vendredi 29 janvier 2010

BD - Gitans intergalactiques


Dans un futur très lointain, quand les voyages intergalactiques seront aussi communs que d'aller acheter son pain chez le boulanger, les Gitans n'ont pas changé. Ils ont le sang chaud et ont troqué leurs caravanes pour des vaisseaux aux soutes souvent pleines de marchandises issues de différents trafics. 

Des gitans qui comme aujourd'hui ont régulièrement des démêlés avec la justice. Dans les premières pages de cette nouvelle série de SF écrite par Lupano et dessinée par Cauuet, Toni Tzarom, le patriarche de cette famille, reçoit la visite de Gabriel Sauzé, avocat au barreau de Prétonia. Il a été commis d'office pour défendre les intérets de Lubna, la compagne de Toni. Elle est accusée d'avoir volé un alien. 

Toni nie en bloc. Mais il n'a pas trop le temps de s'étendre car sa fille, la belle et volcanique Rona, arrive sur les chapeaux de roues après avoir dérobé quelques futs de gaz toxique à des poulpes assez énervés. 

On ne s'ennuie pas une minute dans cette BD truffée de gags et d'aliens bizarres, sans oublier ces gitans intergalactiques, caricatures bien sympathiques d'une communauté trop souvent décriée.

« L'honneur des Tzaroms » (tome 1), Delcourt, 12,90 €

jeudi 28 janvier 2010

BD - Mère de substitution


Cette BD, à la croisée d'Alice au Pays des Merveilles et du David Copperfield de Dickens, est une œuvre très personnelle de deux auteurs, Bouton et Fortier, prenant le risque, pour leurs débuts, d'imposer un monde et un style très personnels. 

Au début du siècle dernier, dans une rue commerçante, deux jeunes orphelins, Janus et sa petite sœur Prune, viennent de chaparder des pommes. Ils vivent libres jusqu'au jour ou Janus, renversé par un cheval, perd la vue. La liberté aussi puisqu'ils sont placés dans un orphelinat. Mais une nuit, un mystérieux chat, Braise, les invite à visiter son pays « suprafantasmallégorique » et de rencontrer la reine qui se propose de devenir leur maman, à tous. 

Le petit groupe suit le félin, dans un cimetière puis effectivement dans une ville qui ressemble à une fête foraine. Si Janus est sous le charme, Prune est réticente. Elle sent que tout sonne faux. Et c'est elle qui découvre, la nuit venue, que le joli pays a des côtés plus sombres et dangereux. 

Un premier tome enchanteur, très prenant, aux dialogues poétiques et aux dessins ressemblant à des enluminures de contes de fées peuplées de monstres hideux.

« Braise » (tome 1), Dargaud, 10,95 € 

mercredi 27 janvier 2010

BD - Le vampire de Düsseldorf


La série « Assassins » écrite par Rodolphe et dessinée par Jeanne Puchol c'est un peu la version BD de « Faites entrer l'accusé », mais sans Christophe Hondelatte, heureusement. Le concept de la série surfe sur cette mode de l'utilisation à l'excès des grands faits divers. 

Après avoir retracé les exploits du docteur Petiot, les auteurs s'intéressent au Vampire de Düsseldorf qui a terrorisé une bonne partie de l'Allemagne à la fin des années 20. Le tueur, quadra gentil et attentionné avec les jeunes femmes, se révèle un abominable boucher quand il sait que ses proies ne pourront plus se défendre. Violées, éventrées, égorgées : ce sont dix femmes qui périront sous ses coups. 

Il avouera, après avoir été capturé suite à une dénonciation anonyme (les nazis commençaient à mettre leur emprise sur le pays) qu'il aimait entendre le bruit du sang qui coule... 

Un récit froid qui, tout en présentant le tueur, donne quelques clés pour comprendre cette Allemagne en pleine mutation. Le dessin de Jeanne Puchol a un petit air rétro qui s'accorde parfaitement avec l'époque.

« Assassins » (tome 2), Casterman, 10,40 € 

mardi 26 janvier 2010

Roman jeunesse - A l'école des vampires

Les vampires sont effectivement éternels. Après une petite période d'éclipse, ils sont de nouveau très présents dans l'édition...



