supermarchés. Ces acariens ne sont que les caricatures des humains sur lesquels ils prospèrent.

« Le bar des acariens », Glénat, 9,40 euros 

samedi 9 février 2008

Roman - La contagion de la douleur

Comment aider une amie qui vient de perdre un être cher ? Comment partager la douleur, se demande Brigitte Kernel dans ce roman.


Léa aime Louise. Léa et Louise sont deux journalistes parisiennes et se cachent. Car même dans les milieux les plus ouverts, les plus progressistes, leur histoire d'amour a du mal à passer. A moins qu'elles ne trouvent une certaine excitation à ces cachotteries. Travaillant dans le même service de cette radio nationale, elles n'ont parlé de leur amour secret qu'à la narratrice du roman, elle-même animatrice sur cette même antenne.

En plein mois d'août, l'année de l'éclipse, dans un appartement parisien, Léa et Louise dînent en compagnie d'Olivier et de sa compagne, l'animatrice qui va raconter toute l'histoire, tout le drame. Ils ne le savent pas, mais c'est le dernier repas qu'ils prendront tous les quatre ensemble. Louise, grand reporter, a l'occasion de partir dans un pays en guerre, pour un reportage au plus près des combats. C'est dangereux, mais elle désire ardemment aller sur place, témoigner. Léa, plus jeune, très amoureuse, se résigne.

Pendant l'éclipse

Pour oublier cette petite période de solitude, elle accepte d'aller admirer l'éclipse dans la maison de campagne normande d'Olivier. Totalement obnubilée par l'événement, elle décroche de l'actualité, voulant vivre pleinement ce phénomène, unique dans le siècle. Alors que le soleil commence à se voiler, la narratrice reçoit un coup de fil de son réalisateur. Louise a eu un problème en reportage. Quelques minutes plus tard les précisions arrivent : elle est tombée dans un guet-apens, avec deux autres collègues elle a été dévalisée et froidement assassinée d'une rafale de kalachnikov. Un jour historique, un jour damné.

Comment annoncer la nouvelle à Léa ? Est-ce à elle de le faire ? Comme souvent dans les circonstances exceptionnelles, l'esprit humain tente de trouver une solution qui après coup semble dérisoire. Elle va tenter de préserver Léa, lui laisser quelques heures de répit, pour qu'elle profite de l'éclipse, elle est si joyeuse, si enthousiaste. La narratrice voudrait tant que cela ne soit pas la triste réalité : « Comment faire rebasculer le temps en arrière ? Comment effacer ce mauvais film, revenir à la scène de lundi, empêcher Louise de partir dans ce pays ? J'avais froid, le ciel s'obscurcissait, lourd de nuages. »

Face à la douleur

Mais alors qu'elles sont chez un éleveur de chiens (Olivier vient d'offrir à sa compagne un cocker) Léa apprend la nouvelle, par hasard. La jeune femme accuse le choc quand elle a la certitude que la journaliste assassinée est bien l'amour de sa vie. « Le corps de Léa, secoué de tremblements et de hoquets, c'est encore aujourd'hui insoutenable à évoquer. Devant une telle douleur, on a honte d'être impuissant, simple humain, incapable de rien d'autre que de prendre par la main, dans les bras, de caresser les cheveux. Souffrir avec l'autre n'est pas mourir avec lui. Je croyais le contraire avant cet événement ».

Brigitte Kernel, connue par ailleurs pour ses émissions nocturnes ou estivales sur France Inter, signe un roman poignant, plein de tristesse et de fureur. Si la première partie est consacrée à la mort de Louise, la seconde se focalise sur Léa, survivante malgré la douleur. Avec en témoin, puis en actrice, la narratrice, beaucoup plus touchée par cette disparition qu'elle ne le croit au début.

« Fais-moi oublier », Brigitte Kernel, Flammarion, 18 € 

vendredi 8 février 2008

BD - La petite fille et la mort


Ce récit en noir et blanc de Benoît Springer traite,avec une grande pudeur et une délicatesse extrême, de la découverte par une fillette de la différence entre la vie et la mort. Luce, petite fille de six ans, est en vacances chez son papi, retraité encore très actif. Elle aide au jardin, au marché, dans les taches quotidiennes de ce vieillard encore alerte mais seul. 

