lundi 16 février 2009

BD - Mère et mer


Histoire de famille chaotique, femme seule, mer omniprésente : cet album de 150 pages en noir et blanc est portée par les mots poétiques de Lætitia Villemin et le dessin précis et énergique de Guillaume Sorel. Ephémère est le nom de cette femme que les auteurs suivent durant toute une vie. 

Fillette ayant perdu ses parents, elle se raccroche à ce qu'il y a de plus rude dans cette Bretagne éternelle : l'océan. Une femme séduisante, séduite, abandonnée. Elle aura un enfant d'un photographe de passage. Un fils qui lui aussi la laissera seule face à cette mer, mangeuse de mère. 

Un album à lire face aux embruns, avec en bruit de fond ces vagues incessantes, si puissantes, immortelles.

« Mâle de mer », Casterman, 14 € 

dimanche 15 février 2009

BD - Ne tombez jamais malade


Voilà l'une des plus anciennes séries du catalogue Dupuis et malgré les décennies, elle n'a pas pris une ride, le ressort humoristique étant toujours aussi fort. La légende prétend que c'est lors d'un séjour à l'hôpital que Cauvin a imaginé ces "Femmes en blanc", essentielles pour la bonne guérison des patients. 

Il a confié le dessin de ces gags et récits complets à un jeune illustrateur, grand spécialiste des gros nez et capable de dessiner dix planches en une seule journée : Bercovici. A croire que Cauvin fait exprès d'être malade pour s'imprégner du milieu et trouver de nouvelles idées. 

Ce 31e tome intitulé "Rentabilité maximum" est désopilant, tout en tirant de plus en plus vers un humour noir, voire macabre. Comme cette histoire sur la meilleure façon de persuader une veuve de donner les organes de son mari fraîchement décédé. Autre moment d'anthologie, la visite d'un ministre, impromptue mais annoncée la veille, pour laisser le temps à la direction de remettre l'hôpital en état et de "trier" les patients. 

Une BD d'une redoutable efficacité qui donne envie de ne jamais tomber malade...

"Les femmes en blanc" (tome 31), Dupuis, 9,45 € 

samedi 14 février 2009

BD - Mémé en momie


Série destinée aux plus jeunes mais pouvant intéresser les plus grands, "Khéti, fils du Nil" est lancé pour la première fois dans une grande aventure en plusieurs parties. Dans cette Égypte des pharaons, Khéti décide d'aider sa jeune fiancée Mayt dans l'épreuve quelle traverse. Sa grand-mère, la doyenne du village, est morte. 

Les obsèques sont prévues dans la soirée. Mais pour que son âme n'erre pas sans fin, il faut dessiner sur le modeste sarcophage en bois les formules magiques qui lui ouvriront le chemin du paradis. Khéti va donc recopier les formules sur des bandes de lin et les retranscrire une fois la cérémonie terminée.

 Problème, quand les deux enfants et leur chat, Miaou, pénètrent dans la tombe, il sont entraînés avec Mémé dans l'au-delà. 

Cette histoire, très instructive sur les rites mortuaires de l'Égypte, est écrite par Isabelle Dethan, passionnée par ce pays et cette période. Au dessin, Mazan, de plus en plus perfectionniste, maniant la couleur comme personne.

"Khéti, fils du Nil" (tome 3), Delcourt, 9,95 €

vendredi 13 février 2009

BD - Les quatre de Baker Street dans l'affaire du rideau bleu


Une nouvelle fois, l'Angleterre Victorienne et les personnages de Sherlock Holmes inspirent des auteurs français. Djian et Legrand se sont associés au scénario pour imaginer la vie mouvementée de certains « auxiliaires » du grand détective imaginé par Conan Doyle. Billie, Charly et Black Tom sont des gamins des rues, utilisés parfois comme guetteurs ou suiveurs par Holmes. 

Dans cette première aventure, ils vont se lancer, seuls, sur les traces d'un proxénète ayant enlevé une adolescente, Betty, la fiancée de Black Tom. Leur enquête (assez mouvementée) dans les bas-fonds de Londres va les conduire dans une maison close, le Rideau bleu, qui a décidé de vendre aux enchères à ses riches clients une « authentique jeune fille » selon les termes de la patronne du lieu. 

Les trois gamins, aidés par un quatrième membre de la bande, vont tout faire pour libérer Betty. 

L'histoire mêlant déduction et humour, est dessinée par Etien, un auteur au trait vigoureux et expressif, appelé à un bel avenir.

« Les quatre de Baker Street » (tome 1), Vents d'Ouest, 13 € 

jeudi 12 février 2009

BD - Fuite majeure


Attention, en lisant ce roman graphique de Cati Baur, toute femme vivant difficilement son statut de « ménagère de moins de 50 ans » pourrait être tentée de faire comme l'héroïne, Marie. 