Comment devient-on un vampire ? La tradition voulait que le vampire se reproduisait par succion. Un coup de dent mal placé et vous voilà transformé en être de la nuit. Une version officielle de plus en plus battue en brèche par divers auteurs qui tentent de réinventer le mythe.

Le vampire suceur de sang a fait son temps. Il devient beaucoup plus cool dans « La Maison de la nuit », série écrite par PC Cast et sa fille Kristin. Le vampire est en fait choisi, marqué, par des prêtresses qui butinent ainsi dans la jeunesse américaine. Zoey, adolescente basique d'une ville de province, mène sa petite existence morne entre une mère absente, un beau-père tyrannique, une grande sœur brillante et un petit frère capricieux. Le banal s'interrompt d'un coup d'un seul quand elle aperçoit un Traqueur se dirigeant vers elle. Un vampire d'un genre particulier. Il se plante devant Zoey et de son long doigt blanc trace la marque (un croissant de Lune repris en couverture) qui la désigne comme future vampire. Elle n'a alors qu'une nuit pour rejoindre La Maison de la nuit, le pensionnat chargé d'éduquer et de superviser la transformation des jeunes vampires.

En quelques heures, la jeune fille va perdre tous ses repaires. Elle ne pourra plus voir ses anciens amis, ni sa famille. De toute manière ces derniers la fuiront car les vampires n'ont pas bonne presse dans cette société imaginée par la famille Cast. Certes beaucoup sont des artistes renommés, mais ils font toujours peur et sont les bêtes noires de la religion dans le vent, le Peuple de la Foi. Zoey rejoint donc la Maison de la Nuit, après une nuit agitée au cours de laquelle elle sera visitée par Nyx, la déesse des vampires.

Aphrodite, l'affreuse

Dès son entrée dans le pensionnat, le roman prend un tour plus teenager. Zoey a beau être marquée, elle reste avant tout une adolescente obligée de s'affirmer dans une communauté fermée. On croisera rapidement les différents protagonistes de ce premier tome. Les bons, ceux qui deviendront ses amis et la défendront comme Lucie, sa colocataire, une blonde fermière fan de country, Damien, gay et intelligent, Erin, blonde et joviale. Du côté des méchants, la figure d'Aphrodite domine. Cette « petite blonde presque parfaite fait penser à Sarah Jessica Parker, en plus jeune. »

Une véritable peste qui va rapidement s'affronter à Zoey. Il est vrai que cette dernière a une particularité qui fait beaucoup jaser dans la Maison de la Nuit. Elle n'a été désignée que depuis un jour mais elle a déjà une Marque entièrement colorée. Un stade qui n'est normalement atteint qu'au bout de trois années d'études vampiriques.

Ce roman, dans l'air du temps, passionnera les jeunes filles romantiques et les jeunes adultes à l'imagination foisonnante. S'il n'échappe pas à quelques clichés véhiculés dans l'imaginaire américain, il a le mérite de décrire rationnellement la transformation de la jeune Zoey en vampire, vivant la nuit, aimant la liberté et qui ne peut s'empêcher d'être attirée par le sang frais. Car même très édulcoré, ce petit monde vampirique ne peut pas se perpétuer sans une pinte de ce liquide rouge et épais, à l'odeur lourde et prenante.

Le premier tome, en plus de poser le décor et les personnages principaux, est le début d'un cycle en trois épisodes. Le second, « Trahie » est annoncé pour juin prochain alors que la conclusion, « Choisie » paraîtra en novembre de cette même année.

« Marquée » (La Maison de la Nuit, tome 1), PC Cast et Kristin Cast, Pocket Jeunesse, 14,95 €

lundi 25 janvier 2010

BD - Famille moderne


Trop souvent l'image de la famille dans la création française est aseptisée, voire complètement irréaliste. Clémence, dans cette BD de 192 pages en noir et blanc qui se lit comme une succession de tranches de vie, a trouvé un accent de vérité, de sincérité, qui dénote avec la majorité de la production. 

