samedi 11 avril 2020

Série Télé - Au Nord, à « Fortitude », on ne vous entendra pas crier…



Bienvenue à Fortitude, ville la plus sûre du monde. Peut-être aussi la plus hostile car cette bourgade de 700 âmes est située sur le cercle polaire, à l’extrême nord de l’Europe, sur une île cernée par la banquise et infestée d’ours polaires. Réalisée en 2015 par les Anglais de Sky Atlantic, cette série joue à fond la coproduction. Des Danois, des Américains, pas mal de Britanniques et même une jolie Espagnole composent le casting de Fortitude dont la première saison est disponible sur Amazon Prime. Cela débute comme un thriller typique de ces contrées gelées. Un chercheur, en conflit avec la gouverneur de la ville qui veut absolument construire un hôtel dans le glacier, est retrouvé mort chez lui. Il baigne dans une mare de sang, le torse déchiqueté. Si la police pense dans un premier temps à une attaque d’ours, en enquêtant a minima, les suspects sont légion. Le pilote d’hélicoptère, ancien marine américain ? Le jeune chercheur anglais récemment arrivé à la base ? La serveuse du café, brune espagnole piquante qui émoustille tous les blonds de Fortitude (il y en a un paquet) qui ne savent pas qu’elle a déjà fait de la prison pour meurtre ? Ou le responsable de la sécurité de la mine russe ? 
Beaucoup de fausses pistes et finalement un basculement dans le fantastique, avec des relents de pandémie, comme pour nous rappeler que les virus, il y en a des milliers qui n’attendent que la fonte des glaces pour déferler sur l’Humanité. Les 11 épisodes de cette première saison sont un peu lents parfois, mais on reste scotchés face aux images tournées sur les glaciers et autres montagnes balayées par des vents violents alors qu’il fait - 30°. Et vu les stalactites accrochées aux barbes des comédiens, ce n’était pas du trucage.

Du cinéma à domicile… et gratuit


Pour ceux qui ont du temps à perdre (normalement c’est le cas de pas mal de monde en ce moment), vous devriez apprécier ces sites qui offrent nombre de films de cinéma pour rien. Certains existaient avant le confinement, d’autres sont des initiatives pour permettre aux enfermés de se distraire.
Ne manquez pas l’opération organisée par MK2 et TroisCouleurs. Chaque semaine, le mercredi, la société fondée par Marin Karmitz propose une sélection de films gratuits. Actuellement il y a deux pépites à ne pas manquer. Une très courte. Signée David Lynch. « En 1995, à l’occasion du centenaire du cinéma, explique le site, David Lynch se voit proposer de réaliser un film de 55 secondes, avec l’une des caméras des frères Lumière, en respectant les conditions de tournage de l’époque : trois plans-séquences, lumière naturelle, et pas de son synchronisé. » Une minute en noir et blanc, totalement hallucinée, entre reportage sur les violences policières, drame familial et cauchemar de Frankenstein. Du pur Lynch, mais en concentré.
On retrouve également dans les films sélectionnés « Sept jours ailleurs » de Marin Karmitz. Présenté en 1968 à la Mostra de Venise, le premier long-métrage de celui qui deviendra essentiellement producteur, met en vedette Jacques Higelin. Déjà musicien mais encore acteur, il est de presque toutes les scènes, promenant sa silhouette dégingandée dans le Paris et la province de la fin des années 60.

Documentaires et films érotiques
Un film rare et qui n’a rien obtenu au festival de Venise. pour la bonne et simple raison que Marin Karmitz a décidé de retirer son film de la compétition en soutien aux réalisateurs italiens qui appelaient au boycott de la manifestation se déroulant en cette année 68 où déjà le festival de Cannes avait fait les frais de la contestation étudiante.


