Certains historiens ne peuvent se contenter de la réalité. Il savent que le cours des événements est souvent tributaire de petits faits. Nolane, le scénariste de Wunderwaffen, a imaginé une autre issue au débarquement allié en 44. Les Allemands ont repoussé l'offensive et les savants nazis ont eu le temps de mettre au point de nouvelles armes. Notamment des avions à réaction rendant à l'armée de l'air allemande la suprématie des airs. C'est le destin rêvé de ces Wunderwaffen qui est en filigrane de la série dessinée par Maza. Hitler, de plus en plus fou et paranoïaque après avoir perdu un bras dans un attentat, poursuit son œuvre de destruction en créant un second camp d'Auschwitz. Le major Walter Murnau, en désaccord avec l'idéologie fasciste, continue cependant à tester les prototypes. C'est le meilleur pilote de la Luftwaffe. Tout l'intérêt de cette BD typique du genre de l'uchronie, est dans les avions. Nolane n'a quasiment rien inventé. Il a fait voler (virtuellement) des machines existantes sur le papier. Des plans que l'on retrouve en fin de volume dans un cahier technique passionnant.
Quelques chroniques de livres et BD qui méritent d'être lus et les critiques cinéma des dernières nouveautés. Par Michel et Fabienne Litout
lundi 4 mars 2013
BD - Pilotes d'avenir dans "Wunderwaffen" de Nolane et Maza
Certains historiens ne peuvent se contenter de la réalité. Il savent que le cours des événements est souvent tributaire de petits faits. Nolane, le scénariste de Wunderwaffen, a imaginé une autre issue au débarquement allié en 44. Les Allemands ont repoussé l'offensive et les savants nazis ont eu le temps de mettre au point de nouvelles armes. Notamment des avions à réaction rendant à l'armée de l'air allemande la suprématie des airs. C'est le destin rêvé de ces Wunderwaffen qui est en filigrane de la série dessinée par Maza. Hitler, de plus en plus fou et paranoïaque après avoir perdu un bras dans un attentat, poursuit son œuvre de destruction en créant un second camp d'Auschwitz. Le major Walter Murnau, en désaccord avec l'idéologie fasciste, continue cependant à tester les prototypes. C'est le meilleur pilote de la Luftwaffe. Tout l'intérêt de cette BD typique du genre de l'uchronie, est dans les avions. Nolane n'a quasiment rien inventé. Il a fait voler (virtuellement) des machines existantes sur le papier. Des plans que l'on retrouve en fin de volume dans un cahier technique passionnant.
dimanche 3 mars 2013
Billet - L'énergie de Yahoo! contre le télétravail
Qu'une des plus grosses entreprises d'internet décide de se recentrer est un signe fort. La dématérialisation du travail de bureau a ses limites. Isolé, l'employé peut prendre des libertés inadmissibles au siège. Certains petits malins savent que le télétravail permet de faire autre chose en parallèle comme cuisine, ménage, distraction (télé, lecture...) voire fumer ou... dormir. Pas évident de piquer un petit roupillon devant son écran dans un open space. On a toutes les chances de retrouver la photo du délit sur un réseau social où on n'a pas que des amis.
Entamer la conversation avec la nouvelle stagiaire aussi. Et ça, c'est mieux que Chatroulette ou Meetic.
Chronique "ça bruisse sur le net" parue en dernière page de l'Indépendant.
BD - Silas Corey, ancien soldat rebelle
samedi 2 mars 2013
Billet - Du Harlem Shake au chèque
Harlem Shake, la dernière folie sur le Net, est un phénomène plus complexe que les gesticulations de collégiens prépubères masqués en mal de copulations. Les 30 secondes de vidéo montrent toute la force d'Internet sur ses fondamentaux : musique moderne, anonymat, vidéo simple, partage immédiat. Un cocktail explosif. Le premier Harlem Shake apparaît le 2 février, il y a exactement un mois. Il en existe des milliers sur les réseaux sociaux. Et le phénomène ne semble pas sur le point de s'essouffler puisque quelques polémiques lui donnent une publicité renforcée. En Tunisie, des islamistes radicaux tentent d'arrêter un tournage. Aux USA, plusieurs collégiens sont renvoyés pour avoir eu des « attitudes indécentes » sur les campus. Cela déborde même de la simple plaisanterie entre potes puisque cet après-midi à Perpignan, rendez-vous est donné devant le Castillet pour un Harlem Shake collectif...