Ce couple de quadra a inversé les rôles. La femme, écrivain, apporte sécurité financière à la cellule familiale alors que le mari se contente de mitonner de bons petits plats. Il est homme au foyer se chargeant de l'éducation des trois enfants : une grande fille, un peu coincée, timide et complexée, la seconde, plus jeune donc mais très dévergondée, profitant de tous les plaisirs de la vie, notamment de son pouvoir sur les jeunes mâles et le dernier, un garçon, boutonneux, rebelle et qui ne trouve la paix qu'en compagnie de son hamster, Sonia. Sans oublier la mère de l'épouse, grabataire dans un fauteuil roulant.

 C'est la vie de tous les jours que Clémence décrit, petits déjeuners joyeux, repas tristes et fêtes improvisées. C'est frais, simple et criant de vérité.

« Rillettes au sucre » (tome 1), Delcourt, 8,95 €

dimanche 24 janvier 2010

BD - L'appel de l'Ailleurs


Les Enfants d'ailleurs
sont de retour. Les trois premiers tomes formaient une histoire cohérente. Ce sera le premier cycle. Cette histoire fantastique d'une bande de copains découvrant un passage vers un autre monde va donc se poursuivre. 

Les événements ont eu raison de l'amitié des quatre jeunes héros. Maxime, marqué par la mort d'Ilvanna, préfère traîner avec des grands qui explorent les prémisses de la délinquance. Rébecca, atteinte d'une maladie grave, est en train de mourir à petit feu dans un hôpital. Seuls Noé et Théo continuent à se voir. Ils tentent même de refaire fonctionner la porte du père Gab. 

Tout repart quand Rébecca est poussée, par un mystérieux fantôme, à retourner vers le passage. Elle est persuadée que c'est dans l'autre monde qu'elle découvrira le remède à son mal. 

La magie de Nykko (scénario) et Bannister (dessin) est toujours aussi convaincante. A conseiller à tous les jeunes lecteurs dès 8 ans.

« Les enfants d'ailleurs » (tome 4), Dupuis, 9,95 €. L'intégrale du premier cycle vient également de paraître, 140 pages, 15,50 €

samedi 23 janvier 2010

BD - Yann Calec à la recherche du trésor du Tonkin


Troisième et dernier titre du cycle asiatique des aventures de Yann Calec, capitaine de la marine dans les années 50. Yann est en Indochine. Il a une mission : remettre une lettre à un jeune légionnaire. 

C'est son père qui veut renouer avec son fils devenu adulte. Mais le soldat Marchand a déserté. Yann va donc le rechercher et retrouver la trace... de son propre père. Dans cette colonie en pleine guerre, Yann Calec va apprendre à ses dépens que certaines vérités ne sont pas toujours bonnes à apprendre. Après trahisons et coups de théâtre, il sera au centre d'une chasse au trésor.

 Des kilos d'or qui sont passés de mains en mains alors que les Viets prenaient le contrôle du Nord du pays, dans la région de Cao Bang. 

Kraehn, le scénariste, a puisé dans l'histoire de cette région, pour échafauder une intrigue très plausible. Il a parsemé le récit de personnages secondaires tous plus affreux les uns que les autres. Il est vrai qu'à l'époque, la mort guettait derrière chaque virage. 

Jusseaume, au dessin, de plus en plus académique (pour ne pas dire parfait), donne corps et vie à cette jungle hostile.

« Tramp » (tome 9), Dargaud, 13,50 € 

jeudi 21 janvier 2010

Roman - Père et fils en galère

Nick Cave, rocker et musicien australien, dévoile une autre facette de son talent dans ce roman halluciné, triste et dramatique.


Bunny Munro est un chaud lapin. Bunny Munro a beaucoup de succès auprès des femmes. Ce représentant de commerce vendant des produits de beauté sillonne les routes d'Angleterre alignant les conquêtes féminines comme d'autres remplissent des grilles de mots fléchés. Mais Bunny Munro est marié. A Libby. Ils ont un petit garçon, Bunny Boy, âgé de 9 ans. Dans les premières pages de ce roman, Bunny est en bonne compagnie dans une chambre d'hôtel. Une superbe prostituée originaire des Caraïbes. Tout en s'occupant d'elle, il a Libby au téléphone. Sa femme, sous antidépresseurs, perd la raison. Pour la calmer, Bunny lui promet de vite rentrer à la maison. Mais la nuit sera longue, très longue.