On peut voir aussi sur la page de TroisCouleurs, rubrique MK2 Curiosity, un documentaire sur le réalisateur chinois Jia Zhang-ke et un autre sur les artistes anglais iconoclastes Gilbert & George. Et mercredi, une nouvelle sélection viendra remplacer celle de cette quatrième semaine de confinement.
Beaucoup plus de films à découvrir sur des adresses qui ont fait de l’exploitation des œuvres tombées dans le domaine public un petit commerce fructueux. Là, la qualité n’est pas forcément au rendez-vous.
Et ça part parfois un peu dans tous les sens.
 Exemple avec cinetimes.org faisant se côtoyer les œuvres de Jean Vigo avec les Don Camillo et des comédies érotiques des années 70.
Difficile de s’y retrouver, mais ne manquez pas « L’Atalante », dernier film de Jean Vigo avec Michel Simon en vedette. Une histoire sociale sur la vie à bord d’une péniche. Cependant si le cinéma engagé et en noir et blanc vous rebute, pourquoi ne pas retomber dans l’ambiance libertine des années 70. Sur Cinetimes.org vous bénéficiez d’un vaste choix. Pour l’étrangeté du film (et du seul comédien homme de la distribution), on vous conseille « Morgane et ses nymphes » de Bruno Gantillon sorti en 1971. 

vendredi 10 avril 2020

De choses et d’autres - A complot, complot et demi


Peut-être est-ce une des conséquences indirectes du confinement : on est de plus en plus enclin à croire tout et n’importe quoi. Alors sur ce terreau fait de craintes pas toujours justifiées et de paranoïa latente, les complotistes s’en donnent à cœur joie et sèment leurs petites graines.
Sur l’origine du covid-19, même si tous les spécialistes s’accordent à relier ça à la consommation de viande animale en Chine, pour d’autres, qui n’ont qu’un brevet élémentaire en ragots et rumeurs non vérifiées, c’est la faute à la 5G. Et d’expliquer que c’est à Wuhan, berceau du virus, que les première antennes pour la 5G ont été déployées. 5G essentiellement développées par les Chinois et qui devait être l’arme fatale de leurs constructeurs face aux Américains d’Apple et aux Coréens de Samsung.
En martelant sans cesse, malgré les démentis de scientifiques, que ces nouvelles ondes favorisent le virus et amplifient l’épidémie, cela a poussé certains à passer à l’action. Voilà comment,  cette semaine en Angleterre, plusieurs antennes de téléphonie mobile ont été incendiées.


Une association complotiste a même mis en vente des clés USB (350 euros l’exemplaire, quand même), qui annihilent les mauvaises ondes de la 5G et protègent du coronavirus. Pas mal de gogos se sont fait attraper.
Mais, dans le monde des complots, il y a toujours pire. Quelqu’un, par plaisanterie, a fait un montage photo montrant une antenne 5G, volant et répandant le virus derrière elle dans des traînées blanches, les fameux chemtrails. C’est énorme, totalement invraisemblable, mais il y a fort à parier que certains vont prendre ce canular pour argent comptant.


Chronique parue en dernière page de l'Indépendant le vendredi 10 avril, 25e jour du grand confinement