Derrière ce Shake, il y a les chèques encaissés grâce aux publicités diffusées avant les vidéos. Comme pour Gangnam Style, le compositeur de la musique, DJ Baauer a choisi la solution « libre de droits ». Il abandonne ses droits d'auteur, mais il touche un pourcentage sur toutes les publicités placées avant chaque Harlem Shake. C'est un peu comme s'il avait gagné à l'Euromillions, mais aussi à la loterie américaine, au loto chinois et au bingo japonais. Continuez à vous agiter sur sa musique, DJ Baauer ramasse les pièces qui tombent de vos poches...
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce samedi en dernière page de l'Indépendant. (Photo Michel Clementz)
Roman - Ultime hurlement de Glen Duncan
Dépressif, pourchassé de toute part, Jake n'en peut plus. Le dernier loup-garou ne fêtera pas ses 200 ans dans le roman de Glen Duncan.
Jake Marlowe n'a pas le moral. Il vient d'apprendre que Wolfgang le Berlinois vient d'être abattu. Il ne le connaissait pas particulièrement et n'avait pas plus d'accointances. Simplement il était comme lui : un loup-garou. Et comme il ne restait plus qu'eux deux, Jake est le dernier de l'espèce. Et le prochain sur la liste. Mais a-t-il encore l'envie de se défendre, de perpétuer cette abomination mensuelle ?
Ce roman de Glen Duncan a de faux airs fantastiquo-romantique. A l'opposé des vampires, les loups-garou n'ont rien de charmant. Au contraire, une fois transformés, c'est la bête affamée qui prend le dessus. Jake est distingué et prévenant en permanence. Sauf les nuits de pleine lune. Il se métamorphose, cherche une proie, la tue et la dévore. C'est ainsi depuis plus de 150 ans. Logique qu'il soit un peu las. Quand en plus vous apprenez que les meilleurs limiers de la Chasse, le nom usuel de l'OMPPO (Organisation mondiale pour la prédation des phénomènes occultes) sont à vos trousses, le coup de mou est d'autant plus prononcé.
En apprenant qu'il est le dernier, Jake est résigné. Au fond de lui, du reste d'humanité subsistant, il est presque soulagé car « par moments, une puanteur interne s'élève en moi, celle de toute la viande, tout le sang qui ont dévalé mon gosier, l'odeur de tous les tas de chair où j'ai enfoui le museau, toutes les entrailles où j'ai fourragé et dont je me suis gorgé. » L'homme n'a pas choisi d'être loup. Même si au fond de nous, il subsiste toujours une forte part animale.
Filles antipathiques
Glen Duncan a découpé son roman en deux parties équilibrées. Interrogation de Jake au début. Le combat vaut-il le coup ? Comment en en est-il arrivé là ? On apprend qu'une nuit au Pays de Galles, ce jeune Anglais distingué, filant le parfait amour avec Arabella, a croisé la route d'un loup-garou. Poursuivie, la bête mord superficiellement Jake et ne prend pas la peine de le dévorer. Un mois plus tard, Jake comprend que sa vie bascule. La transformation est physique, mais aussi mentale. Il s'éloigne de sa jeune femme. Une force irrésistible. Sans le comprendre il cherche à la protéger. Car une fois métamorphosé, son amour se transforme en faim...
Dès lors, Jake jure de ne jamais plus tomber amoureux. Il se contentera de filles antipathiques. Comme Madeline, sa partenaire du moment, « menteuse, matérialiste, pétrie d'autosatisfaction, débordante d'axiomes imbéciles, experte en clichés. » Difficile de se lier à ce genre de femme, même si elle a « la peau blanche, les yeux verts, un torse court et de petits mamelons alertes de chatte. » Oui, ce roman est fantastique, mais aussi très osé par moment.
La seconde partie du récit se concentre sur la traque de Jake. Alors qu'il est sur le point d'abandonner, il va croiser la jeune et belle Tallula. Le doute s'immisce dans son esprit : et s'il n'était pas le dernier ?