 Le lendemain matin, en prenant son petit déjeuner dans son hôtel, Bunny ne regrette rien. Exactement il ne se souvient de rien car en plus d'être un tombeur, il boit comme un trou. En sirotant son café, il se regarde dans une glace et trouve « l'image qu'il a devant lui pas si déplaisante. Bunny n'est pas un génie, ni un visionnaire ni un sage, mais il voit tout de suite pourquoi les dames en pincent pour lui. Ce n'est pas le tombeur standard musclé à la mâchoire carrée, ni l'homme à femmes avec la ceinture de smoking, mais il dégage quelque chose, même avec la trombine fracassée par l'alcool, il exerce un charme magnétique qui passe par les plis d'humanité qui se forment aux coins de ses yeux quand il sourit, l'arcade sourcilière qui se fronce avec malice et ses joues qui se creusent de fossettes à vous faire péter l'hymen quand il rit. »

Fuir ses fantômes

Le problème c'est que Bunny vit ses derniers jours. C'est expliqué par l'auteur dès les premières pages et dans le titre. La mort qui fait une entrée fracassante dans sa vie quand il franchit enfin la porte de son appartement. Un appartement dévasté. Bunny Boy explique que c'est Libby qui a craqué. Quelle est enfermée dans sa chambre et qu'elle ne répond plus. Bunny pénètre dans la chambre et découvre « Libby Munro en nuisette orange, pendue à la grille de sécurité. » « Elle a le visage violet comme une aubergine ou un truc dans le genre et, un court instant, Bunny se dit en fermant les yeux de toutes ses forces pour chasser cette pensée, que ces nichons, c'est quelque chose. »

Après des obsèques croquignolesques, Bunny noie son chagrin au cours d'une soirée en compagnie de ses collègues. Cela vire à la beuverie puis à la partouze. Bunny est donc en-dessous de tout. Pourtant son fils l'aime. C'est vrai qu'il n'a plus que lui. Un Bunny Boy qui lui aussi semble un peu atteint quand il est persuadé que sa mère continue à lui parler.

Après une première partie très borderline, Nick Cave concentre son récit sur le père et son fils. Ils partent en voiture, prennent la route; roulent sans but. Comme pour mieux s'éloigner de ces fantômes un peu trop présents.

Roman trash, roman triste, « Mort de Bunny Munro » entraîne le lecteur sur les chemins cabossés du remord et des regrets, de la vie qui file trop vite, de l'essentiel masqué par le clinquant et le plaisir facile. Un long blues de 330 pages, comme une de ces chansons que chante Nick Cave avec sa voix grave de crooner très fatigué.

"Mort de Bunny Munro », Nick Cave, Flammarion, 20 €

mercredi 20 janvier 2010

BD - De mâle en pis


Raoul Cauvin a vendu suffisamment de millions d'albums dans sa carrière (Tuniques Bleues, Cédric, Pierre Tombal...) pour avoir le droit de se faire plaisir. 

Il avait ainsi imaginé une histoire improbable de taureau se sentant vache et donc incapable d'accomplir ce pour quoi on l'a acheté : se reproduire. Désiré, qui en plus avait le pouvoir de parler avoir été frappé par la foudre, avait finalement trouvé une astuce pour assurer une descendance à la vache du fermier. 

Toujours avec De Thuin au dessin, Cauvin a imaginé une suite tout aussi savoureuse dans les situations que les personnages. Revoilà Désiré, son problème de virilité et de fertilité. 

Une parabole sur les différences et la tolérance. Avec une fin presque mélodramatique comme jamais Cauvin n'avait osé en écrire.

« Coup de foudre » (tome 2), Dupuis, 9,95 €

mardi 19 janvier 2010

BD - L'ado pour les nuls


Pat a 13 ans, l'âge « où le monde entier est ligué contre vous ! » Anne Guillard a imaginé ce prototype de fille mal dans sa peau et dans son époque. 

Entre une grande sœur apprentie top-model et ne jurant que par la Star Ac', une petite sœur pourrie gâtée, une mère pro-bio et un père geek, elle a toutes les difficultés pour se repérer. Heureusement il y a des constantes, comme l'amour. Notamment celui qu'elle porte à Ludo, le beau gosse qu'elle a parfois la chance de croiser dans le bus. 