Cinéma - Laissez-vous entraîner dans le monde tout fou de Timmy Failure



Si vous hésitez encore à vous abonner à Disney +, rien que pour ce film, franchissez le pas. En plus de proposer les classiques de la maison presque centenaire et les incontournables de Pixar, Star Wars ou Marvel, Disney + propose comme ses concurrents des longs-métrages réalisés directement pour la plateforme. Premier exemple avec « Timmy Failure, des erreurs ont été commises » de Tom McCarthy. 
Un film par excellence tout public, même si les plus jeunes ne comprendront pas toutes les allusions et situations complexes des enquêtes de ce détective privé en culottes courtes. Mais ils devraient malgré tout se reconnaître un peu dans ce gamin loin de la normalité. Timmy vit à Portland dans l’Oregon avec sa maman Patty (Ophelia Lovibond). Il est en CM2 et ses résultats scolaires sont catastrophiques. Normal car Timmy, qui a décidé de ne jamais aller au collège, est déjà à la tête de sa propre entreprise : la Total Failure Inc. Une agence de détective privé qu’il gère avec son associé, Total. Dans ce monde un peu fou, Total est un ours polaire de plus de 600 kg. 
On comprend rapidement qu’entre notre réalité et celle de Timmy, il y a un gouffre. Total est un ami imaginaire, son histoire de détective privé un prétexte pour ne pas jouer avec les garçons de son âge. L’ours est une source inépuisable de gags et les seconds rôles (le professeur ou le conseiller d’orientation) apportent une vision très décalée sur la fausse réalité de Timmy. 
Réalisé par Tom McCarthy, qui s’est illustré dans le film politique avec Spotlight sur l’enquête ayant révélé le scandale des abus sexuels de l’église américaine, ce film adorable de poésie est l’adaptation des romans de Stephan Pastis dont deux tomes sont parus chez Hachette sous le titre de Timmy Lalouse.

BD - Partez à l’aventure avec les feuilletons BD de la revue Robinson



Et si ce confinement était la renaissance d’une certaine presse BD boostée par le numérique ? Après Astérix, c’est Robinson, édité par Hachette, qui arrive gratuitement dans toutes les boîtes mails des amateurs d’aventures dessinées ou directement sur le site hachette.fr. Chaque vendredi, sur une centaine de pages, vous pourrez lire les BD parus dans la collection Robinson, mettant en scène aventuriers et héros de gags. 


Robinson, ce nom n’est pas inconnu aux plus anciens et surtout aux amateurs de vieux papiers. Robinson fait partie de l’âge d’or de la BD en France. Lancé en 1936, cet hebdomadaire édité par Opera Mundi et hachette, offrait 16 pages dont la moitié en couleurs. Au sommaire essentiellement des reprises de BD américaines comme Guy l’Éclair, Mandrake, La Famille Illico ou Popeye. Quatre années et des tirages à plus de 200 000 exemplaires. Mais au début des hostilités en juin 1940, Robinson a cessé de paraître pour ne jamais renaître à la Libération. 80 ans plus tard, le même logo orne les couvertures des deux premiers numéros parus. Le 1 la semaine dernière et le 2, ce vendredi. En couverture on retrouve les membres du Club des Cinq d’Enid Blyton. Une adaptation de très grande qualité signée de Béja et Nataël. En deux gros épisodes, vous pouvez découvrir l’intégralité du premier album, « Le club des Cinq et le trésor de l’île », qui voit la formation de ce groupe d’adolescents dont les enquêtes ont traversé les décennies. 

Parmi les séries à suivre dans Robinson, ne manquez pas « Clivages » de Runberg et Urgell. Un récit futuriste criant de vérité racontant comment un village fait face à l’arrivée de soldats en pleine guerre civile meurtrière. Côté grandes sagas, l’Histoire a la part belle avec « Rhum Héritage » sur la culture de la canne à sucre en Martinique alors que « La maison des fragrances » plonge dans les coulisses de l’impitoyable industrie du parfum.

jeudi 9 avril 2020

De choses et d’autres - Ils ont craqué ! Et vous ? 


Il ne se passe pas un jour sans qu’il ne nous vienne aux oreilles une histoire folle de confinement. Comme si la pandémie et l’enfermement qui en découle faisaient perdre la tête et toute raison aux plus fragiles.
Dans le top 3 de l’absurde, au pied du podium, ce malfaiteur qui a profité de la généralisation du port du masque pour braquer une pharmacie sans que personne ne s’inquiète avant qu’il ne sorte son couteau. A la 3e position, ce post de Bruno Lemaire, ministre de l’Économie, montrant… son cochon d’Inde sur la table de sa cuisine. Presque gagnant, le fou ou amateur de surréalisme arrêté dans la rue pour avoir écrit le texte de l’attestation de sortie sur sa main. Avec ce motif qui justifie tout : « Je vais acheter du papier A4 pour l’imprimante »…


