samedi 15 août 2015

BD : Chat diabolique


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Grippy n'est pas inconnu des amateurs de gags familiaux. Il a débuté sa carrière de personnage de BD en tant qu'animal de compagnie des « Petits Diables » d'Olivier Dutto. Après avoir beaucoup souffert entre les mains de ces deux frères et sœurs tyranniques, il aspire à un peu de tranquillité en vivant calmement auprès de Mamie. Leur programme se résume à se lever tard, à profiter d'une bonne sieste et entre les deux de manger un maximum de cookies. Une vie rêvée régulièrement perturbée par des importuns, moins graves que Tom et Nina, mais très désagréables quand même. Dans ce petit monde loufoque il y a le pingouin Melville, plus souvent près de frigo de Mamie que dans son enclos du zoo, un lézard laid, remplacé le temps de cet album par un crocodile (qui squatte la boîte aux lettres...) et tous les autres petits-enfants de Mamie, des chenapans qui adorent partir à la chasse aux poils. Ceux de Grippy. Arrachés à pleine main... Un dessin simple et expressif, des séries de gags où la surenchère rend les chutes de plus en plus rigolotes : Grippy est devenu un héros à part entière, en passe de détrôner ses anciens maîtres dans le cœur des petits et grands lecteurs de BD amateurs d'histoires absurdes.

« Grippy » (tome 2), Soleil, 10,50 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : Viré !

Pendant que les aoûtiens (à ne pas confondre avec les aoûtats) se dorent la pilule sur la plage, les pauvres juillettistes sont de retour au boulot. Et s'y ennuient ferme. Conséquence ils consultent plus souvent Facebook ou Twitter que leurs dossiers. D'où le succès de la dernière tendance du moment : imaginer les pires phrases de licenciement. Savourons quelques-unes de ces situations cocasses, virtuelles jusqu'à preuve du contraire car au pays de l'humour noir, Twitter est roi. Florilège. « Ne pleurez pas, c'est juste une longue pause clopes de plus ». « Vous allez enfin pouvoir réaliser ce projet de Tour du Monde, c’est génial ! » « C'est OK pour votre augmentation. Mais de temps libre seulement. » « Restez chez vous et testez le télétravail, sans travail... » « Non Chang, 50 Ipads de l'heure à six ans et demi ce n'est pas une productivité acceptable. »
Certains relient leur trouvaille à la politique : « Comme Hollande se représente s'il arrive à faire diminuer le chômage, vous êtes viré ». L'exercice a aussi provoqué une overdose de jeux de mots douteux à base de « lit » de « 100 » et de « ciment ».

Des centaines de tweets et l'impression que plus personne ne travaille mais se contente de ruminer son possible licenciement. Décidément, août est un mois à part. Surtout si comme moi on doit travailler tous les jours et trouver des idées de chronique liées à une actualité définitivement atone : à trop tirer à la ligne je risque la faute grave. 

vendredi 14 août 2015

BD : La bataille des profondeurs


oeil de la nuit, lehman, gess, delcourt
Les super héros ne sont pas tous américains. Superdupont fera son grand retour en septembre (toujours avec Gotlib au scénario) et d'autres personnages profitent de la vague des films à gros budget. « L'œil de la nuit » de Lehman (scénario) et Gess (dessin) ne porte pas de costume moulant. Il évolue dans une Europe steampunk héritée de l'univers de Jules Verne. A la base Théo Sinclair n'a rien d'un fier redresseur de torts. Cardiaque, malingre, il préfère le calme des bibliothèques aux combats nocturnes. Mais un accident va le transformer. Il devient nyctalope et bénéficie d'un cœur artificiel expérimental. Non seulement la machine lui redonne une seconde jeunesse, mais elle décuple ses forces. Théo abandonne son statut d'intellectuel pour endosser celui de justicier de la nuit au service de l'État français. Dans cette seconde aventure de près de 100 pages, il affronte un androbathe, homme des profondeurs issu des manipulations génétiques d'un savant fou. Un hybride entre homme et requin, unique de son espèce mais programmé pour éradiquer les hommes de la surface de la terre. Un délicieux air rétro transforme cette BD d'aventures en bel hommage aux feuilletonistes du XIXe siècle.