Une solitude temporairement brisée par la venue de Luce durant ces quelques jours. Luce qui ouvre de grands yeux sur ce monde qu'elle découvre petit à petit. Un jour, au marché, elle voit passer une petite fille drapée dans un crêpe noir, accompagnée d’un homme nu. Un couple qu'elle revoit quand le voisin de son papi, un retraité veuf lui aussi, met fin à ses jours. Luce, avant de comprendre ce qu'est la mort, la croise, mystérieuse et silencieuse. 

Un album de 80 pages qui prend le temps de montrer les sentiments. Springer, par exemple, dessine toute la détresse de la solitude en deux planches ne représentant qu'un chat mangeant ses croquettes avec en toile de fond le son d'un jeu télévisé. Une histoire entre réalisme social cru et fantastique masqué. Un cocktail étonnant et séduisant.

« Les funérailles de Luce », Vents d'Ouest, 15 € 

jeudi 7 février 2008

BD - Polar du futur


Même si la couverture n'est pas des plus engageante, plongez dans le premier tome de cette nouvelle série de science-fiction et découvrez Scoffoni, un dessinateur presque débutant (c'est son premier album, mais il travaille depuis de nombreuses années dans le milieu de la publicité) au trait réaliste et aux cadrages dignes d'un vieux briscard assis sur 20 années d'expérience. Une véritable merveille graphique, avec son lot de décors très poussés et de gueules chez les seconds rôles. 

Sans oublier les véhicules futuristes mais totalement crédibles. Côté histoire, le scénario de Benoît Rivière met un peu de temps à démarrer. Heureusement le personnage principal, Milo Deckman, flic de base de Los Angeles permet de faire passer quelques longueurs. Il est le témoin, par hasard, du meurtre d'une jeune femme dans la rue. 

Au moment de l'identification qui s'effectue à l'aide de l'iris, il découvre une double identité. Femme d'un chercheur avec l'oeil gauche et d'un dentiste avec l'autre. Qui est-elle exactement ? Pourquoi a-t-elle été abattue en pleine rue ? L'enquête ne fait que commencer et Milo, sans le savoir, vient de mettre les pieds dans une affaire complexe qui risque de lui gâcher l'existence.

« Milo », Delcourt, 12,90 €  

mercredi 6 février 2008

BD - Cuba libre

En 1902, Cuba a failli devenir le 46e état. Les USA, qui occupaient l'immense île des Caraïbes depuis quelques années, après l'élection d'un président fantoche, étaient sur le point de lui faire signer le traité d'annexion. 

Mais c'était sans compter sur les membres de l'agence WEST (Weird enforcement special team), des mercenaires venus sur place pour aider les Américains mais qui par éthique vont changer d'employeur et se mobiliser pour le peuple cubain en révolte. Le premier tome avait un fort goût de fantastique. Vaudou et magie noire avaient occupé le devant de la scène. 

Dans cette seconde partie, toujours écrite par Xavier Dorison et Fabien Nury avec Christian Rossi au dessin et aux couleurs, c'est la politique qui prend sa revanche. Reste qu'avec Chapel et ses hommes, souvent, avant que la raison ne l'emporte, les armes doivent parler. Les scènes de bagarre ou de combat sont donc nombreuses et les coups de théâtre multiples. 

La série est devenue en quatre albums une référence dans le genre BD d'action et de distraction, avec en plus quelques explications historiques toujours enrichissantes.

« West », Dargaud, 13 € 

mardi 5 février 2008

BD - Le terrorisme met Paris à feu et à sang


Dans un futur très proche, Paris est transformée en ville assiégée avec la tenue du G9. Le groupe des 8 pays les plus riches de la planète accueille pour la première fois son 9e membre : la Chine. Les réunions se tiennent au Louvre et le centre de la capitale est transformé en camp retranché. A l'extérieur, des milliers d'altermondialistes manifestent contre ce sommet du capitalisme et du libéralisme triomphant. 