Enfin vainqueur toute catégorie ce Polonais qui s’est volontairement fait confiner de nuit dans un hypermarché. Il a été retrouvé le lendemain matin ivre mort après avoir vidé plusieurs bouteilles de whisky et de champagne tout en regardant des films pornos sur les télévisions en démonstration.  
Ces craquages ont peut-être donné l’idée à trois geeks dotés d’un bon sens de l’humour de lancer tuvascraquer.fr, une petite application sous forme de quizz à choix multiples. On répond à une quinzaine de questions (comme « Quelle est ta situation actuelle » à laquelle on peut répondre « En télétravail, du moins c’est ce que croit mon employeur ») et au final vous saurez quand vous allez craquer. Personnellement j’explose le 12 avril. Et vous, quand c’est que vous craquez ?


Chronique parue en dernière page de l'Indépendant le jeudi 9 avril, 24e jour du grand confinement

BD - Une sorcière marrante et un parasite qui l’est beaucoup moins

Wolcano, sorcière de son état, est aussi obsédée sexuelle. Oliver Page, aventurier du XIXe siècle, est aussi sauveteur de l’Humanité dans un futur fluctuant. Le rire magique contre l’action scientifique.



Wolcano a un petit problème. Elle a sans cesse le feu aux fesses. Voilà pourquoi dans la ville de Whitetown elle est affublée du surnom peu glorieux de « Sorcière du cul ». Vous me direz il y a pire ? Elle aurait pu hériter du sobriquet « sorcière aux verrues » ou « sorcière Corona » si elle buvait beaucoup de bière. 
D’un autre côté elle assume tout à fait sa frénésie sexuelle. Ce soir justement, elle ramène dans sa petite maison un jeune et joli menuisier. Une fois son affaire terminée, elle est convoquée par Ox, cyclope taciturne envoyé par les Grands mages pour annoncer à Wolcano qu’elle vient de perdre ses pouvoirs de sorcière après avoir usé de 666 partenaires différents. Cette succession de gags qui forment en fait une histoire cohérente et complète est issue de l’esprit de Shyle Zalewski qui comme son héroïne, préfère conserver le mystère sur son genre et ses inclinaisons sexuelles. Le dessin simple et presque enfantin ne doit cependant pas tromper les parents : attention les scènes décrites dans cette BD ne sont absolument pas pour les petits. Wolcano, toutes les trois pages, utilise sa langue de dragon, très longue, très tactile et pleine de vice pour réaliser ce qu’elle fait de mieux. Et non, ce n’est pas parler.



Il y a aussi de la magie dans le second tome des aventures d’Oliver Page, mais surtout des voyages dans le temps. La magie c’est par l’intermédiaire d’un parasite qui colonise les corps des Humains.

Heureusement Oliver découvre un trône lui permettant de faire des allers-retours entre le Londres de la fin du XIXe siècle et celui actuel. Avec l’aide de la belle Wynn, Amazone venue de l’an 2544, il va tout faire pour sauver la civilisation humaine. Une excellente variation de Desberg (scénario) et Griffo (dessin) sur les paradoxes temporels. 
« Wolcano, la sorcière du cul », Delcourt, 14,95 €
« Oliver Page » (tome 2), Glénat, 14,50 €


VOD - Sur Disney +, découvrez vos émotions avec « Vice Versa »