« L'œil de la nuit » (tome 2), Delcourt, 15,95 €

DE CHOSES ET D'AUTRES : La rémanence des noms

Pavlov l'emportera toujours. Comme les animaux, l'homme change de comportement par habitude. Un bon exemple : les noms propres. En 2008, la fusion entre ANPE et Assédic donne naissance à Pôle Emploi. Au début, tout le monde raille ce nom. Et ne l''utilise pas, préférant l'ANPE créée en 1967. Sept ans plus tard, Pôle Emploi est passé dans le langage courant et ceux qui évoquent encore l'ANPE font figure de dinosaures. Les nouvelles technologies aiment imposer de nouveaux noms aux utilisateurs. Qui se souvient encore d'AOL ? L'un des premiers fournisseurs d'accès à internet a lentement mais sûrement disparu du paysage. Devenu Neuf, il se nomme maintenant SFR. Jusqu'au prochain changement (la société vient d'être rachetée par Numéricable). En politique, la droite prend la tête du changement de nom. Certains adhérents du parti Les Républicains gardent leur carte de l'UMP, du RPR voire du RPF pour les vieux de la vieille. Combien comptera-t-on d'années avant que Les Républicains n'entrent dans le langage courant ? Tout dépendra du résultat des prochaines élections... Pourtant certaines appellations font de la résistance. Notamment les adresses de magasin. Malgré le changement d'enseigne et la disparition de la marque, beaucoup vont toujours faire leurs courses au Mammouth. Même nous à l'Indépendant sommes concernés. Le déménagement au Boulevard des Pyrénées remonte à près de cinq ans. Mais la meilleure façon de guider un visiteur local reste de dire que le siège du journal a remplacé l'ancien garage Mazda...

jeudi 13 août 2015

DVD : Enfants et monstres sur une terre en ruines

Sombre avenir décrit dans « Battle for Skyark », film de SF de Simon Hung sorti directement en DVD.

battle, skyark, hung, m6videoLa terre court à sa perte. Pas besoin d'être un grand économiste ou scientifique bardé de diplômes pour s'en douter. Cette évidence est souvent utilisée comme base aux scénaristes et romanciers de science-fiction. « Battle for Skyark » de Simon Hung part de ce postulat. Réchauffement climatique oblige, la terre n'est plus qu'un désert brûlant. Des monstres ont fait leur apparition et l'Humanité a construit une immense arche en orbite pour y vivre plus sereinement. Classique. La suite l'est moins. Comme le film s'adresse plutôt aux enfants et adolescents, ce sont ces derniers qui sont expédiés, par châtiment, sur terre pour expier leurs fautes. Le jeune Rags (Caon Mortenson) tombe en plein désert. Il est rapidement aidé par une bande de jeunes rebelles, survivant vaille que vaille dans le « camp des damnés ». Ils attendent le messie, celui qui les délivrera des attaques des monstres. Il sera porteur d'un signe : treize cicatrices sur le bras. Rags, blessé dans sa rentrée dans l'atmosphère, a justement ces treize ombres. Est-il le sauveur ? Comment va-t-il se transformer en vaillant guerrier lui qui n'est qu'un enfant sage, renvoyé sur terre car son père était un opposant politique ? De pleutre il devient héros...
Ce genre de production, pour être un minimum crédible, doit avoir d'assez gros moyens. Le budget, sans atteindre celui des super productions américaines, devait être conséquent car les décors sont particulièrement soignés. En plein désert, un cimetière d'avions a servi de base au camp des damnés. Tôles, ferrailles et toiles de parachutes sont judicieusement exploités. Les habits des enfants, entièrement de récupération, sont assez crédibles, entre esthétique Mad Max et Guerre des étoiles. Par contre, il semble qu'il n'y avait plus de budget pour les scénaristes et la distribution. L'histoire, banalement basique, est rapidement prévisible. Aucune surprise donc sur l'origine des monstres. Quant aux acteurs, ils font plus penser à des ados en colonie de vacances en train de jouer à la guerre qu'à de véritables survivants dans une univers impitoyable. Bref, cela ne vole pas haut, même si la fameuse Skyark est très haut en orbite.

« Battle for Skyark », M6 Vidéo, 12,99 euros le DVD, 17,99 euros le blu-ray

BD : Magie londonienne


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Certains dessinateurs excellent dans une époque. André Benn, depuis les aventures de Mic Mac Adam, n'a quasiment jamais quitté la fin du XIXe siècle, que cela soit en Angleterre ou en France. Sa nouvelle série, annoncée en trois tomes au format carré, se déroule entre 1852 et 1887 dans les environs de Whitechapel, quartier londonien. Les premières pages montrent Jerrold Piccobello, célèbre magicien un peu oublié, se faire refouler d'une audition. Une sacrée déchéance pour ce maître des prestiges. Il revient alors sur les lieux de ses débuts, un théâtre aujourd'hui en ruines et se souvient. Orphelin à 10 ans (son père, tricheur aux cartes, a tenté d'arnaquer un ponte de la pègre...), il est recueilli par une femme qui vit dans la conciergerie de ce théâtre. C'est là, adolescent, qu'il va rencontrer Virgill Webb, prestidigitateur qui lui apprendra les rudiments de la magie puis le prendra comme associé. L'album, sur deux époques différentes, raconte l'ascension de Jerrold, ses tournées en Europe avec Virgill, leurs conquêtes féminines. Mais un jour, Virgill disparaît et Jerrold déprime. Entre récit d'initiation et histoire d'amitié, « Le magicien de Whitechapel » se conclu par une incursion dans le fantastique. Comme si les trucs et astuces ne suffisaient plus pour berner le public. Benn, comme dans ses précédentes productions, abandonne son trait rond et bien formé pour des croquis aux multiples hachures, renforçant le côté sombre et vieillot de l'histoire. Une surprenant évolution graphique mais qui s'accorde parfaitement avec le scénario.