L'intérêt de ces gags, outre qu'il nous font découvrir le monde sans pitié des ados, est que finalement rien n'a changé de génération en génération...

« Ma vie d'ado », Vents d'Ouest, 9,40 € 

lundi 18 janvier 2010

BD - Duo frappé


Cela commence comme une gentille histoire entre deux auteurs invités à un festival à Lisbonne. Mathieu Sapin et Frantico, en échange de leur participation, acceptent d'animer un blog sur le festival. Mais en croisant la route de Petrov, leur vie va changer. 

Ce dernier, énigmatique Ukrainien, leur explique qu'il pratique le méga-krav-maga, art martial ultime imaginé par les services secrets israéliens. Les deux compères décident de raconter cette rencontre. 

Mal leur en prend car le MKM devant rester secret, ils sont pourchassés par les adeptes de ce dernier. 

De Lisbonne à Madrid en passant par l'Inde, un feuilleton délirant de 192 pages qui s'achèvera le mois prochain dans le tome 2.

« Méga-Krav-Maga » (tome 1), Delcourt, 8,95 € 

jeudi 14 janvier 2010

BD - Guy Lefranc à la mine


Guy Lefranc, héros journaliste détective créé par Jacques Martin, s'offre une aventure sociale. « Noël noir », le 20e titre de la série, signé Michel Jacquemart (scénario) et Régric (dessin) revient sur les tragédies minières des années 50. 

Le blond reporter se pose de sérieuses questions sur son métier (déjà les dérives vers le people et les frasques des stars) quand les téléscripteurs crépitent : une explosion au fond d'une galerie de la mine de Soumont-en-Gohelle fait de nombreuses victimes. 

Et plusieurs mineurs sont bloqués au fond du trou. Lefranc va suivre les opérations de sauvetage et réussir à partir avec les secours à plusieurs centaines de mètres de profondeur. A cette intrigue va se rajouter une histoire de sabotage, de guerre froide, d'amour et de trahison. 

Un scénario très sombre, les personnages secondaires étant tous des écorchés n'ayant pas la conscience tranquille. Cette noirceur dénote un peu dans la série qui pour une fois met l'humain au premier plan. Lefranc, lui non plus, n'en sortira pas indemne.

« Lefranc » (tome 20), Casterman, 10 € 

mercredi 13 janvier 2010

BD - Bonnet rouge en délire


Étonnant parfois où l'imagination et les hobbies des dessinateurs les conduisent. Prenez Isa par exemple. Cette dessinatrice, maniant la dérision et les nez ronds à merveille, est par ailleurs passionnée de plongée sous-marine. Il faut certainement y trouver l'origine de cette série d'histoires courtes mettant en scène le fantôme du commandant Cousteau. 

Un concept saugrenu qui pourtant devient au fil des pages une formidable mine de gags et de situations cocasses. Donc, au fond de la Méditerranée, un jour, Bernadette, mérou de son état, vit une apparition : le fantôme du commandant Cousteau. 

Le cinéaste, défenseur de la nature avant son heure, toujours coiffé de son remarquable bonnet rouge, revient dans ce monde de plus en plus pollué. Il devra se coltiner les Yann Arthus Bertrand et autres Nicolas Hulot qui ont repris son fond de commerce. 

Un commandant qui devra également s'expliquer sur son passé et certains errements. Notamment quand il a malencontreusement introduit en Méditerranée la cualerpa taxifolia surnommée plus communément depuis : l'algue tueuse.

« Le fantôme du commandant Cousteau », Fluide Glacial, 9,95 € 

mardi 12 janvier 2010

BD - Golden City : touchée coulée...


Le 8e tome de la série Golden City s'ouvre avec une découverte qui fera mal au cœur de tous les fans de la série : la cité vient d'être retrouvée par 3000 mètres de fond. Touchée, coulée... Le reste de l'album, par d'astucieux retours en arrière, nous apprendra comment l'impensable a pu avoir lieu. 