Le cadre planté, Bartoll, le scénariste, présente les héros de cette nouvelle série de politique fiction dessinée par Rovero (qui signe également ce mois-ci le second tome des aventures de Malone chez Casterman). Arno Toms, journaliste couvrant l'événement, cherche des renseignements sur les opposants. Il les trouve par l'intermédiaire d'une photographe freelance, bien introduite dans le milieu des Blacks Blocs, un des groupuscules les plus violents. 

Alors que la venue du pape met encore plus les forces de sécurité sous pression, les Blacks Blocs tentent de prendre en otage les dirigeants. Arno, entraîné malgré lui dans l'assaut, va devenir le « terroriste » le plus recherché du monde.

« Terroriste », Glénat, 9,40 € 

lundi 4 février 2008

Roman - Sensuelle Sicile

Ce roman de Bertrand Visage se déroule en Sicile et plonge le lecteur dans les passions exacerbées par les mentalités volcaniques locales.


Huit ans. Huit ans d'absence, d'oubli, de quasi mort. Arturo a quitté la Sicile depuis huit ans. Ce Français, venu dans l'île italienne pour réaliser un film documentaire, est tombé amoureux de Véronica, une fille de gangster. Ils ont vécu une belle histoire d'amour durant quelques mois, presque une année. Mais c'est le passé. Arturo a mis longtemps pour s'en souvenir. Un matin, il a été retrouvé inanimé sur une plage sicilienne, après un sévère passage à tabac. Un mois de convalescence et puis un mystérieux émissaire lui a remis un billet d'avion pour le Chili. 

Sans mémoire, un peu perdu, il a franchi l'Atlantique et s'est refait une vie sur une île isolée. Un solitaire qui a lentement retrouvé la mémoire. Les instants de bonheur avec Veronica, la fin du rêve. En pleine reconstruction, il ne peut s'empêcher de penser à Veronica et malgré le danger, le risque, décide de reprendre contact avec ce passé qui a failli lui coûter la vie. Huit ans après, Arturo est de retour en Sicile.

Retour au bercail

Bertrand Visage, le romancier de cet « Intérieur Sud » connaît parfaitement cette région. Il y a longtemps vécu et plusieurs de ses romans ont la grande île pour cadre. Il excelle donc quand il décrit longuement la population picaresque de l'immeuble où vit Veronica. Le même appartement qu'il y a huit ans. Après quelques jours passés à espionner, Arturo a la certitude que si Veronica vit toujours dans l'appartement, elle est actuellement absente. Et par un concours de circonstance, il récupère les clés et s'installe de nouveau dans ces murs où il connu amour fou et bonheur intense. Il retrouve tous les voisins, ses chers voisins qui lui font un accueil chaleureux, persuadés qu'il est vient de reconquérir le cœur de son ancienne femme. Arturo, comme dans un rêve éveillé, fait comme si c'était la vérité, savourant avec délice ces instants de presque béatitude.

Tombée du ciel

Longtemps concentré sur le personnage d'Arturo et de l'absente, le roman change totalement d'orientation un soir d'orage. Arturo, dans un appartement plongé dans l'obscurité pour cause de coupure de courant, découvre à la faveur d'un éclair, une forme sur le petit balcon de la cuisine. « Une forme humaine. Couchée en biais sur le ciment du balcon, tout près de lui. Une fille. » Que fait-elle là ? Comment y est-elle arrivée ? « Arturo traversa la cuisine, mit un genou au sol. Assez près pour deviner que la fille n'était pas menaçante. Elle était là plutôt à la façon d'un sac de sable ou d'un panier de chiffons. Elle était là comme une vague tâche claire, comme du lait renversé. » On apprendra quelques pages plus tard qu'elle s'appelle Eva, qu'elle a 25 ans et qu'elle est étudiante en français. Occasionnellement, elle se prostitue dans l'appartement du dernier étage de l'immeuble. Eva qui va se reconstruire elle aussi, cachée chez Arturo, lui donnant une occasion d'oublier Veronica. Le solitaire du Chili, de retour en Sicile se retrouve à devoir faire un choix entre deux femmes, « Veronica est un nuage de poivre, Eva est un morceau de sucre sculpté en femme. » La sensualité et le doute sont sans cesse en toile de fond de ce roman aux succulentes saveurs sudistes.