Cette mère de famille, un soir, en rentrant de vacances avec mari et enfant, se dit, lors d'un arrêt sur une aire d'autoroute : « C'est maintenant ou jamais ! ». Un peu de rouge à lèvres et elle monte dans la cabine d'un camionneur, cap au sud. Marie s'invente une autre vie, loin de son train train, se faisant des amis, des amants dans des endroits où seule l'apparence compte. 

Une fuite en avant, comme si elle n'avait plus que quelques semaines à vivre. 

Récit intimiste, léger et grave à la fois, par une dessinatrice qui sait donner du sens à son récit.

« Vacance », Delcourt, 14,95 € 

BD - Le grimoire des souhaits avec Talisman de Debois et Martin


Pour leur 40e anniversaire, les éditions Glénat lancent de nombreuses séries et les présentent sous un double rabat reprenant la couverture d'un côté et une image-poster de l'autre. Parmi ces nouveautés, Talisman de Debois et Martin devrait plaire aux plus jeunes. 

Une histoire fantastique prometteuse, écrite par un maître du genre et dessinée par une illustratrice espagnole ayant fait ses gammes auprès de Guarnido. Edwin McGill, écrivain à succès, est en panne d'inspiration. Un état qui nuit à ses relations avec sa femme et sa fille, Tara, préadolescente à l'imagination débordante. 

Quand il tombe malade puis sombre dans le coma, les finances de la famille passent au rouge et la vie de Tara devient encore plus difficile. Jusqu'à ce qu'elle découvre dans un coffre, au grenier, une cape magique lui permettant de réaliser ses souhaits. Une cape ayant appartenu à son père et qui pourrait être la cause de sa maladie. 

Un conte prenant avec des personnages très attachants.

« Talisman » (tome 1), Glénat, 13 € 

mercredi 11 février 2009

BD - La captive de Wild River


L'Amérique sauvage, celle des grands espaces, du gibier à profusion et des Indiens, est au centre de cette série écrite par Seiter et dessinée par Wagner. Le souffle de l'aventure balaie cet album qui donne une parfaite idée de la difficulté de vivre et survivre en ces temps rudes et sans loi. 

Robert Frazer, un de ces pionniers, a vu sa vie basculer quand des Indiens Crows ont enlevé sa femme et son fils de six ans. Le lecteur va suivre en parallèle les efforts de Robert pour monter une expédition afin de retrouver sa famille et la vie de la mère et de son enfant dans une tribu indienne de plus en plus belliqueuse face à l'arrogance des Blancs colonisateurs. 

Dans ce déchaînement de violence, le frère de Robert va tenter de calmer le jeu. Mais ce n'est pas évident quand des fanatiques religieux entrent en scène et crucifient des Indiens pour l'exemple. 

Un western des temps anciens, âpre et sanglant, dans des décors grandioses superbement dessinés par Wagner.

« Wild River » (tome 2), Casterman, 11,50 € 

mardi 10 février 2009

Roman jeunesse - La 25e heure est fantastique

A Bixby, quand arrive minuit, durant une heure, tout s'immobilise et les créatures du « monde ancien » prennent possession de la ville.


« Darklings », « grouilleurs »... sous ces noms se cachent des créatures millénaires. Elles apparaisent dans les rues de Bixby, petite bourgade de l'Amérique profonde, à minuit, quand tous les habitants s'immobilisent durant une heure, l'heure secrète. En débarquant à Bixby en provenance de Chicago, la jeune Jessica Day ne se doute pas que ses nuits vont rapidement prendre une étrange tournure.

Le premier tome de cette trilogie fantastique de Scott Westerfeld (le créateur de la série Uglies) débute comme un classique roman pour teenagers. Jessica, en ce jour de rentrée scolaire, découvre son nouveau lycée. Et les élèves. Parmi eux des adolescents normaux, d'autres aux looks différents, peu conventionnels. Rex, large manteau noir et épaisses lunettes de vue est le souffre-douleur des petits caïds. Mélissa a en permanence des écouteurs sur les oreilles, comme pour s'isoler du brouhaha général. Dess, passionnée de maths, « habillée tout en noir, avec des verres fumés et une masse de colliers scintillants ».

Diamants en suspension

Ces trois amis remarquent immédiatement que Jessica n'est pas comme les autres. Jess fait partie des midnighters, les enfants nés à minuit pile. Une particularité qui leur permet de rester éveillés durant l'heure secrète. La jeune héroïne le découvre durant sa première nuit dans cette nouvelle maison. Au début, elle croit que c'est un rêve. « La pièce était inondée de lumière. Jessica la détailla, troublée par l'étrangeté de la scène. La nuit même avait quelque chose de bizarre. La clarté semblait provenir de partout, froide et bleutée. Elle ne dessinait aucune ombre et la chambre paraissait sans relief, pareille à une vieille photo défraîchie. » Étonnée par cette ambiance, elle regarde par la fenêtre. Et découvre une scène incroyable : « Jessica se frotta les yeux, mais les diamants qui flottaient devant elle refusaient de disparaître. Il y en avait des milliers, comme suspendus à des fils invisibles. » Elle devra sortir pour comprendre que ce ne sont que des gouttes de pluie, figées dans l'air et l'espace durant cette fameuse heure secrète.