Pecqueur, le scénariste, a donc décidé de prendre des risques avec son jouet, imaginé il y a une dizaine d'années avec Malfin, le dessinateur. Mais si la ville flottante du futur, abritant les plus riches de ce monde est détruite, il n'en est pas de même pour les nombreux personnages de cette saga aux multiples ramifications. Ainsi si une partie de l'action se déroule sur Golden City, l'autre nous explique comment Amber, aidée de Mifa, va libérer deux jeunes enfants tombés entre les griffes de trafiquants d'organes. 

De l'action, des trouvailles futuristes, des méchants qui le sont vraiment, de jolies filles qui ont du cran... Le cocktail utilise des ingrédients classiques mais l'ensemble tient la route et se révèle toujours aussi passionnant.

« Golden City » (tome 8), Delcourt, 12,90 €

samedi 9 janvier 2010

Humour - Un chat pas si crétin...


Parfois, l'inspiration vous pend au bout du nez. Prenez Simon Tofield, directeur artistique dans une société d'animation anglaise, il s'est inspiré de ses trois chats, Hugh, Jess et Maisie, pour raconter les péripéties de son chat imaginaire. 

Un gros matou, en permanence affamé. Il a plusieurs solutions pour se remplir l'estomac. Attendre que son maître daigne s'apercevoir que sa gamelle est vide ou tenter de retrouver ses instincts de chasseur et tenter d'attraper une souris ou un oiseau. La quête de nourriture est donc la principale action de ce recueil de gags muets. C'est souvent excellent quand le chat s'en prend à son maître qui visiblement n'a pas tout compris à la psychologie féline. 

Désopilant aussi les astuces trouvées par le chat pour tenter de gober les oiseaux. C'est simple, dessiné d'un trait simple, efficace et très réussi. Pas étonnant si ce chat, en plus du papier et d'internet, va bientôt s'animer sur les petits écrans.

« Simon's cat », Fleuve Noir, 14,90 €

vendredi 8 janvier 2010

BD - Le Père Noël et les stars dans "Himalaya Vaudou de Fred Bernard et Rochette


Sorti en septembre dernier, cet album de BD est certainement le plus étrange et le plus déconcertant de l'année 2009. Sur 100 pages, les auteurs ont développé une sorte de fable sinistre sur l'évolution de l'Humanité. Une vision qui prend tout son sel en ce moment, alors que le sommet de Copenhague a accouché d'une souris. 

Tout débute sur les pentes d'un sommet de l'Himalaya. Un guide et trois stars de la télévision progressent lentement avec un but : atteindre la maison du père Noël pour l'interview du siècle. Il y a un jeune présentateur branché, aussi bête que son public d'adolescentes en rut, un vieux journaliste sur le retour plus intéressé par son image et son audience que par les malheurs du monde et la caution écologique, un reporter spécialisé dans le développement durable. Ils risquent leur vie pour aller à la rencontre de Noël Bodombossou. 

Ce vieil Africain, adepte du Vaudou a décidé de changer le monde pour le sauver. Lassé de voir les puissants et les riches exploiter la planète, il leur a lancé un sort. Des cadeaux comme il dit : les présidents des Etats-Unis et de la Russie ont été transformés, l'un en cheval, l'autre en serpent... Pourquoi fait-il cela, quel sort réserve-t-il à ses visiteurs ? 

Bernard (scénario) et Rochette (dessin) développent leur argumentaire jusqu'à la conclusion, bestiale mais visionnaire.

« Himalaya Vaudou », Drugstore, 19 € 

jeudi 7 janvier 2010

BD - Capricorne à vif


La saga de Capricorne s'étoffe de nouveaux personnages. Andréas, au bout de 14 épisodes, s'amuse toujours à compliquer l'intrigue tout en distillant au lecteur fidèle quelques clés permettant au final de relier tous les fils entre eux. 

Capricorne embarque sur un cargo. Il veut rejoindre New York. Mais en pleine traversée, il découvre que l'équipage et les autres passagers ne sont que des illusions. Des rêves provoqués par une entité extraterrestre qui l'opère, à vif, dans les cales du bateau. 

Une opération pour sauver Capricorne. Il deviendra l'allié de ce qui fut le docteur Cortex dans son combat contre le Passager. 

Ces 44 pages sont comme d'habitude une démonstration de l'incroyable talent du dessinateur. Cette fois il apprivoise les hachures. Un choc graphique sombre et superbe.