Parmi les nombreux films du catalogue de Disney +, «Vice Versa » est un petit bijou d’intelligence. A ne pas manquer en cette période de confinement pour mieux comprendre les émotions de vos enfants mises à rude épreuve.
Riley a 11 ans. Fille unique, elle a tout pour être heureuse. Si cet épanouissement semble naturel, il doit en fait beaucoup aux émotions qui coordonnent l’esprit de Riley depuis le poste de commandement de son cerveau. Les cinq premières minutes de « Vice Versa » expliquent comment cela fonctionne. Cinq émotions principales sont à l’œuvre en permanence. Peur, Colère, Dégoût, Tristesse et Joie. Cette dernière est la dominante de l’humeur de Riley. Alors quand les parents annoncent à Riley qu’ils vont quitter leur Minnesota un peu perdu pour s’installer à San Francisco, Joie tente de conditionner Riley pour qu’elle profite de ce changement. Mais dans les faits Tristesse prend le dessus involontairement. L’idée du film est venue à Pete Docter (réalisateur de Là-haut) en regardant ses enfants grandir. Et de se demander souvent, face à leurs réactions parfois déroutantes, « Mais que se passe-t-il dans leur tête ? » Et d’imaginer l’esprit de Riley, fonctionnant comme un gros ordinateur piloté par plusieurs entités. Les deux mondes ne se rencontrent jamais, mais sont totalement interdépendants. Deux univers, deux styles pour un même film. Si Riley est animée de façon très classique, les cinq émotions sont elles beaucoup plus cartoonesques. Couleurs criantes (vert brocolis pour Dégoût), formes caractéristiques (Colère est carré comme une brique, Peur filiforme et fuyant comme un serpent) et exagérations sans limites caractérisent l’esprit de Riley. Toutes les possibilités de l’animation sont exploitées dans ces séquences particulièrement réussies. Et quand l’émotion prend le dessus sur l’humour, on sait que l’on se trouve face à un petit chef-d’œuvre de subtilité.

Opération rangement des livres



Opération rangement durant le grand confinement. Pourquoi ne pas profiter du temps libre pour classer votre bibliothèque ? Ou si vous êtes un maniaque de l’ordre, de la revisiter pour en redécouvrir les perles oubliées ?
Pour l’opération classement, rien de tel que des conseils de pros. Non le métier d’expert en classement de livres n’existe pas, mais les gros lecteurs peuvent vous donner quelques tuyaux. Vous les trouverez en grande partie dans le livre « Et vous, vous les rangez comment vos livres ? » de Nicolas Carreau paru en début d’année à la Librairie Vuibert. Le journaliste d’Europe 1 anime chaque semaine « La voix est livre », magazine culturel au cours duquel il se rend chez une personnalité et discute avec elle des titres de sa bibliothèque et de son agencement. On entre ainsi dans l’intime de Clémentine Célarié, Jeanne Cherhal, Bruno Solo, Costa-Gavras, Douglas Kennedy, Jul, Enki Bilal ou Valérie Damidot. Des profils très différents pour quasiment autant de bibliothèques. Avec cependant une constance : le désordre.


 Rares sont les invités de l’émission qui ont des rayonnages parfaitement rangés, bénéficiant d’un ordre précis, une cohérence. Souvent, ces amoureux des livres, ont tendance à les stocker un peu partout. L’animateur débute souvent la visite par l’entrée de la maison ou de l’appartement qui n’échappe pas à la montagne de volumes des autres pièces. David Abiker, journaliste radio lui aussi et auteur de quelques romans dans sa jeunesse a cette réflexion : « le livre c’est un élément de décoration aussi. Ils tapissent les murs un peu comme un papier peint ou une frise. La bibliothèque a donc une fonction de stockage mais elle est aussi décorative, comme dans beaucoup d’intérieurs bourgeois aujourd’hui. » 
Sur l’aspect physique des bibliothèques, le plus calé et exigeant reste Bruno Solo. Nicolas Carreau, est ébloui par sa « bibliothèque incroyable. Circulaire ! » Le comédien d’expliquer qu’il n’y a pas de mur d’angle dans son salon mais un « demi-cercle. J’ai demandé à un menuisier de me fabriquer une bibliothèque qui épouserait cette forme particulière. Et ça a été très compliqué. […] Je crois que c’est l’objet, le meuble que je préfère. » Côté écrivain, il avoue être « dingue de Pérec. Si j’avais été écrivain, j’aurais aimé écrire comme Queneau ou Pérec. »
Ce bouquin permet aux lecteurs de découvrir ainsi les préférences des uns et des autres. On sera surpris par exemple que Dave, le chanteur, s’il est devenu célèbre grâce à une chanson sur Proust, préfère lire Paul d’Ivoi, un écrivain contemporain de Jules Verne totalement oublié. « Ce sont des livres d’aventure, presque des livres pour ados ou éternels adolescents comme moi. »
Alors si durant le confinement vous décidez de faire un peu de rangement dans votre bibliothèque, prévoyez large en termes d’amplitude horaire. Car trop souvent, on redécouvre des livres oubliés qui finalement semblent passionnants. Sans parler de toutes les lectures de notre jeunesse, véritables machines à remonter dans le temps. Bon rangement et bonne lecture !

