Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Par Michel et Fabienne Litout
lundi 22 octobre 2018
Livre sur le cinéma - Steve McQueen, le prince des bolides
Beau gosse emblématique du cinéma américain, Steve McQueen était un passionné de vitesse. Il l’a montré dans ses films, mais dans la vie privée il s’offrait souvent un tour en bolide. Ce beau livre, parfait pour les amateurs de cinéma et de voitures de légendes, revient sur la passion dévorante de l’acteur pour la course automobile.
Avant un superbe portfolio et une filmographie exhaustive de sa carrière à la télévision et au cinéma, Guillaume Evin raconte la vie à 100 à l’heure de cet acteur qui aime piloter ou de ce pilote qui aime jouer à l’acteur. Car en plus de ses succès dans les salles obscures, Steve McQueen a participé à quantité de courses récoltant d’autres lauriers.
➤ « Steve McQueen, king of cool » de Guillaume Evin, Hugo Motors, 272 pages, 35 €
dimanche 21 octobre 2018
BD - Un détective à l’ancienne
Nom : Vercorian. Prénom : Atom. Particularité : fils d’un flic parisien d’origine arménienne, ancien grand Résistant. Le nouveau héros imaginé par Yann et dessiné par Olivier Schwartz est résolument vintage. L’action de sa première enquête se déroule à l’été 49. Le jeune Atom veut prouver à son père, grand ponte de la PJ, qu’il vaut autant que lui. Il se rêve détective privé et profite d’un fait divers retentissant pour se lancer dans sa première affaire.
Dans le sud, le Bégum, la femme de l’Aga Khan, vient de se faire dérober ses bijoux dans un « carjacking » avant l’heure. Atom est flanqué de son assistante, la belle et intrépide Mimi et d’un associé-financeur, Jojo la Toupie, colosse qui a connu son heure de gloire dans le milieu du catch.
Un trio explosif pour une enquête menée à 100 à l’heure, entre la Riviera, les bas-fonds de Paris et la banlieue. Délicieusement nostalgique (mais avec un peu de parodie et de sarcasme, Yann oblige) d’une époque qui a fait les beaux jours de BD à la Tillieux avec un trait proche de Jijé, les aventures d’Atom ne devraient pas passionner les jeunes mais rencontrer un réel enthousiasme auprès des vieux collectionneurs.
« Atom Agency » (tome 1), Dupuis, 15,95 €
samedi 20 octobre 2018
Roman - Pascal Bruckner nous offre un cauchemar le temps d'une nuit ou d'une année
Si vos nuits sont déjà un peu agitées en raison de cauchemars récurrents et troublants, évitez ce roman de Pascal Bruckner. Ou au choix dévorez-le en une nuit blanche. Ainsi vous n’aurez pas de cauchemar, même si les mésaventures de Jézabel valent largement toutes les inventions paranoïaques de votre inconscient. Pascal Bruckner, dans une veine fantastique qu’il apprécie tant, renoue avec les dédales du temps.
En route pour le Canada afin de présenter à un ami de son père une montre particulière, Jézabel croit sa dernière heure arrivée lors d’une violente tempête. L’avion de ligne, chahuté, est détourné vers le Maine aux USA. De là, elle rejoint un hô- tel perdu dans les montagnes avant d’espérer prendre un bus pour le Canada quand les conditions météo le permettront. Un hôtel étrange, immense, silencieux et sinistre.
En rejoignant la chambre, elle croise pour une première rencontre avec les Insomniaques : « Au loin apparut, accoudé à la balustrade de l’entresol, un trio de vieux messieurs, debout à cette heure, un manchot, un bossu et un boiteux avec leurs cannes qui la fixaient sans mot dire. Ils sautillaient, vifs et agités, malgré leurs handicaps ». Une ambiance étrange, à la Shinning, qui ne l’empêche pas de sombrer dans le sommeil après 24 heures éprouvantes.
A son réveil, elle découvre qu’elle a dormi une année complète. Rêve ou réalité, jamais le lecteur ne sait où est la frontière. Un peu comme si le présent, le passé et l’avenir se mélangeaient allègrement dans un récit alambiqué. Avec Jézabel, on résiste pour ne pas sombrer dans la folie.