« Le dernier loup-garou », Glen Duncan, Denoël, 22,50 €
vendredi 1 mars 2013
Billet - Dépression Nord-Sud sur fond de World of Warcraft
L'avantage des happy end, c'est que le chroniqueur peut se permettre un peu de mauvais esprit. Comment croire dans ce récit que c'est le Niçois qui déprime et tente de se suicider ? Le Sud, sa douceur de vivre, son soleil, ses températures clémentes sont quand même plus attrayants que le ciel gris et plombé du Nord ! Autre anomalie : ils se sont connus en jouant à World of Warcraft. Ce jeu en ligne, très addictif, se déroule dans un monde virtuel peuplé de monstres et autres orques. Tuer du troll, même virtuel, ne rend pas plus gentil. D'ailleurs, en août 2011, la principale chaîne de magasins de Norvège a décidé de ne plus le vendre car c'était la distraction favorite... d'Anders Behring Breivik, le sinistre auteur d'une double attaque meurtrière faisant 77 morts et 151 blessés.
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue de vendredi en dernière page de l'Indépendant.
jeudi 28 février 2013
BD - "Urban" ou la police des plaisirs et des vices
Dans un futur proche, pour oublier un travail harassant et des conditions de vie dégradées, tout le monde a droit à une semaine de vacances dans la zone de Monplaisir. Dans ce gigantesque parc d'attraction, tous les vices sont permis. Sexe, violence et jeux de hasard. On se déguise et on profite de ces sept jours hors du temps. Mais Monplaisir, loin de ressembler au Paradis, a des airs de purgatoire, se transformant en enfer pour certains. La seconde partie de cette série de SF écrite par Brunschwig et dessinée par Ricci se concentre sur les deux personnages principaux : Zachary Buzz, le jeune flic et Niels, le petit garçon perdu. Zach va devoir affronter le redoutable tueur Ebrahimi dans un duel où tout le monde peut parier et espérer devenir riche.
Niels va tomber sous la coupe d'un magicien des rues, clochard sans cœur bien décidé à profiter de nouveau de tous les avantages de Monplaisir quand on a un compte en banque bien rempli, ce qui est le cas de Niels.
Un futur noir et pessimiste, pourtant plein de couleurs grâce aux planches de Roberto Ricci, un très grand dessinateur pour un projet ambitieux.
« Urban », Futuropolis, 13 €
mercredi 27 février 2013
Roman - La franchise selon Martin Martin
Et si tout le monde disait exactement ce qu'il pensait ? Du jour au lendemain, le monde se transforme et une vaste pétaudière totalement invivable.
Esclandre chez le boucher. Roland Quinzebilles, commerçant prévenant, demande des nouvelles de la bavette achetée la veille par Mme Buie, une « fidèle entre les fidèles ». « Dure comme de la pierre, immangeable presque. Comme d'habitude ! » lui répond dans les dents la mamie. La scène se déroule sous les yeux de Martin Martin, employé discret dans une maison d'édition. Martin découvre dans cet échange vif le premier indice qui fera que cette journée ne sera pas tout à fait comme les autres.
Avant de rejoindre son travail, Martin fait un détour par son garagiste, Corydon Aiglefine. La voiture est en révision. Il la récupère avec des injecteurs neufs. Et une explication du mécanicien pleine de franchise : « Ils marchaient très bien vos injecteurs, mais de toute façon vous allez pas vérifier, vous y connaissez que dalle. » Et de terminer sa tirade en se justifiant : « Que voulez-vous, quand on trouve un gogo on va pas se priver. » Plus de doute, il se passe quelque chose.
Martin Martin découvre que tout le monde, au lieu de se montrer aimable et diplomate, dit ses quatre vérités à ses proches. Il pourrait s'offusquer, crier au scandale, mais le héros imaginé par Jean-Pierre Brouillaud est un homme « que la perspective d'une querelle effrayait au-delà de tout ».
Trop gentil
Martin Martin est trop gentil. Beaucoup trop timide. Un modèle de personnage fade et effacé. Mais pas bête pour autant. Juste attaché à une certaine tranquillité. En ce jour exceptionnel ou la franchise est gratuite et à volonté, il va prendre quelques initiatives, chose qu'il évite habituellement avec une extrême habileté.