La seconde nuit sera beaucoup moins féerique. Attirée dehors par un chat, elle le verra se transformer, « pétrifiée d'horreur ». « Le corps du chat s'allongea, s'affina, tandis que sa queue grossissait comme s'il y tassait sa masse. Ses pattes rentrèrent dans ses flancs et sa tête se réduisit, s'aplatit, des crochets sortirent de sa gueule. Le chat s'était transformé en serpent. » Elle apprendra qu'il s'agit d'un grouilleur. Inoffensif selon les autres midnighters venus à sa rescousse alors qu'elle était sur le point de se faire boulotter par un darkling, espèce plus agressive, ayant pris l'apparence d'une grosse panthère. Rex va expliquer à une Jessica incrédule les règles de l'heure secrète. Notamment comment survivre. Les autres midnighters ont un pouvoir, Jessica tarde à découvrir le sien. Mais ce qui est le plus étonnant c'est cette volonté des darklings de l'attaquer, comme si elle représentait un danger pour eux.

Passionnante, inventive, malgré quelques clichés typiques de ces récits pour adolescents américains, l'histoire de ces Midnighters nous réserve encore bien des surprises. Le second tome sortira en mai prochain, l'ultime épisode étant programmé pour novembre. En attendant, ne vous réveillez pas à minuit pile !

« Midnighters, l'heure secrète », Scott Westerfeld, Pocket Jeunesse, 13,50 €

lundi 9 février 2009

BD - Trois épées et de la magie


De l'espionnage à la magie, il n'y a parfois qu'un fil ténu. Niklos Koda, héros imaginé par Dufaux et dessiné par Grenson, utilise ses dons de magiciens pour soutirer secrets et informations confidentielles. Ce magicien, pilier de la collection "Troisième Vague", vit dans son dixième album la fin d'un premier cycle. 

Le club Osiris a de plus en plus de difficulté à résister aux assauts de son ancien protecteur, le Bureau 9. Et les derniers membres soupçonnent Koda de trahison. Ses pouvoirs pourraient l'avoir fait bascule du côté sombre de la magie. Dans les faits il n'en est rien. 

Si Niklos a fait appel à un puissant sorcier maîtrisant l'écoulement du temps, c'est pour sauver sa fille, Seleni. Une fillette qui se révèle avoir au passage récupéré quelques pouvoirs redoutables. On devine que ce personnage va prendre de l'ampleur dans les prochains tomes de cette série vedette. 

Si le scénario est parfois obscur (c'est souvent de la magie noire), on reste sous le charme du trait réaliste de Grenson, de plus en plus à l'aise, se permettant des compositions audacieuses, soignant les gros plans de ses principaux personnages. 

En cadeau, avec cet album, quatre nouvelles cartes de tarot, dont celles des "Trois épées" et des "Anges noirs".

"Niklos Koda" (tome 10), Le Lombard, 10,40 euros

dimanche 8 février 2009

BD - Navis et le monde flottant


Morvan, scénariste français, est fasciné par le Japon. Au point qu'il y a emménagé et a décidé d'installer un studio sur place. Logiquement, Philippe Buchet, le dessinateur de "Sillage", sa série vedette, est du voyage. Baignant dans cette atmosphère depuis quelques mois, c'est logiquement que le duo a imaginé une aventure de Navis se déroulant sur une planète ressemblant étrangement au Japon médiéval. 

La jeune Terrienne, unique survivante de son espèce, est dans de sales draps. Jugée dans le précédent album, elle n'a plus le droit de travailler pour la Constituante, le gouvernement de Sillage, cet immense vaisseau spatial, sorte d-arche de Noé de l'univers. Elle a cependant encore un soutien : son avocat, très intéressé par les qualités de guerrière de Navis. Il l'embauche comme reporter pour tenter de tirer au clair une histoire de massacre de militaires de la Constituante sur la planète RiBhehn par des milices traditionalistes. 

Elles s'opposent au nouvel empereur désirant s'allier avec Sillage, notamment pour utiliser ses armes modernes. Une superbe parabole sur le Japon d'antan, les défauts du modernisme et l'apprentissage. Navis va passer entre les mains d'un maître d'armes faisant furieusement penser au Yoda de la guerre des Etoiles. 

Le 11e titre de la série, parenthèse esthétisante, est intitulé "Monde flottant" en raison du graviton, un minerai très commun sur RiBhehn, inversant l'effet de la pesanteur. Le dessin de Buchet (et ses couleurs) est d'une incroyable inventivité. Entre beauté des paysages et rudesses des machines, il trouve un équilibre qui n'a pas d'égal.

"Sillage" (tome 11), Delcourt, 12,90 euros