➤ « Un an et un jour » de Pascal Bruckner, Grasset, 18 €
➤ L’adaptation en BD de son roman « Les voleurs de beauté », prix Renaudot, vient de sortir aux éditions Glénat
En route pour le Canada afin de présenter à un ami de son père une montre particulière, Jézabel croit sa dernière heure arrivée lors d’une violente tempête. L’avion de ligne, chahuté, est détourné vers le Maine aux USA. De là, elle rejoint un hô- tel perdu dans les montagnes avant d’espérer prendre un bus pour le Canada quand les conditions météo le permettront. Un hôtel étrange, immense, silencieux et sinistre.
En rejoignant la chambre, elle croise pour une première rencontre avec les Insomniaques : « Au loin apparut, accoudé à la balustrade de l’entresol, un trio de vieux messieurs, debout à cette heure, un manchot, un bossu et un boiteux avec leurs cannes qui la fixaient sans mot dire. Ils sautillaient, vifs et agités, malgré leurs handicaps ». Une ambiance étrange, à la Shinning, qui ne l’empêche pas de sombrer dans le sommeil après 24 heures éprouvantes.
A son réveil, elle découvre qu’elle a dormi une année complète. Rêve ou réalité, jamais le lecteur ne sait où est la frontière. Un peu comme si le présent, le passé et l’avenir se mélangeaient allègrement dans un récit alambiqué. Avec Jézabel, on résiste pour ne pas sombrer dans la folie.
➤ « Un an et un jour » de Pascal Bruckner, Grasset, 18 €
➤ L’adaptation en BD de son roman « Les voleurs de beauté », prix Renaudot, vient de sortir aux éditions Glénat
vendredi 19 octobre 2018
Roman - Sur la trace de Federica Ber, la belle disparue
Qui était Federica Ber ? Qu’est-elle devenue ? Ces deux interrogations sont au centre du roman de Mark Greene. Le narrateur se souvient de cette belle Italienne qui lui a fait découvrir les toits de Paris quand il était jeune.
Aujourd’hui elle est suspectée dans la mort d’un couple d’architectes découvert attachés au pied d’une muraille rocheuse des Dolomites. Entre ces récits distincts, l’auteur aurait pu signer un faux polar, avec rebondissements et coups de théâtre. Il a préféré jouer à fond la nostalgie. Les souvenirs de cet été magique. Puis la disparition de cette femme libre, visionnaire. Cela donne deux histoires d’amours incomplètes, inachevées. Marquées par le destin. Un roman fort et vertigineux.
➤ « Federica Ber » de Mark Greene, Grasset, 18 €
jeudi 18 octobre 2018
BD - Valise mystérieuse et camions du diable
L’histoire ne compte que huit planches dont une dernière inédite. L’essentiel de l’embryon de récit tourne autour d’une valise, dérobée par un vagabond et qui, en découvrant ce qu’elle contient, préfère s’en débarrasser immédiatement en la jetant dans une mare. Que contenait cette valise ? La question est restée sans réponse durant des décennies. Tillieux, qui travaillait à l’époque comme un feuilletoniste, n’avait pas encore pensé à la suite de l’histoire. Risque-Tout abandonné, il lâche Marc Jaguar pour se consacrer à son autre série vedette, Gil Jourdan. Ce n’est que 50 ans plus tard que Walthéry et Borgers ont osé imaginer une suite aux « Camions du diable ». Le dessin en a été confié à Delvaux, grand spécialiste des voitures de l’époque. Cela donne un album hommage, dans l’esprit, avec pour boucler la boucle, la reproduction des planches dessinées par Tillieux. Le Marc Jaguar « moderne », de journaliste, se transforme en détective privé et même espion, n’hésitant pas à utiliser la manière forte quand il se retrouve en position délicate. Courses-poursuites, bagarres, intrigues, trahisons, secret d’État, le tout saupoudré de quelques clins d’œil en référence à Zappy Max ou César et son incorrigible fillette, autres personnages du prolifique Tillieux.
« Marc Jaguar, les camions du diable », Dupuis, 17,50 €
mercredi 17 octobre 2018
BD - Ouvrir la boîte de ses origines
Ses parents sont Coréens. Ils vivent en France depuis longtemps. Elle y est née comme son petit frère. Mais quand la mère meurt dans un accident de la route et que son père se retrouve dans le coma, Claire va devoir se plonger dans les papiers de la famille et découvrir qu’elle a été adoptée à l’âge d’un an. Elle a été trouvée dans une babybox. Pour faire le deuil de sa mère qui ne l’était pas, elle va en Corée pour tenter de retrouver sa véritable mère. Un récit initiatique peut-être encore plus fort que les mémoires dessinées de Jung, « Couleur de peau : miel ».