« Capricorne » (tome 14), Le Lombard, 10,40 € 

mercredi 6 janvier 2010

BD - Quand Bouzard s'imagine un père poilu


Guillaume Bouzard a avoué en 2004 se lancer dans l'autobiographie « parce que ça rapporte plein de fric ». Mais cet auteur considéré à juste titre comme le digne héritier des meilleurs comiques tendance « Fluide Glacial » ne fait jamais les choses comme tout le monde. 

Il raconte donc dans cette série pour le moins désarçonnante comment il a appris être le fruit des amours d'une humaine et d'un troll. Un père qu'il n'a jamais connu mais qu'il va retrouver dans la forêt de Brocéliande en compagnie de son chien Flopi. 

L'idée, déjà assez tordue, se complique quand le duo croise la route de chasseurs psychopathes, d'une jeune elfe fugueuse et d'anciens hippies. Ce qui est fou, c'est qu'au final, c'est tendre et émouvant. Bravo Bouzard !

« The autobiography of a mitroll » (tome 2), Dargaud, 10,40 € 

mardi 5 janvier 2010

BD - Salade portugaise au menu de Lady S de Van Hamme et Aymond


Jean Van Hamme est omniprésent depuis quelques mois (voir la note précédente). Nouvelle série (Rani au Lombard), reprise de Blake et Mortimer, one shot avec Paul Teng chez Casterman et suite de ses dernières séries. 

Notamment Lady S dessinée par Aymond. Dans ce 6e volet des aventures de la belle blonde, l'action se partage entre Strasbourg et le Portugal. Suzan (ou Shania) est traductrice au Parlement européen. Elle en fait est chargée d'infiltrer un réseau d'extrémistes religieux. Mais au même moment son père, évadé des prisons russes, réapparaît à Lisbonne. Les deux intrigues vont s'entremêler dans un album plein d'émotion et de rebondissements. 

Presque l'archétype de la bonne série d'action qui pourrait parfaitement être adaptée pour la télévision.

« Lady S » (tome 6), Dupuis, 10,40 € 

lundi 4 janvier 2010

BD - Jean Van Hamme est partout


Jean Van Hamme est le scénariste à succès de ces 20 dernières années. Il a beaucoup produit, encore plus vendu, ce qui explique peut-être sa semi retraite. Après avoir assuré sa succession sur ses séries vedettes (Thorgal, XIII) il a décidé de se faire plaisir. Résultat il est très présent en cette fin d'année. Le nouveau Blake et Mortimer mais aussi une série, Rani avec Vallès au dessin, et cet album plus personnel dessiné par Paul Teng.

 « Le télescope » est une histoire d'amitié, de sexe et de d'amour fou. Ils sont cinq amis. Plus très jeunes. Pas très riches. Ecrivain, acteur, restaurateur, banquier, policier... Ils ont perdu leurs dernières illusions, survivant comme ils peuvent avec leurs lots de souffrances physiques. 

Et puis un jour ils la découvrent. Elle a 25 ans, habite en face et ils ne ratent rien de sa vie intime grâce à ce télescope providentiel. Ils rêvent en la regardant s'effeuiller. Un rêve qui va devenir réalité par une rencontre fortuite. Leur vie va changer, basculer, pour Jo, la belle Anversoise. 

Les personnages sont savoureux, Jo est belle à à se damner et la morale de moins en moins présente. Car Van Hamme se risque dans ce scénario à prendre le contre pied de ses productions habituelles, parfois trop vertueuses. C'est clairement immoral mais ces cinq copains sur le retour sont si sympathiques...

« Le télescope », Casterman, 15 €

samedi 2 janvier 2010

BD - Adorable Lou


Lou, la jeune héroïne imaginée par Julien Neel, va sur ses 14 ans. Elle grandit en même temps que ses lecteurs (essentiellement des lectrices) et partage souvent leurs doutes, espoirs et désillusions. Une année qui débute sur les chapeaux de roues. 