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Le hasard fait bien les choses, parfois…

Quand on ne sait plus quoi lire et que l’on a une bibliothèque importante, il reste le lancer de dé. On laisse au hasard de décider du prochain titre à lire. Cela permet de changer de registre et parfois de faire de belles découvertes. On lance un premier dé déterminer la rangée (de 1 à 6) puis on en lance deux autres pour choisir le livre (un 4 et un 5 donnent le 9e roman à partir de la gauche). Selon ce principe voici les titres tirés au sort pour illustrer ce papier.
Rangée 3 livre 4 : Un nommé Peter Karras. Lu en 2000 lors de sa parution en France chez Murder Inc (éditeur qui n’existe plus), ce polar de George Pelecanos est toujours disponible en poche chez Points.
Rangée 5 livre 12 : La machine, chef-d’œuvre de René Belletto lu en 2006 dans une version revue pour Folio. Un mélange de polar et de fantastique sur l’échange d’identité.
Rangée 2 livre 2 : L’Empire des étoiles (tome 2). Cette saga de science-fiction est une œuvre de jeunesse d’Alexis Aubenque au Fleuve Noir. On y découvre la vie dans une dans une fédération galactique regroupant 250 mondes habités, certains encore médiévaux, d’autres très futuristes. J’avais lu à l’époque, en 2006 les trois premiers. J’en ai cinq. Me manquent les quatre derniers. Un jour peut-être…

mercredi 8 avril 2020

De choses et d’autres - De la réussite de son confinement


Même dans les épreuves il faut être meilleur que les autres. Ou du moins aussi bon, faire preuve d’enthousiasme, rester constructif. La dictature de la pensée positive frappe même en plein confinement. Car on voit fleurir dans les magazines et les réseaux sociaux quantité d’articles-conseils pour « réussir son confinement ».


La barre est souvent mise très haut. On doit lire les classiques et toutes les nouveautés possibles et imaginables, on doit revoir des classiques du cinéma, on doit aussi maigrir et trouver des astuces pour faire du sport à la maison. Enfin on doit garder optimisme et joie de vivre.
Je vais me faire l’avocat du diable pour une fois. Car non, on ne peut pas vivre ce confinement comme une période positive et sympa. Car parfois, on est tellement anxieux, paniqué, que se plonger dans un roman est inutile. Après avoir relu 5 fois la même phrase, on ne sait toujours pas de quoi ça parle.
Notre esprit est aux abonnés absents. Plus exactement il ne pense qu’à ce bête enfermement, ce supplice sans fin, cette privation de liberté abominable.
Devant un vieux film, notre seule pensée peut être de regretter les temps d’avant, quand on pouvait se balader dans les rues, les parcs, en forêt. Ou fumer attablés dans les cafés et restaurants.
Aujourd’hui on n’a le droit que de rester chez soi, à courir un marathon entre la cuisine et le salon, à manger des chips arrosées de muscat, affalé dans le canapé, se désespérant des kilos en trop. Mais c’est si rassurant sur le coup.
Je ne pense pas qu’on puisse « réussir » son confinement. L’enjeu est ailleurs et la difficulté sans doute encore plus grande, quand le déconfinement sera sifflé et qu’il faudra reprendre une vie normale.


Chronique parue en dernière page de l'Indépendant le mercredi 8 avril, 23e jour du grand confinement