« Babybox », Soleil Noctambule, 18,95 €
mardi 16 octobre 2018
BD - Violette Morris, une femme trop forte
« Violette Morris » (tome 1/4), Futuropolis, 16 €
lundi 15 octobre 2018
BD - Monstrueuse mer, terrain de chasse du "Kraken"
Serge Dougarry a connu la gloire. Présentateur à la télévision, son émission sur la mer a tutoyé les sommets de l’audimat. Aujourd’hui il n’a plus d’émission et vivote en thésaurisant cette notoriété résiduelle en vantant des conserves de poisson. Un matin, un gamin, en ciré jaune et armé d’un harpon sonne à la porte de son appartement parisien.
Il lui demande de l’aider pour chasser le kraken. Le début de ce roman graphique en bichromie signé Pagani et Cannucciari interloque. Dougarry, épave alcoolique, se bat avec des démons intérieurs.
Le gamin, Damien, est visiblement un attardé. Cet improbable duo va pourtant se retrouver dans la petite ville côtière où le drame se noue. La mère de Damien persuade Dougarry de faire semblant de partir à la chasse au kraken avec son fils handicapé.
Damien, devenu le souffre-douleur de toute la communauté depuis que le poisson se fait rare et que des enfants disparaissent dans la mer.
Et si le kraken, monstre marin légendaire, existait vraiment ? Entre étude sociologique, enquête policière et récit fantastique, cet album magistralement dessiné et à l’intrigue pleine de rebondissements a très justement remporté le prix du meilleur album italien au dernier festival BD de Rome
« Kraken », Soleil, 17,95 €
dimanche 14 octobre 2018
BD - Méfiance les machos, Camel Joe est là !
À force de voir des films de superhéros, ça devait arriver : les féministes aussi rêvent d’une justicière dévouée à leur cause. Claire Duplan, jeune dessinatrice parisienne, l’a imaginée. Exactement elle raconte la vie de Constance, illustratrice survivant en enchaînant les boulots alimentaires (et trop souvent sexistes pour les agences de pub).
Pour faire passer la pilule, elle dessine sur son blog les aventures de Super Joe, l’héroïne qui arrive quand une de ses sœurs est importuné par un harceleur, un relou, un dragueur ou tout être de sexe masculin qui pense plus avec ce qu’il a dans son pantalon qu’avec son cerveau. Super Joe plaît aux copines de Constance. Et devient Camel Joe pour affirmer sa féminité.
Cet album, au trait unique (simplicité de Claire Brétécher, efficacité de Pénélope Bagieu), va beaucoup plus loin dans la dénonciation des harceleurs du quotidien. Il donne aussi aux lectrices et surtout lecteurs des clés pour mieux comprendre certaines femmes d’aujourd’hui.
Sur leurs façons d’aimer, leur propension à provoquer des bagarres dans les bars ou d’arroser les plantes avec un engrais naturel inattendu. Le problème pour les hommes-lecteurs : ils ne peuvent que tomber amoureux de Camel Jo alias Constance alias Claire Duplan…
« Camel Joe », rue de l’Échiquier, 16,50 €
Livre - Anarchie, nom féminin
Si aujourd’hui l’anarchie est considérée comme une dérive politique dangereuse, essentiellement liée historiquement à des actions violentes, à l’origine cette façon de penser et de vivre en communauté était pacifique et séduisante.
Daniel de Roulet, écrivain suisse, a retrouvé dans les archives des traces de cette utopie si belle. Il raconte dans ce roman la vie de « Dix petites anarchistes ». Elles viennent toutes de Saint-Imier, petit bourg helvète où les habitants vivotent entre élevage et travail dans l’horlogerie de précision. Les mouvements ouvriers ont le vent en poupe. Avant que Marx n’impose sa vision du collectivisme anticapitaliste, d’autres prônent une autre voie : l’anarchisme. Les bourgeois et leur autorité, dans leur envie de maintenir leur pouvoir, ne font pas la différence et répriment sévèrement les deux camps.