« Le magicien de Whitechapel » d'André Benn, Dargaud, 15,99 €

mercredi 12 août 2015

Cinéma : "Floride", le pays de la mémoire morte

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Joli film sur la maladie, 'Floride' de Philippe Le Guay offre deux excellents rôles à Sandrine Kiberlain et Jean Rochefort dont ce sera sans doute la dernière apparition.


"J'ai la mémoire qui flanche" chantait Jeanne Moreau. Claude Lherminier (Jean Rochefort) aurait pu lui aussi fredonner cette chanson populaire dans ses ultimes moments de lucidité. Il aime chanter des ritournelles avec sa fille Carole (Sandrine Kiberlain), notamment quand ils roulent ensemble dans la vieille décapotable, une Renault portant le doux nom de Floride. La Floride est omniprésente dans l'esprit de Claude, vieil homme de plus de 80 ans, vivant seul dans sa grande maison près d'Annecy. En plus de la voiture, il adore la Floride car elle produit le meilleur jus d'orange. Pour son petit-déjeuner, il demande systématiquement à son aide-ménagère si c'est bien du jus de Floride. Il n'aime que celui-là. Une Floride qu'il idéalise, avec palmiers et soleil à volonté. Un état américain où vit son autre fille. Elle va peut-être bientôt venir en France. À moins que ce ne soit lui qui y aille.
Adorable méchant
Sous des airs de comédie, ce film est une réflexion intelligente sur la maladie d'Alzheimer, même si jamais son nom n'est prononcé, les liens de la famille et le passé. Claude, affaibli physiquement, n'est pourtant pas totalement dépendant. Son aide-ménagère, seule présence humaine dans son immense maison où la nuit il semble voir revenir quelques fantômes de son enfance, sert autant à le surveiller qu'à lui permettre de passer ses nerfs. Au grand désespoir de Carole, obligée d'en trouver de nouvelles après les multiples démissions. Elle pourrait le mettre dans une maison de retraite spécialisée, mais elle ne parvient pas à se décider, persuadée que ce serait signer son arrêt de mort.
Souvent farceur et joyeux, Claude aime jouer quelques tours à ces femmes de l'ombre. La nouvelle, Ivona (Anamaria Marinca) est une Roumaine obligée de tout supporter de ce vieux monsieur souvent charmant, parfois abject. C'est une des conséquences de la maladie. Ceux qui ont la tristesse d'avoir un proche atteint d'Alzheimer redoutent ces moments. Le père aimant et protecteur se transforme alors en horrible monsieur capable des pires insultes. Voilà pourquoi Claude se met à détester sa fille qu'il croit "cupide". Deux facettes d'un même personnage qui permet à Jean Rochefort de briller. Il passe aisément de la bonhomie à la haine, de la gentillesse à la méchanceté. Au point de briser le couple de Carole et d'embarquer Ivona dans une rocambolesque opération de profanation de sépulture.
Philippe Le Guay a adapté avec Jérome Tonnerre une pièce d'Adrien Zeller. Grâce à des flashbacks, le spectateur se retrouve parfois dans la tête, la mémoire, du vieillard qui retombe en enfance. Il se souvient parfaitement de ces moments où il était dans les bois en culottes courtes. Par contre, ce qu'il a fait la veille ou le mois dernier est totalement effacé. Comme si seul le passé très éloigné surnageait dans sa mémoire trouble.
Toute la réussite du film, particulièrement émouvant quand il s'approche de la Floride, consiste à nous mettre dans la tête de Claude. On le comprend, on l'aime, on l'excuse. On se prépare aussi, car un jour, nous aussi nous serons vieux.

DE CHOSES ET D'AUTRES : Tong en orbite

En vacances, rares sont ceux qui veulent se prendre la tête. Les activités culturelles se limitent aux jours de pluie, histoire de se mettre à l'abri dans un musée. Le reste du temps, le vacancier de base veut de la détente, du fun, du pas sérieux... Sur le marché des animations originales, la ville d'Hourtin en Gironde a trouvé une idée géniale car peu coûteuse. Une pelouse, un mètre ruban suffisamment long, quelques barrières pour contenir le public et place au championnat du monde du lancer de tong. Les concurrents participent en binôme. L'un lance la tong qu'il porte, l'autre doit la réceptionner. La 13e édition vient d'être remportée par Nicolas et Ludovic, avec le record du monde à la clé : 39,56 mètres. Spectaculaire, marrante (quand le lanceur tombe...) et gratuite, la compétition s'est déroulée devant 500 personnes. Les touristes sont friands de ces spectacles décalés.