Employé par une fausse maison d'édition pour lire des manuscrits systématiquement acceptés (en échange d'une participation financière de l'auteur de quelques milliers d'euros...), il est marié à une artiste peintre. Martin trouve ses toiles hideuses, mais n'ose pas lui dire et comme en plus elles se vendent... En ce jour étrange, son patron lui demande de véritablement juger les manuscrits et de les refuser s'ils sont mauvais. Mieux, de dissuader définitivement ces piètres écrivaillons de tenter une carrière dans les belles lettres. Chez lui, son épouse lui annonce tout de go qu'elle le trompe depuis des années avec un vigneron bordelais.
Face à tant de revirements, Martin se dit que c'est peut-être le moment de savoir enfin ce que les gens pensent de lui. Il ne sera pas déçu. Épouse, mère, amis : ils lui taillent un costard de première. L'auteur semble sans pitié pour son personnage. En fait c'est l'inverse.
Dans cette courte fable sur les mérites de la franchise en société, Jean-Pierre Brouillaud décrit un homme se contentant de peu. La simplicité s'approche souvent de la vérité. Et les faux-semblants sont le ciment de notre société. Pour preuve, à la fin de la journée, la franchise devenue mondiale, met le feu aux poudres. Le langage diplomatique a laissé la place aux invectives et les puissances nucléaires à deux doigts de déclencher le feu atomique contre le « cow-boy inculte et ces arriérés d'Américains » ou « les gesticulations du petit Français ». La situation est grave, le lecteur plié en deux de rire. La réflexion philosophique n'empêche pas la rigolade. D'autant plus quand c'est voulu.
« Martin Martin », Jean-Pierre Brouillaud, Buchet-Chastel, 13 €
mardi 26 février 2013
BD - Le futur stylisé des "Souvenirs de l'empire de l'atome"
Comment devient-on écrivain de science-fiction ? Thierry Smolderen répond en partie à cette interrogation dans « Souvenirs de l'empire de l'atome », roman graphique illustré par Alexandre Clérisse. Paul, dans son enfance au cœur des années 50, a été fasciné par les nouvelles et romans de SF diffusés dans les magazines. Tellement imprégné de cet univers qu'il s'est construit un double imaginaire, Zarth Arn, héros du futur. Depuis l'âge de 14 ans, il est persuadé de pouvoir communiquer avec lui par télépathie. Impossible de résumer cet album aux multiples ramifications.
Sachez que parmi les thèmes évoqués vous aurez droit aux drogues hallucinogènes, à l'hypnose, à un hommage à Franquin et même à l'Exposition universelle de 58 à Bruxelles. Et le plus incroyable, c'est que cet immense fourre-tout est d'une cohérence redoutable.
« Souvenirs de l'empire de l'atome », Dargaud, 19,99 euros
lundi 25 février 2013
Billet - Polémique entre Iacub et Angot, les drôles de dames et DSK
Marcela Iacub fait mieux que Christine Angot dans le genre littérature d'autofiction à forte connotation sexuelle. La querelle, par journaux interposés, de ces deux drôles de dames délurées a beaucoup agité le net ces derniers jours. Rappel des faits : Marcela Iacub, belle Argentine, tombe amoureuse d'un « cochon » vilipendé par toute la planète.
De ces huit mois de passion amoureuse elle en tire un livre. Un brûlot. Alternant réalité et fiction. Son amant, elle le compare à un porc. Marcela Iacub ne le nomme jamais mais tout le monde reconnaît DSK empêtré dans le scandale Nafissatou Diallo. Couverture du Nouvel Obs', une de Libération : ce sont les journaux de gauche qui donnent toute son ampleur à l'affaire.
La polémique enfle et prend une nouvelle tournure avec la publication, dans le Monde cette fois, d'une longue tribune de Christine Angot. « Non, non, non et non » jette-t-elle à la face de Iacub car certains critiques ont comparé son « Belle et Bête » aux romans d'Angot. Il est vrai qu'Angot a elle aussi complaisamment romancé ses amours, ne privant pas le lecteur de détails croustillants. Le principal reproche fait à Iacub est d'avoir séduit DSK pour écrire son livre. Une impression résumée dans un tweet de Mickaël Frison « Mi-homme mi-cochon. Mi-livre mi-torchon. »
Je ne sais pas si la littérature ressortira grandie de ces querelles de coucheries étalées sur la place publique, mais la machine à fantasmes a toujours fait courir les foules.
Chronique "ÇA BRUISSE SUR LE NET" parue ce lundi en dernière page de l'Indépendant.