Traversée avec Louise Michel
Au point que dix jeunes femmes du village envisagent de créer une communauté anarchiste aux antipodes : en Patagonie. Du rêve à la réalité, ce sont ces aléas de la vie qui forment l’essentiel du roman battit comme le témoignage de la dernière survivante. Les deux premières petites anarchistes, parties en exploratrices, seront assassinées dans la ville chilienne de Talcahueno.
Cela ne décourage pas leurs amies qui prennent le bateau en France pour Punta Arenas. Le même qui conduit les condamnés communards dont Louise Michel, vers le bagne de Nouvelle-Calédonie. Elles partent à huit (avec une ribambelle d’enfants) mais n’arrivent qu’à sept, Émilie meurt en couches en pleine traversée. Durant dix ans elles vont survivre dans des conditions climatiques effroyables. Mais elles mettent leur projet en partie à exécution et gagnent suffisamment d’argent pour se lancer dans une seconde migration.
Elles comptent rejoindre l’île de Robinson Crusoé dans le Pacifique où s’épanouit une communauté anarchiste appelée « l’expérience ». C’est la partie la plus heureuse de ces vies même si ce n’est pas la plus importante du récit. «Difficile de raconter notre vie sur l’île : le bonheur se passe d’un récit, les anecdotes s’estompent ou deviennent ridicules quand le temps s’est écoulé ».
La fin du périple se passe en Argentine au début du XXe siècle. Les jeunes anarchistes, devenues vieilles militantes, croient toujours à leur rêve. Même si depuis les actions pacifiques de Saint-Imier, les faits ont donné raison aux tenants de la manière forte. Un témoignage important, prouvant que l’envie de liberté des femmes ne date pas de ces dernières décennies, bien au contraire.
➤ «Dix petites anarchistes» de Daniel de Roulet, Buchet-Chastel, 14 €
Daniel de Roulet, écrivain suisse, a retrouvé dans les archives des traces de cette utopie si belle. Il raconte dans ce roman la vie de « Dix petites anarchistes ». Elles viennent toutes de Saint-Imier, petit bourg helvète où les habitants vivotent entre élevage et travail dans l’horlogerie de précision. Les mouvements ouvriers ont le vent en poupe. Avant que Marx n’impose sa vision du collectivisme anticapitaliste, d’autres prônent une autre voie : l’anarchisme. Les bourgeois et leur autorité, dans leur envie de maintenir leur pouvoir, ne font pas la différence et répriment sévèrement les deux camps.
Traversée avec Louise Michel
Au point que dix jeunes femmes du village envisagent de créer une communauté anarchiste aux antipodes : en Patagonie. Du rêve à la réalité, ce sont ces aléas de la vie qui forment l’essentiel du roman battit comme le témoignage de la dernière survivante. Les deux premières petites anarchistes, parties en exploratrices, seront assassinées dans la ville chilienne de Talcahueno.
Cela ne décourage pas leurs amies qui prennent le bateau en France pour Punta Arenas. Le même qui conduit les condamnés communards dont Louise Michel, vers le bagne de Nouvelle-Calédonie. Elles partent à huit (avec une ribambelle d’enfants) mais n’arrivent qu’à sept, Émilie meurt en couches en pleine traversée. Durant dix ans elles vont survivre dans des conditions climatiques effroyables. Mais elles mettent leur projet en partie à exécution et gagnent suffisamment d’argent pour se lancer dans une seconde migration.
Elles comptent rejoindre l’île de Robinson Crusoé dans le Pacifique où s’épanouit une communauté anarchiste appelée « l’expérience ». C’est la partie la plus heureuse de ces vies même si ce n’est pas la plus importante du récit. «Difficile de raconter notre vie sur l’île : le bonheur se passe d’un récit, les anecdotes s’estompent ou deviennent ridicules quand le temps s’est écoulé ».
La fin du périple se passe en Argentine au début du XXe siècle. Les jeunes anarchistes, devenues vieilles militantes, croient toujours à leur rêve. Même si depuis les actions pacifiques de Saint-Imier, les faits ont donné raison aux tenants de la manière forte. Un témoignage important, prouvant que l’envie de liberté des femmes ne date pas de ces dernières décennies, bien au contraire.
➤ «Dix petites anarchistes» de Daniel de Roulet, Buchet-Chastel, 14 €
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