La région propose quelques fleurons comme le cracher de noyau de cerise à Céret (sur le fameux pinyodrome) ou le concours du « plus gros mangeur d'abricots » à Rivesaltes. Le créneau semble porteur et les offices du tourisme devraient plancher sur de nouveaux défis tous plus bizarres les uns que les autres. Méfiance cependant aux bonnes idées qui pourraient se révéler catastrophiques et contre productrices. Personne de raisonnablement sensé n'osera s'inscrire à un concours de plus gros mangeur de cassoulet à Castelnaudary (16e fête cette année du 26 au 30 août). Une cassole ça va, trois, bonjour les dégâts pour l'entourage... et le trou dans la couche d'ozone ! 

mardi 11 août 2015

DE CHOSES ET D'AUTRES : Chat sachant chasser des chaussettes


La France compte 12 millions de chats domestiques. A quel point influencent-ils la biodiversité ? Des chercheurs du Muséum national d'histoire naturelle lancent une vaste étude sur nos amis ronronnants. S'ils équipent quelques matous d'une balise GPS (pour suivre en direct leur parcours de chasseurs), le gros de l'étude sera fourni directement par nous, les maîtres. Un site internet permet de renseigner le type de proie que nos « chatminous » ramènent. Sur le formulaire, plusieurs options : mammifère (souris), reptile (du simple lézard à la vipère) ou oiseau (moineau ou plus rare troglodyte mignon). Nous avons trois chats à la maison. La plus âgée a beaucoup chassé dans sa jeunesse. Aujourd'hui elle se contente de dormir 23 heures sur 24. Les deux plus jeunes ne semblent pas constituer des exemples très représentatifs. Ils ont toujours un instinct de chasse assez poussé, mais n'influent plus sur la biodiversité. Marcel, beau mâle de 8 kilos, toujours affamé, ne chasse plus que les sachets de croquettes. Même en haut d'une étagère, il est capable s'escalader cette dernière pour déchiqueter l'emballage. Sa sœur Jane, gentille petite femelle, se révèle encore plus bizarre. Tout ce qu'elle chasse, elle le ramène à nos pieds. Cependant, elle dédaigne les petits animaux au profit des... chaussettes sales. Elle attaque régulièrement la panière et déterre ces bouts de tissu qu'elle ramène fièrement en miaulant de plaisir. J'ai bien cherché dans le formulaire des chercheurs, il n'existe pas de catégorie « habits ». Donc, nos chats sachant chasser des chaussettes sècheront la recherche.

BD : Un dessinateur sachant parodier


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Michel Rodrigue a de la suite dans les idées. Ce dessinateur, expert en style franco-belge, a débuté à la fin des années 80 en participant à un album collectif de parodie d'Astérix. Il a par la suite acquis ses lettres de noblesse en reprenant les aventures de Clifton puis celles de Cubitus. Ce milieu de la BD, il adore et maîtrise à la perfection. Il a donc délaissé, le temps de cet album hors collection, ses personnages préférés pour signer une « parodie » loufoque et bourrée de clins d'œil. Le gros de l'album est le mélange improbable de l'univers de Thorgal et de XIII. L'enfant des étoiles, Thoraxe, adopté par un clan viking, tente de séduire la belle Aarissa. Mais un inconnu débarque un matin, un amnésique, beau comme un dieu et tatoué sur l'épaule d'un énigmatique « XIII & 1/2 » Les deux héros vont s'écharper comme le montre la couverture, parodie elle aussi de l'album d'Astérix, « La zizanie ». Rodrigue n'étant pas avare de caricatures dans ce 46 pages, glisse quelques figures incontournables du 9e art qui en prennent pour leur grade. Alix et Enak, en couple homo aux relations assez troubles, le professeur Tournesol en mode Léonard, Sœur Marie-Thérèse des Batignolles ou Michel Vaillant en preux chevalier. On a même droit à la participation de Dark Vador et du troll Hébus de l'univers de Troy. Un album à lire en deux temps. Premièrement profitez de l'histoire et des dialogues parfois surréalistes, puis reprenez chaque planche et cherchez les « petites bêtes » comme Blacksad, Cubitus ou l'hommage à la série Croisade de Jean Dufaux qui signe la préface de cette désopilante « Parodie ».
« La parodie » de Michel Rodrigue, Lombard, 12 €