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mercredi 7 septembre 2016

Cinéma : "Comancheria", le combat des nouveaux cowboys contre les banques

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Comancheria", film du Britannique David MacKenzie, a un peu des airs de "True Detective". La faute aux comédiens, parfaits dans leur complémentarité. Ils sont quatre à se partager la vedette, chacun avec un rôle fort, à la mesure de leur talent.

D'abord les hors-la-loi, les frères Toby (Chris Pine) et Tanner (Ben Foster). Ils braquent des banques. Ce ne sont pas des experts. Ils commencent dans le métier. Pour preuve ils n'attaquent que des petites succursales, toujours de la même société, dans ce Texas de l'Ouest, rural et pétrolier. Et ils ne raflent dans les caisses que les petites coupures. Ce dernier détail fait tiquer Marcus (Jeff Bridges), vieux ranger proche de la retraite. Son instinct lui dit que ces deux braqueurs sont en réalité à la recherche d'une certaine somme. Flanqué de son coéquipier Alberto (Gil Birmingham), mi-Comanche mi-Mexicain, il se lance sur leurs traces, espérant que leur arrestation sera le dernier fait d'arme d'un vieux policier fatigué.
Le film, sous ses airs de thriller classique, se double de plusieurs réflexions. Les frères sont devenus braqueurs par nécessité. Cet argent ils en ont besoin pour racheter l'hypothèque de la banque sur le ranch de leur mère récemment morte. De l'argent qu'ils entendent blanchir dans un de ces nombreux casinos, dernière ressource des Indiens. Ce côté social montre toute l'avidité de ces entreprises financières dénuées d'empathie, capables de ruiner des familles entières après quelques belles promesses.
Double duo
Côté police, c'est un autre enjeu. Marcus endosse avec plaisir le rôle du flic raciste et persévérant. Il se moque de son coéquipier, mais pour rien au monde ne lâcherait la piste des voleurs comme un chien reniflant un os à ronger. Jeff Bridges, à des lieux de son rôle du Dude dans "The Big Lebowsky", arrive à être touchant dans son combat épuisant. Il représente une certaine Amérique, une époque révolue où servir son pays était gratifiant. Mais ce qui fait le plus penser à "True Detective", reste le duo formé par Chris Pine et Ben Foster. Le premier abandonne ses habituels personnages propres et gentils pour un fils avide de vengeance. Le second, remarquable de violence et de folie, est le véritable Indien du film, celui qui a une conception de la vie et de la mort radicalement différente. Un jusqu'au-boutisme qui donne toute sa force à ce remarquable film d'action.
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Nick Cave au Castillet.
La musique de "Comancheria" est signée Nick Cave. Le rocker australien est devenu un habitué du 7e art. Il a de nombreuses musiques de films à son actif depuis quelques décennies. Nick Cave sera également dans quelques salles de cinéma le jeudi 8 septembre à 20 h (le Castillet à Perpignan dans la région) pour présenter en séance unique son nouvel album, Skeleton Tree. Réalisé par Andrew Dominik, "One More Time With Feeling" retrace l'enregistrement de ce 16e album studio, entrecoupé de commentaires du musicien.

jeudi 21 janvier 2010

Roman - Père et fils en galère

Nick Cave, rocker et musicien australien, dévoile une autre facette de son talent dans ce roman halluciné, triste et dramatique.


Bunny Munro est un chaud lapin. Bunny Munro a beaucoup de succès auprès des femmes. Ce représentant de commerce vendant des produits de beauté sillonne les routes d'Angleterre alignant les conquêtes féminines comme d'autres remplissent des grilles de mots fléchés. Mais Bunny Munro est marié. A Libby. Ils ont un petit garçon, Bunny Boy, âgé de 9 ans. Dans les premières pages de ce roman, Bunny est en bonne compagnie dans une chambre d'hôtel. Une superbe prostituée originaire des Caraïbes. Tout en s'occupant d'elle, il a Libby au téléphone. Sa femme, sous antidépresseurs, perd la raison. Pour la calmer, Bunny lui promet de vite rentrer à la maison. Mais la nuit sera longue, très longue.

 Le lendemain matin, en prenant son petit déjeuner dans son hôtel, Bunny ne regrette rien. Exactement il ne se souvient de rien car en plus d'être un tombeur, il boit comme un trou. En sirotant son café, il se regarde dans une glace et trouve « l'image qu'il a devant lui pas si déplaisante. Bunny n'est pas un génie, ni un visionnaire ni un sage, mais il voit tout de suite pourquoi les dames en pincent pour lui. Ce n'est pas le tombeur standard musclé à la mâchoire carrée, ni l'homme à femmes avec la ceinture de smoking, mais il dégage quelque chose, même avec la trombine fracassée par l'alcool, il exerce un charme magnétique qui passe par les plis d'humanité qui se forment aux coins de ses yeux quand il sourit, l'arcade sourcilière qui se fronce avec malice et ses joues qui se creusent de fossettes à vous faire péter l'hymen quand il rit. »

Fuir ses fantômes

Le problème c'est que Bunny vit ses derniers jours. C'est expliqué par l'auteur dès les premières pages et dans le titre. La mort qui fait une entrée fracassante dans sa vie quand il franchit enfin la porte de son appartement. Un appartement dévasté. Bunny Boy explique que c'est Libby qui a craqué. Quelle est enfermée dans sa chambre et qu'elle ne répond plus. Bunny pénètre dans la chambre et découvre « Libby Munro en nuisette orange, pendue à la grille de sécurité. » « Elle a le visage violet comme une aubergine ou un truc dans le genre et, un court instant, Bunny se dit en fermant les yeux de toutes ses forces pour chasser cette pensée, que ces nichons, c'est quelque chose. »

Après des obsèques croquignolesques, Bunny noie son chagrin au cours d'une soirée en compagnie de ses collègues. Cela vire à la beuverie puis à la partouze. Bunny est donc en-dessous de tout. Pourtant son fils l'aime. C'est vrai qu'il n'a plus que lui. Un Bunny Boy qui lui aussi semble un peu atteint quand il est persuadé que sa mère continue à lui parler.

Après une première partie très borderline, Nick Cave concentre son récit sur le père et son fils. Ils partent en voiture, prennent la route; roulent sans but. Comme pour mieux s'éloigner de ces fantômes un peu trop présents.

Roman trash, roman triste, « Mort de Bunny Munro » entraîne le lecteur sur les chemins cabossés du remord et des regrets, de la vie qui file trop vite, de l'essentiel masqué par le clinquant et le plaisir facile. Un long blues de 330 pages, comme une de ces chansons que chante Nick Cave avec sa voix grave de crooner très fatigué.

"Mort de Bunny Munro », Nick Cave, Flammarion, 20 €