« Intérieur Sud », Bertrand Visage, Seuil, 16 € 

dimanche 3 février 2008

BD - Jeu spatial pour les Naufragés d'Ythaq


Arleston, en dehors du monde de Troy, a lancé nombre de séries ces dernières années. Plus ou moins réussies tant du côté du texte que du choix des dessinateurs. Mais s'il en est une une qui ressort du lot, c'est bien « Les naufragés d'Ythaq ». 

Un récit de science-fiction qui paraissait basique au vu des premiers albums mais qui se révèle beaucoup plus fin et recherché quand on referme ce cinquième tome. Un vaisseau spatial s'est écrasé sur la planète Ythaq. Parmi les rescapés, Granite, astro-navigatrice passionnée et allergique à la hiérarchie, Callista, jeune aristocrate sexy et Narvarth, technicien touche-à-tout, sorte de McGyver jamais à court d'idées. 

Trois personnages principaux que l'on retrouve dans le vaisseau échoué, pris d'assaut par les hordes de soldats de Khengis. La bataille est dantesque, donnant l'occasion à Adrien Floch, le dessinateur, de faire admirer son art du mouvement et des compositions de masse. La mort frappe à tour de bras et pourtant certains protagonistes semblent peu concernés, comme happés par un jeu à l'échelle de l'espace et de l'univers.

« Les naufragés d'Ythaq », Soleil, 12,90 € 

samedi 2 février 2008

BD - Humour absurde et décalé pour une question d'humanité

Dessinée par Casanave sur un scénario de Vandermeulen, la première enquête du commissaire Crémèr nous entraîne en croisade au large de Sumatra. Le policier belge accompagné de son adjoint Lucas (prénom Georges) et de sa chienne Jessica rencontrent dans le grand restaurant du paquebot un chercheur ferraillant verbalement avec un homme d'église sur l'origine de l'homme. Réfutant l'histoire d'Adam et Eve, le savant prétend que nous descendons du singe. 

Reste à trouver le maillon manquant qu'il pense avoir aperçu dans les parages il y a quelques années : le faustolopithèque. Chance, le bateau tombe en panne au large d'une petite île isolée. Les passagers sont invités à aller se dégourdir les jambes et le commissaire, en compagnie de Lucas, va devoir enquêter sur le meurtre du savant. Il arrête rapidement un suspect, un jeune autochtone à moitié nu, l'arme du crime à la main. Un coupable pour le commissaire, un simple singe pour les autorités locales. Il va enquêter pour déterminer si le meurtrier est un humain ou un animal. 

Des situations abracadabrantes mettant en vedette un humour absurde et décalé qui fait tout le sel de cette BD.

« Une enquête du commissaire Crémèr », Dargaud, 10,40 € 

vendredi 1 février 2008

BD - Un peu de morale... mais de la bleue !


La morale, souvent sous-jacente dans les albums des Schtroumpfs de Peyo, est omniprésente dans ce 26e album de leurs aventures. La première page montre le Grand Schtroumpf obligé de s'absenter quelques jours et craignant pour l'harmonie du village : « Ce voyage me tracasse ! Chaque fois que je m'absente, tout schtroumpfe de travers ! ». 

Et effectivement dès la deuxième page, le Schtroumpf à lunette, décidé à nettoyer l'atelier du Grand Schtroumpfs, découvre un livre dont toutes les pages sont blanches. Un livre magique qui parle. Il demande à qui l'approche de lui poser une question. Il a toujours la réponse. 

A toutes les questions, à toutes les situations. L'heureux découvreur va vite tenter de s'accaparer entièrement l'objet. Un bon moyen d'être bien vu par tous ses congénères. Lotion pour l'éclat des cheveux pour la Schtroumpfette, recette pour le cuisinier, potion permettant de devenir plus musclé pour le costaud : tous vont profiter des réponses du « Livre qui dit tout ». Mais rapidement cela va semer la zizanie. Une histoire encore plus moralisatrice que les précédentes, c'est peu dire...

« Les Schtroumpfs », Le Lombard, 9,25 €