Alors qu'elle est en pyjama dans la rue en train de regarder l'immeuble de son enfance flamber, sa mère lui annonce qu'elle va avoir un petit frère. Un double choc, négatif et positif, qui s'équilibre mais ne sera pas sans conséquences sur l'avenir. Cette BD qui est une des séries vedette de Tchô, le journal de Titeuf, est beaucoup plus ambitieuse que certaines rigolades de cour de récréation. Lou a une véritable personnalité, développée par un auteur qui a également soigné les personnages annexes, du chat à la mère. C'est d'ailleurs cette dernière qui est en vedette dans ce 5e tome. 

Une fille-mère comme on disait il n'y a pas longtemps, qui a raconté son histoire dans un journal intime qui est tombé par hasard dans les mains de Lou. La pré-adolescente va ainsi comprendre pourquoi sa mère a tant de difficulté à s'engager avec son amoureux du moment, Richard lui aussi en proie au doute. Dessins doux, histoire intelligente : Lou est une belle réussite, la preuve que la BD d'auteur a encore de l'avenir.

« Lou ! » (tome 5), Glénat, 9,40 € 

vendredi 1 janvier 2010

Roman et rock - Romain Slocombe explore le Paris, côté obscur

Le Paris branché d'hier et d'aujourd'hui est au centre de ce polar crépusculaire de Romain Slocombe, amoureux de la capitale.


Mona est de retour. Mona, l'ancienne chanteuse des Mona Toys, groupe de rock des années 80 au succès aussi fulgurant que bref. Mais cette réapparition n'a rien d'un come back programmé par des publicitaires en mal de trouvailles pour gagner un maximum d'argent avec un minimum de création. Mona est simplement aperçue déambulant dans une rue. Cela reste quand même un événement puisque Mona Granados, normalement, est morte depuis quelques années...

Cette chanteuse, muse du héros, Alain « Glucose » Gluckheim, est la fameuse « Infante du rock » du titre de ce polar de Romain Slocombe, pièce maîtresse de « Noir 7.5 » nouvelle collection dirigée par Olivier Mau et dont l'ambition est de mettre en scène un « Paris d'aujourd'hui. Un Paris qu'on reconnaisse et non la toile de fond intemporelle d'un décor qui n'aurait guère changé depuis Nestor Burma. » Dans cet exercice, Romain Slocombe s'est transformé en guide touristique d'une ville sombre et mystérieuse. Où les lieux glauques sont parfois moins angoissants que les hommes et femmes les fréquentant. Ainsi, la découverte par Alain Glucose d'un sauna échangiste, sous la conduite de son riche éditeur accompagné d'une romancière à succès, sent l'expérience vécue. Et nauséeuse.

Folles années 80

Mona est donc au centre de ce roman. Figure tutélaire d'une certaine époque, quand la pop française était inventive et enthousiasmante. Alain Glucose était le parolier du groupe. Amoureux transi de la chanteuse qui préférait le guitariste. Et puis le succès aidant, la drogue a tout détruit. Alain survit maintenant en écrivant des polars mous, en assurant des traductions et des visites guidées pour les touristes japonais. Après la disparition de Mona, il a passé quelques années au Japon. Recruté par les Yakusas qui aiment la distinction des poètes maudits français... Le roman alterne vie d'aujourd'hui et longs flashbacks sur ces années 80 qu'on semble tant regretter alors que se profile une nouvelle décennie.

Alain, résigné, se contente d'une existence pépère, comme floue et triste après les ors et paillettes de la gloire. Tout change quand Takao, le yakusa fan des Mona Toys, revient à Paris. Un retour qui coïncide avec l'apparition de Mona. Alain est persuadé de l'avoir croisée dans une rue. Pourtant elle a été déclarée morte. Un dernier article sur elle est paru en février 1992. A la rubrique faits divers. On a retrouvé son corps, mais sans tête, pieds ni mains dans la Seine. Bien involontairement, Alain va se transformer en détective privé. Il se lance sur les traces de Mona avec le fol espoir de la retrouver et enfin lui avouer son amour. Mais en 20 ans, les branchés ont viré leur cuti. 

Finalement, Alain sera celui qui aura le mieux gardé l'esprit créatif et bohème de l'époque. Du DRH cynique au gourou sataniste, les anciens membres des Mona Toys ont bizarrement évolué. C'est aussi toute la richesse de ce polar, étude sociologique très réaliste d'une génération perdue.

« L'infante du Rock », Romain Slocombe, Parigramme, 15 €